Question de Mme DUMAS Catherine (Paris - Les Républicains) publiée le 03/10/2024

Mme Catherine Dumas attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la multiplication inquiétante des incivilités et des agressions contre les pharmaciens en Ile-de-France, en particulier à Paris.
Elle souligne que les pharmaciens d'officine sont en première ligne face aux violences et sont victimes d'injures, menaces, vandalisme, agressions physiques ou encore de vols à main armée.
Elle note que le conseil national de l'ordre des pharmaciens a recensé 366 agressions (verbales, physiques ou vols) pour l'année 2022 sur le territoire national, soit une augmentation de 17 % par rapport en 2019.
Elle précise que ces chiffres sont sous-estimés car, selon le conseil national de l'ordre des pharmaciens, près de 4 pharmaciens sur 10 renoncent à déclarer leurs agressions, en raison d'un manque de temps, d'une méconnaissance des procédures ou encore par découragement et par peur de représailles.
Elle constate que les témoignages d'agressions ou de vols se multiplient sur les réseaux sociaux, notamment à Paris, où ce phénomène tend à s'aggraver.
Elle souhaite par conséquent lui demander ce que le Gouvernement entend mettre en oeuvre pour protéger les pharmaciens et lutter contre ce fléau.

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Transmise au Ministère de l'intérieur


Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 02/01/2025

La lutte contre les atteintes commises à l'encontre des commerçants d'une manière générale et des pharmaciens en particulier, qu'il s'agisse de vols, de cambriolages ou de violences fait l'objet d'une grande attention de la part de la préfecture de police, qui mène en ce domaine à la fois un travail d'investigation, de sécurisation et de prévention, en lien direct avec les professionnels du secteur. De manière factuelle, les principales atteintes visant la profession des pharmaciens au sein de l'agglomération parisienne concernent les vols à la tire et les vols à l'étalage (47 % du volume des infractions subies en 2023, 53 % à Paris, 20 % sur les 9 premiers mois de 2024, 16 % à Paris) ainsi que les cambriolages et dégradations (18 % du volume des infractions subies en 2023, 15 % sur les 9 premiers mois de 2024, 22 % à Paris). A ce jour, les informations sur la profession des victimes et sur le type de lieu de commission des infractions sont trop lacunaires dans les systèmes d'information de la police et de la gendarmerie nationales pour identifier et mesurer précisément la délinquance dont les pharmaciens sont les victimes. Des travaux sont toutefois menés par le service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI) du ministère de l'intérieur pour être, à terme, en mesure d'appréhender précisément les phénomènes de délinquance dont sont victimes certaines professions : pharmaciens, médecins, professeurs, etc. D'ores et déjà, une première étude a été publiée par la SSMSI sur les « Violences physiques et verbales enregistrées par les services de sécurité depuis 2016 : une première approche des victimes par profession » (Interstats - Info Rapide, n° 21, juillet 2022). Cette étude ne permet toutefois pas d'isoler la situation des pharmaciens. Sur le ressort de l'agglomération parisienne, le nombre d'infractions commises à l'encontre des pharmaciens et des préparateurs en pharmacie est néanmoins évaluée comme étant en baisse de manière générale et dans chaque département. Précisément, entre 2022 et 2023, la diminution a été de 12 % sur l'agglomération (1761 faits recensés en 2022 contre 1543 en 2023) et 16 % à Paris (808 faits recensés en 2022 contre 680 en 2023). En 2024, ce chiffre est à nouveau à la baisse avec 944 infractions commises sur l'agglomération parisienne au cours des 9 premiers mois de l'année (414 faits recensés à Paris) contre 1170 sur la même période en 2023 (514 faits recensés à Paris). Les marqueurs à la hausse sont ceux des vols avec violences, avec 24 faits recensés sur l'agglomération parisienne au cours des 9 premiers mois de 2024 (17 à Paris) contre 15 en 2023. Les violences volontaires sont également en hausse, avec 44 faits recensés sur l'agglomération parisienne au cours des 9 premiers mois de 2024 (15 à Paris), contre 37 en 2023 (9 à Paris). Sur le plan opérationnel et afin de lutter contre les atteintes dont sont victimes les pharmaciens, les patrouilles de voie publique ont été renforcées dans les secteurs les plus touchés, avec un accent mis sur la prise de contacts avec les commerçants concernés. En cas de cambriolage avec effraction, un équipage de police procède systématiquement aux premières constatations sur les lieux et recueille rapidement les éléments susceptibles de permettre l'identification des auteurs. Les services de la police scientifique sont ensuite requis. Par ailleurs, l'utilisation de la vidéoprotection apporte une aide incontestable au signalement des auteurs et à l'élucidation des délits commis, par le rassemblement de preuves. En matière de prévention, la préfecture de police entretient un lien partenarial direct avec l'Ordre des pharmaciens et organise des actions de sensibilisation à l'attention des adhérents du Syndicat national des pharmaciens. L'ensemble de ces échanges a notamment abouti à la réalisation d'un Livret Sécurité Pharmacien. Aussi, afin de répondre aux questions des pharmaciens en matière de protection de leur officine, la préfecture de police met à leur disposition des correspondants et référents sûreté, qui sont en mesure d'établir un diagnostic personnalisé. En parallèle, ces référents organisent des réunions d'information ainsi que des formations afin de sensibiliser les pharmaciens aux différents risques encourus par leur profession. La préfecture de police a en outre renforcé ses actions de communication et de prévention situationnelle à l'attention des commerçants, des entreprises et des professions libérales. En particulier, le dispositif CESPPLUSSUR permet de diffuser aux professionnels inscrits sur la plateforme, un ensemble de conseils en matière de prévention et de sûreté des commerces. À ce jour, CESPPLUSSUR compte plus de 940 pharmaciens adhérents. La préfecture de police rappelle qu'en cas d'atteinte, le dépôt de plainte doit être systématique, afin de permettre le déclenchement d'enquêtes pénales. La préfecture de police restera particulièrement à l'écoute des professionnels du secteur et vigilante quant à leur protection. Il convient aussi de rappeler que, à Paris comme dans toute la France, bien que l'Ordre national des pharmaciens ne puisse se substituer au praticien dans le dépôt de plainte, l'article L. 4233-1 du code de la santé publique lui permet d'ester en justice en se portant partie civile, notamment en cas de menaces ou violences commises en raison de l'appartenance à la profession pharmaceutique. Depuis 2017, les pharmaciens peuvent en outre déclarer les agressions qu'ils ont subies à partir du site internet de leur ordre. Cette possibilité leur permet de signaler plus facilement les faits dont ils sont victimes. Il doit également être rappelé que le code pénal prévoit une répression aggravée pour les auteurs de menaces ou de violences à l'encontre d'un professionnel de santé dans l'exercice ou du fait de ses fonctions. En dehors de l'agglomération parisienne, la police nationale est également mobilisée pour prévenir et lutter contre la délinquance dont sont trop souvent victimes les officines pharmaceutiques. Des moyens préventifs et répressifs adaptés sont mis en oeuvre pour permettre aux pharmaciens de travailler en toute sérénité. Les forces de police sont sensibilisées et attentives à toute demande d'intervention en la matière, gage d'une forte réactivité dès qu'un problème est signalé. Le passage de patrouilles de police aux abords des officines de pharmacie, par exemple, ainsi que les prises de contact régulières, permettent d'éviter nombre d'incivilités et d'incidents. Chaque incident rapporté est traité. De même, la protection des pharmaciens et des professions exposées est un sujet d'attention et de mobilisation pour les forces de gendarmerie. E En écho au bilan annuel de l'ordre national des pharmaciens, il convient néanmoins de préciser que la gendarmerie nationale évalue l'évolution des faits constatés à l'encontre des officines de pharmacie, en zone gendarmerie nationale, qui ont progressé de 18,37 % en 2023. 