Question de Mme BRULIN Céline (Seine-Maritime - CRCE-K) publiée le 03/10/2024
Mme Céline Brulin attire l'attention de Mme la ministre du travail et de l'emploi sur la composition des commissions professionnelles consultatives (CPC).
Onze commissions créées par la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, sont chargées d'examiner les projets de création, de révision ou de suppression de diplômes et titres à finalité professionnelle délivrés au nom de l'État.
Les dispositions de l'article L. 6113-3 du code du travail, traduisent la volonté de renforcer la place des professionnels dans les CPC sans en limiter le nombre, ni d'exclure les « personnalités qualifiées », a minima à titre consultatif.
Or, les décrets d'application n° 2018-1230 du 24 décembre 2018 et n° 2019-958 du 13 septembre 2019 modifié par le décret n° 2022-4 du 4 janvier 2022 semblent beaucoup plus restrictifs que la loi votée.
Ils limitent fortement la place des personnes qualifiées, fixant à cinq le nombre de membres « associés » représentants les organisations intervenant dans les champs professionnels dont relèvent les titres ou diplômes concernés ou ayant une expertise en matière de formation et d'emploi, le tout sans voix délibératives.
Le ministère du travail a réduit unilatéralement le nombre de membres à seize et abandonne le fonctionnement quadripartite qui existait dans ces commissions avant 2018. Cela entraine l'éviction complète de l'ensemble des « personnalités qualifiées » qui représentaient pourtant les usagers et les acteurs sociaux, dont les représentants des personnels de l'éducation et la formation.
De plus, le ministère du travail a choisi de faire siéger avec voix délibérative cinq représentants des employeurs interprofessionnels au sein de chacune des CPC, faisant d'eux les membres majoritaires. À l'inverse, il ne retient que deux représentants des employeurs du ou des secteurs concernés.
Des inquiétudes s'expriment sur la gouvernance et les orientations de ces CPC, du fait d'une perte de pluralisme et de qualité d'expertise croisée sur l'ensemble des métiers de l'agriculture, de l'agroalimentaire et davantage encore sur ceux de l'aménagement des espaces, de la forêt et de l'environnement.
Par ailleurs, la représentativité des branches professionnelles du secteur, réduite à deux membres avec voix délibératives, ne suffit pas à assurer les missions, à savoir « mettre en adéquation des référentiels aux besoins des secteurs professionnels ». Les dernières rénovations de diplômes engagées par la CPC agriculture, agroalimentaire et aménagement des espaces ont confirmé les dérives qu'entraîne le manque de pluralisme : des diplômes du secteur de l'aménagement basculent vers le secteur de la production ou des diplômes techniques vers des diplômes du secteur technico-commercial. Ces évolutions s'expliquent par la disparition, au sein de la CPC de pans entiers du secteur considéré, au profit des industriels et du commerce.
Il semblerait donc judicieux d'élargir la composition des CPC en intégrant les collectivités locales, le monde associatif, les parents d'élèves, les personnels de l'éducation et la formation...
Pour exemple, le secteur de la forêt et du bois est uniquement représenté au sein de la CPC par des représentants de la filière du papier et du sciage, abandonnant ainsi la notion de multifonctionnalité de la forêt. De même, la trentaine de formations de la filière agroéquipement risque de se transformer en diplôme commercial du fait de la nature professionnelle des membres de la CPC.
C'est pourquoi, elle lui demande s'il entend élargir la composition des commissions professionnelles consultatives afin de garantir une réelle prise en compte de l'ensemble des compétences et usages des métiers agricoles du secteur de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de l'aménagement des espaces.
