Question de M. PERNOT Clément (Jura - Les Républicains-R) publiée le 07/11/2024

M. Clément Pernot attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie s'agissant de la dégradation des finances publiques locales.

À la suite de la publication de son rapport annuel sur la situation financière des collectivités locales en date du 22 juillet 2024, la Cour des comptes met en évidence la dégradation globale de la situation financière des collectivités au cours de l'année 2023. Elle indique également qu'il existe une véritable divergence des situations financières des trois grandes catégories de collectivités.

En effet, les recettes de fonctionnement des collectivités (252 Mdeuros) ont ralenti (+ 3,4 % contre + 5,2 % en 2022 à périmètre constant). Leurs dépenses de fonctionnement (212,2 Mdeuros) ont accéléré (+ 6,1 % contre + 5 % en 2022 à périmètre constant). L'inflation (+4,9 % après +5,2 % en 2022) a encore eu des effets conséquents, directs comme indirects, sur leurs dépenses : hausse du prix des achats de biens et services (aliments, eau, énergie), indexation des prestations sociales, hausse de la charge d'intérêts de l'endettement financier et hausse des rémunérations (revalorisation du point d'indice de 1,5 % au 1er juillet 2023, après 3,5 % au 1er juillet 2022 notamment).

Les collectivités conservent cependant une situation financière saine. Elles ne peuvent emprunter que pour financer des dépenses d'investissement (et non des dépenses de fonctionnement ou des remboursements d'emprunts). À ce titre, leur dette est stable depuis trente ans, à 8,9% du PIB. En 2023, leur endettement financier (187,6 Mdeuros) a continué à se réduire par rapport au PIB (à 6,7 %). Il est d'autant plus limité que les collectivités conservent une trésorerie élevée (55,3 Mdeuros), bien qu'en diminution en 2023.

Cependant, une juste présentation des responsabilités de l'État dans la dégradation des déficits publics parait nécessaire, la Cour des comptes mettant systématiquement en avant le sérieux budgétaire. D'autant plus que les collectivités assument un ensemble de nouvelles charges (gestion des digues, recul du trait de côte ou du secteur de la petite enfance) pendant que l'État poursuit sa trajectoire de dépenses, largement grevée par des nationalisations d'impôts locaux.

C'est pourquoi il lui demande de bien vouloir lui définir le rôle de l'État dans la situation financière dégradée des collectivités locales.

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Transmise au Ministère auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics


Réponse du Ministère auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics publiée le 10/04/2025

Ainsi qu'a pu le relever la Cour des comptes dans son rapport annuel sur les finances publiques locales 2024, la dynamique des dépenses réelles de fonctionnement (DRF) des collectivités est notamment alimentée par les achats et charges externes, dans un contexte qui, encore récemment, se caractérisait par une inflation élevée. Les frais de séjour versés par les départements dans le cadre des politiques autonomie et de l'aide sociale à l'enfance sont également croissants. Par ailleurs, les frais de personnel et les aides à la personne ont fortement progressé es durant les dernières années. Enfin, les charges financières, si elles représentent une part résiduelle des DRF, s'accroissent aussi sous l'effet de la hausse des taux. Les recettes réelles de fonctionnement (RRF) observent une dynamique moindre que les DRF. Malgré un produit d'impôts locaux en nette augmentation, des concours de l'État et des fractions de TVA en hausse, la fiscalité transférée subit des évolutions plus modérées, voire négatives s'agissant des droits de mutation à titre onéreux (DMTO). Les collectivités se retrouvent exposées à un "effet ciseaux", toutefois très hétérogène selon les catégories de collectivités. Neutre pour les communes, plus important pour les groupements à fiscalité propre et les régions, il apparaît en revanche très significatif pour les départements. Ce faisant, l'impact sur l'épargne brute est très variable. Suivant le cycle électoral et également concernées par l'inflation, les dépenses réelles d'investissement (DRI) progressent aussi. Cependant, ces constats sur le temps court doivent être regardés avec précaution. Les difficultés des collectivités doivent être mises en perspective avec les résultats cumulés antérieurement. Ainsi, fin 2023, sur leurs budgets principaux, les régions disposaient d'un fonds de roulement de 1,2 Md euros, les départements de 7,7 Mds euros, les groupements à fiscalité propre de 8,2 Mds euros et les communes de 27,6 Mds euros. Les collectivités conservent ainsi dans leur ensemble une situation saine, notamment du point de vue de leur endettement, eu égard à la règle d'or de l'équilibre budgétaire. La situation des finances publiques au sens maastrichtien doit toutefois être regardée comme un ensemble. Ses trois composantes, administrations publiques centrales, locales et de sécurité sociale, sont liées par des flux financiers tels qu'ils ne permettent pas de raisonner avec une complète étanchéité. Les transferts financiers de l'État, qu'il s'agisse des prélèvements sur recettes, de la fiscalité transférée ou des crédits de la mission relations avec les collectivités territoriales, dépassent ainsi chaque année 100 Mds euros. Aussi, avec un déficit public pour 2023 de 154 Mds euros, soit 5,5 % du PIB, et une dette dépassant 3 000 Mds euros soit près de 110 % du PIB, le redressement des finances publiques appelle nécessairement à une solidarité entre les différentes sphéres d'administration publique. Dans ce contexte, la loi de finances pour 2025 prévoit que les collectivités territoriales contribueront à cette maîtrise des finances publiques à travers un mécanisme de stabilisation des fractions de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) affectées à leur profit en 2025 et un dispositif de lissage conjoncturel des recettes, pour un montant total estimé à 2,2 Mdeuros. Néanmoins, plusieurs mesures sont prévues dans cette loi de finances pour 2025 tendant à consolider les recettes des collectivités notamment les plus fragiles : la reconduction du même niveau d'augmentation de la péréquation au sein de la DGF qu'en 2024, le réhaussement de 0,5 point du taux maximal de taxe de publicité foncière ou de droit d'enregistrement pour une période de 3 ans en exonérant les primo-accédants, ainsi que l'instauration d'un versement mobilité destiné au financement des services de mobilité.

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