Question de Mme ROMAGNY Anne-Sophie (Marne - UC) publiée le 03/10/2024
Mme Anne-Sophie Romagny interroge M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la création d'une aire marine en Arctique et en Antarctique.
Du 8 au 10 novembre 2023, au muséum national d'histoire naturelle de Paris, s'est tenu le premier sommet international consacré aux glaciers et aux pôles. Le Président de la République a conclu ce sommet par une série d'annonces engageantes pour la France dans cette protection environnementale tant à l'échelle nationale qu'à l'échelle internationale.
Il a notamment émis le souhait de proposer, d'ici la prochaine conférence des Nations unies sur les océans qui se déroulera à Nice le 7 juin 2025, la création d'une « aire marine de grande ampleur pour la haute mer en Arctique ». Il souhaite également travailler à en faire de même en Antarctique, réitérant sa volonté d'un moratoire sur l'exploitation des fonds marins.
Elle lui demande si les négociations internationales ont déjà pu être entamées à ce sujet d'une part, et si la France donne une priorité à la création d'une aire en Arctique plutôt qu'en Antarctique, d'autre part.
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Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 12/12/2024
À l'initiative du Président de la République, la France a accueilli à Paris, du 8 au 10 novembre 2023, le One Planet-Polar Summit, premier sommet international consacré à la cryosphère, qui a donné lieu à l'adoption d'une déclaration politique, « l'Appel de Paris pour les glaciers et les pôles ». Celle-ci a été endossée, à ce jour, par 36 pays ainsi que par l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO) et l'Organisation météorologique mondiale (OMM). Cette déclaration appelle à intensifier les efforts internationaux en cours, notamment pour : - planifier la mise en oeuvre des dispositions de l'accord sur la conservation et l'utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale (BBNJ) adopté en juin 2023, en particulier l'identification et la création d'aires marines protégées en haute mer ; - poursuivre les efforts entrepris par la Commission pour la conservation de la faune et la flore marines en Antarctique (CCAMLR) pour la création d'aires marines protégées dans l'océan austral ; - promouvoir et appliquer les plus hauts standards de soutenabilité pour toutes les activités ayant un impact sur les glaciers et la glace de mer, comme l'exploration et l'exploitation des hydrocarbures et des ressources minières lorsqu'elles sont autorisées. La France contribue à la création d'aires marines protégées (AMP) à travers des organisations internationales comme la Convention pour la protection du milieu marin de l'Atlantique du Nord-Est (Convention OSPAR) et la CCAMLR. Cette dernière s'est engagée, dès 2008, à mettre en place un système représentatif d'aires marines protégées dans la zone de la Convention située au sud du 60e degré de latitude Sud. Deux aires marines protégées y ont ainsi été créées, en 2009 (plateau sud des îles Orcades du Sud) et en 2016 (région de la mer de Ross). La France et l'Australie portent, depuis 2012, avec le soutien de l'Union européenne (UE), un projet de création d'une aire marine protégée en Antarctique de l'Est. La France soutient également, aux côtés de l'Union européenne, les propositions de création d'aires marines protégées en mer de Weddell (initiative allemande) et dans l'ouest de la péninsule antarctique et du sud de l'arc du Scotia (initiative de l'Argentine et du Chili). Ces propositions sont régulièrement examinées lors des sessions annuelles de la CCAMLR à Hobart (Tasmanie) et ont fait l'objet d'une session extraordinaire sur les questions de gestion spatiale et les aires marines protégées à Santiago (Chili) en juin 2023. En raison de l'opposition de deux Etats en particulier, leur adoption est bloquée à ce stade. La France poursuit ses efforts avec ses partenaires en faveur de la création et de l'adoption de nouvelles aires marines protégées en Antarctique. Le système du Traité sur l'Antarctique, dont relève la CCAMLR, est un système juridique distinct de celui des Nations unies ; aussi, les négociations sur les AMP antarctiques ne pourront se tenir à la 3e Conférence des Nations unies sur l'Océan, qui se tiendra à Nice en juin 2025. L'un des objectifs de l'accord BBNJ est d'offrir un cadre global pour la création d'outils de gestion par zone, notamment d'aires marines protégées, dans les zones ne relevant pas de la juridiction nationale. Dans la continuité de ses engagements à l'égard de la protection de l'environnement, la France a signé l'accord BBNJ dès le 20 septembre 2023 et a entamé immédiatement après le processus de ratification au niveau national. Ce processus s'est achevé avec la ratification au Sénat le 5 novembre et déposera son instrument de ratification aux Nations unies très prochainement. La France contribue activement, au niveau européen, aux discussions visant à permettre à l'UE et à ses Etats membres de faire de même et encourage un maximum d'Etats à engager leur processus de ratification au niveau national, afin de permettre à l'accord d'entrer en vigueur dès que possible, et idéalement en amont de la Conférence des Nations unies sur l'Océan. Elle le fait aussi au niveau international et le Ministre de l'Europe et des affaires étrangères, M. Jean-Noël Barrot, s'y emploie personnellement. Une fois que l'accord BBNJ sera en vigueur, il appartiendra à la Conférence des Etats parties de décider, à l'issue de la procédure inscrite dans l'accord BBNJ, de la création d'aires marines protégées en haute mer. S'agissant de l'Arctique, en attendant la création éventuelle d'une aire marine protégée dans le cadre du BBNJ, des échanges ont lieu au sein du Conseil de l'Arctique, forum intergouvernemental composé des huit Etats arctiques et de six organisations représentatives de populations autochtones, auprès duquel la France a un statut d'observateur. Les questions liées à la mise en place par les Etats d'aires marines protégées sont notamment évoquées au sein du groupe de travail pour la protection de l'environnement marin (PAME). S'agissant enfin de l'exploitation des fonds marins, la France s'est engagée, en novembre 2022, contre l'exploitation minière des fonds marins (annonce du Président de la République le 7 novembre 2022, à la COP 27 de Charm el-Cheikh) et a interdit, pour les espaces relevant de sa souveraineté et de sa juridiction (mer territoriale et eaux intérieures, zone économique exclusive, plateau continental) toute exploitation de ce type, devenant ainsi le pays le plus ambitieux en matière de protection des fonds marins. Elle porte depuis cette position au sein de l'Autorité internationale des fonds marins (AIFM) et s'efforce de sensibiliser d'autres Etats à cette cause. Cette mobilisation s'est notamment traduite par le lancement, en mars 2023, du « Joint call for action for a partnership for the Deep Sea », visant à renforcer la connaissance scientifique des écosystèmes profonds et à promouvoir une pause de précaution - entendue comme l'engagement à ne pas approuver de plan de travail d'exploitation avant qu'un code minier complet, robuste et protecteur de l'environnement ne soit adopté par l'AIFM. A ce jour, trente-deux Etats membres de l'Autorité soutiennent, a minima, une forme de pause de précaution ou un moratoire sur l'exploitation. La France oeuvre désormais avec ces pays à l'adoption par l'AIFM d'une politique générale ambitieuse en faveur de la protection de l'environnement marin.
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