Question de Mme NOËL Sylviane (Haute-Savoie - Les Républicains) publiée le 01/06/2023
Mme Sylviane Noël attire l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur le refus de greffe de patients non vaccinés contre la covid-19.
Alors que l'organisation mondiale de la santé (OMS) a déclaré la fin de la covid-19 en tant qu'urgence de santé publique de portée internationale et que la pandémie semble être loin derrière nous, différents hôpitaux en France persistent dans une pratique gravement discriminante, consistant à placer en « contre-indication temporaire » dans la liste d'attente nationale des greffes les personnes non vaccinées contre la covid-19 , ce qui correspond de facto à les en exclure et leur interdire toute transplantation. Cette pratique met à l'évidence en danger la vie des personnes non vaccinées en attente de greffe.
À titre d'exemple au mois d'octobre 2022, le centre hospitalier universitaire (CHU) de Dijon, qui devait être le lieu d'accueil d'une personne en attente d'une transplantation de reins, a invoqué une contre-indication médicale temporaire se fondant sur une recommandation nationale de la société francophone de transplantation, préconisant « de ne pas transplanter les patients non vaccinés contre la covid-19 lorsque le taux d'incidence départementale de cette maladie est supérieur à 50 pour 100 000 habitants ».
Au mois de février 2023, le même centre hospitalier a de nouveau refusé la transplantation de cette personne, invoquant cette fois ci qu'en recevant une greffe sans vaccination contre la covid-19, le patient s'exposerait à des risques d'infection sévère au coronavirus, voire à un décès suite à la perte du greffon.
Depuis lors, le CHU de Dijon a changé d'avis et a levé la « contre-indication temporaire » à la greffe de cette personne du fait de sa non vaccination contre la covid-19 mais lui a néanmoins fait signer un document indiquant qu'elle reconnaissait les dangers de ne pas être vaccinée et que l'hôpital ne pouvait être tenu responsable en cas de complications. Du fait de ce changement, le tribunal administratif de Dijon ne pourra pas établir de jurisprudence pour d'autres patients ou centres hospitaliers, alors que pourtant cette situation dramatique touche encore de nombreuses personnes non vaccinées contre la covid-19 et en attente de greffe.
Enfin, à ce jour, l'agence de biomédecine (dont la mission est de garantir à chaque malade un accès égal à la greffe d'organes sur tout le territoire) assure que la vaccination contre la covid-19 n'est pas obligatoire pour les personnes en attente de greffe.
Dans ces conditions, elle lui demande de lui confirmer la position de l'agence de biomédecine, de lui indiquer s'il considère compatible avec le principe d'égal accès à la greffe d'organe pour tout un chacun, la pratique de certains hôpitaux consistant à placer en « contre-indication temporaire » dans la liste d'attente nationale des greffes les personnes non vaccinées contre la covid-19 , enfin de lui indiquer s'il soutient la persistance de cette pratique malgré le fait que l'OMS ait déclaré la fin de la covid-19 en tant qu'urgence de santé publique de portée internationale.
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Réponse du Ministère auprès du ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées, chargé des personnes handicapées publiée le 05/07/2023
Réponse apportée en séance publique le 04/07/2023
Mme le président. La parole est à Mme Sylviane Noël, auteure de la question n° 723, adressée à M. le ministre de la santé et de la prévention.
Mme Sylviane Noël. Madame la ministre, alors que l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a déclaré la fin de l'épidémie de covid-19 en tant qu'urgence de santé publique internationale, différents hôpitaux en France persistent dans une pratique gravement discriminante : dans la liste d'attente nationale des greffes, ils placent les personnes non vaccinées contre la covid-19 en contre-indication temporaire, ce qui de facto les exclut de la liste et empêche toute transplantation.
C'est ainsi qu'au mois d'octobre 2022 le centre hospitalier universitaire (CHU) de Dijon a invoqué une contre-indication médicale temporaire, en se fondant sur une recommandation nationale de la société francophone de transplantation qui préconise de ne pas transplanter les patients non vaccinés contre la covid-19, lorsque le taux d'incidence départementale de cette maladie est supérieur à 50 pour 100 000 habitants.
Au mois de février 2023, le CHU a réitéré son refus, invoquant des risques d'infection sévère au coronavirus, voire de décès à la suite de la perte du greffon.
Depuis, le CHU a changé d'avis et levé la contre-indication temporaire à la greffe de la personne concernée du fait de sa non-vaccination contre la covid-19. Il a toutefois demandé à la personne de signer un document dans lequel elle reconnaît les dangers de ne pas être vaccinée et qui dédouane l'hôpital en cas de complication...
Dès lors, le tribunal administratif de Dijon ne peut plus établir de jurisprudence pour d'autres patients ou centres hospitaliers, alors même que cette situation dramatique concerne de nombreuses personnes en attente de greffe non vaccinées contre la covid-19.
L'Agence de la biomédecine - garante de l'accès égal à la greffe d'organes sur tout le territoire - assure pourtant que la vaccination contre la covid-19 n'est pas obligatoire pour les personnes en attente de greffe.
Le Gouvernement le confirme-t-il ? Tous les Français doivent être égaux dans la répartition des organes prélevés en vue d'une greffe.
Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées, chargée des personnes handicapées. Madame la sénatrice, au cours de la crise sanitaire, toutes les recommandations de l'Agence de la biomédecine (ABM) - placée sous la tutelle du ministère de la santé - à destination des équipes hospitalières de prélèvement et de greffe ont porté sur la conduite à tenir en cas de symptomatologie covid positive du donneur.
Concernant les receveurs en attente de greffe, l'Agence, qui met tout en oeuvre pour que chaque malade reçoive les soins nécessaires, dans le respect des règles de sécurité sanitaire, d'éthique et d'équité, s'est appuyée et s'appuie encore sur les différents avis actualisés au fur et à mesure des données scientifiques.
S'appuyant ainsi sur les avis du groupe de travail « Sécurité des éléments et produits du corps humain » du Haut Conseil de la santé publique (HCSP) et sur les recommandations des sociétés savantes - notamment de la Société francophone de transplantation et de la Société francophone de néphrologie, dialyse et transplantation -, l'Agence de la biomédecine n'a jamais considéré le schéma vaccinal complet comme un prérequis obligatoire pour accéder à la greffe d'organes.
Concernant la gestion et le suivi des contre-indications temporaires, l'ABM a émis les recommandations suivantes le 2 mars 2021 : les contre-indications temporaires doivent faire l'objet d'une révision régulière par les équipes de greffe, patient par patient ; l'ABM doit être informée des suspensions d'activité provisoires de prélèvement et de greffe. L'expertise de l'ABM en fait l'autorité de référence sur les aspects médicaux, scientifiques et éthiques relatifs à ces questions.
Dans le cas du CHU de Dijon, l'Agence a réalisé un état des lieux, en lien avec les équipes hospitalières. Elle a conclu qu'aucune disparité dans l'accès à la greffe, imputable à une potentielle gestion erratique de la liste d'attente par les équipes dijonnaises et concernant le motif covid, n'était apparue.
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