Question de M. SALMON Daniel (Ille-et-Vilaine - GEST) publiée le 03/10/2024
M. Daniel Salmon interroge Mme la ministre de l'agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt sur les problématiques liées à l'interdiction du retournement des prairies pour les agriculteurs en bio.
Les prairies permanentes sont définies par l'article 4 du règlement UE n° 1307/2013, établissant les règles relatives aux paiements directs : « est prairie ou pâturage permanent toute surface dans laquelle l'herbe ou d'autres plantes fourragères herbacées prédominent depuis cinq années révolues au moins (sixième déclaration PAC ou plus) ; sont également prairies permanentes les landes, parcours et estives, même pour les surfaces adaptées au pâturage et relevant des pratiques locales établies dans lesquelles l'herbe et les autres plantes fourragères herbacées ne prédominent pas traditionnellement. Toute prairie temporaire qui n'a pas été déplacée (même si elle a été entre-temps labourée et réensemencée) devient prairie ou pâturage permanents au bout de cinq ans révolus ».
L'objectif de limiter la disparition des prairies permanentes est louable et nécessaire afin de conserver ces terres si bénéfiques pour l'environnement. Ainsi, depuis les nouvelles normes issues de la Politique agricole commune (PAC) 2023, notamment dans les bonnes conditions agricoles et environnementales (BCAE) 1, relatives au maintien d'un ratio régional de prairies et des pâturages, le retournement des prairies est proscrit à l'échelle régionale lorsque, depuis 2018, le territoire concerné enregistre une baisse du nombre de prairies permanentes par rapport à 2018.
En Bretagne, ces prairies représentent plus de 18 % de la surface agricole utile (SAU) et ont diminué de 4,60 % depuis 2018.
La région risque bientôt de passer sous le régime d'interdiction totale de retournement des prairies permanentes, comme cela est déjà le cas en Normandie ou dans les Pays de la Loire. Cette situation risque d'être intenable pour les éleveurs bio qui ont une obligation agronomique d'intégrer des rotations longues d'une dizaine d'années essentielles au maintien des élevages de ruminants (que ce soit en Ille-et-Vilaine ou ailleurs.)
C'est d'autant plus incompréhensible que les chiffres montrent que les éleveurs en agriculture biologique sont par leurs pratiques des acteurs essentiels dans l'accroissement des surfaces en prairies permanentes sur l'ensemble des régions en France.
La France s'est engagée à accroître le nombre de ses hectares dédiés à l'agriculture biologique, il apparaît donc comme incohérent et à contre sens d'interdire tout retournement des prairies pour les éleveurs bio au-delà de cinq années d'existence.
Il souhaite savoir si le Gouvernement envisage une dérogation pour ces éleveurs, notamment via un retour aux exigences de la PAC de 2014-2022 où l'agriculture biologique a été exemptée de ces critères.
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Réponse du Ministère de l'agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt publiée le 12/12/2024
Dans le cadre de la conditionnalité de la politique agricole commune (PAC), la norme BCAE1 (bonnes conditions agricoles et environnementales), telle que définie à l'article 48 du règlement (UE) n° 2022/126 modifié, vise le maintien des prairies permanentes dans l'objectif de préserver le stockage du carbone dans les sols. En application de cette réglementation, chaque année pour chaque région française, la part de prairies permanentes rapportée à la surface agricole totale déclarée à la PAC est comparée au ratio de référence de l'année 2018. En cas de dégradation de ce ratio, les agriculteurs des régions concernées se voient limités dans les possibilités de conversion de leurs prairies permanentes vers d'autres usages, voire obligés de réimplanter l'équivalent des surfaces de prairies permanentes converties les années précédentes. S'agissant du maintien des prairies permanentes, la région Bretagne subit depuis plusieurs années une diminution conséquente de ses prairies, en partie liée à la déprise de l'élevage et aux changements structurels des modes d'exploitations. Cette problématique est également observée dans d'autres régions de la moitié Nord de la France, ce qui a conduit de nombreux éleveurs à porter ce sujet dans le cadre des revendications de la profession agricole du début d'année. Se saisissant de cet enjeu majeur pour les exploitants, la France a interpellé la Commission européenne afin de faire évoluer l'encadrement réglementaire relatif à la BCAE 1. La Commission européenne a adopté un règlement modificatif au printemps 2024, afin de permettre aux États membres de procéder à un ajustement des ratios de référence pour tenir compte de l'impact de la déprise de l'élevage sur la diminution de la surface en prairies permanentes. Afin de décliner cette souplesse introduite dans la réglementation européenne, la France a déposé une demande de modification de son plan stratégique national de la PAC afin de retraiter les ratios de référence de plusieurs régions incluant la Bretagne. Cette modification, qui vient d'être validée par la Commission européenne permettra de lever les contraintes pour la campagne 2024, y compris pour les agriculteurs en agriculteur biologique, dans la continuité des engagements pris par le précédent Gouvernement. S'agissant de façon plus générale de l'application de la BCAE1, la règlementation européenne ne permet pas de dérogation pour les exploitants engagés en agriculture biologique. Il n'est donc pas possible de prévoir de tels critères d'exemptions au niveau national.
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