Question de M. GONTARD Guillaume (Isère - GEST) publiée le 12/06/2025
M. Guillaume Gontard attire l'attention de Mme la ministre auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargée du logement sur la suspension de l'aide à la rénovation thermique MaPrimeRénov' (MPR). Dans un article publié le 3 juin 2025, Le Parisien affirmait que les crédits alloués à MPR pour 2025 étaient « pratiquement intégralement consommés » et qu'une suspension de l'aide serait envisagée. Ces informations proviendraient d'une source proche du dossier.
En réponse à l'article du Parisien, la Ministre du logement et de la rénovation urbaine affirmait « Aujourd'hui, aucune décision n'a été prise». Le 4 juin 2025, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique de la France confirmait la suspension du dispositif et évoquait un encombrement des dossiers, ainsi qu'un excès des fraudes. Pourtant, Lyon, l'Ardèche et différentes collectivités territoriales du Grand Est ont indiqué avoir épuisé leur enveloppe budgétaire.
La recommandation de la commission d'enquête portant sur la rénovation énergétique des logements de 2023 avait jugé nécessaire d'attribuer 4,5 milliards d'euros de crédits annuel au dispositif MPR. Entre 2024 et 2025, les crédits alloués à MPR ont considérablement chuté pour finalement atteindre 2,29 milliards d'euros dans la loi de finances pour 2025. Alors que la rénovation énergétique constitue un investissement indispensable à long terme, les efforts budgétaires court-termistes ne peuvent justifier cette baisse.
La suspension de MPR aurait de lourdes conséquences sociales, écologiques et économiques. Les propriétaires souhaitant effectuer des travaux se retrouvent dans un flou total et se voient contraints de reporter des améliorations de leur logement. Les artisans et entreprises de la rénovation énergétique sont également très inquiets, des milliers d'emplois étant directement menacés et toute la montée en puissance de la filière étant remise en cause. Enfin, l'Agence nationale de l'habitat (Anah), l'Agence de la transition écologique (Ademe) et les structures locales d'accompagnement seraient également très affectées.
Il souhaite donc savoir ce que compte faire le Gouvernement face à l'insuffisance des crédits alloués à MPR et pourquoi une rallonge n'est pas envisagée. Il souhaite également savoir ce que compte faire Mme la Ministre face aux conséquences induites par la suspension de MPR, en particulier concernant les milliers d'emplois menacés au sein des entreprises chargées de la rénovation énergétique et des différents organismes gestionnaires (Anah et Ademe).
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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé du logement publiée le 17/07/2025
Le Gouvernement soutient l'aide MaPrimeRénov', bénéfique pour le confort des ménages, leur pouvoir d'achat, et la transition énergétique. Ce soutien s'est notamment manifesté par la stabilité des paramètres en 2025, qui n'ont pas évolué par rapport à 2024, et parl'enveloppe budgétaire allouée par l'ANAH à MaPrimeRénov'de 3,6 Mdseuros, qui a permis de fixer des objectifs ambitieux de 350 000 rénovations, réparties entre 250 000 rénovations par geste et 100 000 rénovations d'ampleur (soit +10% par rapport à 2024). Cette stabilité a porté des fruits : à fin mai 2025, 122 712 ménages ont bénéficié de cette aide, avec une nette accélération des rénovations d'ampleur (44 162 logements concernés), multipliées par plus de trois par rapport à la même période en 2024, et le stock de dossiers déposés devrait garantir l'atteinte des objectifs 2025 de l'Anah de 100 000 rénovations d'ampleurs engagées dans l'année. Ce dynamisme témoigne de l'appropriation croissante du parcours accompagné, qui facilite les projets complexes grâce à un appui renforcé sur le plan technique et financier. Toutefois, stabilité ne signifie ni absence de maîtrise de la dépense publique, dans un contexte