Question de Mme MARGATÉ Marianne (Seine-et-Marne - CRCE-K) publiée le 12/06/2025

Mme Marianne Margaté attire l'attention de Mme la ministre auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargée du logement sur la suspension du dispositif MaPrimRenov'.
Les Français veulent rénover leurs logements. Ils le prouvent en sollicitant beaucoup plus de financements de MaPrimRenov' auprès de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH). À tel point que les financements prévus par le Gouvernement au budget 2025 (4,4 milliards d'euros) se révèlent être très insuffisants. Il est sans doute nécessaire d'arriver à 10 milliards d'aides globalement pour que ce dispositif fonctionne correctement en vue d'atteindre les 700 000 rénovations annuelles prévues par la Stratégie Nationale Bas Carbone.
Par ailleurs les 4 milliards de financement annuels des certificats d'économies d'énergie (CEE) pour le bâtiment sont très mal employés. Selon la Cour des comptes il y a 30% de coût de gestion et une efficacité des dépenses douteuse. D'après la Cour des comptes il faut transférer ces 4,4 milliards de CEE vers le budget de l'ANAH pour abonder les crédits de MaPrimRenov'. De plus une étude du cabinet Colombus Consulting pointe le risque d'une augmentation des factures d'énergie des ménages pouvant atteindre « 900 à 1 000 euros » par an en 2026 à cause du fonctionnement des CEE, car les fournisseurs d'énergie n'absorbent pas eux-mêmes le surcoût représenté par les CEE, mais le répercutent sur les clients.
C'est dans ce contexte que le Gouvernement suspend le dispositif MaPrimeRenov'. C'est une catastrophe pour le climat et un coup porté à notre souveraineté. En effet rénover les logements est indispensable pour diminuer notre consommation de gaz russe ou américain. C'est aussi un coup dur porté à l'emploi des entreprises du bâtiment et aux classes populaires qui n'auront plus les moyens de payer une rénovation énergétique.
Par conséquent, elle lui demande ce qu'elle compte faire pour revenir sur la décision de la suspension du dispositif MaPrimRenov', puis transférer les 4,4 milliards d'euros vers l'ANAH puis enfin agir en faveur d'autorisations d'engagement à la hauteur de 10 milliards d'euros dans le cadre budgétaire. Plutôt que d'alimenter sans conditionnalités les intérêts privés ne s'agirait-il pas de mettre en place un service public de la rénovation thermique participant à une planification écologique et démocratique efficace au vu des objectifs climatiques et de souveraineté ? En vue de ce pilotage public structurant, les capacités de l'ANAH, pour accompagner massivement les rénovations performantes, ne devraient-elles pas être fortement améliorées ?

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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé du logement publiée le 17/07/2025

