Question de M. VALLET Mickaël (Charente-Maritime - SER) publiée le 13/02/2025

M. Mickaël Vallet interroge M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur à propos de ladite « nuit bleue » d'octobre 2023 en Corse. Ce terme euphémistique, par un fâcheux abus de langage, désigne une série d'attentats nocturnes à l'explosif, simultanés ou se suivant dans un temps relativement limité.

Dimanche 8 octobre 2023, plusieurs explosions ont été entendues dans les environs d'Ajaccio, de Bastia, ainsi que dans de nombreux villages, comme à Viggianello, Vico ou encore à Lecci, dans le sud de la Corse, relate la presse.

En Haute-Corse, d'après une source judiciaire, des maisons mais aussi des lotissements ont été visés par des bombes comme à Erbalonga où quatre déflagrations ont retenti, à Lucciana et sur la plaine orientale à Santa-Lucia-di-Moriani mais aussi à Santa-Reparata-di-Balagna.

C'est la plus grande « nuit bleue » en Corse depuis plus de dix ans. Au total, 30 attentats ont été commis pendant cette nuit. À ce jour, on compte près de 120 attentats en Corse depuis les événements de mars 2022.

Le procureur de la République d'Ajaccio a indiqué que la plupart des cibles de ces attentats terroristes étaient des « résidences secondaires achevées ou en construction et inoccupées ».

Une grande partie des attentats a été revendiquée par le front de libération nationale corse (FLNC) et Ghjuventu Clandestina Corsa (GCC ou « Jeunesse clandestine corse »).

Or, à la différence d'autres événements de moindre importance que le ministre n'a pas manqué de commenter, il ne trouve pas trace d'expression du ministère sous la forme de communiqué de presse, ou de déclarations publiques, sur les réseaux sociaux comme sur les canaux « historiques » de diffusion.

Il souhaite donc connaître les raisons pour lesquelles les décisions nécessairement prises par le ministre à la suite de ces attentats et les déclarations que celui-ci n'a probablement pas manqué de faire n'ont pas fait l'objet d'une communication par ses services de presse.

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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 17/07/2025

Dans la nuit du 8 au 9 octobre 2023, entre 22h00 et 03h32, plusieurs habitations ont été visées par des destructions ou tentatives de destruction par explosifs sur l'ensemble de la Corse. On dénombre 15 faits en Corse-du-Sud et 16 en Haute-Corse dans la zone de compétence de la gendarmerie nationale. À cela s'ajoute une attaque dans la zone de compétence de la police nationale : l'ancienne annexe du centre des impôts d'Ajaccio a été détruite par une explosion. Certaines cibles portaient des tags « FLNC ». Les procédés utilisés sont ceux traditionnellement employés par le FLNC : bonbonnes de gaz, extincteurs, bombes agricoles, ou encore mélanges nitrate-sucre. Il ne s'agit donc pas d'actes isolés ou improvisés, mais d'une action coordonnée, utilisant des moyens clairement identifiés. Dès le lendemain matin, un communiqué de revendication a été adressé à Corse-Matin par le FLNC réunifié, rappelant leur refus d'un destin commun avec la France. Le message était bref et ne listait pas les cibles. Cette série d'attentats intervenait dans un contexte politique tendu, marqué par la visite du Président de la République la semaine précédente et ses annonces sur une possible autonomie pour la Corse, fortement rejetées par les mouvements indépendantistes comme Core in Fronte et Corsica Libera. La date elle-même n'est pas anodine : le 8 octobre est symboliquement associée à la bataille de Borgo de 1768, synonyme de victoire corse contre les troupes françaises. Dès les premières heures, le parquet national antiterroriste s'est saisi des faits, avec une cosaisine de la section de recherches de la gendarmerie de Corse, de la sous-direction antiterroriste (DNPJ) et de la police judiciaire locale. Les faits ont été répartis entre les différents unités et services en fonction des pistes d'enquête. Le procureur de la République d'Ajaccio a confirmé le caractère coordonné des faits et leur rattachement à la mouvance clandestine corse. Par ailleurs, volontairement, aucune communication officielle n'a été effectuée par le ministère de l'intérieur concernant ces faits, ce qui est conforme à la pratique habituelle dans les affaires relevant d'enquêtes judiciaires en matière terroriste, par nature complexes et pour lesquelles la discrétion est de mise. Il convient toutefois de souligner que les faits ont été largement couverts par la presse nationale et régionale, à l'instar du journal Le Monde, qui a mis en lumière l'ampleur et la portée symbolique de cette série d'attentats, ainsi que les enjeux politiques sous-jacents. Les enquêtes judiciaires sont toujours en cours et mobilisent les militaires de la gendarmerie et les agents de la police nationale.

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