Question de Mme VOGEL Mélanie (Français établis hors de France - GEST) publiée le 03/10/2024
Mme Mélanie Vogel attire l'attention de Mme la ministre de l'agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt sur le contournement de l'interdiction des expérimentations animales pour des produits cosmétiques.
Des tests de produits cosmétiques sur des animaux ont été progressivement interdits pour toute l'Union européenne. Après que la directive 2003/15/EC a interdit des tests sur des animaux pour des produits cosmétiques finis, l'interdiction a été progressivement élargie et couvre, depuis le 11 mars 2013, également des expérimentations animales de substances utilisées pour des cosmétiques et la commercialisation de produits importés développés en utilisant des expérimentations animales.
Elle lui rappelle que ces interdictions européennes visent à lutter contre la maltraitance animale étant donné que ces tests sont particulièrement cruels pour les animaux. En effet, les animaux passent toute leur vie en captivité, vivent dans des conditions particulièrement contraignantes et doivent subir des protocoles de tests qui ne tiennent nullement compte du bien-être animal. Le plus souvent, ils sont tués juste après la fin des tests pour être disséqués.
Qui plus est, leurs terribles souffrances s'avèrent inutiles, car les réactions des souris, des rats, des cobayes, des lapins ou des autres animaux utilisés pour ces tests diffèrent souvent sensiblement des réactions que la substance testée entraîne en contact avec le corps humain, ce qui rend les résultats de ces tests sur des animaux peu exploitables. En revanche, il existe généralement des alternatives à ces expérimentations animales pour la conception de produits cosmétiques. Entre autres, des essais in vitro des molécules utilisées ou des modélisations informatiques peuvent permettre d'évaluer le produit en cours de conception. En outre, il se peut même que les données soient déjà disponibles, mais qu'un manque d'échange des informations entre les entreprises ne permette pas leur prise en compte. Dans ce cas, il suffit de faciliter le partage de connaissances.
Elle déplore que les expérimentations animales continuent malgré la volonté du législateur européen d'y mettre fin. L'interdiction est en effet contournée par des producteurs qui testent leurs produits dans des établissements clandestins en dehors de l'UE, entre autres en Chine. De plus, des expérimentations animales continuent d'être autorisées dans l'UE et pour des produits importés en vertu du règlement n° 1907/2006 (REACH).
Alors que l'interdiction des expérimentations animales pour des produits cosmétiques avait été actée avant l'adoption du règlement REACH, les tests sur des animaux pour des produits cosmétiques sont ainsi de nouveau organisés sur le fondement de ses dispositions. De cette manière, grand nombre de producteurs exploitent cette contradiction afin de continuer de conduire des expérimentations animales, rendant leur interdiction prévue dès 2003 non effective dans les faits.
Pour toutes ces raisons, elle souhaite connaître quelles actions le Gouvernement met en place pour développer des alternatives aux tests de substances chimiques utilisées dans des produits cosmétiques sur des animaux. En outre, elle aimerait savoir si elle envisage d'interdire les tests sur des animaux en France pour la conception de produits cosmétiques.
- page 3369
Transmise au Ministère de l'agriculture, de l'agro-alimentaire et de la souveraineté alimentaire
Réponse du Ministère de l'agriculture, de l'agro-alimentaire et de la souveraineté alimentaire publiée le 04/12/2025
La Commission européenne a rappelé, au mois de juillet 2023, dans sa réponse à l'initiative citoyenne européenne « Pour des cosmétiques sans cruauté - S'engager en faveur d'une Europe sans expérimentation animale » que l'arrêt de l'utilisation d'animaux en recherche demeure l'objectif ultime mais qu'en l'état actuel des connaissances scientifiques, il n'est pas possible de fixer une échéance sans amoindrir la protection des personnes et de l'environnement. À ce jour, la liste des méthodes alternatives validées par EURL-ECVAM, instance officielle de la Commission européenne, fait encore apparaître un grand nombre de domaines, comme l'étude de la toxicité par administrations répétées, pour lesquels il n'existe pas d'alternatives. Aussi l'approche des méthodes alternatives reste centrée sur le principe des 3R : remplacer (ne pas utiliser d'animaux lorsque c'est scientifiquement possible), réduire (diminuer le nombre d'animaux utilisés en préservant la possibilité d'interpréter les résultats obtenus), raffiner (optimiser les conditions d'utilisation des animaux afin de préserver leur bien-être). Le FC3R, centre français dédié au principe des 3R, créé par la loi de programmation de la recherche de 2020, est l'acteur central de la mise en oeuvre des méthodes alternatives. Il dispose maintenant d'un budget d'un million d'euros provenant de ses membres et des ministères chargés de la recherche et de l'agriculture. Sur le remplacement, le FC3R a réalisé une enquête auprès des laboratoires sur les approches substitutives. Cette enquête permettra de mettre à jour l'état des lieux sur le développement et la diffusion des méthodes alternatives à l'expérimentation animale en France. Le FC3R a organisé trois appels à projet ayant suscité de nombreuses réponses. Le troisième appel à projet concerne les approches numériques et se terminera ce mois de décembre. L'agence nationale de la recherche finance également différents projets qui pourront contribuer à terme au développement de recherches sans animaux : par exemple le programme Track-NAFLD de modèle de foie sur puce multicellulaire couplé à la biologie systémique et à un modèle mathématique pour suivre la stéatose hépatique non alcoolique. Sur la réduction, le FC3R conduit différentes actions à destination des chercheurs qui contribuent à réduire le nombre d'animaux utilisés dans les projets. Il organise des webinaires sur la planification expérimentale et l'amélioration des plans d'étude ou encore sur l'optimisation de l'utilisation des données statistiques. Le centre développe parallèlement une base de données sur les résultats non publiés (« résultats négatifs ») qui permettra d'améliorer le partage des connaissances et des informations au sein de la communauté scientifique et d'éviter des réplications non nécessaires de procédures scientifiques. Sur le raffinement, la commission nationale de protection des animaux utilisés à des fins scientifiques et le comité national de réflexion éthique sur l'expérimentale animale ont une activité soutenue et continue. Ces deux instances se réunissent plusieurs fois par an et leurs réunions permettent des échanges fructueux entre les ministères, les associations de protection animale et les professionnels de la recherche. Ces réunions sont complétées par plus de dix groupes de travail sur des sujets spécifiques. Ces deux instances produisent des avis et des recommandations accessibles sur le site du ministère chargé de la recherche et qui portent entre autres sur l'agrément des comités d'éthique en expérimentation animale ou sur des sujets plus techniques (production d'anticorps d'origine animale, utilisation des animaux en enseignement ). Le ministère chargé de l'agriculture attache également une vigilance particulière à la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques par le biais d'inspections des établissements utilisant des animaux à des fins scientifiques dans le domaine de la protection animale.
- page 5918
Page mise à jour le