Question de Mme BORCHIO FONTIMP Alexandra (Alpes-Maritimes - Les Républicains) publiée le 09/01/2025
Mme Alexandra Borchio Fontimp alerte Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargée de la ruralité sur le cas de la commune de Breil-sur-Roya située dans son département des Alpes-Maritimes.
Ce cas loin d'être singulier illustre parfaitement la situation complexe dans laquelle se trouve une multitude de nos communes, particulièrement rurales. En effet, ce village emblématique du département des Alpes-Maritimes a été gravement touché par la tempête Alex en octobre 2020, connaissant ainsi des dégâts très importants dont le coût de la réparation est estimé à hauteur de 10 millions d'euros. La municipalité n'a pas lésiné pour reconstruire et s'adapter aux demandes de ses administrés mais elle doit faire face aujourd'hui à une double peine. En effet, l'assureur historique de Breil-sur-Roya avait initialement décidé de mettre fin à son contrat à compter du 31 décembre 2024, ce qui aurait eu pour conséquence de laisser ce territoire sans aucune couverture d'assurance à partir du 1er janvier 2025.
Faisant suite à cette annonce aussi brutale qu'injustifiée, elle a ainsi interpellé le Président du Sénat ainsi que l'ancien Premier ministre, Michel Barnier, pour trouver une solution qui satisfasse le maire concerné mais surtout qui protège les habitants déjà fortement impactés par les catastrophes naturelles rencontrées. Car une commune qui n'est pas assurée est une commune qui se retrouve dans l'incapacité de financer les réparations nécessaires et essentielles en cas de sinistre, renforçant ainsi les difficultés budgétaires d'ores et déjà accrues pour nos collectivités locales.
Suite au dépôt d'un recours devant le tribunal administratif ainsi qu'aux différentes interventions en soutien au maire, l'assureur est finalement revenu sur sa décision le 27 décembre 2024 en faisant le choix de prolonger d'un an uniquement certains contrats, laissant de fait 70 bâtiments communaux sans assurance. Cette décision contestable entraîne des conséquences non négligeables puisque les dommages aux biens desdits bâtiments ne seront pas concernés, ce qui n'aura pour finalité que d'aboutir à une situation dangereuse pour cette commune réputée sujette aux dégâts causés par les catastrophes naturelles.
Aussi et en réaction à cette situation ubuesque, le maire a pris un arrêté pour interdire les catastrophes naturelles sur tout le territoire de la commune. Purement symbolique, il souhaite ainsi mettre en lumière l'impuissance des communes face au système français des assurances.
Loin d'être un cas isolé, la commune de La Turbie, également située dans le département des Alpes-Maritimes, s'était retrouvée elle aussi dans une situation similaire puisqu'elle n'avait pas été assurée pendant plus de treize jours.
Des travaux de qualité ont été menés sur cette problématique, particulièrement au Sénat avec l'excellent rapport du Sénateur Jean-François Husson mais aussi par l'association des maires de France (AMF) sous la houlette d'Alain Chrétien et Jean-Yves Dagès.
En conclusion, il revient au législateur de se saisir à bras le corps de cet enjeu et d'y apporter des réponses pérennes. Ainsi, elle souhaite connaître les mesures envisagées par le Gouvernement pour y répondre dans les meilleurs délais.
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Réponse du Ministère délégué auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé de la ville publiée le 19/03/2025
Réponse apportée en séance publique le 18/03/2025
M. le président. La parole est à Mme Alexandra Borchio Fontimp, auteure de la question n° 248, adressée à Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargée de la ruralité.
Mme Alexandra Borchio Fontimp. Tous les sinistres sont interdits sur les bâtiments communaux : tel est l'objet de l'arrêté pris par le maire de Breil-sur-Roya, une commune des Alpes-Maritimes qui a failli être rayée de la carte après la tempête Alex. Confronté à l'impossibilité de trouver une assurance au 1er janvier, il a été contraint d'adopter cet arrêté, aussi absurde que réaliste !
Certes, entre-temps, le Bureau central de tarification (BCT) a finalement obligé cinq assureurs à se partager les risques de la commune, mais le compte n'y est pas, puisque le montant de la cotisation a été multiplié par huit et que la franchise est démesurée.
Par ailleurs, cerise sur le gâteau, les dégradations, les vols, les dégâts des eaux et les dommages électriques ne sont plus pris en charge, soit 99 % des sinistres habituels. C'est clairement de l'indécence financière !
