Question de M. PLA Sebastien (Aude - SER) publiée le 19/06/2025
M. Sebastien Pla signale à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche que le 4 juin 2025, le ministre de l'économie annonçait la suspension, sine die, du dispositif d'aides MaPrimeRénov' pour les rénovations énergétiques globales et les travaux d'isolation, tandis que la ministre du logement indiquait vouloir en changer les règles, et ce, après plus de 14 réformes. Le 7 juin 2025, le Président de la République déplorait, quant à lui, « les incertitudes pesants sur les dispositifs mis en place », avant que, finalement, le 10 juin 2025 la ministre chargée des comptes publics ne promette une reprise du dispositif au 15 septembre 2025, épuré des fraudes.
L'incompréhension totale face à des annonces changeantes en moins de 5 jours est réelle et emporte de graves risques de rupture de la confiance à l'égard de l'État. De telles annonces contradictoires inquiètent en effet légitimement les professionnels du bâtiment, comme la Fédération française du bâtiment (FFB) et la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment, et les propriétaires. En effet, l'isolation thermique, le chauffage et les travaux de rénovation énergétique restent essentiels pour améliorer la performance thermique des logements.
Il lui signale ainsi qu'avec une enveloppe de 2,4 milliards d'euros en 2022, de 2,45 milliards en 2023, le budget 2024 initialement fixé à 4 milliards d'euros, avait été révisé à 3,29 milliards d'euros permettant à quelques 340 801 logements d'être rénovés, dont 43 271 enregistraient un saut de trois classes énergétiques ou plus, mettant en évidence une nette amélioration de leur performance thermique grâce aux travaux effectués.
Il lui rappelle également que lors de l'examen du budget 2025, avec son groupe parlementaire, il n'a eu de cesse de dénoncer la baisse des ressources allouées à l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat (ANAH) qui sont passées de 3,29 milliards d'euros en 2024 à 2,3 milliards d'euros en 2025, soit une baisse de près d'un milliard, auxquels s'ajoutent aussi les Certificats d'Économie d'Énergie (CEE), qui continuent de soutenir activement la rénovation énergétique des logements.
Il en déduit donc que depuis plusieurs années, la part du financement de l'État dans le dispositif n'a cessé de diminuer, de sorte que l'enveloppe est déjà consommée en juin 2025 et oblige, par manque d'anticipation évident sur les besoins des ménages, à stopper ce dispositif, dès le milieu d'année.
Il estime donc que la fin de MaPrimerénov, victime de son succès et largement sous budgétée, ajoute ainsi à la crise sans précédent de la construction neuve.
Si l'engorgement des demandes de rénovation d'ampleur et le traitement de la fraude associée invoquées pour justifier l'interruption du dispositif visent, selon les dernières communications officielles, à « épurer les stocks », il déplore, à l'instar de la FFB d'Occitanie, que les rénovations par gestes, non concernées par les difficultés précédentes, subissent le même sort dans la mesure où elles permettaient de financer des travaux ciblés pour améliorer la performance énergétique des logements sans engager une rénovation complète, de façon à améliorer le confort, tout en réduisant progressivement la consommation d'énergie.
Il lui demande donc que le Gouvernement s'engage à rétablir sans tarder ces aides, donne un calendrier précis et garantisse que cette interruption ne compromette ni les demandes de prime, ni les versements d'aides à venir d'ici la fin de l'année, sauf à prendre le risque de mettre un frein à la transformation du bâti pour son adaptation au changement climatique, et la résorption des 4,2 millions de passoires thermiques, et, à écarter durablement les ménages, et notamment les plus modestes, de la nécessaire transition énergétique.
Il la presse d'agir et lui demande comment elle compte éviter un effondrement du tissu économique et une défiance inédite à l'égard de la parole publique.
