Question de Mme JACQUEMET Annick (Doubs - UC) publiée le 03/10/2024

Mme Annick Jacquemet attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les aides de l'État à destination des secteurs considérés comme exposés à un risque réel de fuite de carbone en raison des coûts des émissions indirectes.

À l'origine, la directive 2003/87/CE du Parlement et du Conseil du 13 octobre 2003, complétée par la décision 2011/278/UE de la Commission européenne du 27 avril 2011, avait pour but d'allouer transitoirement des quotas à titre gratuit aux installations des secteurs et sous-secteurs exposés à un risque de fuite de carbone. L'objectif étant de préserver l'avantage environnemental des réductions d'émissions dans l'Union alors que les mesures prises par des pays tiers n'incitent pas de manière comparable les entreprises à réduire leurs émissions.

Jusqu'à plusieurs évolutions réglementaires, notamment en 2012 (2012/C158/04 Annexe II) et en 2014 (2014/746/UE Annexe), les secteurs de la production de fonte ou d'acier étaient initialement intégrés dans la liste des secteurs concernés, à l'instar de la sidérurgie et des autres secteurs de transformation des métaux.

Si, depuis la communication de la Commission européenne du 23 septembre 2020 (2020/C317/01, annexe I, ligne 12), le secteur de la fonderie de fonte (2451) est à nouveau assimilé à un secteur exposé à un risque réel de fuite de carbone en raison des coûts des émissions indirectes, ce n'est pas le cas du secteur de la fonderie d'acier (2452).

Cette situation pénalise les acteurs du secteur de la fonderie d'acier tant pour le gaz que pour l'électricité, dont les prix ont fortement augmenté depuis plusieurs mois, en créant une concurrence déloyale avec, d'une part, les fonderies de fonte sur certains produits et, d'autre part, des concurrents mondiaux dans la fonderie d'acier. Elle peine à comprendre cette différence de traitement dans la mesure où les process en fonderie d'acier sont similaires à ceux de la fonderie de fonte (seul le pourcentage de carbone change entre ces deux alliages de fer et de carbone).

Compte tenu de la nécessité de préserver notre tissu industriel et les nombreux emplois du secteur d'activité de la fonderie d'acier, elle souhaite savoir si le Gouvernement entend agir pour que le code de la nomenclature statistique des activités économiques dans la Communauté européenne (NACE) 2452 soit réintégré à la liste des secteurs exposés à un risque réel de fuite de carbone. En cas de réponse négative, elle lui demande les raisons qui motivent une telle position.

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Transmise au Ministère délégué auprès de la ministre de la transition écologique, de la biodiversité et des négociations internationales sur le climat et la nature, chargé de la transition écologique


Réponse du Ministère délégué auprès de la ministre de la transition écologique, de la biodiversité et des négociations internationales sur le climat et la nature, chargé de la transition écologique publiée le 27/11/2025

Le marché carbone européen EU ETS a été récemment révisé de façon majeure dans le cadre du paquet « Fit for 55 », grâce notamment au travail de la Présidence Française du Conseil de l'UE au premier semestre 2022. La révision implique notamment un objectif 2030 à -62 % de réductions d'émission (contre -43 % précédemment), l'inclusion du transport maritime, et la baisse progressive des quotas gratuits pour les secteurs soumis au Mécanisme d'Ajustement Carbone aux Frontières. Les critères déterminant, si un secteur est à risque de fuites de carbone, n'ont en revanche pas été modifiés, ce qui implique que la liste des secteurs à risque de fuites de carbone ne sera pas amendée suite à la réforme et ne pourra pas réintégrer le secteur de la fonderie d'acier (code NACE 2452). Le secteur de fonderie d'acier n'est en effet plus sur la liste des secteurs à risque de fuites de carbone depuis 2021. Il avait été inclus dans la première liste en 2013 et maintenu dans sa mise à jour pour 2015-2020 sur la base de critères qualitatifs. Le critère d'intensité de risque de fuite de carbone pour ce secteur, à 0,016 kgCO2/eurosValeur ajoutée (4 % d'intensité du commerce international multiplié par 0,4 kgCO2/eurosValeur ajoutée), est très éloigné du seuil de 0,2 qui aurait rendu son inclusion dans la liste automatique, mais aussi de 0,15 qui aurait permis de faire une demande d'inclusion basée sur des critères qualitatifs (critères et seuils ayant été définis lors de la réforme du marché ETS précédente, en 2018, pour la période 2021-2030, et non modifiés par la réforme récente comme indiqué ci-dessus). A titre de comparaison, le critère d'intensité de risque de fuite de carbone pour le secteur de la fonderie de fonte (code NACE 2451) est à 0,49 (41 % d'intensité du commerce international multiplié par 1,9 kgCO2/eurosVA). En revanche, les marchandises issues du secteur de fonderie d'acier relèveront du mécanisme d'ajustement carbone aux frontières (MACF) (code NC 72 sauf quelques ferro-alliages ; et codes NC 73 pour des produits de l'aval comme les tubes en fonte), qui entrera pleinement en vigueur en 2026 après une période de transition. Cela signifiera que ces marchandises entrant dans l'UE seront soumises à un prix du carbone équivalent à celui payé par les producteurs européens. Ce mécanisme montera progressivement en puissance avec l'extinction progressive des quotas gratuits, et permettra une protection contre les fuites de carbone plus efficace.

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