Question de M. MARIE Didier (Seine-Maritime - SER) publiée le 10/10/2024
M. Didier Marie attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques énergétique à propos du rapport de l'autorité environnementale relatif à l'implantation de deux réacteurs pressurisés européens (EPR2) et leurs raccordements électriques à Penly dans le département de la Seine-Maritime.
Conformément aux dispositions de l'article R. 122-4 du code de l'environnement relatif à l'autorité environnementale prévue à l'article R. 122-6 du même code, l'autorité environnementale a été saisi pour émettre un avis quant à la qualité de l'étude d'impact présentée par le maître d'ouvrage et sur la prise en compte de l'environnement dans le projet.
Dans le cas précis du projet d'EPR2 de Penly, l'autorité environnementale constate des manquements dans la mesure des risques d'atteintes à la population et aux milieux liées aux rejets radiologiques, thermiques et chimiques ainsi que la nécessité de réduction de la production de matières et déchets nucléaires et des émissions de gaz à effets de serre sur l'ensemble du cycle de production de l'électricité issu du réacteur.
L'autorité préconise également de prévoir des mesures d'évitement, de réduction ou de compensation du déroctage des 5 millions de mètres cube de la falaise et de l'artificialisation de 20 hectares sur le fond marin afin de rendre compatible le projet avec le document stratégique de façade Manche est - mer du Nord et de reprendre en profondeur l'étude des incidences du projet sur les sites Natura 2000.
Ces conclusions ont de quoi inquiéter, d'autant plus qu'il est possible que le projet n'aboutisse pas et qu'aucune disposition pour une remise en état du site n'est prise pour faire face à cette éventualité.
Le Gouvernement, par la loi n° 2023-491 du 22 juin 2023 relative à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes, a témoigné de sa volonté de poursuivre sa stratégie en faveur du développement de l'énergie nucléaire pour les prochaines décennies. Cette stratégie ne doit pas se faire au détriment des habitants et des habitantes et de la détérioration de leur cadre de vie.
Sur le projet d'EPR2 de Penly, les élus s'inquiètent quant aux conditions d'accueil des quelque 6000 futurs travailleurs nécessaires à la conduite du chantier et des modifications importantes sur le plan paysager et des nouvelles infrastructures que cela devra générer.
Dans ce contexte, il lui demande de lui préciser les mesures que pourra prendre le Gouvernement pour rassurer les élus locaux et les habitants riverains de ce projet concernant la réalisation du chantier et l'exploitation des futurs réacteurs pour réduire au maximum les nuisances et les risques auxquels ils seront soumis.
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Transmise au Ministère auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie et de l'énergie
Réponse du Ministère auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie et de l'énergie publiée le 29/05/2025
Les installations nucléaires de base (INB) sont des installations qui, de par leur nature ou en raison de la quantité ou de l'activité des substances radioactives qu'elles contiennent, sont soumises à des dispositions particulières en vue de protéger les personnes et l'environnement. Depuis la loi n° 2023-491 du 22 juin 2023 relative à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes, l'autorisation environnementale (AE) est l'une des trois principales autorisations requises pour la réalisation des projets nucléaires, avec l'autorisation de création (DAC) de l'installation nucléaire de base (INB) et l'autorisation de mise en service (MES) des réacteurs. Chacune des autorisations nécessaires à la réalisation du projet poursuit un objectif spécifique. Des procédures de participation du public (débats publics, enquêtes et consultations publiques) sont également prévues à différentes étapes de ces processus. L'autorisation environnementale (AE), délivrée par décret n° 2024-505 du 5 juin 2024 du Premier ministre, encadre les travaux préparatoires du projet EPR2 Penly, en conformité avec les réglementations relatives à la protection de l'environnement. Dans le cadre de cette demande d'AE, l'Autorité environnementale s'est prononcée sur le projet par avis délibéré du 9 novembre 2023, avis sollicité dans le cadre des autorisations nécessaires aux premières activités de réalisation du projet. Elle identifie des enjeux prioritaires, notamment la gestion des nuisances pendant la phase travaux (bruit) et la protection de la biodiversité. Il est à noter que l'autorité environnementale n'a pas émis