Combien de temps allons-nous encore tolérer qu'une municipalité se retrouve dans une telle situation ubuesque ?
Le Sénat et l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité (AMF) ont produit d'excellents rapports qui révèlent la dégradation des relations entre les collectivités et les assurances, mais surtout proposent des recommandations pertinentes et lucides : l'État doit désormais s'en saisir !
Il est urgent de faire évoluer la dotation de solidarité aux collectivités victimes d'événements climatiques (DSEC) en élargissant la liste des biens éligibles, d'écarter le principe de reconstruction « à l'identique » ou encore d'étendre les prérogatives du médiateur de l'assurance.
Bien sûr, le marché de l'assurance des collectivités est moins rentable que celui des entreprises, mais les collectivités ne sont pas des clientes comme les autres. Elles sont chargées des missions de service public de proximité indispensables.
Lors de l'examen de la proposition de loi de Jean-François Rapin visant à soutenir les collectivités territoriales dans la prévention et la gestion des inondations, j'ai fait adopter une mesure de bon sens consistant à aider les communes à mieux évaluer leurs dégâts afin de les accompagner plus efficacement.
Dans le département des Alpes-Maritimes, comme partout en France, de plus en plus de collectivités rencontrent des difficultés pour accéder à une couverture assurantielle adéquate. Il faut aider les maires, madame la ministre ! Leur mandat est déjà marqué par de nombreuses crises.
En janvier dernier, dans cet hémicycle, le Gouvernement s'était engagé à proposer des solutions concrètes. Une réforme urgente du système d'assurance des collectivités doit être engagée !
J'interroge donc le Gouvernement sur les nouvelles mesures que vous proposez, car Breil-sur-Roya - comme vous le savez - n'est pas un cas isolé !
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Juliette Méadel, ministre déléguée auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargée de la ville. Madame la sénatrice Alexandra Borchio Fontimp, le Gouvernement est très attentif à ce que les collectivités puissent trouver une solution d'assurance pour les dommages matériels dont elles sont victimes, notamment en cas de catastrophe naturelle.
Tout d'abord, l'État est aux côtés des collectivités pour prévenir et indemniser le risque à travers des dispositifs qui ont fait leurs preuves, tels que le fonds de prévention des risques naturels majeurs, dit fonds Barnier, qui peut être mobilisé par les collectivités pour financer études, travaux ou équipements de prévention ou de protection contre les risques naturels, ou encore la dotation de solidarité aux collectivités victimes d'événements climatiques.
Pour instaurer un climat de confiance entre collectivités territoriales et assureurs, plusieurs actions ont été déjà engagées.
En septembre 2023, la conclusion d'un accord avec les assureurs a été annoncée afin que ces derniers mettent en place le recours au médiateur de l'assurance, ce dernier intervenant comme un médiateur conventionnel, pour les litiges portant sur un contrat d'assurance de collectivités territoriales.
Le BCT a, par ailleurs, pu intervenir, comme c'est le cas pour la commune de Breil-sur-Roya que vous évoquez à juste titre, madame la sénatrice.
La situation n'est cependant pas satisfaisante. S'agissant de l'impossibilité de trouver un contrat, plusieurs propositions ont été émises par la mission d'expertise menée par Alain Chrétien, maire de Vesoul, et Jean-Yves Dagès, ancien président de Groupama. Elles rejoignent les conclusions du rapport du sénateur Jean-François Husson.
Pour répondre à cette situation de déséquilibre, il convient de dynamiser le marché assurantiel, de veiller à la diffusion des bonnes pratiques en matière de commande publique, tout en engageant des mesures visant à mieux maîtriser la sinistralité.
Le Gouvernement travaille actuellement avec les assureurs pour trouver des solutions pertinentes et innovantes. Il faut davantage accompagner les communes afin qu'elles renforcent la connaissance de leur patrimoine et ciblent leurs efforts de prévention, comme l'a fait le maire de Breil-sur-Roya.
L'état des lieux étant posé, le Gouvernement proposera des solutions aux difficultés assurantielles rencontrées par les collectivités territoriales. François Rebsamen les réunira très prochainement, avec Éric Lombard, afin de présenter un plan d'action. Il comportera une série d'actions concrètes pour que chaque collectivité, quelles que soient sa taille et son exposition au risque, puisse trouver une solution d'assurance adaptée.
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