Question de Mme SOLLOGOUB Nadia (Nièvre - UC) publiée le 13/03/2025

Mme Nadia Sollogoub attire l'attention de Mme la ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur la méthode de suivi de la population lupine.
La méthode de comptage du loup employée par l'Office français de la biodiversité (OFB) suscite de nombreuses interrogations quant à sa fiabilité. En effet, les cartographies de l'OFB, pour les années 2018 et 2019, indiquaient une présence "occasionnelle" du loup dans le département de la Nièvre. Toutefois, les données plus récentes, notamment celles de 2022, ne mentionnent plus aucune présence du loup dans ce département. Cette absence de reconnaissance officielle est pourtant en contradiction avec des observations récurrentes et documentées sur le terrain. Selon l'OFB, plusieurs cas ont été recensés dans la Nièvre : un cas est en cours d'expertise et cinq cas ont été retenus, sans qu'aucune information sur l'espèce ADN ne soit communiquée pour ces derniers.
Au cours de l'année 2024, les attaques sur le bétail ont continué de se multiplier, atteignant 110 dommages ayant fait l'objet d'un constat par les services de l'OFB. Sur ses 110, 54 ont été reconnus comme liés à une prédation et avec la responsabilité du loup non écartée (LNE).
Selon l'Observatoire du loup dans la zone de Magny-Cours, la présence de deux espèces a été signalée depuis 2021. Un loup sombre, filmé en septembre 2023 à Ville-Langy, semble s'être déplacé vers Magny-Cours depuis juillet 2024. Un second individu, plus clair, a été observé dans la même zone. La dépouille d'un loup a été découverte à Urzy, le 14 juillet 2024. Les services de l'État ont mobilisé les louvetiers dès août 2024.
Il y a également deux louvarts (jeune loup de 1 à 2 ans) qui ont été photographiés sur la commune de Livry le 23 octobre 2024.
Dans ces conditions, il paraît légitime de s'interroger sur la fiabilité des méthodes de recensement et de comptage du loup, ainsi que sur la transparence des instances concernées. Il semble essentiel d'adapter ces méthodes aux réalités du terrain, afin d'assurer une gestion efficace et apaisée de la présence du loup sur notre territoire.
Au regard de ces éléments, elle lui demande de préciser les critères et la méthodologie utilisés par l'OFB pour cartographier la présence du loup et justifier l'absence de mention de la Nièvre dans les données récentes et quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour améliorer la transparence de la collecte des données et assurer une meilleure prise en compte des signalements effectués par les acteurs locaux.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire publiée le 26/03/2025

Réponse apportée en séance publique le 25/03/2025

M. le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, auteur de la question n° 386, adressée à Mme la ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

Mme Nadia Sollogoub. Madame la ministre, je souhaite attirer votre attention sur la méthode de suivi de la population lupine employée par l'Office français de la biodiversité (OFB), dont la fiabilité suscite de nombreuses interrogations.

Les cartographies de l'OFB indiquaient ces dernières années une présence occasionnelle du loup dans le département de la Nièvre, dont je suis élue. Pourtant, en 2022, elles n'en font plus mention. Or cette absence de reconnaissance officielle est en contradiction complète avec les observations récurrentes et documentées sur le terrain.

C'est pourquoi, madame la ministre, au regard de ces éléments, je vous demande de préciser les critères et la méthodologie utilisés par l'OFB pour cartographier la présence du loup.

Je souhaite également connaître les mesures que le Gouvernement entend prendre pour améliorer la transparence de la collecte des données et assurer une meilleure prise en compte des signalements effectués par les acteurs locaux.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire. Madame la sénatrice Nadia Sollogoub, élue d'un territoire d'élevage moi-même, je sais combien la présence du loup emporte de conséquences sur l'activité pastorale en France et je travaille sur le sujet depuis de très nombreuses années. Je partage donc votre préoccupation.

Dans ce contexte, afin de gagner la confiance de tous, il est indispensable de disposer de données fiables sur l'estimation et la répartition du nombre d'individus en France. C'est l'objet des travaux qu'a conduits l'OFB l'année dernière. Je n'ignore pas pour autant les interrogations quant à la fiabilité de ce comptage.

La méthode d'estimation de la population du loup a fait l'objet d'une évolution en 2024, pour trois raisons.

Premièrement, l'OFB publiait jusqu'alors deux chiffres par an et il a été décidé de disposer d'une estimation unique pour une meilleure lisibilité ; deuxièmement, les marges d'erreur de l'ancienne méthodologie étaient de plus en plus importantes, ce qui ruinait la confiance à l'égard des chiffres et nourrissait la colère des éleveurs ; troisièmement, vous admettrez qu'il existait un réel besoin de transparence.

La nouvelle méthode, basée sur les données génétiques, a été présentée aux membres du groupe national Loup à la fin de l'année 2024, pour une mise en oeuvre en 2025.

Je peux vous assurer que, grâce au travail de l'OFB, cette nouvelle méthode, unique en Europe, permet de disposer rapidement d'une estimation fiable de la population. Nous aurons, en tout état de cause, à juger de son opportunité.

Cette année, les efforts de l'OFB portent sur une meilleure répartition de la collecte des indices afin d'assurer un suivi homogène. Pour cela, l'Office a développé une carte accessible au grand public sur le site loupfrance.fr. Vous pourrez y retrouver les indices recueillis pour la Nièvre et le traitement qui leur a été réservé. Cela apporte un gage de transparence essentiel dans ce dossier.

Les données que vous évoquez, et leur traitement, relèvent de l'ancienne méthode. Grâce à la nouvelle, appuyée sur l'analyse de l'ADN des individus, un suivi plus fiable pourra être établi. Au fil des années, cela permettra de mieux comprendre comment les loups se répartissent, de mieux réguler leur présence et ainsi de mieux répondre aux attaques qu'ils opèrent sur nos élevages.

M. le président. Il faut conclure.

Mme Annie Genevard, ministre. Tel est le voeu que je forme et je peux vous assurer, madame la sénatrice, que j'y porterai une attention toute particulière.

M. le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour la réplique.

Mme Nadia Sollogoub. Vous avez toute ma confiance, madame la ministre, mais l'essentiel est maintenant de s'assurer que cette méthode de comptage va mettre en évidence combien le loup a échappé à tout contrôle dans mon département : onze attaques en 2023, quarante-huit en 2024 et déjà trente-neuf en 2025.

Peu importe, finalement, que la méthode de comptage soit efficace, il est désormais absolument vital d'obtenir des autorisations de régulation. En leur absence, les éleveurs connaissent actuellement un immense sentiment d'abandon. Ils se trouvent dans une situation absolument dramatique : toutes les nuits, la seule question est de savoir où le carnage aura lieu. Des milices s'organisent !

Nous sommes en territoire de bocage, il est donc absolument impossible, vous le savez très bien, de rentrer toutes les nuits tous les agneaux et tous les veaux. Les procédures sont très longues, d'une extrême complexité, totalement inefficaces et, pour finir, incompréhensibles. Les éleveurs sont au bord du gouffre, fous de rage et de désespoir.

Il faut absolument que cette méthode de comptage colle à la réalité et que nous puissions, de façon réactive, efficace et urgente, apporter des réponses et réguler le loup dans nos départements, où l'animal a échappé à tout contrôle.

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