Question de M. PLA Sebastien (Aude - SER) publiée le 01/06/2023
M. Sebastien Pla appelle l'attention de Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de l'écologie, sur l'article 7 du projet de règlement du Parlement européen et du Conseil du 22 juin 2022 relatif à la restauration de la nature et prévoyant la destruction des retenues d'eau en rivière sur un linéaire de 25 000 kms de rivières en Europe.
Il souligne que la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets réaffirme pourtant le rôle clé de ces milliers de petites retenues d'eau pour le stockage d'importants volumes d'eau dans les rivières, les nappes phréatiques superficielles (nappes alluviales) et dans les nappes profondes (nappes de massifs rocheux).
Il lui rappelle également que la politique de continuité écologique des cours d'eau en France, qui s'est manifestée par des campagnes d'arasement de ces petits barrages anciens, a eu pour conséquences d'abaisser sensiblement le fil de d'eau à l'amont des ouvrages concernés et consécutivement le niveau des nappes alluviales (de 1 à 2 m). Ainsi souligne-t-il que la destruction des petites retenues traditionnelles apparaît comme un facteur dégradant de la qualité des eaux, alors que les rivières européennes sont encore largement polluées, en particulier en aval des bassins.
Il estime donc que la préservation des petites retenues d'eau aménagées de longue date sur nos bassins apparait primordiale en ce qu'elles permettent à la nappe alluviale d'assurer en saison sèche des débits minimums nécessaires à la vie aquatique, dès lors que les dispositifs de franchissement sont adaptés aux espèces et les zones de frayère bien identifiées.
Il pointe aussi que le ralentissement de l'écoulement des eaux dans les rivières en raison de la présence de petits seuils préserve les zones humides et joue, à cet égard, un rôle de dépollution, processus que ne permettent pas les eaux « vives ».
Il lui demande donc de bien vouloir lui indiquer quelles sont les suites qu'elle entend donner aux demandes répétées à son adresse de la part de la Fédération française des associations de sauvegarde des moulins en faveur de la réorientation des aides au service de « l'entretien, la gestion, et l'équipement » des chaussées de moulins, ainsi que le prévoit l'article L. 214-17 du code de l'environnement.
Il lui demande également si elle entend, de ce fait, encourager la réparation et la reconstruction des chaussées partiellement ou totalement détruites afin de réalimenter les nappes alluviales et profondes et contenir l'assèchement des rivières lors des épisodes secs.
Enfin, il souhaiterait connaître les initiatives qu'elle compte engager auprès des instances européennes afin de faire obstacle à ce projet de règlement comme le réclament les fédérations de moulins, étangs, riverains aux comités de bassin, dans un contexte particulièrement sensible en raison du réchauffement climatique.
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Transmise au Secrétariat d'État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la biodiversité
Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la biodiversité publiée le 05/10/2023
La biodiversité aquatique est particulièrement fragilisée en France : 39 % des poissons sont menacés, et 19 % présentent un risque de disparition. La fragmentation des cours d'eau fait partie des pressions responsables du déclin de cette biodiversité. Dans ce contexte, le Gouvernement réaffirme l'importance de la politique de restauration de la continuité écologique des cours d'eau. La Stratégie Biodiversité 2030 de la Commission européenne en fait également un enjeu majeur, qui apparaît aussi dans sa proposition de règlement pour la restauration de la nature. La politique de restauration de la continuité écologique concilie les enjeux de restauration des fonctionnalités des cours d'eau avec le déploiement de la petite hydroélectricité, la préservation du patrimoine culturel et historique, ou encore les activités sportives en eaux vives. À ce jour, la politique de priorisation mise en oeuvre par le Gouvernement a permis d'identifier les cours d'eau sur lesquels il était important de procéder à de la restauration écologique : ils représentent environ 11 % des cours d'eau. Sur ces cours d'eau, la politique est de procéder prioritairement à des interventions sur environ 5 000 ouvrages sur les 25 000 ouvrages obstacles à l'écoulement qu'ils comptent. La solution technique retenue consiste majoritairement à aménager l'ouvrage (mise en place d'une passe à poisson, d'une rivière de contournement, abaissement du seui), plutôt qu'à le supprimer. Depuis 2012, environ 1 400 effacements d'ouvrages ont été financés par les Agences de l'eau sur ces 11% de cours d'eau, soit seulement 1 % de l'ensemble des ouvrages obstacles à l'écoulement des cours d'eau français. Il convient de signaler à cette occasion que l'indication « partiellement détruit » ou « entièrement détruit » dans le référentiel des obstacles à l'écoulement de l'Office français de la biodiversité (OFB) ne signifie en aucun cas que l'ouvrage en question a été volontairement effacé par l'homme. Dans la très grande majorité des cas, ces ouvrages ont été détruits naturellement au cours du temps car anciens et non entretenus par leurs propriétaires. De nombreuses études et publications scientifiques démontrent l'intérêt d'effacer des petits ouvrages en cours d'eau, tant pour la survie et la reproduction des poissons migrateurs que pour l'amélioration générale des fonctionnalités la rivière, de sa biodiversité et de la qualité de son eau. A ce sujet, le conseil scientifique de l'OFB a produit une note exposant des "éléments de réponse à certains arguments contradictoires sur le bien-fondé du maintien et de la restauration de la continuité écologique dans les cours d'eau" (2018). Les barrages sur les cours des rivières tendent à réduire l'infiltration de l'eau dans les sols, et ne sont donc pas synonymes d'une plus grande disponibilité de la ressource en eau. Au contraire, ces pratiques favorisent l'évaporation, le réchauffement de l'eau, et sa desoxygenation, qui favorisent les phénomènes d'eutrphisation. C'est pourquoi la restauration de la continuité des cours d'eau concourt à la construction d'un territoire résilient à la sécheresse et aux canicules, ainsi qu'à la qualité de l'eau, y compris à objectif de potabilisation, pour les eaux superficielles mais également souterraines. En outre, les petits seuils ne protègent généralement pas contre les inondations car les retenues qu'ils n'ont pas la capacité de stocker une partie du volume de la crue, et ne peuvent donc pas réduire ses effets. Au contraire, les seuils peuvent aggraver les petites inondations à leur amont car ils rehaussent la ligne d'eau et facilitent ainsi les débordements. Ils peuvent aussi causer des sur-inondations en aval en cas de rupture. Ainsi, de nombreux effacements ou arasements de seuils ont pour objectif principal de réduire le risque inondation pour les riverains, avec des résultats très satisfaisants. L'article 49 de la loi dite « Climat et résilience » d'août 2021 précise effectivement que, s'agissant des moulins à eau, l'effacement des seuils ne peut désormais plus constituer une solution dans le cadre de l'accomplissement des obligations relatives au franchissement par les poissons migrateurs et au transport suffisant des sédiments. En conséquence, depuis la publication de la loi, les services préfectoraux ne sont plus en mesure de prescrire l'effacement d'un ouvrage situé sur un cours d'eau prioritaire comme solution de rétablissement de la continuité écologique. Des effacements sur ces cours d'eau restent cependant possibles pour d'autres motifs, notamment sanitaires ou de sécurité hydraulique. Cette évolution législative tend à contraindre les propriétaires d'ouvrages, avec obligation de restaurer la continuité à assumer les dépenses d'entretien liées à leurs seuils, même lorsqu'ils souhaiteraient les effacer. Or, cet entretien est jugé par certains propriétaires comme chronophage, coûteux et techniquement compliqué.
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