Question de M. CAMBIER Guislain (Nord - UC) publiée le 03/10/2024
M. Guislain Cambier attire l'attention de Mme la ministre de la santé et de l'accès aux soins concernant la pénurie de médicaments en France.
La situation s'aggrave de jour en jour, les termes tels que « tension d'approvisionnement » et « rupture de stock » devenant monnaie courante dans les mises à jour de l'agence nationale de sécurité du médicament (ANSM). Les chiffres sont alarmants, un tiers des Français a été confronté à une pénurie de médicaments en 2023.
Toutes les catégories de médicaments sont touchées, depuis les antibiotiques et les anticancéreux jusqu'aux corticoïdes, aux anesthésiques locaux, et aux traitements pour le diabète, les maladies cardiovasculaires, l'ostéoporose et les vertiges. Cette situation génère de l'angoisse chez les patients tout en créant une pression chronophage sur les pharmaciens qui doivent constamment trouver des alternatives sans visibilité ni perspective d'amélioration.
L'impact s'étend aux conditions d'exercice des médecins, qui doivent ajuster leurs prescriptions ou rééquilibrer les traitements ; mais aussi sur la santé publique notamment avec un développement prévisible de l'antibiorésistance.
Certains patients se voient contraints d'obtenir des médicaments à l'étranger sans prise en charge par l'assurance maladie, engendrant des inégalités d'accès aux soins.
Des comportements inquiétants émergent, tels que le troc de médicaments sur les réseaux sociaux, par crainte de manquer de traitements parfois vitaux, une pratique extrêmement dangereuse. Plus grave encore, cette pénurie pousse certains patients à chercher leur traitement sur des sites internet, une pratique interdite en France, avec une probabilité élevée de tomber sur des médicaments falsifiés.
De plus, nous constatons que les situations épidémiques exceptionnelles ne sont pas suffisamment anticipées.
Face à cette situation, source d'anxiété, de défiance et de perte de confiance en notre système de soins, une action urgente est nécessaire.
Il lui demande des informations sur les mesures qui doivent être prises rapidement afin de relancer l'industrie pharmaceutique en France.
- page 3595
Réponse du Ministère de la santé et de l'accès aux soins publiée le 12/12/2024
Compte tenu de l'augmentation des signalements de ruptures et risques de ruptures de stock constatée ces dernières années, indépendamment de la pandémie de Covid-19, le ministère du travail, de la santé et des solidarités a réuni un nouveau comité de pilotage le 21 février 2024, lequel a acté une nouvelle feuille de route 2024-2027 pour garantir la disponibilité des médicaments et assurer à plus long terme une souveraineté industrielle. Depuis 2019 et à plus forte raison pendant la crise sanitaire, les travaux entrepris par les ministères chargés de la Santé et de l'Industrie, notamment dans le cadre de la feuille de route précédente ont permis de renforcer la lutte contre les pénuries de produits de santé dans le prolongement de la précédente feuille de route 2019-2022 qui a marqué des avancées majeures (plan de gestion des pénuries pour les médicaments d'intérêt thérapeutique majeur, obligation de détention de stocks de sécurité notamment). En outre, une liste de 450 médicaments dits « essentiels » car stratégiques pour la santé des patients a été établie sur la base des recommandations des sociétés savantes. Cette liste, publiée le 13 juin 2023, est évolutive. À partir de cette liste, des travaux spécifiques ont été engagés pour mieux garantir la disponibilité des médicaments concernés (suivi renforcé sur les capacités d'approvisionnement, analyse des pratiques de prescription et des tendances d'achat, cartographie et renforcement des chaînes de production, mise en oeuvre de solutions de production de secours, actions de prévention, etc.). Le Président de la République a également annoncé, le 13 juin 2023, la relocalisation de la production d'une partie de ces médicaments essentiels. Par ailleurs, une charte d'engagement initiée conjointement par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et le Conseil national de l'Ordre des pharmaciens a été signée le 22 novembre 2023 par les acteurs de la chaîne du médicament pour un accès équitable des patients aux médicaments faisant l'objet de tensions d'approvisionnement. De plus, l'ANSM en lien avec la direction générale de la santé a établi un plan hivernal (sécurisation des stocks de médicaments majeurs de l'hiver, amélioration de la mise à disposition des données, responsabilisation de l'ensemble des acteurs du soin et des patients, etc.) pour anticiper d'éventuelles tensions et renforcer notre capacité à faire face à des pics saisonniers de consommation de médicaments. Ce plan hivernal inclut une phase d'anticipation qui vise à sécuriser les approvisionnements afin de garantir la couverture des besoins et à communiquer sur les gestes barrières et les règles de bon usage des médicaments. Sur le plan législatif, la Loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2024 a prévu plusieurs mesures pour lutter contre les tensions d'approvisionnement, notamment l'obligation, sous peine de sanction financière, pour les laboratoires pharmaceutiques de chercher un repreneur en cas d'arrêt de commercialisation d'un médicament d'intérêt thérapeutique majeur. La LFSS pour 2024 renforce également les pouvoirs de l'ANSM pour ce qui concerne la requalification d'un médicament en médicament d'intérêt thérapeutique majeur et pour réguler les tensions, en lui permettant, par exemple, de privilégier un circuit de distribution ou des contingentements. Par ailleurs, elle crée un statut de préparations officinales spéciales permettant aux pharmaciens de pallier les pénuries. Enfin, au niveau européen, le règlement (UE) n° 2022/123 du 25 janvier 2022 qui a introduit des dispositions visant à prévenir et gérer les pénuries de médicaments et de dispositifs médicaux considérés comme critiques, en renforçant le rôle de l'Agence européenne des médicaments est entré en application. Il s'agit là d'une première étape visant à mettre en place un cadre renforcé pour la notification et la surveillance des pénuries de médicaments et de dispositifs médicaux lors d'urgences de santé publique ou d'événements majeurs dans l'Union européenne. De même, dans le cadre du projet de révision de la législation pharmaceutique présenté par la Commission européenne, des mesures visant à anticiper et réduire les tensions d'approvisionnement sont prévues, reprenant une partie des dispositions françaises (obligation d'avoir des plans de prévention et de gestion des pénuries pour les laboratoires, liste de médicaments critiques, obligation de déclaration des ruptures notamment).
- page 4861
Page mise à jour le