Question de M. BONHOMME François (Tarn-et-Garonne - Les Républicains-A) publiée le 01/06/2023
M. François Bonhomme attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur le projet de révision de la Directive relative aux émissions industrielles (IED) actuellement en cours de discussion au niveau européen. Cette directive vise à prévenir et à réduire les émissions de polluants des activités industrielles sur l'environnement au sein des membres de l'Union européenne. La modification de cette réglementation devrait intervenir avant la fin 2023. Dans ce cadre, la Commission européenne a exprimé son souhait d'intégrer dans la directive actualisée « toutes les exploitations bovines, porcines et avicoles contenant plus de 150 UGB (unité gros bétail) ». Si ce seuil devait être finalement maintenu à l'issue des discussions au sein du trilogue européen, de nombreuses exploitations familiales agricoles françaises pourraient être concernées alors qu'elles ne constituent pas des lieux d'élevage intensif. Ainsi pour la filière porcine de notre pays, la proposition de la commission conduirait à classer sous réglementation « IED » 93 % des élevages de ce secteur contre 7 % actuellement. Pour la région Occitanie, 288 exploitations familiales sur un total de 405 se verraient assujetties aux nouvelles obligations, soit un investissement moyen de 150 000 euros par exploitation pour une mise en conformité. Pour la production nationale avicole, la proposition de la Commission conduirait à classer sous réglementation « IED » 72 % des élevages, contre 18 % actuellement. Pour les élevages sous signe de qualité, le nombre d'exploitations concernées passerait de 0,7 % à 79 %. Le coût total pour cette filière pourrait s'élever à environ 1,2 milliards d'euros. Par exemple, en Occitanie, les exploitations avicoles auraient à investir quelque 50 000 à 80 000 euros selon le type de bâtiment. Cette éventuelle adoption de la Directive européenne viendrait accélérer la concentration du secteur de l'élevage en donnant un avantage concurrentiel aux grandes exploitations ayant les moyens financiers et logistiques de s'adapter à ces nouvelles contraintes administratives. Elle constituerait aussi une menace pour nos éleveurs qui ont fait le choix exigeant de la qualité et du terroir pour leurs productions : indication géographique protégée (IGP), appellation d'origine contrôlée (AOP), Label Rouge ou agriculture biologique (AB). Ce serait enfin ne pas prendre en compte tous les efforts entrepris par l'élevage familial en matière de préservation de l'environnement notamment sur le rejet des nitrates, du protoxyde d'azote, de l'ammoniac ou encore du méthane. De leur côté, le 16 mars 2023, les États membres de l'Union européenne ont souhaité revoir à la hausse le seuil des 150 UGB proposé par la Commission en le faisant passer à 350 UGB. Le 25 avril 2023, la commission « agriculture » du Parlement européen (PE) rejetait la proposition de révision émanant de la Commission européenne. Le 24 mai, la commission « environnement » du PE a voté pour inclure au classement IED les élevages de porcs ou les volailles dans des exploitations comptant au moins 200 unités de gros bétail (UGB) et les bovins dans des exploitations d'au moins 300 UGB. Pour les exploitations qui élèvent plus d'une race de ces animaux, la limite devrait être de 250 UGB. La décision du Parlement ne sera définitivement arrêtée que lors d'un vote prévu en séance plénière avant la clôture des travaux en juillet prochain. Le processus au sein du trilogue devra ensuite trouver son issue avant la fin 2023 sous la Présidence de l'Espagne. Il souhaite savoir quelle est la position officielle du Gouvernement français avant le vote final du Parlement européen et souhaite connaitre les initiatives qu'il entend prendre pour que, dans le cadre de la révision IED, les seuils existants concernant les différentes filières d'élevage (bovine, porcine, avicole...) soient absolument préservés.
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Transmise au Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires
Réponse du Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires publiée le 10/08/2023
La directive 2010/75/UE relative aux émissions industrielles (dite « directive IED ») s'applique aujourd'hui uniquement aux élevages de volailles, de porcs et de truies. Elle a pour objectif de réduire les émissions des exploitations concernées notamment par la mise en oeuvre de mesures environnementales définies au niveau européen. La Commission européenne a présenté le 5 avril 2022 un projet de modification de cette directive intégrant dans son champ d'application les élevages de volailles, porcins et bovins à partir du seuil de 150 unités de gros bétail (UGB), sur le fondement d'une étude d'impact mettant notamment en exergue l'importance des émissions d'ammoniac et de méthane issues de l'ensemble de ces élevages. Dans le cadre des négociations au Conseil de l'Union européenne, le Gouvernement a porté une position visant à tenir compte des contraintes, notamment financières, que la révision de la directive engendrerait pour la profession agricole. Ces négociations ont abouti à une orientation générale du Conseil le 16 mars 2023 incluant des seuils de 280 UGB pour les élevages de volailles et de 350 UGB pour les élevages porcins, bovins et les exploitations mixtes ainsi qu'une exclusion des élevages extensifs porcins et bovins (dans lesquels la densité est inférieure à 2 UGB par hectare servant uniquement au pâturage ou à la culture de fourrage utilisé pour l'alimentation des animaux dans l'installation). L'orientation générale comprend également un calendrier d'application échelonné en fonction de la taille des exploitations concernées afin que la profession dispose d'un temps suffisant pour se conformer à la directive. Les négociations au Parlement européen sont encore en cours. À ce stade, les seuils retenus dans les principes votés par la commission de l'environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire du Parlement sont de 200 UGB pour les élevages de volailles et porcins, de 300 UGB pour les élevages bovins et de 250 UGB pour les exploitations mixtes avec une exclusion des élevages extensifs (définis selon différentes options et sans compter une catégorie animale pour laquelle le nombre d'UGB est inférieur à 25). La commission de l'agriculture et du développement rural du Parlement a, quant à elle, déposé un amendement supprimant la référence aux élevages bovins de la définition de l'UGB, qui a été rejeté par la commission de l'environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire. Le vote en plénière a eu lieu le 10 juillet 2023 au Parlement. Dès lors, le gouvernement français continue d'être largement investi dans le cadre du trilogue européen et de la définition des exigences qui seront applicables aux élevages (dites « règles d'exploitation ») afin que des mesures environnementales soient appliquées proportionnellement aux pollutions générées par les différents types d'élevages et en tenant compte de leurs spécificités.
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