Question de Mme BOYER Valérie (Bouches-du-Rhône - Les Républicains) publiée le 15/05/2025
Question posée en séance publique le 14/05/2025
M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Valérie Boyer. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.
Monsieur le ministre, le 31 mars dernier, le Président de la République et son homologue algérien s'accordaient sur une reprise du dialogue et de la coopération. Pourquoi une telle bienveillance de la part de notre pays, alors que l'incarcération inique de Boualem Sansal dure depuis maintenant six mois ?
Le bilan de cette tentative de rapprochement sous couvert de repentance perpétuelle et unilatérale est calamiteux. Aucun dossier n'a avancé, Boualem Sansal est toujours un otage politique et diplomatique du président Tebboune et les affronts se succèdent, puisque l'Algérie vient d'expulser quinze agents des services diplomatiques et consulaires français.
Obligations de quitter le territoire français (OQTF) refusées, Kabyles et réfugiés politiques menacés sur le sol français, élus de notre pays actuellement utilisés par l'Algérie pour déployer ses stratégies d'influence : la liste est longue. Vous qualifiez vous-même ces faits de « brutaux » et d'« incompréhensibles ». Ils révèlent les véritables intentions d'Alger à notre égard.
Pour y répliquer, vous avez annoncé le renvoi en Algérie de tous les agents titulaires de passeport diplomatique ne disposant pas de visa. Combien sont-ils ? Pouvez-vous nous en dire plus sur la « riposte graduée » ?
Vous n'avez pas répondu à mon collègue Pascal Allizard, il y a quelques jours. Aussi, je vous le demande de nouveau : pourquoi poursuivre les relations entre nos pays sur la base des accords dérogatoires de 1968 ? Le coût de ces accords reste inconnu, malgré les interrogations du Sénat.
M. Michel Savin. C'est vrai !
Mme Valérie Boyer. Par ailleurs, monsieur le ministre, comment justifiez-vous le silence du Président de la République, qui, hier, après trois heures d'interview, n'a pas prononcé une seule fois le nom de notre compatriote Boualem Sansal ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Max Brisson. Très bien !
Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 15/05/2025
Réponse apportée en séance publique le 14/05/2025
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.
M. Jean-Noël Barrot, ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Madame la sénatrice Valérie Boyer, la relation entre les gouvernements algérien et français est totalement gelée depuis le 14 avril dernier, date à laquelle les autorités algériennes ont pris la décision injustifiée et injustifiable d'expulser douze agents français en poste sur leur territoire.
Cette décision s'oppose à l'esprit qui avait présidé à l'échange entre les deux présidents et à ma visite du 6 avril. Cette dernière avait vocation à ouvrir le champ des coopérations, y compris en posant la question de la révision éventuelle des accords qui régissent notre relation, mais aussi à plaider en faveur d'un geste d'humanité à l'égard de notre compatriote Boualem Sansal, dont le Gouvernement se préoccupe de l'état de santé et des conditions de détention.
Le gouvernement français a répondu à ces décisions brutales de manière immédiate et ferme, en expulsant à son tour douze agents algériens en poste en France et en rappelant notre ambassadeur - je lui rends hommage - pour des consultations, qui sont en cours.
Dimanche 11 mai, les autorités algériennes ont pris, une nouvelle fois, une décision incompréhensible et brutale consistant à demander le départ immédiat de leur territoire des agents français en poste pour de courtes missions, à savoir moins de quatre-vingt-dix jours, lesquelles ne nécessitent pas de visa.
Le gouvernement français y a répondu une fois encore de manière immédiate et ferme : j'ai convoqué le chargé d'affaires algérien à Paris pour lui signifier que nous prenions exactement la même décision - renvoyer tous les agents titulaires d'un passeport diplomatique qui ne disposent pas de visa - et que, en fonction de l'évolution de la situation, nous ne nous interdisions rien.
La France s'est montrée ouverte au dialogue. Les autorités algériennes ayant préféré prendre un autre chemin, il leur appartient désormais de choisir : veulent-elles mettre un terme aux tensions qui perturbent la relation entre nos deux pays ? (Mme Valérie Boyer lève les yeux au ciel.)
De son côté, la France ne s'interdit pas - j'y insiste -, si besoin, de prendre de nouvelles mesures, comme elle l'a déjà fait sous l'autorité du Premier ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. - M. Olivier Cadic applaudit également. - Marques d'ironie sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jacques Grosperrin. Ce qui veut dire ?
M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour la réplique.
Mme Valérie Boyer. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre, mais il y a urgence : Boualem Sansal est en danger de mort. Pourquoi ne répondez-vous pas aux demandes d'intervention en sa faveur ?
Rien ne justifie que la France cesse de défendre ses intérêts ou qu'elle accepte encore, avec le soutien d'une partie de la gauche, des provocations et des ingérences qui n'ont que trop duré ! Comme l'a justement rappelé Bruno Retailleau, « la France est une grande nation. Il n'y a pas seulement un problème diplomatique, il y a aussi une question de fierté du peuple français, qui ne veut plus que l'Algérie puisse nous humilier ».
Soixante-trois ans après, il est temps de changer de paradigme et de revenir sur des accords iniques et défavorables à la France. Quelles que soient les douleurs de l'Histoire, rien ne peut justifier que l'on humilie notre pays, que l'on retienne un de nos compatriotes, âgé et malade, que des ingérences aient lieu sur notre sol ou que des actions soient menées à l'encontre de nos compatriotes réfugiés politiques.
Monsieur le ministre, il faut vraiment que cesse ce comportement : il y a urgence ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
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