Question de M. BLANC Grégory (Maine-et-Loire - GEST) publiée le 07/11/2024
M. Grégory Blanc demande à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie si dans le cadre de l'accompagnement de la politique du parcours résidentiel des propriétaires, en raison de la crise du crédit actuel et de la restriction de celui-ci par les banques, il pourrait être étudié dans les dispositifs envisagés et annoncés par le Premier ministre l'obligation pour les banques d'autoriser un transfert d'hypothèque d'un bien vendu vers un bien acheté en conservant le prêt à taux préférentiel.
Ainsi, les foyers qui auraient à rembourser un prêt par anticipation suite à la vente de leur bien pourraient réemprunter en conservant le même taux initial sur le montant qui leur restait à rembourser afin d'éviter un blocage financier supplémentaire dans la fluidité du marché. Par exemple, aujourd'hui, un couple, qui a un prêt à rembourser de 200 000 euros à 1 % par anticipation, en raison de la vente de son bien, ne peut réemprunter avec la même mensualité qu'à hauteur de 146 000 euros avec un taux réactualisé à 4,6 %. Cela constitue donc un motif supplémentaire de blocage du marché, puisqu'il n'y a alors aucun intérêt à changer de bien immobilier puisque dans ces conditions on peut difficilement avoir plus grand ou mieux, même avec un effort financier supplémentaire.
Il considère donc que si les banques étaient incitées au transfert de garantie sur le nouveau bien en gardant le même prêt, on débloquerait une partie du marché. Cela sans dépense supplémentaire de la part de l'État et sans perte pour la banque, puisque le prêt initial est bien conservé. Un tel dispositif, limité dans le temps et limité aux résidences principales, participerait rapidement de relancer une partie du marché immobilier.
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Transmise au Ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique
Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique publiée le 03/04/2025
Le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique est conscient des difficultés auxquelles peuvent être confrontés les ménages français lorsqu'ils souhaitent acheter un bien immobilier notamment lors de l'accès au crédit. Il convient de rappeler qu'un crédit est accordé sur une base contractuelle. Les banques, étant responsables des risques qu'elles acceptent de supporter, sont, de ce fait, seules décisionnaires en matière d'octroi de prêts, en fonction de l'appréciation qu'elles portent sur la situation financière de leurs clients et des garanties offertes. S'agissant plus particulièrement de la portabilité et de la transférabilité d'un crédit immobilier, la clause de portabilité permet à un propriétaire de financer un nouvel achat immobilier tout en conservant le prêt immobilier contracté pour le bien qu'il désire vendre, ainsi que ses conditions de taux. Autrement dit, la portabilité attache un crédit à l'emprunteur, alors qu'actuellement le crédit est attaché à un emprunteur pour un bien donné, c'est-à-dire à un couple bien-emprunteur. Une clause de transférabilité attache, quant à elle, un prêt à un bien. Un nouvel acheteur conserve donc les conditions de prêt du précédent propriétaire. Dans les deux cas, il devrait le cas échéant, et selon des critères à déterminer, être prévu un transfert des garanties associées au prêt (caution par un organisme de caution, assurance-emprunteur dans le cas de la portabilité). Les clauses susmentionnées sont déjà autorisées par les banques en France mais restent à leur discrétion. Il peut être souligné qu'imposer à un organisme prêteur une de ces deux clauses porterait atteinte à la liberté contractuelle et à la liberté d'entreprendre garanties constitutionnellement. En effet, elle reviendrait à contraindre une banque à contracter dans des conditions qui n'ont pas été choisies initialement. Si l'instauration d'une clause de portabilité ou de transférabilité obligatoire peut être justifiée par des motifs d'intérêt général - en l'espèce, la promotion de l'accession à la propriété - l'atteinte portée à la liberté d'entreprendre des établissements bancaires pourrait être regardée comme disproportionnée. Par ailleurs, en France, les prêts immobiliers sont accordés en majorité à taux fixe et non à taux variable ce qui protège les ménages emprunteurs. De surcroît, dans un contexte de baisse du taux directeur de la banque centrale européenne, les conditions liées aux opérations de crédit immobilier se desserrent. La renégociation des prêts susmentionnés, lorsque les taux d'intérêt diminuent, permet notamment aux ménages de réduire le surcoût des prêts contractés lorsque les taux d'intérêt sont élevés. Concernant l'encours des crédits immobiliers, du point de vue des banques françaises, l'instauration d'une clause de portabilité ou de transférabilité obligatoire comporterait un risque pour la rentabilité et les modalités de refinancement des crédits immobiliers. En effet, lorsque les banques proposent un crédit, elles modélisent une maturité effective (économique) plus faible que l'échéance contractuelle, la durée moyenne de détention des crédits s'élevant à 8 ans du fait des probabilités de remboursement anticipé[1], et au total, elles refinancent les crédits immobiliers qu'elles octroient par des ressources à maturité nettement plus courte que lesdits crédits. Dans un contexte de taux de marché plus élevés que les taux des crédits immobiliers sur le stock des encours, il n'est donc pas acquis qu'une telle mesure se ferait sans perte pour les banques, qui devraient refinancer plus longtemps à des taux plus élevés ces crédits passés. Le risque serait donc in fine que les banques, face à des ventes à perte sur leur stock existant, restreignent leur offre de crédits nouveaux et/ou en augmentent substantiellement la tarification, avec au final un effet contreproductif. Même si la mesure suggérée n'apparaît pas opportune, dans un environnement où l'accessibilité au marché de l'immobilier reste difficile, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle est néanmoins bien conscient de l'utilité d'une réflexion sur la fluidification des parcours résidentiels, y compris en termes de financement. C'est dans ce cadre qu'il a été demandé au Comité consultatif du secteur financier de travailler en 2025 sur le modèle français de financement de l'acquisition de logement. Le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sera très attentif aux conclusions à tirer de ces travaux. -------- ¹ Actuellement, la maturité moyenne à l'octroi des nouveaux crédits est de 22 ans en 2023 mais en moyenne les crédits immobiliers sont remboursés par anticipation au bout d'une période plus courte (de 7 à 10 ans). Les banques modélisent donc économiquement cette probabilité de remboursement par anticipation et affectent en fonction des ressources. La transférabilité ou la portabilité des crédits représenterait donc un risque les pour les banques car elles devraient réaffecter des ressources de plus long terme, donc plus coûteuses.
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