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Transmise au Ministère auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé du logement
Réponse du Ministère auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé du logement publiée le 17/07/2025
Le Gouvernement n'a pas varié dans le souhait de stabiliser le dispositif MaPrimeRénov'en 2025 et dans les années à venir. C'est pour cela que, pour 2025, les paramètres n'ont pas évolué par rapport à 2024, et que l'enveloppe budgétaire allouée par l'ANAH à MaPrimeRénov'de 3,6 Mdseuros a permis de fixer des objectifs ambitieux de 350 000 rénovations, réparties entre 250 000 rénovations par geste et 100 000 rénovations d'ampleur (soit +10% par rapport à 2024). Cette stabilité a porté des fruits : à fin mai 2025, 122 712 ménages ont bénéficié de cette aide, avec une nette accélération des rénovations d'ampleur (44 162 logements concernés), multipliées par plus de trois par rapport à la même période en 2024, et le stock de dossiers déposés devrait garantir l'atteinte des objectifs 2025 de l'Anah de 100 000 rénovations d'ampleurs engagées dans l'année. Ce dynamisme témoigne de l'appropriation croissante du parcours accompagné, qui facilite les projets complexes grâce à un appui renforcé sur le plan technique et financier. Toutefois, stabilité ne signifie ni absence de maîtrise de la dépense publique, dans un contexte contraint, ni libre-cours aux nouveaux schémas de fraude. Or, 2 phénomènes sont apparus au cours du printemps, et ont appelé à une réponse la plus ciblée possible que le Gouvernement a dû mettre en place dès juin 2025. Le premier phénomène est celui de la fraude. Le Gouvernement dispose de chiffres précis à ce sujet : la fraude effective (fraude avérée + fraude potentielle) correspond à 3,5% des montants d'aides décaissées. Si l'on regarde l'ensemble des tentatives de fraudes (en incluant les fraudes évitées), ce taux monte à 9% du budget engagé. En 2025, de nouveaux schémas de fraude sont apparus via les accompagnateurs rénov'(MAR). Une centaine d'entre eux au niveau national a déposé en 2025 environ 16 000 dossiers présentant des signaux forts d'une diversité de fraude : usurpation d'identité du ménage ou de l'entreprise, audits manipulés, absence de neutralité. Cette fraude s'organise tout aussi diversement avec ou sans la complicité des ménages, avec ou sans travaux réellement effectués, avec ou sans la complicité des entreprises intervenantes. C'est l'activité de cette frange d'acteurs, marginale en nombre mais non négligeable en volumes et en flux de dossiers, qui nécessite la mise en place d'une instruction renforcée. Or, cette instruction nécessite une suspension du guichet pour analyser les dossiers avec les transferts de données permis désormais par la loi Cazenave, que le Conseil constitutionnel a validée. Le deuxième phénomène est celui de l'afflux de dossiers dès janvier, provoquant un allongement des délais d'instruction de 70 à 105 jours, en partie aggravé par l'adoption tardive du budget 2025, mais surtout une consommation rapide de l'enveloppe financière disponible. La dynamique de dépôt des dossiers constatée en 2025 aurait mécaniquement conduit à un épuisement du budget en 9 mois au lieu de 12. Sans prendre aucune mesure, les dossiers déposés après épuisement du budget ne pourraient pas être instruits en 2025, allongeant le délai d'instruction de 3 à 5 mois supplémentaires ce qui n'est pas acceptable. Surtout, cet effet volume se couple avec une forte augmentation du coût des travaux (+7%) sur la rénovation d'ampleur, sans commune mesure avec l'inflation (autour de 2%). Cette augmentation a également un impact budgétaire et risque de conduire à financer moins de dossiers de rénovation si rien n'est fait. Sans renoncer à son souhait de stabiliser au maximum le dispositif, le Gouvernement a donc dû mettre en place une suspension la plus ciblée et la plus courte possible (23 juin - mi-septembre). Cette suspension ne porte que sur les dossiers de rénovation globale individuelle, sans modifier ni les monogestes, ni les rénovations des copropriétés (qui, en nombre de ménages concernés, représentent les 2/3 de l'aide accordée). Cette suspension ne remet pas en cause ni le budget 2025, sanctuarisé à hauteur de 3,6 Mdseuros comme voté en loi de finances 2025, ni les paramètres de l'aide, à l'exception de ceux qui favorisent les phénomènes d'inflation observés, qui seront ajustés rapidement.
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