Question de M. KERN Claude (Bas-Rhin - UC) publiée le 24/10/2024

M. Claude Kern attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les conséquences du stationnement illicite des gens du voyage. Au courant de l'été 2024 une communauté de 200 personnes environ s'est installée sur une parcelle à proximité d'un site très touristique. Ce groupe a laissé le terrain qu'il avait investi dans un état déplorable. La commune a ainsi constaté des quantités affolantes d'excréments et de détritus jetés dans la nature. Pour éviter à l'avenir ce type de désagréments, le maire de la commune demande la mise en place par l'État de toilettes de chantiers en nombre suffisant à proximité du campement. Il lui demande donc quelle suite le ministre entend donner à cette requête.
Par ailleurs et concernant une approche plus globale, l'inefficacité avéré de l'arsenal juridique en l'état, notamment concernant les référés suspension permettant le maintien physique de ces groupes sur un site investi en toute illégalité, alors même que le territoire, en totale conformité avec la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en oeuvre du droit au logement (loi Besson), dispose d'une aire de grand passage dédiée, prouve la nécessité de reconsidérer de manière tout à fait urgente la législation actuelle de manière à mettre un terme à ces installations illicites. Il lui demande ainsi s'il compte se saisir du dossier afin d'y apporter une réponse efficace.

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Transmise au Ministère de l'intérieur


Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 29/05/2025

Le régime applicable en matière d'accueil, d'habitat et de stationnement des gens du voyage est prévu par la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 modifiée. Il établit un équilibre entre, d'une part, la liberté d'aller et venir, et, d'autre part, le souci des élus locaux d'éviter des installations illicites portant atteinte au droit de propriété et occasionnannt des troubles à l'ordre public. Pour ce faire, les schémas départementaux d'accueil des gens du voyage formalisent l'obligation pour les communes de plus de 5 000 habitants et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) de créer, d'aménager et d'entretenir des aires d'accueil réservées aux gens du voyage. Au 31 décembre 2023, 80,1% des aires permanentes d'accueil, 62,2% des aires de grand passage et 21,3% des terrains familiaux locatifs prescrits par les schémas départementaux avaient été réalisés. Lorsque la commune ou l'EPCI se sont dotés d'aires et terrains conformes à ce schéma, le maire ou le président de cet EPCI peuvent interdire par arrêté le stationnement des gens du voyage en dehors des aires ou terrains aménagés et, en cas de violation de cette interdiction, demander au préfet de département de mettre en demeure les gens du voyage de quitter les lieux. Lorsque cette mise en demeure n'a pas été suivie d'effets, l'évacuation forcée des résidences mobiles peut alors intervenir dans un délai de 24 heures sous réserve de l'absence de recours devant le juge administratif. Lorsqu'il est saisi, le juge administratif doit se prononcer dans les quarante-huit heures, ce qui garantit la célérité de la procédure d'évacuation. La mise en demeure reste par ailleurs applicable pendant un délai de sept jours et peut donc servir de fondement juridique à une nouvelle mesure d'évacuation forcée lorsque la résidence mobile se retrouve à nouveau en situation de stationnement illicite. Les stationnements illicites peuvent également être sanctionnés pénalement, l'article 322-4-1 du code pénal réprimant le délit d'installation illicite en réunion sur un terrain communal ou privé et la loi du 7 novembre 2018 ayant augmenté les sanctions correspondantes qui sont désormais d'un an d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende. En outre, ces dispositions pénales peuvent servir de cadre à la répression des actes de destruction, dégradation ou détérioration des biens appartenant à autrui commis par les gens du voyage, leur réparation pouvant être recherchée par la constitution de partie civile du propriétaire du terrain dans le cadre de cette procédure. Une action civile en responsabilité du fait personnel peut également être introduite indépendamment de toute procédure pénale, en application de l'article 1240 du code civil, en vue de l'obtention d'une indemnité compensatrice de la dégradation. Le décret du 26 décembre 2019 relatif aux aires permanentes d'accueil et aux terrains familiaux locatifs destinés aux gens du voyage prévoit que le droit d'usage acquitté par les personnes occupant ces aires comprend le droit d'emplacement et la consommation de l'eau et de l'électricité ; il est variable selon les collectivités et les prestations offertes, mais s'établit généralement à 25 euros/semaine. Les personnes s'installant sur ces aires s'acquittent également à leur arrivée d'un dépôt de garantie d'un montant maximum équivalent à un mois de droit d'emplacement qui est restitué au moment du départ de l'aire. En cas de dégradation constatée lors de l'état des lieux de sortie, le gestionnaire conserve tout ou partie du dépôt de garantie selon la gravité des dégâts constatés. Outre le droit d'usage et le dépôt de garantie, les collectivités disposant d'une aire permanente d'accueil perçoivent une aide forfaitaire au titre de l'allocation logement temporaire (ALT2), qui représente un budget de 15 millions d'euros annuel pour l'Etat. Le cumul du droit d'usage et des aides perçues par les collectivités permet donc de couvrir en grande partie les frais de fonctionnement et d'entretien des aires d'accueil. S'agissant d'une compétence décentralisée, il n'appartient pas à l'Etat de financer la mise en place spécifique de sanitaires à proximité de sites touristiques ou d'aires d'accueil. Si la réglementation permet déjà de faire supporter le coût des dégradations par les auteurs de ces dernières, le Gouvernement est sensible aux difficultés pratiques d'application rencontrées sur le terrain. Ainsi, le ministre d'État, ministre de l'intérieur a décidé de la mise en place d'un groupe de travail associant le ministère de l'intérieur, les associations d'élus locaux et des parlementaires. Le ministre François-Noël Buffet mène ces travaux. Le groupe de travail se réunit actuellement pour permettre l'élaboration d'une nouvelle doctrine d'intervention pour les forces de l'ordre, devant permettre de mettre en oeuvre efficacement l'ensemble des outils déjà prévus par la loi. Ce groupe de travail analyse également la possibilité de proposer des dispositions législatives nouvelles afin que l'ordre public soit respecté, que des enquêtes patrimoniales puissent être déclenchées et que les dommages soient évités, ou dans le cas contraire réparés.

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