Question de M. GILLÉ Hervé (Gironde - SER) publiée le 01/06/2023
M. Hervé Gillé signale à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion que dans le cadre de son plan de réforme du travail (réforme des retraites, mise en place de France Travail, projet de loi relatif au plein emploi...), le Gouvernement envisage de renforcer les mesures contraignantes pour les allocataires du revenu de solidarité active (RSA) conditionnant le versement de ce dernier au suivi de parcours intensifs de « formation de 15 à 20 heures ». Le terme formation est générique puisque le contenu reste encore très obscur, n'étant pas précisé à cette heure. Le projet introduit également la « suspension mobilisation » dès le début du dispositif, mesure coercitive preuve une nouvelle fois de l'idéologie néolibérale oppressive du Gouvernement.
Cette proposition suscite des inquiétudes quant à ses conséquences sur la précarité des bénéficiaires et leur réinsertion professionnelle. Il est essentiel d'évaluer attentivement les risques potentiels de telles mesures et de s'assurer que les politiques mises en oeuvre favorisent une réinsertion durable plutôt que des résultats à court terme.
En outre, le RSA est déjà conditionné aux engagements des allocataires et des professionnels accompagnants sur le plan social et professionnel, mais pas uniquement à une reprise d'emploi coûte que coûte. La rentabilité à tout prix, la politique du chiffre sont des réussites d'affichage et ne constituent pas des politiques sociales de long terme.
Ainsi, en plus de la philosophie générale de cette proposition, le changement d'organigramme de l'organisation du versement du RSA et donc la remise en question de la place des départements dans le cadre de cette réforme affolent les collectivités.
Il lui demande s'il entend poursuivre les discussions pour trouver des approches sociales qui soutiennent réellement l'autonomie des allocataires du RSA et répondent aux enjeux socio-économiques tout en laissant le département seul maitre de l'organisation du versement du RSA, pour une véritable politique de proximité.
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Réponse du Ministère auprès du ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion et du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, chargé de l'enseignement et de la formation professionnels publiée le 07/06/2023
Réponse apportée en séance publique le 06/06/2023
Mme le président. La parole est à M. Hervé Gillé, auteur de la question n° 722, adressée à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion.
M. Hervé Gillé. Madame la ministre, 607,75 euros, voilà le montant perçu par une personne seule au RSA, ce revenu de solidarité active qui couvre en France 3,85 millions de personnes.
Dans le cadre de son plan de refonte de la relation au travail, le Gouvernement envisage de renforcer les mesures contraignantes pour les allocataires du RSA, en conditionnant le versement de ce dernier au suivi de parcours intensifs d'« heures d'activités » - au nombre de quinze à vingt heures par semaine. Qu'en est-il exactement de cette intention ?
Il est essentiel d'évaluer attentivement les risques induits par de telles mesures et de s'assurer que les politiques mises en oeuvre favorisent une réinsertion durable plutôt que des résultats à court terme.
Cette nouvelle conditionnalité du versement du RSA est actuellement testée dans plusieurs départements. Les conclusions de ces expérimentations sont attendues afin d'orienter nos futures réflexions sur cette question. Nous espérons que le Gouvernement sera capable de les entendre et d'adapter sa politique.
Le RSA est déjà conditionné aux engagements des allocataires par un contrat avec des professionnels accompagnants sur le plan social et professionnel. Pouvez-vous préciser vos orientations ? Voulez-vous renationaliser le RSA ?
Le changement d'organigramme de l'organisation du versement du RSA, et donc la remise en question de la place des départements dans le cadre de cette réforme, alertent les collectivités. Voulez-vous placer les départements sous tutelle ?
Les discussions doivent se poursuivre pour trouver des approches sociales qui soutiennent réellement l'autonomie des allocataires du RSA et répondent aux enjeux socioéconomiques tout en laissant les départements en première ligne, pour garantir une véritable politique de proximité.
Madame la ministre, pouvez-vous préciser vos intentions ? Quelle inscription des départements dans le projet France Travail prévoyez-vous ? Allez-vous leur imposer cette réforme et poursuivre cette politique coercitive d'approche néolibérale ?
Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Carole Grandjean, ministre déléguée auprès du ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion et du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, chargée de l'enseignement et de la formation professionnels. Monsieur le sénateur Hervé Gillé, l'objectif du chantier France Travail est l'amélioration significative de l'offre de service aux demandeurs d'emploi ainsi qu'aux entreprises, et tout particulièrement aux allocataires du RSA. En effet, seuls 40 % d'entre eux sont aujourd'hui inscrits à Pôle emploi ; et parmi les allocataires du RSA, 42 % y sont toujours inscrits sept ans après leur première inscription. Il est donc urgent de les accompagner.
À cet égard, les quinze à vingt heures par semaine que vous avez évoquées ne relèvent ni du travail gratuit ni du bénévolat obligatoire : il s'agit de consacrer du temps à la construction d'un parcours, dans une logique de meilleure insertion professionnelle.
Nous tiendrons compte des différentes situations afin de répondre aux besoins spécifiques d'accompagnement des personnes ; ces besoins ne sont en effet pas les mêmes, au niveau des freins périphériques, selon que l'on est une femme chef de famille monoparentale, ou que l'on vit en milieu rural, par exemple.
Il s'agit de s'appuyer sur des démarches déjà existantes ; nous ne partons pas de zéro. Nous utiliserons ainsi le contrat d'engagement jeune, dont les résultats sont encourageants et qui nous permet d'avoir un certain recul sur les moyens mobilisables pour mettre en place ces quinze à vingt heures d'activité consacrées au parcours professionnel en termes d'accompagnement, de formation et d'immersion professionnelle. Il s'agit d'alimenter la réflexion afin d'améliorer l'accompagnement des personnes les plus éloignées de l'emploi.
Nous avons donc lancé un grand dispositif de parangonnage : cet exercice mené au niveau européen, grâce au travail de l'inspection générale des affaires sociales (Igas) et de l'inspection générale des finances (IGF), a renforcé notre conviction qu'un accompagnement intensif faisait partie des facteurs clés de réussite de l'insertion professionnelle.
Une expérimentation relative aux allocataires de RSA est ainsi en cours dans dix-huit départements volontaires, et devrait progressivement être étendue. Elle permettra de proposer des offres adaptées aux besoins de chacun et de retenir les solutions qui fonctionnent dans chacun de ces départements.
Mme le président. La parole est à M. Hervé Gillé, pour la réplique.
M. Hervé Gillé. Il y a certes des expérimentations, madame la ministre, mais il n'y a pas de retours d'expérience dont les départements pourraient discuter ! Il serait donc utile de replacer ceux-ci dans le jeu et de négocier avec eux les nouvelles orientations prévues dans votre projet de loi.
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