Question de Mme ROSSIGNOL Laurence (Val-de-Marne - SER) publiée le 30/11/2023
Question posée en séance publique le 29/11/2023
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Laurence Rossignol. Ma question s'adresse à Mme la Première ministre.
Dimanche, nous avons été bouleversés par un triple infanticide commis dans le Val-de-Marne. Un père a tué de ses mains à son domicile ses trois petites filles âgées de 4 à 11 ans.
Cet homme avait été condamné en 2021 pour violences sur conjoint, mais aussi sur mineur, sur l'une de ses filles. Il avait été condamné à dix-huit mois de prison, dont douze avec sursis, assortis d'une interdiction d'approcher les victimes.
Au même moment, sa femme avait déposé une plainte pour viol conjugal, qui avait bien entendu été classée sans suite, comme c'est presque toujours le cas...
Depuis le printemps 2023, cette femme et ses enfants n'étaient plus protégées ni par une interdiction d'approcher ni par une ordonnance de protection. Les parents étaient en instance de divorce et avaient organisé une garde alternée. La mère s'est rendue deux fois au commissariat pour signaler des problèmes lors de la remise des enfants au père.
Voilà...
Madame la Première ministre, quelles conclusions tirez-vous de ce drame quant à l'efficacité de nos politiques de lutte contre la violence envers les femmes et les enfants ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K, GEST, RDSE, ainsi que sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
- page 10404
Réponse du Ministère des solidarités et des familles publiée le 30/11/2023
Réponse apportée en séance publique le 29/11/2023
M. le président. La parole est à Mme la ministre des solidarités et des familles.
Mme Aurore Bergé, ministre des solidarités et des familles. Madame la sénatrice Rossignol, trois petites filles ont été assassinées. Elles avaient 4, 10 et 11 ans.
Je ne m'étendrai pas sur l'enquête en cours ; j'espère qu'elle apportera des réponses claires.
Votre question concerne, plus largement, ce que doivent prévoir le Gouvernement et les parlementaires concernant les droits des parents, notamment les droits de visite, en cas de conflit familial, dès lors que des violences ont été commises.
La proposition de loi visant à mieux protéger et accompagner les enfants victimes et covictimes de violences intrafamiliales de la députée Isabelle Santiago a été adoptée à l'Assemblée nationale, avec le soutien du Gouvernement. Ce texte énonce des principes clairs, mais essentiels, tels que la possibilité de retirer l'autorité parentale dès lors qu'une plainte - et non une simple suspicion - a été déposée contre un parent.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Ce n'est pas la question.
Mme Aurore Bergé, ministre. Madame la sénatrice, je crois que c'est la question.
La garde des enfants peut être utilisée pour exercer une forme de chantage ou de pression, notamment envers les mères, conduisant parfois à ce qui s'est malheureusement produit dans votre département, le Val-de-Marne.
La suspension de l'autorité parentale du parent poursuivi pour un crime ou un délit, que cette proposition de loi vise à instaurer, est un élément de réponse essentiel.
Ce texte va même jusqu'à prévoir le retrait de l'autorité et de l'exercice parental quand un parent a été condamné pour un crime ou un délit sur son enfant. En matière de violences conjugales, il permet enfin de reconnaître que l'enfant est aussi covictime des violences conjugales perpétrées à l'encontre de la mère ou du parent victime.
Des avancées essentielles restent cependant à accomplir, mais cette proposition de loi permet de franchir une étape importante dans la protection que nous devons à nos enfants.
Enfin, j'ai une pensée pour la mère de ces trois petites filles, qui devra survivre au drame absolu qui s'est produit. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes INDEP et RDSE. - M. Stéphane Demilly applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour la réplique.
Mme Laurence Rossignol. À chaque fois que j'en ai eu l'occasion - en 2020, en 2021, en 2022 -, j'ai défendu ici des amendements visant à porter de six à douze mois la durée d'exécution des mesures prononcées dans le cadre d'une ordonnance de protection.
J'ai défendu des amendements visant à suspendre le droit de visite et d'hébergement.
J'ai défendu des amendements tendant à permettre de dissimuler l'adresse de la mère et des enfants pendant la durée de l'ordonnance de protection.
À chaque fois, ces amendements ont été rejetés et par le Gouvernement et par la majorité sénatoriale.
Après le meurtre terroriste d'Arras, le ministre de l'intérieur a dit : « Le texte immigration tel que nous l'avons proposé et tel qu'il a été adopté par la commission des lois du Sénat nous aurait permis d'obtenir la levée des protections du terroriste d'Arras. »
Je ne peux pas m'empêcher de penser que si mes amendements avaient été adoptés, ces enfants ne se seraient pas trouvés dimanche dernier au domicile de leur père. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE-K, ainsi que sur des travées du groupe RDSE.)
- page 10404
Page mise à jour le