Question de M. BUIS Bernard (Drôme - RDPI) publiée le 22/06/2023
M. Bernard Buis attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire à propos du projet de révision de la directive 2010/75/UE du Parlement européen et du Conseil du 24 novembre 2010 relative aux émissions industrielles, dite directive « IED ».
Ce projet, à l'initiative de la Commission européenne, prévoit d'étendre le champ d'application de l'actuelle directive sur les émissions industrielles. Il compte rendre plus strictes les règles d'exploitation, renverser la charge de la preuve dans certaines situations, mais aussi rendre possible l'évolution du champ d'application et des règles d'exploitation par simples actes délégués.
Les conséquences potentielles de ce projet sont préoccupantes pour l'ensemble de l'élevage français. Cela englobe des aspects cruciaux tels que la souveraineté alimentaire, l'attractivité des filières animales, le renouvellement des générations d'éleveurs, l'aménagement du territoire et la préservation de l'environnement.
Par ailleurs, cette proposition entraînerait en France une classification sous la réglementation « IED » de 72 % des élevages avicoles et 93 % des élevages porcins, contre respectivement 18 % et 7 % actuellement. Cela concerne aussi près de 30 000 exploitations bovines, sans prendre en compte les élevages soumis aux règles de cumul. Les coûts estimés pour les filières dépassent les 2 milliards d'euros et confirment ainsi une sous-estimation de l'impact de la proposition par la Commission européenne.
En outre, il convient de souligner que les exploitations agricoles françaises sont d'ores et déjà activement engagées dans la réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre et dans la préservation de l'environnement. Des résultats concrets témoignent de leurs efforts, notamment en ce qui concerne la diminution significative des émissions d'ammoniac, de protoxyde d'azote et de méthane dans les secteurs de l'élevage bovin, porcin et avicole.
C'est pourquoi il s'oppose à l'extension du champ d'application de l'actuelle directive et le prie de bien vouloir se prononcer sur les raisons justifiant ce projet européen qui mettrait en danger notre élevage français et préciser comment le Gouvernement compte réagir.
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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des collectivités territoriales et de la ruralité publiée le 01/11/2023
Réponse apportée en séance publique le 31/10/2023
M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, en remplacement de M. Bernard Buis, auteur de la question n° 756, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, en remplacement de M. Bernard Buis. Notre collègue Bernard Buis tenait à interroger le Gouvernement sur le projet de modification de la directive européenne relative aux émissions industrielles (IED).
Avec cette directive, il s'agit de réduire les émissions des exploitations concernées via des mesures environnementales définies à l'échelon européen.
Le 5 avril 2022, la Commission européenne a présenté un projet de modification de cette directive, en intégrant dans son champ d'application les élevages de volailles, porcins et bovins à partir du seuil de 150 unités de gros bétail.
Dans le cadre des négociations européennes, le Gouvernement a défendu une position visant à tenir compte des contraintes, notamment financières, que la révision de la directive engendrerait pour la profession agricole.
Le 10 juillet 2023, le Parlement européen a voté contre le projet de la Commission. Nous pouvons nous réjouir de ce vote, qui est porteur d'un message de soutien à destination des filières agricoles. Contrairement à ce que nous pouvons lire ici ou là, ce n'est en rien une mauvaise nouvelle pour la transition écologique.
Les exploitations agricoles françaises sont d'ores et déjà activement engagées dans la réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre et dans la préservation de l'environnement. Élevage et écologie ne sont pas incompatibles. Les opposer sans nuance ne sert à rien.
Cela étant, il y a eu des négociations dans le cadre du trilogue européen, au lendemain du vote des parlementaires.
Mon collègue Bernard Buis souhaitait donc vous interroger. Les négociations sont-elles toujours en cours ? Quelles sont les prochaines étapes de ces négociations ? Comment le Gouvernement s'investit-il pour protéger nos éleveurs ? Enfin, ces derniers ont-ils encore des raisons de s'inquiéter ou peuvent-ils être sereins ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur, l'inclusion dans le champ de la directive des activités d'élevage ayant des impacts environnementaux importants ne peut être pensée qu'en soulignant que l'élevage a un avenir en France et détient une partie de la solution face au changement climatique.
Dans cette logique, le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire a annoncé, en lien avec le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, un plan de soutien à l'élevage, à l'occasion du trente-deuxième sommet de l'élevage de Cournon.
Dans la même optique, la France s'est aussi exprimée à plusieurs reprises au niveau européen pour défendre l'élevage et restreindre au maximum l'inclusion de l'élevage dans le champ de la directive IED.
Ces interventions fortes en faveur de l'élevage ont porté leurs fruits, puisque plusieurs avancées ont ainsi été obtenues dans l'orientation générale du Conseil adoptée le 16 mars dernier par rapport à la proposition initiale de la Commission européenne : rehaussement des seuils d'entrée, exclusion des élevages extensifs, définition des règles applicables aux exploitations par acte d'exécution pour un meilleur contrôle par les États membres des obligations qui seront imposées aux exploitants.
La France a soutenu cette proposition de compromis, tout en insistant sur l'indispensable prise en compte des systèmes d'élevage durables.
Le mandat du Parlement, voté le 11 juillet dernier, propose le statu quo sur le sujet. Les trilogues sont désormais engagés sous l'égide de la présidence espagnole, et le sujet « élevage » devrait être abordé lors du troisième trilogue politique du 28 novembre prochain.
Les négociations sont donc en cours. Il nous faut, côté Conseil, trouver des voies de compromis entre les deux mandats. La France estime que le résultat du vote du Parlement doit inciter le Conseil à faire un effort supplémentaire pour desserrer la contrainte sur les exploitations d'élevage.
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