Question de Mme MORIN-DESAILLY Catherine (Seine-Maritime - UC) publiée le 03/10/2024

Mme Catherine Morin-Desailly attire l'attention de Mme la ministre de la culture sur le dispositif « Culture à l'hôpital » et, plus largement, sur les programmes d'accès à la culture dans les hôpitaux.

Ceux-ci ont été initiés dès 1999 par la signature d'une convention entre la ministre de la culture et de la communication et le secrétaire d'État à la santé et à l'action sociale, donnant naissance au programme « Culture à l'hôpital ». Dès lors, de nombreux projets et expérimentations se sont développés dans plusieurs établissements hospitaliers et des personnels dédiés ont parfois été recrutés.

Convaincue de la nécessité de faire de l'hôpital un lieu plus humain et tourné vers la cité, elle a largement soutenu ces dispositifs. En 2009, lors de l'examen de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, elle avait ainsi déposé plusieurs amendements, tous adoptés. Ils visaient d'une part, à introduire dans les contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens des établissements publics de santé un volet culturel et d'autre part, à confier aux agences régionales de santé (ARS), créées par cette loi, la mission « d'encourager et [de] favoriser, au sein des établissements, l'élaboration et la mise en oeuvre d'un volet culturel ».

En 2010, une deuxième convention, signée par la ministre de la santé et des sports et le ministre de la culture et de la communication, a réaffirmé l'importance d'une action interministérielle, élargi les dispositifs à d'autres publics et établissements et les a ouverts aux collectivités territoriales. Elle a également été déclinée au niveau territorial sous la forme de conventions régionales conclues entre les directions régionales des affaires culturelles (DRAC) et les ARS qui ont désigné en leur sein un référent chargé du domaine « culture et santé ».

Cette dernière convention est caduque depuis 2019, soit cinq ans ! Elle s'interroge donc sur un tel délai. En outre, cette convention semblant être enfin en cours de renouvellement, elle souhaite un bilan détaillé de la précédente convention, notamment eu égard au rapprochement concret entre les DRAC et les ARS.

Elle demande également un point d'étape des travaux. Alors que depuis cette période, les « droits culturels » ont été introduits dans la loi à deux reprises, dans la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant sur la nouvelle organisation territoriale de la République et la loi n° 2015-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine, elle demande comment ceux-ci sont pris en compte pour renforcer, précisément, les politiques en faveur d'une culture accessible aux personnes qui en sont éloignées, en raison de leur santé, de leur handicap ou de leur grand âge.

Enfin, elle demande au Gouvernement s'il envisage d'augmenter les crédits consacrés à ces programmes ou d'ouvrir leur financement au mécénat d'entreprise pour assurer leur continuité.

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Réponse du Ministère de la culture publiée le 21/11/2024

