Question de M. ANGLARS Jean-Claude (Aveyron - Les Républicains) publiée le 26/06/2025
M. Jean-Claude Anglars interroge M. le ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation sur les tensions budgétaires auxquelles sont confrontés les départements en raison du désengagement de l'État dans le financement des politiques sociales.
Le 18 juin 2025, les départements ont symboliquement désigné cette date comme le « jour du dépassement » : le jour à partir duquel ils assument, sur leurs fonds propres, sans compensation de l'État, l'intégralité du financement des principales allocations individuelles de solidarité - revenu de solidarité active (RSA), allocation personnalisée d'autonomie (APA) et prestation de compensation du handicap (PCH). Ce seuil marque une rupture dans le principe de solidarité nationale, révélant les limites du cadre de la décentralisation.
Depuis plusieurs années, les départements alertent sur la hausse continue de leurs dépenses sociales, sans que les transferts financiers de l'État ne suivent. Dans le même temps, leurs recettes sont fragilisées, notamment en raison de la baisse des droits de mutation à titre onéreux. Ce double effet met en péril leur capacité d'investissement dans des missions fondamentales telles que l'entretien des collèges, les infrastructures routières ou le soutien aux territoires ruraux.
Cette situation pose la question de la soutenabilité du modèle de décentralisation, dès lors que les collectivités locales se trouvent dans l'incapacité de financer durablement des politiques publiques conçues et décidées au niveau national.
Il lui demande donc quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour garantir aux départements un soutien financier durable et adapté aux charges sociales qu'ils assument.
- page 3556
Réponse du Ministère de l'aménagement du territoire et de la décentralisation publiée le 11/09/2025
Le niveau du reste à charge au titre des différentes allocations individuelles de solidarité (AIS) a eu tendance à croître depuis 2022 pour l'ensemble des départements. Cette situation s'explique principalement par le retour d'un « effet ciseau » se caractérisant par une dynamique toujours soutenue de progression de la dépense, notamment d'APA (aide personnalisée à l'autonomie) et de PCH (prestation de compensation du handicap), conjuguée à un tassement général des recettes, voire à la diminution de l'une des principales d'entre elles, les droits de mutation à titre onéreux (DMTO), qui participent, en droit, de la compensation du RSA (revenu social d'activité) et de l'accompagnement financier historique de l'APA et de la PCH. Pour autant, le taux de couverture global des dépenses de ces trois prestations sociales est bien supérieur au taux de 50 % (ce qui correspondrait à une couverture sur une demi-année). En effet, sur le plan juridique, certains dispositifs de compensation et certaines ressources historiques transférées en contrepartie de l'exercice par les départements de certaines politiques sociales, telle l'allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP), doivent être prises en compte pour mesurer objectivement le niveau de financement réel de ces différentes allocations, directement par l'Etat ou par des ressources transférées. Ainsi, en tenant compte de ces règles et ressources, le taux de couverture des dépenses d'AIS exposées par le département de l'Aveyron demeure globalement stable et est devenu supérieur à la moyenne nationale. En effet, au cours des trois dernières années, celui-ci s'est établi à 75,6 % en 2022, à 74,2 % en 2023 et à 78,5 % l'an dernier, alors que le taux moyen national a eu tendance à décroître, diminuant de 78,7 % en 2022 à 71,7 % en 2024. Il convient d'ailleurs de noter que, concernant le RSA, l'ensemble des dispositifs reconnus par la loi comme assurant la compensation financière de ce transfert de compétence permettent au département de l'Aveyron de disposer d'un niveau de couverture supérieur à la charge exposée au moins depuis 2022. Néanmoins, le Gouvernement est pleinement conscient des difficultés structurelles et conjoncturelles du modèle de financement des départements eu égard aux compétences exercées, notamment dans le domaine social. C'est ainsi, dans le cadre d'un dialogue régulier entre l'Etat et les collectivités territoriales, que des mesures financières de soutien ont été mises en oeuvre dans le cadre de la loi de finances pour 2025. En premier lieu, afin de concilier l'objectif de redressement des finances publiques avec la dégradation de la situation financière des départements, la contribution de ces derniers, via le dispositif de lissage conjoncturel, dit DILICO, défini à l'article 186 de la loi de finances pour 2025, a été significativement revue à la baisse, à 220 Meuros, et la moitié d'entre eux, les plus en difficulté au regard de leur indice de fragilité sociale, dont le département de l'Aveyron fait partie, a été exonérée de cette contribution. Par ailleurs, le Gouvernement a donné aux aux départements, pour une durée de trois ans, la faculté de relever le taux maximal d'imposition de droit commun sur les DMTO qu'ils perçoivent de 4,5 % à 5 % pour les mutations d'immeubles, hors celles concernant les primo-accédant (article 116 de la LFI pour 2025). Applicable à compter du 1er avril 2025, cette mesure doit permettre aux départements de bénéficier de ressources supplémentaires en année pleine. Le département de l'Aveyron a d'ailleurs délibéré en faveur du rehaussement de ce taux maximal d'imposition, taux majoré qui est entré en application le 1er mai 2025. Cette faculté doit être mise en regard avec la reprise des transactions immobilières qui se traduit, à taux constant de fiscalité, par une augmentation du produit des DMTO perçu par les départements à la même période l'an passé. En outre, la réforme des concours financiers versés par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) initiée en loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 doit permettre, en maintenant a minima en 2025 les taux de couverture de la dépense d'APA et de PCH constatés en 2024 à partir de l'ensemble des concours dédiés attribués par la CNSA, de faire progresser les concours attribués en 2025 de 200 Meuros de plus que le tendanciel d'évolution des concours avant réforme. Enfin, compte tenu des spécificités des compétences exercées par les départements et de leur système de financement, le Gouvernement s'est attaché à dresser un état des lieux précis de leurs finances et à leur dédier un groupe de travail spécifique dans le cadre de la Conférence financière des territoires qui s'est tenue au printemps 2025. Ce groupe de travail a visé à identifier des pistes de reflexion et à formuler des propositions pour soutenir les départements en vue de la loi de finances pour 2026 tout en poursuivant le nécessaire effort de redressement des comptes publics.
- page 4959
Page mise à jour le