Question de M. RUELLE Jean-Luc (Français établis hors de France - Les Républicains-R) publiée le 16/11/2023

M. Jean-Luc Ruelle interpelle Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la suspension des adoptions internationales dans plusieurs pays d'Afrique. Un arrêté du 17 octobre 2023 entérine la décision temporaire prise en octobre 2022 de suspendre les procédures d'adoptions d'enfants malgaches. Un arrêté identique a été pris le 13 septembre 2023, concernant les enfants du Burkina Faso. Ces actes récents s'appuient sur la convention internationale des droits de l'enfant du 20 novembre 1989, la convention de La Haye du 29 mai 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale et le code de l'action sociale et des familles, notamment son article R. 148-10, sans qu'il ne soit fourni d'explications sur la motivation de ces suspensions. Pourtant, ces actes affectent fortement les projets d'adoption de nombreuses familles françaises. Il aimerait connaître les raisons ainsi que le processus décisionnel aboutissant à ces suspensions et les critères y présidant. Il l'interroge sur la poursuite des procédures d'adoption qui étaient sur le point d'aboutir. Enfin, il lui demande si ces suspensions à répétition correspondent à une remise en cause globale du cadre de l'adoption internationale.

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Transmise au Ministère de l'Europe et des affaires étrangères


Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 22/02/2024

Les décisions de suspension des adoptions internationales sont justifiées par la nécessité de faire prévaloir l'intérêt supérieur de l'enfant, principe fondamental proclamé par les conventions internationales auxquelles la France est partie, en particulier la Convention internationale des droits de l'enfant de 1989 et la Convention de La Haye du 29 mai 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale, ratifiée en 1998. Ces décisions sont instruites par la Mission de l'adoption internationale (MAI), autorité centrale au sein du ministère de l'Europe et des affaires étrangères (MEAE), chargée d'orienter et de coordonner l'action des administrations et des autorités compétentes en matière d'adoption internationale. La MAI exerce une mission permanente de veille, de régulation et d'orientation sur les questions de l'adoption internationale et notamment sur les conditions de l'adoption internationale dans les différents pays d'origine, au regard du respect des droits des enfants. Ainsi, elle peut être amenée à suspendre les adoptions internationales en fonction des circonstances et des garanties apportées par les procédures mises en oeuvre par les pays d'origine des enfants. Pour cela, outre son expertise, la MAI s'appuie sur l'évaluation de la situation par nos ambassades et le réseau consulaire, ainsi que sur l'expertise des autorités centrales des autres pays d'accueil voisins et des organisations internationales comme l'UNICEF ou le Service social international. Il est admis par tous les observateurs des droits de l'Enfant que le maintien de l'adoption internationale est fortement déconseillé dans les situations d'urgence ou lorsque les conditions de sécurité ne sont pas réunies. Les situations de crise ne permettent pas de garantir la sécurité et l'éthique des procédures ; elles sont un facteur propice aux pratiques frauduleuses et aux violations des droits des enfants. C'est pour cette raison que les adoptions internationales ont été suspendues en Haïti en mars 2020, en Russie et en Ukraine dès mars 2022, ainsi qu'au Burkina Faso et au Mali plus récemment, États dans lesquels la France a déconseillé formellement tout déplacement. La France a également suspendu les adoptions internationales à Madagascar en octobre 2022, suspension reconduite en 2023, en raison de fragilités de l'autorité centrale pour l'adoption relevées par le rapport du Comité des droits de l'enfant des Nations unies du 9 mars 2022. Les garanties nécessaires en termes de sécurité et d'éthique des procédures n'apparaissent pas réunies en l'espèce. Ces décisions de suspension ne concernent pas les procédures sur le point d'aboutir, puisqu'elles n'affectent pas les familles qui étaient déjà apparentées à un enfant à la date de publication des arrêtés. Ces familles peuvent mener leur procédure d'adoption jusqu'à son terme. Les autres familles ne pourront poursuivre leur projet d'adoption dans un pays ayant fait l'objet d'un arrêté de suspension. Le MEAE a bien conscience que ces décisions sont difficiles pour ces familles engagées dans le processus depuis de longs mois ou années. Elles s'imposent cependant, par précaution, dans l'intérêt supérieur des enfants qui doivent être protégés de tout risque de dérives. Afin de se prémunir contre d'importantes dérives déjà constatées par le passé, la plus grande vigilance s'impose dans ce domaine où le risque de pratiques illicites ne saurait être écarté. Dans ce contexte, il est de la responsabilité de l'État de n'ouvrir la possibilité pour les candidats de s'engager dans ce processus que dans les pays qui remplissent des garanties et standards éthiques élevés.

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