Question de Mme MARGATÉ Marianne (Seine-et-Marne - CRCE-K) publiée le 15/05/2025
Question posée en séance publique le 14/05/2025
M. le président. La parole est à Mme Marianne Margaté, pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.
Mme Marianne Margaté. Ma question s'adresse à Mme la ministre chargée du logement.
L'Insee a récemment publié une enquête intitulée Pauvreté monétaire, privation et difficultés financières, qui montre que 15 % de la population se situe sous le seuil de pauvreté. L'inflation que nous connaissons depuis quelques années laisse craindre le pire à cet égard, et le nombre de familles qui rencontrent des difficultés chaque fin de mois va encore augmenter.
Hier soir, le Président de la République a parlé pendant trois heures, mais il n'a rien dit, ni sur la pauvreté ni sur le logement, alors que cette crise concerne 12 millions de personnes. En 2017, il déclarait : « Je ne crois pas au ruissellement, [...] je crois à la cordée. » En ce qui nous concerne, nous ne voyons ni cordée ni ruissellement. Nous ne voyons que des familles de plus en plus nombreuses à être prises à la gorge par des dettes insurmontables.
Je pense notamment aux dettes locatives. On observe en effet une hausse sans précédent des loyers impayés : les commandements de payer ont crû de 11 % en un an. En outre, les commissaires de justice ont constaté une explosion des expulsions de locataires, qui ont augmenté de 87 % en un an. Or seuls 10 % à 15 % des personnes expulsées sont finalement relogées.
Combien d'enfants sont-ils concernés ? Combien vont à l'école après avoir passé la nuit dans une voiture ? Combien de ruptures scolaires sont ainsi provoquées ? Nous avons tous ici adopté une résolution demandant qu'il n'y ait plus d'enfants à la rue. Or la moindre des choses pour atteindre cet objectif est de ne pas les y envoyer, surtout sans solution de relogement.
La loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, dite loi Dalo, a été adoptée à l'unanimité à l'Assemblée nationale, voilà dix-huit ans. Depuis lors, c'est la loi du 27 juillet 2023 visant à protéger les logements contre l'occupation illicite, dite loi Kasbarian, qui prime, et 51 % des ménages que l'on expulse sans solution de relogement sont reconnus Dalo ; 18 650 ménages ne sont ainsi pas relogés dans les délais réglementaires.
Madame la ministre, si les locataires ont des devoirs, l'État en a aussi. Le droit au logement n'est pas appliqué aujourd'hui en France ; d'ailleurs, en 2023, c'était la première fois que l'accès au logement des ménages Dalo chutait, représentant seulement 4,81 % des attributions annuelles.
Ma question est donc simple : quand l'État respectera-t-il la loi ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K. - Mme Émilienne Poumirol applaudit également.)
Réponse du Ministère auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé du logement publiée le 15/05/2025
Réponse apportée en séance publique le 14/05/2025
M. le président. La parole est à Mme la ministre chargée du logement.
Mme Valérie Létard, ministre auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargée du logement. Vous avez raison, madame la sénatrice, de rappeler que le logement connaît une crise inédite, qui pèse particulièrement sur les plus fragiles.
Face à cela, notre premier défi consiste bien évidemment à relancer la production de logements abordables. Pour ce faire, nous avons fait le choix résolu de nous appuyer sur les bailleurs sociaux. C'est le sens de la feuille de route que j'ai signée avec ce secteur en février dernier, dans la foulée du travail que j'avais préalablement mené avec les parlementaires, que je remercie, car ils ont été un vrai soutien, ainsi qu'avec Éric Lombard.
Ce travail a permis d'obtenir une baisse du taux du livret A à hauteur de 850 millions d'euros, afin d'encourager la production de logements, et une diminution de la réduction de loyer de solidarité (RLS). À cet égard, je remercie le Premier ministre, qui, malgré nos difficultés financières, a validé l'arrêté RLS consacrant la mobilisation de fonds propres pour obtenir ce taux du livret A et ces liquidités, afin d'être au rendez-vous pour atteindre l'objectif des 116 000 logements nouveaux et des 130 000 rénovations qui figurent dans la feuille de route conclue avec les bailleurs sociaux.
Évidemment, nous avons également relancé la Commission nationale des impayés de loyer pour envisager des propositions de solutions, en coordination avec les départements, afin de mieux prévenir ce risque.
En outre, afin d'accompagner le secteur et de répondre ainsi au besoin d'attributions de logement, nous allons développer le prêt à taux zéro pour les ménages modestes, qui libéreront alors des places dans le parc locatif.
Nous améliorerons par ailleurs le statut du bailleur privé, afin de relancer la production de logements locatifs abordables privés.
Ainsi, parallèlement à la lutte contre l'habitat indigne, à laquelle le Sénat prend toute sa part, nous allons mettre les bouchées doubles sur ce sujet. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et RDPI.)
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