Le Gouvernement soutient l'aide MaPrimeRénov', bénéfique pour le confort des ménages, leur pouvoir d'achat, et la transition énergétique. Ce soutien s'est notamment manifesté par la stabilité des paramètres en 2025, qui n'ont pas évolué par rapport à 2024, et parl'enveloppe budgétaire allouée par l'ANAH à MaPrimeRénov'de 3,6 Mdseuros, qui a permis de fixer des objectifs ambitieux de 350 000 rénovations, réparties entre 250 000 rénovations par geste et 100 000 rénovations d'ampleur (soit +10% par rapport à 2024). Cette stabilité a porté des fruits : à fin mai 2025, 122 712 ménages ont bénéficié de cette aide, avec une nette accélération des rénovations d'ampleur (44 162 logements concernés), multipliées par plus de trois par rapport à la même période en 2024, et le stock de dossiers déposés devrait garantir l'atteinte des objectifs 2025 de l'Anah de 100 000 rénovations d'ampleurs engagées dans l'année. Ce dynamisme témoigne de l'appropriation croissante du parcours accompagné, qui facilite les projets complexes grâce à un appui renforcé sur le plan technique et financier. Toutefois, stabilité ne signifie ni absence de maîtrise de la dépense publique, dans un contexte contraint, ni libre-cours aux nouveaux schémas de fraude. Or, 2 phénomènes sont apparus au cours du printemps, et ont appelé à une réponse la plus ciblée possible que le Gouvernement a dû mettre en place dès juin 2025. Le premier phénomène est celui de la fraude. Le Gouvernement dispose de chiffres précis à ce sujet : la fraude effective (fraude avérée + fraude potentielle) correspond à 3,5% des montants d'aides décaissées. Si l'on regarde l'ensemble des tentatives de fraudes (en incluant les fraudes évitées), ce taux monte à 9% du budget engagé. En 2025, de nouveaux schémas de fraude sont apparus via les accompagnateurs rénov'(MAR). Une centaine d'entre eux au niveau national a déposé en 2025 environ 16 000 dossiers présentant des signaux forts d'une diversité de fraude : usurpation d'identité du ménage ou de l'entreprise, audits manipulés, absence de neutralité. Cette fraude s'organise tout aussi diversement avec ou sans la complicité des ménages, avec ou sans travaux réellement effectués, avec ou sans la complicité des entreprises intervenantes. C'est l'activité de cette frange d'acteurs, marginale en nombre mais non négligeable en volumes et en flux de dossiers, qui nécessite la mise en place d'une instruction renforcée. Or, cette instruction nécessite une suspension du guichet pour analyser les dossiers avec les transferts de données permis désormais par la loi Cazenave, que le Conseil constitutionnel a validée. Le deuxième phénomène est celui de l'afflux de dossiers dès janvier, provoquant un allongement des délais d'instruction de 70 à 105 jours, en partie aggravé par l'adoption tardive du budget 2025, mais surtout une consommation rapide de l'enveloppe financière disponible. La dynamique de dépôt des dossiers constatée en 2025 aurait mécaniquement conduit à un épuisement du budget en 9 mois au lieu de 12. Sans prendre aucune mesure, les dossiers déposés après épuisement du budget ne pourraient pas être instruits en 2025, allongeant le délai d'instruction de 3 à 5 mois supplémentaires ce qui n'est pas acceptable. Surtout, cet effet volume se couple avec une forte augmentation du coût des travaux (+7%) sur la rénovation d'ampleur, sans commune mesure avec l'inflation (autour de 2%). Cette augmentation a également un impact budgétaire et risque de conduire à financer moins de dossiers de rénovation si rien n'est fait. Sans renoncer à son souhait de stabiliser au maximum le dispositif, le Gouvernement a donc dû mettre en place une suspension la plus ciblée et la plus courte possible (23 juin - mi-septembre). Cette suspension ne porte que sur les dossiers de rénovation globale individuelle, sans modifier ni les monogestes, ni les rénovations des copropriétés (qui, en nombre de ménages concernés, représentent les 2/3 de l'aide accordée). Cette suspension a d'ailleurs été ajustée après l'écoute des acteurs le 17 juin 2025, en maintenant la possibilité pour les ménages de bénéficier d'une aide pour des gestes de travaux isolés ("monogestes"). Cette suspension ne remet pas en cause ni le budget 2025, sanctuarisé à hauteur de 3,6 Mdseuros comme voté en loi de finances 2025, ni les paramètres de l'aide, à l'exception de ceux qui favorisent les phénomènes d'inflation observés, qui seront ajustés rapidement. Par ailleurs, si le Gouvernement n'envisage pas d'abonder l'enveloppe budgétaire allouée à MaPrimeRénov', dans un contexte budgétaire contraint, d'autres leviers de financement ont été explorés, en particulier les certificats d'économie d'énergie perçus par l'Anah, dont la bonification mise en place en juin permettra d'augmenter les rénovations financées à terme. Le débat parlementaire à venir sur la loi de finances pour 2026, couplée aux consultations initiées dès la mi-juin par la ministre du Logement avec l'ensemble des acteurs, permettra de déterminer les conditions de distribution de MaPrimeRénov'en 2026.

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