d'avis sur les enjeux liés aux risques d'atteintes à la population et aux milieux liées aux rejets radiologiques, thermiques et chimiques ainsi que la nécessité de réduction de la production de matières et déchets nucléaires qui relèvent de la phase d'exploitation et sont étudiés au niveau de l'autorisation de création. EDF et RTE ont produit un mémoire en réponse à cet avis, mis à la disposition du public dans le cadre de l'enquête publique unique portant sur les demandes d'autorisation nécessaires à la réalisation des travaux préparatoires, qui s'est tenue du 1er février au 6 mars 2024. Concernant le déroctage des 5 millions de mètres cubes de falaise et l'artificialisation de 20 hectares de fond marin, des efforts significatifs ont été réalisés pour limiter les emprises au sol et réduire les impacts sur la biodiversité. Le projet repose sur un équilibre précis entre les volumes de déblais et de remblais, minimisant ainsi les flux de transport hors site. Par ailleurs, des mesures d'accompagnement volontaires ont été prévues par EDF, malgré l'absence d'obligation réglementaire de compensation de l'artificialisation en mer. L'évaluation des incidences sur les sites Natura 2000 a été mise à jour en décembre 2023 dans le chapitre 12 de l'étude d'impact du projet. Ce chapitre a fait l'objet d'une réponse à l'Autorité environnementale qui conclut qu'« au regard des précisions apportés dans la version du chapitre 12 de l'étude d'impact pour l'enquête publique, l'analyse des incidences directes et indirectes, temporaires ou permanentes du projet d'implantation de deux unités de production EPR2 sur le site de Penly, menée en considérant l'ensemble des mesures d'évitement, de réduction et de suivi proposées dans l'étude d'impact, conclut que le projet ne remet pas en cause de manière significative l'état de conservation des habitats et des espèces prioritaires ou d'intérêt communautaire ayant prévalu à la désignation des sites Natura 2000 de l'aire d'étude. » Concernant la remise en l'état du site après réalisation des travaux de construction, EDF a prévu des modalités de renaturation des zones artificialisées, s'inspirant du traitement des fondations non exploitées des réacteurs N4 dans les années 1990 sur le même site. Les risques liés aux rejets radiologiques, thermiques et chimiques, et les enjeux liés à la production de matières et déchets nucléaires et des émissions de gaz à effets de serre, concernent l'exploitation future des réacteurs. L'Autorité environnementale sera amenée à rendre un second avis à l'issue de l'instruction technique sur la demande d'autorisation de création au titre de la réglementation nucléaire. Ce nouvel avis permettra de s'assurer que les recommandations relatives à l'exploitation des réacteurs ont été prises en compte par les porteurs de projet. Pour répondre aux préoccupations relatives à l'accueil des milliers de travailleurs nécessaires au chantier et à l'impact sur le cadre de vie, un dispositif « Grand Chantier » a été instauré. Ce dispositif, qui concerne toutes les grandes opérations d'aménagement, repose sur un espace de concertation entre toutes les parties prenantes, dont les collectivités locales, les services de l'État, la maîtrise d'ouvrage, les acteurs économiques, les organisations représentatives du personnel, les entreprises intervenantes. En juin 2023, un coordonnateur Grand Chantier a été nommé par le préfet de la Région Normandie pour accompagner l'insertion du projet EPR2 dans son territoire. Le Grand Chantier EPR2 Penly regroupe l'ensemble des mesures destinées à accompagner la construction des futurs EPR2 dans les territoires. Ces mesures concernent les aménagements d'infrastructures (création de parkings, amélioration des voiries, et aménagements logistiques pour réduire l'encombrement routier), les logements pour les travailleurs (6 000 places d'hébergements à créer sont prévues, réparties en mobil-homes, logements modulaires et résidences hôtelières, avec des solutions réversibles après le chantier), les services et équipements publics (mise en place de plateformes de formation pour favoriser l'emploi local et soutien aux collectivités pour gérer l'augmentation temporaire de population). Le Gouvernement veille à maintenir un dialogue constant avec les élus locaux et les habitants, notamment pour ajuster les dispositifs en fonction des besoins spécifiques du territoire. L'objectif est d'assurer une gestion équilibrée et responsable du projet, en limitant les impacts sur le cadre de vie et en maximisant les retombées positives pour le territoire
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