Question de Mme DELATTRE Nathalie (Gironde - RDSE) publiée le 13/04/2023
Mme Nathalie Delattre attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la ville et du logement, sur les risques d'accroissement de la précarité énergétique qu'engendrerait une interdiction des chaudières à gaz dans le logement. Il semble en effet que la volonté du Gouvernement tende à faire disparaître à l'avenir l'utilisation des chaudières à gaz dans le logement. Or, le gaz alimente 40 % des foyers en France : soit une maison sur trois et un logement sur deux en collectif, représentant près de 12 millions de ménages. Une telle interdiction aurait pour incidence d'orienter les ménages souhaitant remplacer leur ancienne chaudière au gaz vers un système de chauffage fonctionnant à l'électricité. L'installation d'une pompe à chaleur (PAC) 100 % électrique représente des coûts initiaux importants rendant cette mesure largement inéquitable. En effet, les PAC coûtent entre 13 800 € et 20 000 €, contre 4 600 € pour les chaudières, soit une différence de coût de 10 000 €. Le reste à charge imposé aux ménages pour l'installation d'une PAC électrique (de l'ordre de 6 000 € dans le meilleur des cas) dépasse souvent leur capacité de financement. Ainsi, sauf un soutien des finances publiques très conséquent, les ménages se verraient très fortement impactés. Une interdiction du renouvellement des équipements pour le gaz génèrerait environ 3 milliards d'euros par an de surcoût pour les finances publiques uniquement pour le changement d'équipement (avec un flux de 300 000 renouvellements d'équipements gaz par an). En outre, l'installation des PAC suppose d'avoir au préalable réalisé une rénovation énergétique complète du logement, sous peine de devoir installer une PAC de forte puissance et de devoir faire face à des factures énergétiques très élevées liées lors des pointes de froid (CLER, négaWatt). Enfin, l'installation d'une PAC se heurte en pratique à de nombreuses difficultés techniques (manque de place pour la pose, nuisances sonores ou esthétiques, durée importante des chantiers) qui rendent son installation difficile voire impossible dans de nombreux logements ou au prix de travaux très importantes. Ces difficultés pourraient obliger les particuliers à se replier sur une solution de chauffage à « effet joule ». Attractif par son prix d'achet très bas, mais ne présentant qu'une très faible efficacité énergétique, ce mode de chauffage mis en place en substitution à une chaudière au gaz entraînerait une forte hausse des factures énergétiques de + 20 à + 30 % susceptible de fragiliser davantage les ménages précaires. Ainsi, elle demande au Gouvernement si ces impacts seront pris en compte dans la politique nationale de décarbonation des logements.
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Transmise au Ministère auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement
Réponse du Ministère auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement publiée le 07/12/2023
Dans le cadre de la planification écologique et pour atteindre nos objectifs ambitieux fixés en matière climatique, tous les secteurs seront mobilisés pour accélérer la baisse des émissions de gaz à effet de serre. En dépit des efforts réalisés sur la dernière décennie, nous devons encore doubler le rythme de réduction d'ici 2027. A cet égard, le secteur des bâtiments, qui représente 18% des émissions en France, devra donc contribuer à l'accélération de la décarbonation du pays, au même titre que les transports ou encore l'industrie. Dans ce cadre, tous les leviers disponibles doivent être mobilisés : pérennisation des efforts de sobriété énergétique, accentuation de la dynamique d'isolation et accélération du rythme de sortie des énergies fossiles. S'agissant en particulier de la sortie des énergies fossiles, il convient de souligner que : - des alternatives moins carbonées et plus efficaces en termes énergétiques existent : il s'agit notamment de recourir aux réseaux de chaleur ainsi qu'aux énergies renouvelables ou de récupération (pompes à chaleur, géothermie de surface, systèmes solaires ou biomasse). Les chaudières à gaz hybridées avec des pompes à chaleur ou des systèmes solaires thermiques, qui permettent de réduire d'au moins 70 % la consommation de gaz, feront également partie des solutions ; - même si elles peuvent représenter un coût d'investissement plus élevée, ces solutions sont compétitives en coût complet, et permettront de réduire l'impact carbone des bâtiments construits ; - le recours aux énergies décarbonées est générateur de nouvelles perspectives pour les entreprises désireuses de s'engager dans ces solutions d'avenir. Le Gouvernement est engagé pour accompagner la transition des filières industrielles du chauffage vers des énergies bas carbone, notamment avec un plan d'actions en cours pour développer l'industrie française des pompes à chaleur. L'impact sur le réseau électrique de l'accélération de la décarbonation des bâtiments a fait l'objet d'une étude approfondie dans le Bilan prévisionnel 2023 de RTE publié le 20 septembre 2023, reposant sur de multiples variantes et intégrant des principes de prudence. Selon ce rapport, « accélérer le développement des pompes à chaleur ne conduit pas à augmenter sensiblement la consommation d'électricité » et « une réduction rapide de l'usage du gaz fossile dans le secteur du bâtiment conduit nécessairement à augmenter la pointe électrique, mais sans mettre en danger la sécurité d'approvisionnement ». Il indique par ailleurs qu'une « accélération du remplacement des chaudières au gaz par des pompes à chaleur contribue fortement à l'amélioration de la souveraineté énergétique de la France et à la diminution des émissions de gaz à effet de serre ». Ces changements structurels s'engagent progressivement, afin de donner de la visibilité et le temps de l'adaptation à l'ensemble des acteurs. Plusieurs jalons ont déjà été posés en ce sens. Depuis le début de l'année 2022, la réglementation environnementale RE2020 impose le recours à une part importante d'énergie décarbonée pour le chauffage et l'eau chaude sanitaire dans les logements neufs. Cette première échéance s'est imposée aux maisons individuelles et s'étend progressivement aux logements collectifs en 2025 et dans les bâtiments tertiaires. Les dispositifs d'aides tirent également les conséquences de l'impératif de sortie progressive des énergies fossiles : ainsi MaPrimeRénov', principale aide à la rénovation énergétique des logements, ne subventionne plus l'installation de nouvelles chaudières au gaz depuis fin 2022. En revanche, toujours dans un souci de progressivité des décisions et de prise en compte de tous les facteurs, notamment économiques pour les ménages comme les entreprises, d'un changement maîtrisé, l'interdiction d'installation de nouvelles chaudières gaz a à ce stade été écartée, en lui privilégiant des mesures d'incitation renforcée telles que le relèvement des forfaits MaPrimeRénov'pour les équipements de substitution comme les pompes à chaleur.
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