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Réponse du Ministère du travail et de l'emploi publiée le 05/12/2024
La loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel a opéré une refonte en profondeur du système français de certification professionnelle, modifiant notamment la composition et le fonctionnement des Commissions professionnelles consultatives (CPC). Instances nationales de concertation composées au moins pour moitié de représentants d'organisations syndicales de salariés représentatives au niveau national et interprofessionnel et d'organisations professionnelles d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel ou au niveau national et multiprofessionnel, les CPC se prononcent sur les certifications professionnelles publiques délivrées par les ministères, à l'exception des diplômes de l'enseignement supérieur régis par les articles L. 613-1, L. 641-4 et L. 641-5 du code de l'éducation, qui font l'objet d'une concertation spécifique, selon des modalités fixées par voie réglementaire. Le décret n° 2018-1230 du 24 décembre 2018 a permis la constitution de onze CPC interministérielles créées par le décret n° 2019-958 modifié du 13 septembre 2019, dans un souci de mutualisation des expertises publiques et des analyses des besoins en compétences et d'une meilleure articulation des programmes de certification. La composition des onze nouvelles CPC est resserrée, dans une logique de pilotage stratégique renforcé associant plus étroitement les partenaires sociaux représentatifs au niveau interprofessionnel. Leur pouvoir est renforcé, l'avis de ces instances étant désormais un avis conforme sur la création, la révision ou la suppression des diplômes, des titres professionnels et leurs référentiels (d'activités, de compétences et d'évaluation) relevant de leur domaine de compétences, ce qui confère un véritable droit de veto aux partenaires sociaux. L'enregistrement dans le Répertoire national des certifications professionnelles (RNCP) n'est possible qu'après avis conforme de la CPC compétente. De plus, les branches sont plus étroitement associées à la construction des certifications ministérielles et disposent désormais d'un véritable pouvoir d'initiative : les commissions paritaires nationales de l'emploi des branches professionnelles peuvent transmettre des propositions de création de tout ou partie d'un projet de diplôme ou titre à finalité professionnelle. La réforme du système français de certification professionnelle vise également à renouveler les certifications tous les cinq ans afin de mieux prendre en considération les évolutions des métiers. La valeur d'usage des certifications devient un critère majeur. Pour les diplômes professionnels du ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, la direction générale de l'enseignement et de la recherche indique qu'ils sont révisés tous les 5 ans et sont conçus à partir des entretiens conduits avec les professionnels, de leurs besoins en compétences et de leur expertise. Les professionnels sont associés et consultés à chaque étape de la construction des diplômes : - ils contribuent à la rédaction du référentiel d'activités qui liste l'ensemble des activités exercées par les titulaires de l'emploi visé par le diplôme par sa validation en groupe métier ; - ils explicitent les situations professionnelles significatives de la compétence (qu'il faut impérativement maîtriser et donc évaluer) qui permettent d'établir les référentiels de compétences et d'évaluation ; - ils portent en CPC « Agriculture, agroalimentaire et aménagement des espaces » un avis conforme sur les projets de référentiels présentés en vue de leur inscription au RNCP. Les certifications professionnelles portées par le ministère de l'agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt sont strictement rénovées en prenant en les enjeux de politiques publiques. A titre d'exemple, pour la forêt et le bac professionnel rénové en 2022, les principaux enjeux relayés par les politiques publiques en faveur de ce secteur professionnel ont été : - accompagner la forêt vers plus de résilience et d'adaptation face au défi du changement climatique ; - promouvoir le bois en tant que ressource renouvelable et écologique, en particulier pour le stockage du carbone dans la construction ; - réconcilier et créer un lien indéfectible entre l'amont et l'aval au service d'une production de bois souveraine, compétitive et durable ; - reconnaître et valoriser la multifonctionnalité de la forêt, dans toutes ses dimensions (économiques, écologiques et sociétales). De même pour le secteur de l'agroéquipement, le ministère de l'agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt est vigilant, dans le cadre des dernières rénovations, à son coeur de métier, à savoir la production agricole et la souveraineté alimentaire. Dans ce cadre, la rénovation du brevet professionnel "conducteur de machines agricoles" a visé une meilleure articulation entre l'agroéquipement et l'agronomie en vue d'intégrer la démarche agro-écologique.
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