Question de M. PACCAUD Olivier (Oise - Les Républicains-R) publiée le 08/06/2023

M. Olivier Paccaud attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur une faille du principe de parité régissant l'élection des sénateurs concernés par le scrutin de liste à la proportionnelle.
L'instauration d'un mode de scrutin paritaire par la loi n° 2000-493 du 6 juin 2000 tendant à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives a permis de féminiser considérablement les bancs du Sénat. Ces progrès tiennent au fait que l'article L. 300 du code électoral impose que « chaque liste [soit] composée alternativement d'un candidat de chaque sexe ». Ce faisant, nombre de femmes inscrites au deuxième rang de leur liste ont pu être élues.
Toutefois, si l'élection des sénateurs et sénatrices obéit au principe de parité, il n'en va pas de même pour leur remplacement.
En effet, l'article LO. 320 du code électoral n'impose pas le respect de la parité lors du remplacement d'un sénateur devant quitter ses fonctions, lequel est alors remplacé par le dernier candidat de la liste n'ayant pas été élu, quel que soit son sexe. Cette brèche légale permet, en théorie et en pratique, de faire échec à l'obligation paritaire de l'élection sénatoriale en obtenant d'une femme élue qu'elle abandonne son siège à un homme sitôt l'élection acquise. De plus, elle jure avec les récentes évolutions législatives qui tendent à affermir le principe de parité, y compris lors du remplacement d'élus laissant leurs fonctions vacantes (par exemple, l'article L. 2122-7-2 du code général des collectivités territoriales impose le remplacement des adjoints au maire par un conseiller municipal du même sexe).
Aussi, il lui demande si, afin de consolider le principe de parité, il envisage de rendre obligatoire le remplacement des sénateurs et sénatrices démissionnaires par le dernier candidat non élu du même sexe.

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Réponse du Ministère de l'intérieur et des outre-mer publiée le 26/10/2023

L'article 1er de la Constitution, dans sa rédaction issue de la loi constitutionnelle n° 99-569 du 8 juillet 1999 relative à l'égalité entre les femmes et les hommes, dispose que « la loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu'aux responsabilités professionnelles et sociales ». Dans l'objectif de rendre effective cette disposition constitutionnelle, le législateur a précisé les modalités de mise en oeuvre du principe de parité aux différentes élections, par la loi n° 2000-493 du 6 juin 2000 tendant à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives. S'agissant des élections sénatoriales, l'article L. 300 du Code électoral dans sa rédaction issue de la loi du 6 juin 2000 précitée dispose ainsi que « sur chacune des listes, l'écart entre le nombre de candidats de chaque sexe ne peut être supérieur à un. Chacune des listes est composée alternativement d'un candidat de chaque sexe ». S'agissant du remplacement en cas de vacance de siège, l'article L.O. 320 du Code électoral dispose que « le sénateur élu à la représentation proportionnelle dont le siège devient vacant pour tout autre cause que l'acceptation de fonctions gouvernementales est remplacé par le candidat figurant sur la même liste immédiatement après le dernier candidat devenu sénateur conformément à l'ordre de cette liste ». Ce principe de remplacement par le candidat venant immédiatement après sur la liste sans considération de l'alternance entre chaque sexe s'applique à la majorité des scrutins de liste. Il se retrouve également pour les conseillers municipaux et les membres du Conseil de Paris (article L. 270 du même code), les conseillers métropolitains de Lyon (article L. 224-29), les conseillers régionaux (article L. 360) et les conseillers aux assemblées de Guyane et de Martinique (article L. 558-32). Seuls les scrutins de liste instaurés pour l'élection des conseillers communautaires (article L. 273-10 du Code électoral) et pour le remplacement des adjoints dans les communes de plus de 1 000 habitants (article L. 2122-7-2 du Code général des collectivités territoriales) prévoient que le siège vacant est pourvu par un candidat ou par un conseiller « de même sexe » que l'élu à remplacer. Ces dispositions récentes ont été instaurées respectivement par la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral et par la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique. Les parlementaires ont toutefois estimé que ce dispositif nécessitait des assouplissements. Ainsi, la loi n° 2023-506 du 26 juin 2023 tendant à garantir la continuité de la représentation des communes au sein des conseils communautaires a introduit deux adaptations au principe de parité pour pallier aux quelques cas où l'application de ces règles conduisait à laisser vacants certains sièges devant l'impossibilité de procéder à un remplacement paritaire. Le quatrième alinéa introduit à l'article L. 273-10 du Code électoral permet ainsi, au terme de la première année suivant l'installation du conseil municipal de la commune concernée, lorsque le siège d'un conseiller communautaire devient vacant et qu'il n'existe pas de conseiller municipal ou d'arrondissement de même sexe capable de le remplacer, que le siège soit pourvu par le prochain candidat « fléché » figurant sur la liste sur laquelle le conseiller à remplacer a été élu, sans tenir compte de son sexe, puis, qu'à défaut, le siège soit pourvu par le premier conseiller municipal « non-fléché » élu sur la même liste, sans tenir compte de son sexe. Cette évolution permet de concilier de façon plus équilibrée les principes de parité et de représentation des communes Une telle adaptation, ainsi que la pratique appliquée de fait à la majorité des scrutins de liste, n'apparaissent pas contraires au principe de parité. Ainsi, aucune disposition constitutionnelle en matière de parité n'impose la mise en place d'un remplacement des élus et des candidats par un candidat de même sexe. Dans sa décision n° 2013-667 DC du 16 mai 2013, le Conseil constitutionnel a rappelé que les dispositions des articles 1er et 3 de la Constitution de 1958 « permettent au législateur d'instaurer tout dispositif tendant à rendre effectif l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives. Il lui est loisible d'adopter des dispositions revêtant soit un caractère incitatif, soit un caractère contraignant ». Enfin, en tout état de cause, il est constaté dans la pratique que les dispositions actuellement applicables au remplacement des sénatrices et des sénateurs tend à renforcer de fait la féminisation du Sénat. Ainsi, le rapport d'information n° 670 de Mme Annick BILLON, fait au nom de la délégation aux droits des femmes et déposé le 17 juillet 2018 intitulé « Réforme des institutions : quelle place pour l'égalité et la parité », a souligné l'importance du remplacement dans la féminisation du Sénat. Il a démontré que, « dans la plupart des cas, [les] remplacements sont effectués dans le sens homme-femme », ce qui permet d'augmenter en définitive la proportion de sénatrices. Ce même rapport montre notamment qu'« entre le lendemain du renouvellement de 2014 et la veille de celui de 2017, le nombre de sénatrices a augmenté de quelque 10 % », s'expliquant par « l'arrivée au Sénat de femmes remplaçant des sénateurs décédés ou démissionnaires ». Dans ce contexte, le Gouvernement n'envisage pas à ce stade de rendre obligatoire le remplacement des sénateurs et sénatrices démissionnaires par le dernier candidat non élu du même sexe.

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