Question de M. PIEDNOIR Stéphane (Maine-et-Loire - Les Républicains) publiée le 20/03/2025

M. Stéphane Piednoir attire l'attention de Mme la ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l'emploi sur les risques emportés par la baisse de prise en charge des contrats d'apprentissage, sans prise en compte de la qualité de l'enseignement dispensé. Les entreprises ont recours aux contrats d'apprentissage pour pouvoir recruter à un coût significativement moins élevé que celui d'un jeune diplômé. Alors que le cap du million de jeunes en apprentissage a été franchi l'année dernière, l'augmentation du reste à charge risque d'aboutir à une baisse substantielle du nombre d'apprentis en raison de leur perte d'attractivité économique. Les étudiants les moins favorisés verront leur accès à des études de qualité limité puisque l'offre en alternance joue un rôle central dans la décision de leur formation. Les aides d'État à l'apprentissage ont, depuis 2018, créé un appel d'air permettant à de nombreuses écoles d'ouvrir leurs portes. Ainsi, les écoles privées lucratives représentent aujourd'hui 15 % des étudiants en France. Contrairement à l'enseignement privé lucratif, le modèle des établissements d'enseignement supérieur privé d'intérêt général (EESPIG), dont les écoles réinvestissent l'intégralité de leurs revenus dans la formation et la recherche, ne pourra pas absorber cette diminution de l'accompagnement. Cette situation fragiliserait dès lors ces écoles vertueuses de manière injustifiée. Malgré l'impérieuse nécessité de réduire la dépense publique, ce changement doit nécessairement s'accompagner d'une prise en compte de la qualité des formations dans l'attribution des aides de l'État. Une attribution des aides reposant sur des critères de qualité inciterait tous les établissements à se tourner vers un enseignement à haute valeur ajoutée et permettrait d'élaguer les offres les moins scrupuleuses, récompenserait les modèles les plus vertueux, tout en préservant le principe de réduction des dépenses. Il lui demande d'établir des critères objectifs pour garantir l'efficacité des aides à l'apprentissage lors de l'attribution du périmètre de ces aides par décret.

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Réponse du Ministère auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé du travail et de l'emploi publiée le 26/03/2025

Réponse apportée en séance publique le 25/03/2025

M. le président. La parole est à M. Stéphane Piednoir, auteur de la question n° 407, adressée à Mme la ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l'emploi.

M. Stéphane Piednoir. Madame la ministre, j'attire votre attention sur plusieurs problématiques soulevées par la baisse de prise en charge des contrats d'apprentissage, décidée sans prise en compte de la qualité de l'enseignement dispensé.

Chacun le sait, les entreprises ont recours aux contrats d'apprentissage pour recruter à un coût significativement moins élevé que celui de l'embauche d'un jeune diplômé.

Alors que le cap du million de jeunes en apprentissage a été franchi l'an dernier, l'augmentation du reste à charge risque d'entraîner une baisse substantielle du nombre d'apprentis, en raison d'une perte d'attractivité économique. Un tel retour en arrière serait évidemment regrettable.

Les étudiants les moins favorisés verront leur accès à des études de qualité limité, puisque l'offre en alternance joue un rôle essentiel dans leur choix de formation.

De plus, les aides d'État à l'apprentissage ont, depuis 2018, créé un appel d'air permettant à de nombreuses écoles, parfois peu scrupuleuses, d'ouvrir leurs portes en proposant diverses formations. Les écoles privées lucratives représentent aujourd'hui 15 % des étudiants en France.

Contrairement à ces écoles privées à but lucratif, les établissements d'enseignement supérieur privé d'intérêt général (Eespig) réinvestissent l'intégralité de leurs revenus dans la formation et la recherche. Ces écoles vertueuses ne pourront pas absorber la diminution de l'accompagnement et risquent, dès lors, d'être fragilisées de manière injustifiée.

La réduction de la dépense publique est bien sûr une impérieuse nécessité ; mais le changement dont il s'agit doit s'accompagner d'une prise en compte de la qualité des formations dans l'attribution des aides.

Il faut mettre en avant des critères de qualité pour inciter tous les établissements à se tourner vers un enseignement à haute valeur ajoutée. Ce faisant, on élaguera les offres les moins solides et l'on récompensera les modèles les plus vertueux tout en préservant le principe de réduction des dépenses.

M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.

M. Stéphane Piednoir. Madame la ministre, votre collègue chargé de l'enseignement supérieur et vous-même pouvez-vous concevoir et mettre en oeuvre de tels critères objectifs pour garantir l'efficacité des aides à l'apprentissage ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l'emploi. Monsieur le sénateur Piednoir, nous assistons à une véritable révolution culturelle en matière d'apprentissage.

Contrairement à d'autres pays, la France part aujourd'hui du principe que l'apprentissage concerne tous les jeunes, quel que soit leur niveau de qualification, de l'infrabac au master. Dans un pays qui reste obsédé par les diplômes - on peut le déplorer, mais c'est ainsi -, il faut faire comprendre à tous que l'apprentissage n'est pas une voie de garage.

Nous avons déjà rationalisé les aides aux entreprises : pour les entreprises de moins de 250 salariés, qui concentrent 80 % des apprentis, l'enveloppe est passée de 6 000 à 5 000 euros, et nous allons continuer ce travail.

Vous m'interrogez quant au contenu des formations.

Tout d'abord, il convient en effet d'adapter les offres d'apprentissage et les orientations aux besoins actuels de l'économie, notamment aux besoins des entreprises, en insistant sur les métiers d'avenir. Nous avons lancé une concertation en ce sens à la fin du mois de novembre dernier, avec les représentants des branches professionnelles et les partenaires sociaux. Il s'agit de redonner la main aux branches professionnelles pour qu'elles puissent décider d'elles-mêmes de variations beaucoup plus fortes sur les coûts contrats en fonction des besoins des entreprises.

Dans la même logique, nous devons être sûrs d'orienter les apprentis, quel que soit leur niveau de qualification, vers les besoins réels des entreprises, vers les métiers d'avenir, qui sont les mieux rémunérés et offrent les plus belles perspectives.

Cet effort passe aussi par une meilleure information des jeunes et des familles, que ce soit via Parcoursup ou InserJeunes, qui donne des perspectives et des indications relatives aux différents métiers - je pense en particulier au taux d'emploi et aux rémunérations attendues.

Enfin, la révolution de l'apprentissage doit maintenant s'accompagner d'un meilleur contrôle de qualité. Nous y travaillons de concert avec Mme la ministre de l'éducation nationale et M. le ministre chargé de l'enseignement supérieur. À l'évidence, une régulation doit être assurée, non seulement au travers de Qualiopi et des travaux de la Cour des comptes, mais aussi quant au contenu des formations. C'est un sujet que nous sommes appelés à traiter dans le cadre de nos concertations avec les partenaires sociaux.

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