Question de Mme LE HOUEROU Annie (Côtes-d'Armor - SER) publiée le 06/07/2023

Question posée en séance publique le 05/07/2023

M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Annie Le Houerou. Ma question s'adresse à M. le ministre de la santé et de la prévention.

« La nuit dernière, j'ai eu quinze patients qui ont fait plus de soixante kilomètres pour venir aux urgences de Rennes. Chaque matin, on compte vingt à quarante patients qui ont passé la nuit sur des brancards avec un risque de surmortalité de 50 %, faute de lits aval disponibles.

« La solution serait de laisser les patients attendre dans les ambulances plus sécurisées.

« Mais alors qui va aller chercher les patients ? Les transports sanitaires sont aussi saturés. »

Telles sont les paroles d'un urgentiste.

Monsieur le ministre, à Carhaix, les services d'urgence seront fermés en juillet et août prochain, alors que le festival des Vieilles Charrues accueillera 280 000 festivaliers. L'hôpital le plus proche est à quatre-vingt-dix kilomètres et une heure quinze de route.

La maternité de Guingamp n'accueille plus les femmes pour accoucher. Cette suspension est reconduite quatre mois faute de personnels, épuisés d'avoir tenu à bout de bras ces services. « On a l'impression d'être abandonnés », entend-on dans les cortèges de manifestants.

Monsieur le ministre, vous suspendez les activités des petits hôpitaux. Elles sont reportées sur les hôpitaux de référence, sur les centres hospitaliers universitaires (CHU) eux-mêmes exsangues.

À Pontivy, Avranches, Les Sables-d'Olonne, dans tous les centres hospitaliers de France, ce sont des cris d'alarme des médecins, lesquels étaient en grève hier.

Les agences régionales de santé (ARS) rassurent : appel aux soignants, éducation des patients, régulation - « Appelez les 15 avant de vous déplacer ! » -, mais, au 15, les équipes n'en peuvent plus. Elles ne sont pas assez nombreuses.

Les urgentistes quittent l'hôpital pour des conditions de travail moins contraignantes.

La médecine de ville ne va pas mieux. Les cabines de consultation remplacent les médecins de proximité.

Monsieur le ministre, la situation s'aggrave. Elle n'inquiète plus nos concitoyens ou les élus locaux : elle les angoisse ! Quelles réponses concrètes comptez-vous apporter à cette crise aiguë de l'hôpital public et des urgences dès cet été, c'est-à-dire aujourd'hui ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE.)

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Réponse du Ministère de la santé et de la prévention publiée le 06/07/2023

Réponse apportée en séance publique le 05/07/2023

M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé et de la prévention.

M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention. Madame la sénatrice Annie Le Houerou, oui, nous manquons de professionnels de santé, le diagnostic n'est malheureusement pas nouveau.

Oui, ce gouvernement agit en formant plus de médecins - mais il va falloir attendre dix ans (Murmures sur les travées du groupe SER.) -, en formant encore plus d'infirmiers - plus 6 000 -, plus d'aides-soignants - plus 3 000.

Les fermetures ne concernent pas les services d'urgence - il s'agit simplement d'accès régulés - que vous évoquez et ne sont pas le fait d'une décision économique : elles s'expliquent par le manque de professionnels de santé.

La solution viendra en redonnant plus de temps à ces professionnels, ce que nous avons commencé à faire, et en en formant plus, ce que nous faisons également.

Madame la sénatrice, vous le savez, les urgences sont une priorité majeure, encore renforcée cet été. Vous avez évoqué un certain nombre de solutions qui ont été mises en place, mais elles l'ont déjà été l'été dernier et elles fonctionnent.

Ainsi, l'été dernier, nous avons diminué de 5 % la fréquentation de nos services d'urgence, ce qui n'avait pas été le cas depuis plus de vingt ans.

Ces solutions s'articulent autour de trois axes.

Le premier axe concerne l'information du citoyen sur le bon usage du système de santé, en particulier le bon usage des urgences. Si son médecin n'est pas disponible, oui, avant de se déplacer, il faut qu'il appelle le 15. C'est ainsi que l'on trouvera la meilleure solution, adaptée en fonction du territoire où il se trouve.

Dans ce cadre-là, nous renforçons la régulation médicale. Nous accélérons le déploiement de ce service d'accès aux soins qui intègre des médecins généralistes à la régulation. Nous renforçons leur rémunération. Grâce aux mesures votées par le Parlement, nous avons transformé les assistants de régulation médicale en professionnels de santé, ce qui a permis de valoriser leur exercice.

Il faut également des effecteurs sur le terrain.

C'est le cas en ville, avec une augmentation de 15 euros pour les actes qui sont réalisés à la demande de cette régulation.

C'est également le cas pour ce qui concerne les transports sanitaires, ce que vous avez mentionné, madame la sénatrice : on facilite le transport vers les médecins généralistes.

Le deuxième axe, c'est le renforcement des communautés professionnelles territoriales de santé. À l'hôpital, nous avons pris en compte la pénibilité en doublant l'indemnité de nuit pour le personnel paramédical et en la multipliant par 1,5 pour les médecins.

Le troisième axe, c'est le développement d'une logique territoriale, non seulement pour les gardes, en associant public et privé, mais également pour la gestion des lits. Celle-ci se fait désormais à l'échelle du territoire et non plus seulement à celle d'un établissement.

Oui, les solutions sont mises en place. Certaines fonctionnent déjà, on le sait, les autres commencent à montrer leur efficacité. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour la réplique.

Mme Annie Le Houerou. Monsieur le ministre, il y a urgence aux urgences et vous n'y répondez pas.

L'accès aux soins pour tous, partout, fait partie de la promesse républicaine. On en est loin !

La défaillance de la médecine de ville conduit à l'engorgement des urgences, alors que les lits manquent en aval... Le système est embolisé. Où vont exercer les médecins qui quittent l'hôpital ?

Une remise à plat du service public de la santé s'impose, car ce ne sont pas vos propositions qui régleront le problème. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

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