contraint, ni libre-cours aux nouveaux schémas de fraude. Or, 2 phénomènes sont apparus au cours du printemps, et ont appelé à une réponse la plus ciblée possible que le Gouvernement a dû mettre en place dès juin 2025. Le premier phénomène est celui de la fraude. Le Gouvernement dispose de chiffres précis à ce sujet : la fraude effective (fraude avérée + fraude potentielle) correspond à 3,5% des montants d'aides décaissées. Si l'on regarde l'ensemble des tentatives de fraudes (en incluant les fraudes évitées), ce taux monte à 9% du budget engagé. En 2025, de nouveaux schémas de fraude sont apparus via les accompagnateurs rénov'(MAR). Une centaine d'entre eux au niveau national a déposé en 2025 environ 16 000 dossiers présentant des signaux forts d'une diversité de fraude : usurpation d'identité du ménage ou de l'entreprise, audits manipulés, absence de neutralité. Cette fraude s'organise tout aussi diversement avec ou sans la complicité des ménages, avec ou sans travaux réellement effectués, avec ou sans la complicité des entreprises intervenantes. C'est l'activité de cette frange d'acteurs, marginale en nombre mais non négligeable en volumes et en flux de dossiers, qui nécessite la mise en place d'une instruction renforcée. Or, cette instruction nécessite une suspension du guichet pour analyser les dossiers avec les transferts de données permis désormais par la loi Cazenave, que le Conseil constitutionnel a validée. Le deuxième phénomène est celui de l'afflux de dossiers dès janvier, provoquant un allongement des délais d'instruction de 70 à 105 jours, en partie aggravé par l'adoption tardive du budget 2025, mais surtout une consommation rapide de l'enveloppe financière disponible. La dynamique de dépôt des dossiers constatée en 2025 aurait mécaniquement conduit à un épuisement du budget en 9 mois au lieu de 12. Sans prendre aucune mesure, les dossiers déposés après épuisement du budget ne pourraient pas être instruits en 2025, allongeant le délai d'instruction de 3 à 5 mois supplémentaires ce qui n'est pas acceptable. Surtout, cet effet volume se couple avec une forte augmentation du coût des travaux (+7%) sur la rénovation d'ampleur, sans commune mesure avec l'inflation (autour de 2%). Cette augmentation a également un impact budgétaire et risque de conduire à financer moins de dossiers de rénovation si rien n'est fait. Sans renoncer à son souhait de stabiliser au maximum le dispositif, le Gouvernement a donc dû mettre en place une suspension la plus ciblée et la plus courte possible (23 juin - mi-septembre). Cette suspension ne porte que sur les dossiers de rénovation globale individuelle, sans modifier ni les monogestes, ni les rénovations des copropriétés (qui, en nombre de ménages concernés, représentent les 2/3 de l'aide accordée). Cette suspension a d'ailleurs été ajustée après l'écoute des acteurs le 17 juin 2025, en maintenant la possibilité pour les ménages de bénéficier d'une aide pour des gestes de travaux isolés ("monogestes"). Cette suspension ne remet pas en cause ni le budget 2025, sanctuarisé à hauteur de 3,6 Mdseuros comme voté en loi de finances 2025, ni les paramètres de l'aide, à l'exception de ceux qui favorisent les phénomènes d'inflation observés, qui seront ajustés rapidement. Par ailleurs, si le Gouvernement n'envisage pas d'abonder l'enveloppe budgétaire allouée à MaPrimeRénov', dans un contexte budgétaire contraint, d'autres leviers de financement ont été explorés, en particulier les certificats d'économie d'énergie perçus par l'Anah, dont la bonification mise en place en juin permettra d'augmenter les rénovations financées à terme. Le débat parlementaire à venir sur la loi de finances pour 2026, couplée aux consultations initiées dès la mi-juin par la ministre du Logement avec l'ensemble des acteurs, permettra de déterminer les conditions de distribution de MaPrimeRénov'en 2026.
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