Question de Mme MULLER-BRONN Laurence (Bas-Rhin - Les Républicains-A) publiée le 06/07/2023
Mme Laurence Muller-Bronn interroge Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur l'accord conclu entre l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et la Commission européenne instaurant un passe sanitaire numérique à l'échelle mondiale. L'existence de cet accord a été rendue publique par un communiqué de l'OMS du 5 juin 2023. Il révèle également que la Commission européenne a donné à l'OMS l'accès au système de certification Covid-19 européen, dans le but de développer ce réseau sanitaire mondial.
Or, les États membres n'ont jamais été consultés ni appelés à voter pour ce dispositif. Elle souhaite donc savoir sur quelle base légale et juridique repose une telle décision, dont les enjeux éthiques, médicaux et politiques relèvent de la souveraineté nationale des États et de leurs représentants légitimement élus. Elle rappelle à cet égard que le passe sanitaire européen avait été créé pour une durée limitée à la période Covid, et que sa prolongation jusqu'en juin 2023 avait nécessité un accord préalable des États membres, du Conseil et du Parlement européen.
Cet accord devrait donc, a fortiori, faire l'objet d'une consultation démocratique, d'autant plus qu'il implique une prolongation du certificat Covid jusqu'à fin 2023, contrairement à ce qui a été décidé précédemment par les instances européennes.
Elle souhaite donc connaître la position de la France sur cette décision prise unilatéralement par la Commission européenne, et savoir si le Gouvernement envisage de consulter le Parlement sur ce sujet politique majeur.
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Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 24/08/2023
L'accord entre la Commission européenne et l'Organisation mondiale de la santé (OMS) annoncé le 5 juin 2023 est fondé sur la stratégie de l'Union européenne en matière de santé mondiale et la stratégie globale des Etats membres de l'OMS en matière de santé numérique. Un accord sur la coopération stratégique entre l'Union et l'OMS avait été signé le 2 décembre 2022 par la commissaire Kyriakides et le directeur général de l'OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, qui mentionnait notamment des avancées sur la santé digitale. Cette initiative s'inscrit dans les objectifs de l'Union et de ses Etats membres et a pu être discutée au niveau politique. Tout d'abord, le règlement (UE) 2021/953 du 14 juin 2021 relatif à un cadre pour la délivrance, la vérification et l'acceptation de certificats interopérables de vaccination, de test et de rétablissement (certificat COVID numérique de l'UE) afin de faciliter la libre circulation pendant la pandémie de COVID-19, a été un élément crucial de la réponse européenne à la pandémie. Son adoption et son déploiement rapides ont permis aux citoyens de l'Union de se déplacer librement et en toute sécurité, et au secteur européen du voyage d'ouvrir à temps pour l'été 2021. Le certificat numérique COVID de l'UE a donc été un outil majeur pour faire face à la pandémie de COVID-19 et en atténuer l'impact sur les sociétés et les économies. Il est rapidement devenu la norme pour l'Europe et au- delà, avec 51 pays et territoires tiers connectés au système en plus des 27 États membres. Cette extension du certificat par-delà les frontières montrait déjà la volonté de l'Union et de ses Etats membres d'étendre sa portée à une échelle la plus large possible. En juin 2022, les co-législateurs ont prorogé d'un an le règlement (UE) 2021/953 afin de garantir la possibilité aux voyageurs de continuer à utiliser leur certificat au cas où une aggravation significative de la situation épidémiologique aurait obligé les États membres à réintroduire temporairement des restrictions de voyage au sein de l'UE. Le règlement (UE) 2021/953 devait expirer le 30 juin 2023. Étant donné l'absence actuelle de toute restriction aux voyages intra-UE, et compte tenu du fait que le contexte épidémiologique a conduit l'Organisation mondiale de la santé (OMS) à déclarer la fin de la COVID-19 comme un problème de santé publique, il convenait d'envisager la possibilité de mettre en place un système d'alerte rapide pour la COVID-19 en cas de résurgence future de la maladie. Par ailleurs, l'Union s'est fixée comme priorité d'élaborer les politiques et les outils nécessaires pour mieux se préparer aux futures crises sanitaires. Les avantages de l'utilisation de solutions numériques pour atténuer l'impact des maladies transmissibles sur la capacité des citoyens et des entreprises à voyager constituent un pilier central de cette préparation, maintenant envisagée au niveau mondial. Cette priorité de l'Union s'illustre aussi par les conclusions du Conseil adoptées le 20 décembre 2022, invitant la Commission à « étudier la valeur ajoutée d'une version numérique des certificats de vaccination, en tenant compte de l'expérience acquise avec les infrastructures numériques européennes et d'autres outils existants, tels que le certificat international de vaccination ou de prophylaxie ». Le réseau mondial de certification numérique de la santé mis en place par l'OMS, qui s'appuie sur le cadre de confiance du certificat numérique COVID de l'UE, est conçu pour permettre l'interopérabilité et la vérification de ces certificats à l'échelle mondiale. Il devrait donc apporter une solution globale à l'appel lancé dans les conclusions du Conseil et s'inscrit ainsi dans nos objectifs. Enfin, la durée pendant laquelle les 51 pays et territoires tiers connectés au certificat numérique COVID de l'UE maintiendront de telles conditions d'entrée liées au COVID-19 étant difficile à évaluer, et l'évolution de la situation épidémiologique restant incertaine, il n'est pas exclu que certains d'entre eux réimposent des exigences en matière de voyage. Afin de garantir que les préoccupations de santé publique qui justifieraient de telles mesures soient correctement prises en compte, les États membres devraient pouvoir continuer à se fier aux certificats délivrés par des pays tiers conformément à la technologie et aux normes qui sous-tendent le système de certificats numériques COVID de l'Union européenne. Il est aussi souhaitable que les citoyens et résidents de l'Union qui voyagent en dehors de l'Union continuent d'avoir à leur disposition des moyens de prouver leur statut lié au COVID-19, lorsqu'ils en font la demande expresse pour un voyage en dehors de l'Union au-delà du 1er juillet 2023. Enfin, si les États membres introduisent de telles mesures générales de santé publique à la suite d'une résurgence des cas de COVID-19, ils disposeront avec cette recommandation du cadre nécessaire pour continuer à accepter les certificats délivrés par des pays tiers dont les systèmes sont interopérables avec le certificat numérique COVID de l'Union européenne. Par ailleurs, il convient de noter que le Conseil a adopté une recommandation sur l'adhésion de l'Union européenne au réseau mondial de certification numérique de la santé de l'OMS. Dans le cadre des travaux du groupe « santé publique », les Etats membres ont eu la possibilité d'échanger à trois reprises, les 9, 15 et 19 juin sur le sujet, avant qu'un accord soit annoncé en Coreper, le 23 juin. La discussion appropriée a donc bien eu lieu au niveau politique, et a s'est faite postérieurement à l'annonce de l'OMS, afin de pouvoir en travailler le contenu de la meilleure manière possible.
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