Question de Mme GRÉAUME Michelle (Nord - CRCE-K) publiée le 03/10/2024

Mme Michelle Gréaume attire l'attention de M. le Premier ministre sur les perspectives et les projets nationaux et européens en matière de traitement des déchets amiantés.
Scandale sanitaire historique, l'amiante n'a pas fini de faire parler de lui. D'abord par le nombre effarant de victimes : 100 000 à l'horizon 2025, victimes auxquelles s'oppose une immunité pénale injuste et incompréhensible, qui empêche toute réparation juste pour les malades et leurs familles. Ensuite, par l'immense chantier ouvert du désamiantage et du traitement de ses déchets, véritable enjeu de santé publique et de sécurité sanitaire, au regard de la dangerosité de ce matériau.
Aujourd'hui, 97 % de l'amiante et des déchets dérivés sont enfouis dans le sol, sans inertage préalable, avec tous les risques que cela comporte. Des solutions alternatives existent pourtant ou sont en cours de développement, notamment l'inertage par vitrification qui détruit totalement l'amiante, pratiqué dans une usine unique en Europe implantée dans les Landes.
Or, en l'absence de coordination publique, aucune d'entre elles n'est envisagée ni encouragée. Dès 2014, un rapport sénatorial préconisait déjà la mise en place d'une structure interministérielle chargée de cette coordination.
Allant plus loin, mais dans le même esprit, des associations de victimes proposaient la création d'un pôle public d'éradication de l'amiante, regroupant acteurs publics et privés de la filière du désamiantage.
En réalité, et malgré plusieurs plans interministériels amiante (PAIA) successifs, aucune grande décision n'a été prise depuis des années.
Au terme du dernier PAIA, en 2018, devait être conduite une évaluation par l'inspection générale de l'administration (IGA), l'inspection générale des affaires sociales (IGAS) et le conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD), dont les conclusions étaient prévues pour le 1er semestre 2019. Aujourd'hui, les sites internet de ces différents organes renvoient systématiquement les uns vers les autres, sans mise à jour des informations qu'ils contiennent.
En décembre 2021, le conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) et le conseil général de l'économie (CGE) faisaient paraître un rapport, comme l'exigeait la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire (dite loi AGEC) dans son article 114, pour « le traitement des déchets d'amiante, afin de ne pas avoir à les stocker ». Une feuille de route devait être publiée en 2023, elle n'a toujours pas été rendue publique, et il semble qu'aucun projet ne soit en cours pour développer des méthodes alternatives à l'enfouissement.
Cette inaction couplée aux coûts importants demandés par les entreprises spécialisées pour démonter et évacuer les déchets conduisent à des comportements inadaptés et dangereux et à des dépôts sauvages de déchets hautement toxiques dans l'espace public, sans aucune forme de protection pour l'environnement alentour.
C'est la raison pour laquelle elle lui demande de bien vouloir lui préciser les suites qu'il compte donner aux différentes préconisations émises depuis 10 ans, et les intentions du Gouvernement en faveur de la constitution d'une véritable filière de repérage, de détection et d'éradication de l'amiante.

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Transmise au Ministère de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques


Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé de la consommation publiée le 06/11/2024

Réponse apportée en séance publique le 05/11/2024

M. le président. La parole est à Mme Michelle Gréaume, auteure de la question n° 019, transmise à Mme la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques.

Mme Michelle Gréaume. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, par le nombre de ses victimes - 100 000 à l'horizon 2025 -, l'amiante constitue un scandale sanitaire historique qui n'a pas fini de faire parler de lui.

Devant nous est ouvert l'immense chantier du désamiantage et du traitement des déchets, véritable enjeu de santé publique et de sécurité sanitaire compte tenu de la dangerosité de ce matériau. Le volume de ces déchets est estimé entre 300 000 et 600 000 tonnes par an. La fourchette est large faute de chiffrage précis, mais il faut savoir que 97 % de ces déchets sont enfouis dans le sol.

Quelques solutions alternatives sont en cours de développement ou existent déjà, notamment l'inertage par vitrification, qui détruit totalement l'amiante.

Dès 2014, un rapport sénatorial préconisait la mise en place d'une structure interministérielle chargée d'une coordination publique. Allant plus loin dans le même esprit, des associations de victimes proposaient la création d'un pôle public d'éradication de l'amiante regroupant acteurs publics et privés de la filière du désamiantage.

La feuille de route pour le traitement des déchets d'amiante, censée éviter leur stockage et qui avait été inscrite dans la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, était attendue pour 2023. Elle n'a toujours pas été rendue publique et il semble qu'aucun projet ne soit en cours pour imaginer, tester et développer au niveau adéquat des méthodes alternatives à l'enfouissement.

J'ajoute que cette inaction, couplée aux coûts importants demandés par les entreprises spécialisées pour démonter et évacuer les déchets, conduit à des comportements inadaptés et dangereux, avec notamment des dépôts sauvages dans l'espace public de déchets hautement toxiques.

Ma question est donc double, madame la secrétaire d'État : quelles suites comptez-vous donner aux différentes préconisations émises depuis dix ans en matière de recyclage des déchets d'amiante ? Pouvez-vous préciser les intentions du Gouvernement, si elles existent, quant à la constitution d'une véritable filière de repérage, de détection et d'éradication de l'amiante ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Laurence Garnier, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargée de la consommation. Madame la sénatrice Gréaume, vous interrogez le Gouvernement sur la gestion des déchets amiantés, qui sont dangereux et dont les modalités de transport, de traçabilité et de traitement sont particulièrement encadrées au niveau tant français qu'européen.

Pour en améliorer la collecte, la loi antigaspillage de 2020 est venue renforcer les moyens d'action du maire et les sanctions contre les responsables de dépôts sauvages de déchets. Cette loi a également conduit à la mise en place, en 2023, de la filière à responsabilité élargie des producteurs des produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment (REP PMCB), afin de faciliter, notamment, la prise en charge des déchets amiantés issus de ces activités.

La solution aujourd'hui privilégiée à l'échelon européen reste l'enfouissement. En effet, cette technique, bien que ne permettant pas de détruire les fibres d'amiante, constitue un moyen sûr de traiter ces substances en permettant d'éviter leur dispersion dans l'environnement.

Pour autant, madame la sénatrice, les solutions alternatives à l'enfouissement font l'objet d'une attention particulière en France. L'inertage par vitrification, que vous avez évoqué, reste d'une capacité très limitée, avec des coûts associés bien supérieurs au stockage.

Fin 2021, les travaux de l'inspection générale de l'environnement et du développement durable (Igedd) et du Conseil général de l'économie, de l'industrie, de l'énergie et des technologies (CGEIET) ont permis d'identifier en France quatre projets de procédés thermochimiques alternatifs. L'efficacité de ces procédés doit maintenant être confirmée. Ainsi, l'État encadre actuellement, avec l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (Ineris), une étude visant à s'assurer de leur viabilité technique. Des expérimentations sont en cours sur notre territoire.

Des travaux sont également en cours au niveau européen, sous l'égide de la Commission, sur les différentes technologies de traitement des déchets amiantés.

Vous le voyez, le Gouvernement est résolument engagé pour que ces déchets soient pris en charge dans les meilleures conditions, le cas échéant grâce à des solutions innovantes de nature à réduire le recours à la mise en décharge.

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