Question de M. MOHAMED SOILIHI Thani (Mayotte - RDPI) publiée le 04/05/2023
Question posée en séance publique le 03/05/2023
M. le président. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. Thani Mohamed Soilihi. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Monsieur le ministre, depuis quelques jours, l'Hexagone découvre avec effroi les immenses difficultés auxquelles le département de Mayotte est confronté : immigration, gestion de l'eau, assainissement, logements insalubres, etc. La liste est longue !
M. Roger Karoutchi. Oui !
M. Thani Mohamed Soilihi. Les chiffres les plus difficiles à accepter, à mon sens, sont ceux qui touchent notre jeunesse, laquelle représente plus de la moitié de la population. Un système de rotation inédit et inacceptable, lié à un manque crucial d'infrastructures, entraîne 75 % de décrochage scolaire, quand le niveau national est de 10 %.
Les problèmes s'accumulent et s'amplifient depuis des décennies. C'est le cas de l'insécurité, alimentée par la multiplication des gangs et l'immigration illégale et massive.
Cette situation, je le répète avec force ici, est sans égale dans le reste du territoire français.
L'opération Wuambushu, que vous avez eu le courage d'engager, monsieur le ministre, est une réponse forte très attendue par la population.
Elle n'est ni honteuse ni glorieuse. (Mme Éliane Assassi s'exclame.) Elle est nécessaire pour réaffirmer l'autorité de l'État et protéger nos compatriotes de Mayotte. Elle tranche avec l'inertie de ces dernières décennies.
Je veux ici rendre hommage à nos forces de l'ordre, à leur engagement sans faille.
Wuambushu, qui signifie « reprise » en shimaorais, se fixe comme objectif de restaurer le droit à la sécurité. Toutefois, demain, il faudra aussi envisager un Wuambushu de l'éducation, de la santé, de l'aménagement et du logement.
Monsieur le ministre, alors que cette opération vient à peine de débuter, les Mahorais sont inquiets de la suspension des reconduites à la frontière vers les Comores, ainsi que de certaines décisions judiciaires, qui ne sont pas toujours comprises.
Quelles mesures supplémentaires entendez-vous déployer pour que cette promesse de retour à l'ordre républicain soit un succès ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur des travées du groupe UC.)
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Réponse du Ministère de l'intérieur et des outre-mer publiée le 04/05/2023
Réponse apportée en séance publique le 03/05/2023
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer.
M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer. Monsieur le sénateur, d'abord, je veux dire que c'est sur votre initiative et celle des élus mahorais que l'État, sous l'autorité de la Première ministre, a décidé d'engager à Mayotte des moyens sans précédent.
Pourquoi ?
D'abord, pour maîtriser la démographie. Le problème de cette magnifique île de Mayotte, qui, vous le savez mieux que personne, avec ce lagon incroyable, pourrait être plus belle encore que ne le sont les îles des Bahamas ou des Seychelles, c'est qu'elle est déstabilisée par une population qui, malheureusement, fait dériver des services publics, quels qu'ils soient, par exemple le service public de la sécurité ou celui de l'éducation. Je rappelle qu'à Mayotte, mais vous le savez, les enfants, quand ils vont à l'école, n'y vont qu'une demi-journée par jour, parce qu'il n'y a pas assez d'établissements scolaires au regard de la démographie croissante.
Le service public de la santé est lui aussi déstabilisé. Ainsi, 80 % des enfants qui naissent à l'hôpital de Mamoudzou ne sont pas nés de Mahorais. Chaque année, 900 parturientes sont accouchées par les sapeurs-pompiers de l'île de Mayotte, ce qui témoigne d'une difficulté sanitaire pour notre pays.
L'île connaît des difficultés sociales de manière générale, du fait de sa démographie.
Avec cette opération, il s'agit d'abord de la reprise de la sécurité. Je l'ai dit, sur les soixante cibles de la police judiciaire, en quinze jours, vingt-deux ont déjà été interpellées et présentées aux services de M. le garde des sceaux, dont nous espérons qu'ils appliqueront les décisions de justice prononcées : entre sept et dix ans de prison ferme pour la plupart des personnes interpellées.
Il s'agit ensuite de la destruction des bangas. Le ministre délégué chargé de la ville et du logement a mis à disposition tous les relogements possibles. Contrairement à ce que j'entends, tous les mineurs, loin d'être reconduits à la frontière, sont évidemment logés et accueillis dans les services de l'enfance. Je remercie le département et la secrétaire d'État chargée de l'enfance.
Oui, nous luttons contre l'immigration irrégulière originaire du Sri Lanka, de Madagascar, de la région des Grands Lacs africains certes, zones déstabilisées pour une raison ou pour une autre et, bien évidemment, des Comores, avec lesquelles nous continuons à discuter.
Nous continuerons notre travail et je laisserai, sous l'autorité de la Première ministre, les policiers et les gendarmes autant de temps qu'il le faudra pour que Mayotte se sente comme n'importe quel département français. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes RDSE, INDEP et UC.)
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