Question de M. ARNAUD Jean-Michel (Hautes-Alpes - UC) publiée le 22/05/2025

Question posée en séance publique le 21/05/2025

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Jean-Michel Arnaud. Monsieur le ministre d'État, ministre de l'intérieur, ma question porte sur les moyens affectés à la lutte contre l'immigration illégale, tout particulièrement à la frontière italienne dans le département des Hautes-Alpes, au col de Montgenèvre.

En effet, ce col, situé entre 1 800 et 1 900 mètres d'altitude, est devenu en 2015 le premier point d'entrée terrestre de flux illégaux de migrants en France. On constate ainsi une augmentation de plus de 130 % du nombre des passages entre 2024 et 2025. Face à ces afflux et compte tenu des conditions géographiques et climatiques du col, la police aux frontières est, tout bonnement, dépassée.

Premièrement, la charge de travail ayant quadruplé, le manque de personnel se fait durement ressentir, avec un nombre insuffisant d'officiers de police judiciaire.

Deuxièmement, les locaux sont inadaptés, tant à un accueil digne pour les migrants qu'à des conditions de travail décentes pour les fonctionnaires de police. Je rappelle que les rétentions administratives s'opèrent dans des Algeco situés à plus de 2 000 mètres d'altitude.

Troisièmement, il existe un flou juridique concernant le traitement des étrangers en situation irrégulière depuis que la Cour de justice de l'Union européenne a estimé, dans un arrêt du 21 septembre 2023, que la France ne pouvait pas procéder au refoulement de personnes migrantes entrées illégalement sans que ces dernières aient bénéficié d'un délai au cours duquel elles peuvent quitter volontairement le territoire.

Monsieur le ministre, ma question est simple. Le Gouvernement compte-t-il déployer des moyens durables pour faire face à cette situation, qui n'est pas sans conséquence sur la sécurité du territoire national dans son ensemble ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC. - Mme Lauriane Josende applaudit également.)


Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 22/05/2025

Réponse apportée en séance publique le 21/05/2025

M. le président. La parole est à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur.

M. Bruno Retailleau, ministre d'État, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur Jean-Michel Arnaud, nous sommes parvenus à verrouiller la frontière entre les Alpes-Maritimes et l'Italie. Ainsi, désormais, le flux d'Érythréens passe en Italie, par Lampedusa, puis par le col de Montgenèvre, donc par les Hautes-Alpes. En effet, 90 % des mineurs non accompagnés qui ont été interceptés proviennent de l'Érythrée.

Qu'allons-nous faire ? Tout d'abord, protéger la frontière. Vous savez que, contrairement à beaucoup d'autres pays, nous n'avons pas de corps unifié de gardes-frontières.

Nous avons donc constitué un corps diversifié, comprenant les gendarmes, la police aux frontières, la douane, bien sûr, et l'armée, au travers de l'opération Sentinelle, pour mieux garder les frontières. J'ai également décidé de dépêcher une compagnie républicaine de sécurité (CRS) pour renforcer ces effectifs. Ces derniers seront également complétés par des officiers de police judiciaire et bénéficieront de bâtiments modulaires supplémentaires. C'est fondamental.

Je mentionne, par ailleurs, l'Office central pour la répression de la traite des êtres humains (OCRTEH), qui traque les filières dans ce domaine. Ainsi, l'an dernier, nous avons pu démanteler 269 d'entre elles, qui comprennent de véritables trafiquants d'êtres humains. Nous renforcerons cette dimension de notre action.

Vous m'interrogez sur la question juridique, monsieur le sénateur, notamment la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne de septembre 2023, dite ADDE, du nom de l'association Avocats pour la défense des droits des étrangers. Elle nous complique énormément le travail, comme vous le savez.

Avec l'Italie, nous avons obtenu des résultats, notamment dans les Alpes-Maritimes. Nous avons, avec des patrouilles mixtes, la possibilité d'avoir une procédure simplifiée. Il faut faire de même dans votre département des Hautes-Alpes, qui comprend, certes, moins de policiers.

Surtout, la révision de la directive Retour est absolument fondamentale. Aujourd'hui, je tends plutôt à l'appeler directive Antiretour, puisqu'elle donne aux clandestins le choix de rester en leur accordant un délai de départ volontaire... Autant dire que cela ne peut pas fonctionner. L'idée est d'inverser la logique. C'est ce que la Commission européenne a proposé il y a quelques semaines. Voilà qui va tout changer.

Croyez-moi, monsieur le sénateur, nous sommes totalement mobilisés pour garder la frontière entre votre département et l'Italie. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC. - M. Jean-Marc Ruel applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, pour la réplique.

M. Jean-Michel Arnaud. Vous ne m'avez pas répondu sur la question des locaux, monsieur le ministre d'État. Il s'agit d'un élément important pour la dignité des personnes migrantes, mais aussi, et surtout, pour le travail des policiers. En effet, le centre de rétention administrative (CRA) le plus proche se trouve à plus de deux heures de route. Vous comprenez aisément les conséquences que cela peut entraîner dans les deux domaines que j'ai mentionnés. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

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