Question de M. HOUPERT Alain (Côte-d'Or - Les Républicains) publiée le 08/06/2023
M. Alain Houpert interroge M. le ministre de la santé et de la prévention sur les fondements juridiques qui permettent de qualifier d'essai illégal, l'étude qui vient d'être rapportée par l'institut hospitalier universitaire (IHU) Marseille-Méditerranée sur les 30 000 patients qui ont été suivis en 2020 et 2021 en hospitalisation. Ce travail, dont la presse s'est fait l'écho, inclut en réalité les patients de 2020 qui ont déjà fait l'objet de publications, qui, elles, n'ont pas été contestées : l'une portant sur 10 000 personnes vues en hôpital de jour, l'autre sur les plus de 2 000 personnes hospitalisées. Ainsi, l'extension actuelle ne concerne donc que 2021, mais intègre les patients de 2020, ce qui représente la lutte contre 2 ans de covid-19. Par ailleurs, au terme de l'enquête menée par les huit inspecteurs de l'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), de l'inspection générale des affaires sociales (IGAS) et de l'inspection générale de l'éducation, du sport et de la recherche (IGESR), qui ont examiné ces études déjà publiées, parmi les 75 000 documents qui leur ont été remis, les conclusions des enquêteurs n'ont pas fait état d'essai illégal, ce qui corrobore les conclusions du conseil de discipline du conseil de l'ordre des médecins selon lesquelles « l'ex-directeur de l'IHU Méditerranée infection n'a pas commis de faute en prescrivant de l'hydroxychloroquine et n'a pas mis en danger la vie des malades ». Enfin, le directeur général de la santé répondant à une demande d'un confrère, comme lui professeur de maladies infectieuses, a précisé que « tous les médecins peuvent prescrire un traitement hors AMM ». C'est pourquoi, faute de percevoir quels sont les éléments illégaux, il lui demande de bien vouloir lui préciser ce qui, juridiquement, représente un essai illégal dans ce cas de figure d'une étude rétrospective chez des patients informés des usages thérapeutiques de l'IHU, dont la diversité des traitements ne se limite pas à l'hydroxychloroquine. Il le remercie de sa réponse.
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Transmise au Ministère de la santé et de la prévention
Réponse du Ministère de la santé et de la prévention publiée le 21/12/2023
L'article L. 1121-1 du code de la santé publique définit les recherches impliquant la personne humaine comme toute recherche organisée et pratiquée sur l'être humain afin de développer les connaissances biologiques ou médicales. Les projets de recherches portant sur le médicament (en dehors des recherches non interventionnelles) doivent être autorisés par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et recevoir l'avis favorable de la part d'un comité de protection des personnes (CPP) pour pouvoir être légalement réalisés. Ainsi, la réalisation de telles recherches ne disposant pas de l'avis favorable d'un comité et/ou de l'autorisation de l'ANSM rend passible leur promoteur de sanctions pénales et administratives. L'ANSM avait saisi en 2021 la Procureure de la République au sujet de l'essai de l'institut hospitalo-universitaire (IHU) de Marseille sur la chloroquine dans le cadre de la Covid-19 au titre de l'article 40 du code de procédure pénale. Une procédure contradictoire avec l'IHU et l'AP-HM avait été mise en place afin d'une part de suspendre les recherches réalisées sans obtention préalable d'un avis favorable d'un comité de protection des personnes et, d'autre part, de faire la lumière sur les pratiques de l'IHU. Parallèlement, une mission d'inspection engagée par l'ANSM, l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et l'Inspection générale de l'éducation, du sport et de la recherche (IGESR) auprès de l'IHU de Marseille fin 2021, avait notamment pour objectif la vérification du respect par l'IHU et l'Assistance publique - Hôpitaux de Marseille (AP-HM) des dispositions législatives et réglementaires relatives aux recherches impliquant la personne humaine. Cette vérification portait sur : - les conditions de mise en oeuvre des recherches suivantes au regard de la réglementation applicable : « Recherche de tropheryma whipplei comme agent de gastro-entérite chez le jeune enfant » et « Pathologies associées au voyage et acquisition de pathogènes et de bactéries multi-résistantes chez les étudiants en médecine effectuant un stage pratique hors de France » ; - les avis du comité d'éthique interne de l'IHU sur les projets de recherches (sur la période octobre 2018 à 2021) ; - les informations transmises par l'IHU à l'ANSM en matière de promotion de recherches impliquant la personne humaine ; - les dossiers médicaux de patients traités en 2019 pour une tuberculose infectieuse par les services d'infectiologie de l'AP-HM hébergés au sein de l'IHU, en raison de la possible mise en oeuvre d'une recherche interventionnelle comportant une intervention sur la personne non justifiée par sa prise en charge habituelle en l'absence d'autorisation de l'ANSM et d'avis favorable d'un Comité de protection des personnes. Cette inspection conjointe a mis en évidence des infractions à la réglementation des RIPH menées au sein de l'IHU, notamment en ce qui concerne les modalités de mise en oeuvre, les conditions de prélèvement et d'utilisation des échantillons des personnes incluses dans des recherches, ainsi que les modalités de recueil du consentement et d'information des participants. Les règles éthiques n'ont pas été systématiquement respectées, ne permettant pas d'assurer la protection des personnes à un niveau suffisant et tel que la réglementation le requiert. Compte tenu de la gravité des manquements constatés, l'ANSM a de nouveau saisi la procureure de la République au titre de l'article 40 du code de procédure pénale pour les faits pénalement répréhensibles suivants : - la mise en oeuvre de recherches en l'absence d'avis favorable préalable d'un comité de protection des personnes au sein de l'IHU et de l'AP-HM ; - la communication à l'ANSM par l'IHU en amont de l'inspection d'un document falsifié concernant un avis du comité d'éthique interne de l'IHU. En second lieu, « tous les médecins peuvent prescrire un traitement hors autorisation de mise sur le marché (AMM »). Ces dispositions sont strictement encadrées au titre de l'article L. 5121-12-1-2 du code de la santé publique : « un médicament ne peut faire l'objet d'une prescription non conforme à son autorisation de mise sur le marché qu'en l'absence d'alternative médicamenteuse appropriée disposant d'une autorisation de mise sur le marché ou d'une autorisation d'accès précoce et sous réserve que le prescripteur juge indispensable, au regard des connaissances médicales avérées, le recours à ce médicament pour améliorer ou stabiliser l'état clinique de son patient ». De plus, le prescripteur doit informer le patient que la prescription du médicament ne s'effectue pas dans le cadre d'une autorisation de mise sur le marché, le cas échéant de l'absence d'alternative thérapeutique, des risques encourus ainsi que des contraintes et des bénéfices susceptibles d'être apportés par le médicament. L'ordonnance doit mentionner « Prescription hors autorisation de mise sur le marché ». Seul un cadre de prescription compassionnel, prévu à l'article L. 5121-12-1 du code de la santé publique, permettrait sur autorisation de l'ANSM une utilisation encadrée d'un médicament hors de son autorisation de mise sur le marché. Un tel cadre d'utilisation, sollicité auprès de l'ANSM par l'IHU de Marseille en août 2020 pour l'utilisation de l'hydroxychloroquine dans le cadre de la prise en charge du Covid-19, avait fait l'objet d'un avis négatif de l'ANSM en octobre 2020. Cet avis négatif était documenté par l'absence d'un rapport bénéfice/risque favorable de l'hydroxychloroquine pour la prise en charge du Covid-19, que ce soit seule ou en association avec l'azithromycine, en traitement ou en prévention.
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