385 faits supplémentaires ont ainsi été constatés, concernant principalement les vols à l'étalage. Les infractions subies par les pharmaciens sont majoritairement constituées de vols (41 % des faits constatés) et d'escroqueries ou faux (37 %). Les atteintes volontaires à l'intégrité physique des personnes représentent quant à elles 6 % de l'ensemble des infractions constatées. Les départements les plus concernés par cette délinquance sont majoritairement urbains et/ou densément peuplés (Gironde, Loire-Atlantique, Haute-Garonne, Isère, Hérault, Pas-de-Calais, Bouches-du-Rhône, Manche, Ain et Gard - comprenant entre 94 et 50 faits constatés en 2023) ; les départements plus ruraux étant moins impactés (5 faits constatés dans les Ardennes et 1 dans le Territoire de Belfort en 2023). L'État et les professionnels de la santé travaillent en partenariat depuis plusieurs années afin d'améliorer la prévention et la lutte contre les violences, tant à l'égard des établissements de santé qu'au profit des professionnels exerçant hors des structures hospitalières (protocole santé-sécurité-justice du 10 juin 2010). Un protocole national relatif à la sécurité des professionnels de santé a également été signé le 20 avril 2011 entre, d'une part, les ministres chargés de la santé, de l'intérieur et de la justice, et, d'autre part, les représentants des professionnels de santé (médecins, chirurgiens-dentistes, sages-femmes, pharmaciens, infirmiers, etc.). Toujours en application, ce protocole a permis de franchir une nouvelle étape dans ce partenariat. Il prévoit la mise en oeuvre de mesures destinées à améliorer la prévention et la gestion des violences et incivilités et à permettre une poursuite plus systématique des auteurs de violences. Ce protocole fait l'objet d'une déclinaison départementale adaptée aux territoires et aux différentes professions et d'un suivi par la direction des entreprises et partenariats de sécurité et des armes (DEPSA) du ministère. En complément, le ministère de l'intérieur a également élaboré et mis à disposition des ordres un guide pratique pour la sécurité des professionnels de santé. En application de ces protocoles, l'accent est porté sur la prévention situationnelle, avec la possibilité de recourir aux conseils dispensés par les référents ou correspondants sûreté de la police nationale. A l'instar de ceux de la préfecture de police, ceux des services déconcentrés de la direction générale de la police nationale (DGPN) délivrent des conseils visant à prévenir et réduire les vulnérabilités des établissements. Ces conseils en sûreté doivent permettre aux pharmaciens d'envisager les adaptations organisationnelles et matérielles nécessaires à la préservation ou au rétablissement de la sécurité et de la tranquillité. Le réseau local des plus de 250 référents sûreté (compétence départementale) et des plus de 650 correspondants sûreté (positionnnés dans les circonscriptions de police nationale) en poste dans les directions départementales, interdépartementales et territoriales de la police nationale (DDPN, DIPN et DTPN) peut ainsi être sollicité par les pharmaciens qui souhaitent renforcer la sécurité de leur officine. De plus, les référents sûreté de la police nationale, comme le les référents sûreté de la gendarmerie nationale, assistent également les communes qui souhaitent installer ou développer un dispositif de vidéoprotection, en réalisant un diagnostic de vidéoprotection. Ceux-ci permettent d'élaborer un schéma d'implantation des caméras de voie publique destiné à prévenir et mieux lutter contre la délinquance, en prenant en compte, notamment, l'existence de commerces dits exposés, par exemple les officines de pharmacie. Dans le cadre du partenariat avec les pharmaciens, la direction nationale de la sécurité publique (DNSP) est par exemple intervenue le 27 janvier 2024 au Congrès national des pharmaciens pour évoquer la sécurisation et la mise en sûreté des officines, afin de poursuivre cette démarche de sensibilisation. En cohérence, les référents sûreté des groupements de gendarmerie départementale délivrent des conseils humains, organisationnels et techniques, à titre gracieux, afin de réduire les vulnérabilités constatées des établissements et sont donc des acteurs clefs du dispositif de prévention technique de la malveillance adapté aux pharmaciens dans les territoires L'engagement de la gendarmerie aux côtés des officines pharmaceutiques se traduit également dans certains départements par la signature d'une convention avec l'ordre local des pharmaciens pour fortifier leurs actions de prévention et de lutte contre les agressions et les vols. La direction générale de la gendarmerie nationale et l'ordre des pharmaciens sont en lien étroit et échangent régulièrement sur les difficultés rencontrées par les pharmaciens et laborantins, et plus largement tous les personnels de santé. Afin de prévenir les agressions, la gendarmerie ouvre aux pharmaciens la possibilité de s'inscrire dans sa base de données de sécurité publique en tant que « profession menacée » (module SIP-BDSP : sécurisation des interventions et demandes de protection de la base départementale de sécurité publique). Elle met également à leur disposition l'application Opération Tranquillité Entreprises et Commerces (OTEC) qui permet de référencer l'officine, de signaler des situations sensibles telles que l'absence d'occupation des locaux ou une arrivée massive de produits onéreux ou recherchés, et de prévenir ainsi les cambriolages et vol par agression ou menace. En effet, ces informations directement accessibles aux gendarmes leur permettent d'orienter les patrouilles en surveillance générale vers les sites jugés sensibles, et facilitent la rapidité des interventions en cas de besoin. Le ministre de l'intérieur a fait du renforcement de la sécurité du quotidien une priorité, notamment par une présence accrue des patrouilles sur la voie publique et la mise en oeuvre de véritables plans départementaux de restauration de la sécurité du quotidien. Cette nouvelle politique de lutte contre la délinquance bénéficiera nécessairement aux commerces de proximité que sont aussi les officines. Des mesures seront également prises pour permettre une véritable montée en puissance des polices municipales, qui seront ainsi en mesure de davantage s'engager dans la sécurisation de l'espace public et la lutte contre la délinquance.

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