Question de M. BITZ Olivier (Orne - UC) publiée le 03/10/2024
M. Olivier Bitz attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur le monopole des géomètres-experts et ses conséquences sur les délais et les coûts des projets auxquels ils concourent.
La loi n° 46-942 du 7 mai 1946 réglementant l'ordre des géomètres instaure un monopole pour la profession de géomètre-expert sur les travaux et études permettant de fixer les limites foncières. Les géomètres-topographes peuvent quant à eux réaliser d'autres travaux sans lien avec le bornage des terrains.
Ce monopole semble aujourd'hui largement dépassé. Les bornages sont désormais plus simples à mener que les travaux topographiques, pourtant soumis à la concurrence. L'autorité de la concurrence a d'ailleurs invité le législateur et le Gouvernement à remettre en cause ce monopole par un avis n° 18-A-02 du 28 février 2018. La situation actuelle alourdit en effet le coût des services pour les particuliers et les professionnels. Ceci contribue également au ralentissement des procédures. De plus, cela génère un risque juridique pour d'autres professionnels, notamment pour les géomètres-topographes.
Il souhaiterait connaître les mesures envisagées par le Gouvernement dans le cadre d'une loi à venir dédiée aux professions réglementées.
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Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie publiée le 05/12/2024
La problématique du monopole de l'activité des géomètres-experts en matière de délimitation de biens fonciers ici soulevée s'inscrit dans des réflexions d'ensemble sur les mesures qui doivent permettre de simplifier et de moderniser l'activité des professions réglementées. La question posée porte en particulier sur le domaine d'intervention exclusif dont bénéficie la profession de géomètre-expert, au regard de la sécurisation juridique des travaux menés par d'autres opérateurs, tels que les géomètres topographes, et sur l'exercice de cette activité en termes de délais et de coûts pour les bénéficiaires de ces prestations. Il doit être rappelé en préalable que les motifs d'intérêt général qui avaient conduit le législateur à mettre en place un monopole confié aux géomètres-experts sur les opérations de délimitation des biens fonciers demeurent toujours pertinents aujourd'hui : assurer la plus grande impartialité à l'exercice des missions qui permettent aux ayant-droits de jouir de manière incontestable de leur droit de propriété. Ainsi le respect des exigences de professionnalisme et de probité, assuré par ce système de monopole légal, adossé à une régulation confiée à un ordre professionnel, demeure essentiel. Par ailleurs, il convient également d'avoir à l'esprit que la part d'activité des géomètres-experts relevant de ce monopole légal est relativement réduite (de l'ordre de 20%) au regard de l'ensemble des tâches qui leur sont habituellement confiées. Pour ces autres missions, la concurrence avec d'autres professionnels, tels que notamment les géomètres-topographes, pour des opérations sans incidence sur les limites foncières, est possible et réelle. Les services du ministère sont néanmoins soucieux de l'importance de promouvoir la concurrence et de renforcer l'efficacité économique et la fluidité du marché pour toutes les prestations topographiques, dont le fonctionnement n'est pas sans générer des dissensions entre les différents intervenants. À la suite de l'avis de l'Autorité de la concurrence (ADLC) du 28 février 2018 qui préconisait l'adoption de mesures destinées à clarifier le périmètre du monopole des géomètres-experts et le champ des prestations pouvant être réalisées par ces deux catégories d'acteurs dans un cadre concurrentiel, de nombreux échanges sont intervenus entre les professionnels concernés et les administrations compétentes de l'Etat (notamment le ministère de l'économie et le ministère en charge du logement), afin d'envisager des pistes de réforme. A ce stade, les professionnels s'accordent sur une maitrise plus facile aujourd'hui qu'en 1946 de la technicité des opérations considérées, soulignée par l'avis de l'ADLC. Cependant les compétences juridiques nécessaires pour que les géomètres-experts puissent exercer leurs missions dans des environnements de nature diverse et parfois complexes, ainsi que leurs obligations déontologiques, justifient toujours le maintien de cette profession réglementée et le monopole dont elle bénéficie pour les opérations relatives à la délimitation des biens fonciers. Des échanges sont néanmoins en cours avec les professionnels pour assouplir les conditions d'accès à la profession de géomètre-experts, afin d'accroitre leur nombre sans abaisser le niveau d'accès à cette profession. Le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche travaille en lien avec le ministère en charge du logement (Direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature (DGALN), chargée de la tutelle de l'Ordre des géomètres-experts) ainsi à des évolutions des conditions d'obtention de diplôme délivré par le Gouvernement (DPLG) : extension du délai avant soutenance du mémoire, nombre accru de passages possibles à l'examen, etc., facilitant, de fait, pour la catégorie des géomètres-topographes, l'accès à la profession de géomètres-expert, tout en tenant compte des enjeux nouveaux de la profession et en maintenant un degré d'exigence adéquat. Avec le même objectif d'augmenter le nombre de géomètres-experts, des aménagements pourraient également intervenir pour améliorer les « passerelles » offrant la possibilité à des professionnels faisant la preuve de leurs compétences de se voir reconnaitre le statut de géomètre-expert. Au-delà de ces évolutions sur les conditions d'accès à la profession, les services restent attentifs aux bénéfices concurrentiels potentiels d'une plus grande ouverture du marché. Des réformes en ce sens ne pourront en tout état de cause pas intervenir sans un maintien des éléments fondamentaux garantissant la fiabilité et l'incontestabilité des opérations de délimitation des biens fonciers. En outre leur opportunité ne pourrait être retenue qu'en présence de données chiffrées et objectivées sur l'effet économique bénéfique d'un aménagement de ce monopole, qui font défaut à ce stade.
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