La politique Culture/Santé, médico-social et handicap a pour objectif principal de favoriser la participation à la vie culturelle de l'ensemble des personnes hospitalisées, hébergées en établissements médico-sociaux et/ou en situation de handicap, ainsi qu'à leurs proches et aux personnels soignants. Le ministère de la culture pilote la mise en oeuvre de cette politique, notamment grâce à une dynamique de travail interministérielle dont il est le moteur. En effet, une complète implication du ministère de la santé et de l'accès aux soins, ainsi que du ministère des solidarités, de l'autonomie et de l'égalité entre les femmes et les hommes (notamment le pôle Santé-agences régionales de santé (ARS) au sein du secrétariat général des ministères sociaux) est primordiale pour la qualité du partenariat interministériel à l'échelon central et déconcentré : directions régionales des affaires culturelles (DRAC) et ARS. La mise en oeuvre de cette politique se traduit par : la construction d'un cadre d'action en interministériel ; le soutien à des acteurs nationaux (associations) ; le soutien aux projets dans les territoires par les DRAC et les ARS ; la mobilisation des opérateurs sous tutelle du ministère de la culture. Une première convention a été signée en 1999 entre le ministère de la culture et de la communication et le secrétariat d'État à la santé et à l'action sociale. Les enjeux de cette nouvelle convention sont posés dès le préambule : « La nécessité de faire de l'hôpital un lieu plus humain, ouvert à la cité, est aujourd'hui reconnue comme une priorité par l'ensemble du secteur médical et hospitalier. La culture peut jouer un rôle essentiel dans cette évolution. En dehors de tout objectif thérapeutique, elle participe à l'amélioration de l'environnement des personnes et contribue à favoriser la relation de l'hôpital avec l'extérieur. La mise en place de projets culturels dans les hôpitaux, l'intervention d'artistes auprès des malades, la mise à disposition d'oeuvres d'art ou de livres constituent autant d'éléments de nature à faire de l'hôpital un lieu où la culture est présente. De la même façon, le milieu culturel s'intéresse à l'hôpital, car celui-ci réunit des publics potentiels de tous âges et de toutes origines sociales. » Trois axes opérationnels se dégageaient de cette première convention : les jumelages entre hôpitaux et équipements culturels ; le développement des bibliothèques dans les hôpitaux ; la mention des conventions régionales : « afin de conforter les politiques culturelles des établissements hospitaliers au niveau régional, des conventions pourront être signées entre les DRAC et le ou les hôpitaux d'une ville ou mieux, entre les DRAC et les ARH (agences régionales de l'hospitalisation) ». Une seconde convention est signée en 2010 entre le ministère de la santé et des sports et le ministère de la culture et de la communication : « La présente convention, dans le prolongement de celle de 1999, a pour objectif de réaffirmer l'importance d'une action interministérielle en matière de culture et de développer celle-ci au sein des établissements de santé. La culture, vecteur de valorisation personnelle, professionnelle et sociale, est considérée comme une contribution à la politique de santé qui accorde une nouvelle place à l'usager. De même, une action culturelle au sein des établissements de santé contribue à la qualité des relations professionnelles et améliore l'inscription des établissements dans la cité. » Plusieurs nouveautés sont alors à signaler : les publics visés (personnes hospitalisées, familles, professionnels de la santé et un élargissement, à titre expérimental, aux établissements médico-sociaux) ; une ouverture aux collectivités territoriales (souhait que les collectivités deviennent partenaires de ce dispositif) ; l'ouverture affirmée à l'ensemble des champs disciplinaires de la culture en s'appuyant notamment sur les grands événements nationaux (fête de la musique, journées du patrimoine, etc). S'agissant des conventions régionales et des collaborations interministérielles entre les DRAC et les ARS sur les territoires, elle affirme : « La présente convention se décline au niveau territorial sous la forme de conventions régionales conclues entre les DRAC et les ARS. Ces conventions ont vocation à s'élargir aux collectivités territoriales. Les ARS désignent en leur sein un référent chargé du domaine « culture et santé ». De même, au sein des DRAC, un correspondant « culture et santé » doit être identifié. » Les effets de cette convention nationale culture/santé ont été particulièrement vertueux et il faut souligner une évolution notable dans la structuration des collaborations interministérielles en région. L'évaluation de cette politique publique indique que la qualité des projets proposés s'est fortement améliorée et que les professionnels du secteur de la culture, de la santé et du médico-social se forment de plus en plus pour mettre en place des projets culture/santé dans les établissements. Par ailleurs, depuis 25 ans, les référents culturels dans les établissements de soins et médico-sociaux ainsi que les référents handicap dans les établissements culturels sont de plus en plus nombreux. Conformément aux orientations de la convention, les DRAC ont nommé, parmi les personnels en charge de l'action culturelle et territoriale, des référents sur les politiques « culture/santé, médico-social et handicap ». Ces derniers ont des interlocuteurs au sein des ARS. En s'appuyant sur la convention nationale, les DRAC et les ARS ont travaillé à la structuration de la mise en oeuvre de cette politique sur le territoire, notamment grâce à des conventions régionales DRAC / ARS. Ainsi, sur une période de 10 ans, la quasi-totalité des territoires ont été couverts. Il est à noter que des collectivités territoriales sont parfois associées : cinq conventions sont cosignées par des régions, une convention (La Réunion) est cosignée par la région et le département. Désormais, seules deux régions ne disposent pas d'une convention « Culture/santé, médico-social, handicap » (Hauts-de-France et Mayotte). Il est à noter cependant que des travaux de rédaction d'une convention régionale sont engagés sur ces territoires. Des pôles régionaux culture/santé, soutenus par les DRAC et les ARS, ont été mis en place, dans une logique de développement stratégique. Ceux-ci ont vocation à qualifier les collaborations entre les acteurs de la culture, de la santé, du médico-social (il en existe une dizaine à ce jour, uniquement en France métropolitaine). Ces pôles proposent notamment des temps d'échanges sous forme d'ateliers de travail ou de journées régionales pour mettre en lien les acteurs et porteurs de projets. De plus, ils développent des ressources et des formations afin d'encourager la mise en place de projets artistiques et culturels dans les établissements. Ces pôles sont en cours de structuration pour développer un réseau national (Entrelacs). L'administration centrale soutient et accompagne ce projet depuis 2023, à hauteur de 3 000 euros en 2023 et 10 000 euros en 2024. Par ailleurs, au-delà du cadre interministériel régional, les DRAC et les ARS ont également structuré le soutien aux acteurs et aux projets grâce à la mise en place d'appels à projets sur les champs de la santé, du médico-social et du handicap (les périmètres des appels à projets peuvent être variables d'une région à l'autre). Les projets soutenus dans le cadre des appels à projets régionaux culture/santé/handicap peuvent prendre des formes diverses : ateliers de pratiques artistiques, résidences d'artistes, soutien à des actions de formation des professionnels de la culture et de la santé. Par ailleurs, certaines DRAC et ARS (Bretagne notamment) ont mis en place une dynamique de soutien à des jumelages entre établissements de soin et médico-sociaux et établissements culturels (9 jumelages existant à ce jour et 3 nouveaux en cours de construction). Ce dispositif permet d'accompagner des projets de nature très variée et devient régulièrement le socle de projets de résidences de territoire plus larges, associant d'autres acteurs du territoire (établissements scolaires, médiathèques, association locale…). Grâce à l'importante structuration de cette politique depuis la signature de la convention de 2010, le nombre de projets soutenus est désormais très important : en effet, plus de 800 actions sont subventionnées, chaque année, dans ce cadre. Le ministère de la culture mobilise 5,5 millions d'euros (crédits déconcentrés 2023). La convention culture/santé de 2010 est caduque depuis 2019. Dès 2020, des travaux ont été engagés pour son renouvellement. Afin de prendre en compte la diversité des territoires, les enjeux des acteurs de terrain et les ambitions en matière de droits culturels pour cette nouvelle convention, un important travail de concertation a été mis en place. Un comité de pilotage dédié au renouvellement de la convention a été installé par le ministère de la culture (DG2TDC : délégation générale à la transmission, aux territoires et à la démocratie culturelle) avec les deux ministères en charge de la santé, du médico-social et du handicap : direction générale de la cohésion sociale (DGCS), direction générale de la santé (DGS), direction générale de l'offre de soin (DGOS) et le Pôle santé ARS au secrétariat général. Ce comité de pilotage a permis de travailler sur la rédaction de la nouvelle convention et va se poursuivre au-delà de la signature du texte afin de travailler sur sa mise en oeuvre et sur l'analyse et la qualification de données émanant des services déconcentrés respectifs. Par ailleurs, afin d'être au plus proche de la réalité et de la diversité des territoires, la DG2TDC a mis en place un groupe de travail dédié associant l'ensemble des DRAC (conseillers action culturelle et territoriale). Ces temps d'échange ont permis de partager des éléments d'état des lieux et les attentes, ambitions et souhaits des DRAC quant au contenu de la nouvelle convention. De plus, une consultation nationale a été lancée par le ministère de la culture afin de recueillir les recommandations de structures impliquées sur la mise en oeuvre de ces politiques. Les associations et fédérations nationales soutenues par le ministère de la culture ont été consultées (musique et santé, Culture Relax, APF France Handicap, Fédération des aveugles de France, etc.). En outre, cette consultation s'est également adressée à des instances et des structures très stratégiques (Conférence nationale de Santé et Fédération hospitalière de France notamment). La finalisation de la nouvelle convention pour la période 2025-2028 est en cours. Une version stabilisée est actuellement à la relecture des ministères sociaux (DGS, DGOS, DGCS, secrétariat général des ministères chargés des affaires sociales). Parmi les points saillants et stratégiques qui seront mis en exergue dans le cadre de cette convention, on peut noter : la stabilisation du périmètre de la convention (santé, handicap, médico-social, dépendance, âge). En effet, le médico-social n'était pris en compte qu'à titre expérimental dans la précédente convention. Il est désormais pleinement intégré ; les enjeux de renforcement des collaborations avec les territoires en associant les collectivités territoriales (en particulier les départements pour leur compétences solidarité et handicap) ; la prise en compte des droits culturels : il s'agira dans ce cadre de prendre en compte les malades, les personnes en situation de handicap mais également les familles, les aidants et les soignants dès la phase de construction des projets ; la réflexion et l'ouverture sur du soutien à la recherche, à l'innovation et à l'expérimentation.

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