EXPOSÉ GÉNÉRAL
Mesdames, Messieurs,
Nonobstant un contexte général marqué par la persistance de difficultés de fonctionnement de la justice au quotidien, liées à un manque chronique de moyens, encore avivé par les besoins résultant de la mise en oeuvre d'importantes mesures nouvelles, le Gouvernement juge prioritaire une revalorisation de la carrière des magistrats.
Alors que d'autres projets de loi envisagés dans le domaine de la justice semblent aujourd'hui abandonnés, comme en particulier les avant-projets de textes relatifs à la responsabilité des magistrats diffusés en décembre 1999 par Mme Elisabeth Guigou, alors Garde des Sceaux, le Sénat est en effet aujourd'hui saisi d'un projet de loi organique, déposé en premier lieu sur son bureau, qui tend à une réforme de l'organisation des carrières des magistrats, destinée à en simplifier et en améliorer le déroulement, tout en favorisant la mobilité par l'institution d'obligations statutaires formellement nouvelles conditionnant l'avancement.
Cette réforme répond au souhait des magistrats judiciaires de voir alignée leur carrière sur celle des magistrats administratifs ou des magistrats financiers. Elle a en outre pour objet de mettre fin à la situation de blocage de l'avancement déterminant le niveau des rémunérations, situation au demeurant peu favorable à la mobilité, qui caractérise aujourd'hui le corps des magistrats judiciaires.
I. L'ORGANISATION ACTUELLE DE LA CARRIÈRE DES MAGISTRATS SE CARACTÉRISE PAR UNE SITUATION DE BLOCAGE DE L'AVANCEMENT ET UNE MOBILITÉ INSUFFISANTE
A. LA STRUCTURE HIÉRARCHIQUE DU CORPS DES MAGISTRATS ET L'ORGANISATION DES CARRIÈRES
1. La structure du corps
La structure du corps des magistrats judiciaires comporte, par ordre hiérarchique croissant, différents niveaux : le second grade , le premier grade , divisé en un premier et un second groupe , et la hors hiérarchie .
Conformément à l'article 2 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, la hiérarchie du corps judiciaire comprend en effet deux grades , étant précisé que l'accès du second au premier grade est subordonné à l'inscription sur un tableau d'avancement.
Le premier grade est lui-même divisé en deux groupes de fonctions la promotion du premier au second groupe s'effectuant au choix. En revanche, le second grade ne comporte plus de subdivision en groupes, ces derniers ayant été supprimés par la loi organique n° 92-189 du 25 février 1992.
Chacun de ces niveaux hiérarchiques (second grade, premier groupe du premier grade, second groupe du premier grade) correspond à l'exercice de fonctions déterminées par le décret en Conseil d'Etat n° 93-21 du 7 janvier 1993.
S'y ajoutent en outre, au sommet de la pyramide, les emplois hors hiérarchie , dont la liste est limitativement fixée par l'article 3 de l'ordonnance statutaire.
Il importe de rappeler que les rémunérations des magistrats sont directement déterminées par la place qu'ils occupent dans cette structure. L'évolution de la carrière, et en particulier des rémunérations, est donc subordonnée à la survenance de vacances d'emplois correspondant à des fonctions hiérarchiquement supérieures.
La structure des emplois de magistrats judiciaires résultant de l'application de l'ordonnance du 22 décembre 1958 et du décret du 7 janvier 1993 est actuellement la suivante (par ordre hiérarchique décroissant) :
SITUATION ACTUELLE |
|||
Niveau hiérarchique |
Effectif global et pourcentage
|
Fonctions |
|
Hors hiérarchie |
349
|
A |
|
Premier grade, second groupe (I-2) |
2.480 |
1.039 (15,5 %) |
B |
Premier grade, premier groupe (I-1) |
(36,9 %) |
1.441 (21,4 %) |
C |
Second grade |
3.892
|
D |
A : Premiers présidents et procureurs généraux de la Cour de cassation et des cours d'appel, conseillers à la Cour de cassation, présidents de chambre et avocats généraux des cours d'appel de Paris et de Versailles, présidents et procureurs de la République de 22 tribunaux de grande instance.
B : Présidents de chambre et avocats généraux des cours d'appel de province, conseillers référendaires de la Cour de cassation, conseillers et substituts généraux des cours d'appel de Paris et de Versailles, présidents et procureurs de la République de 88 tribunaux de grande instance, vice-présidents, premiers juges, premiers substituts des tribunaux de grande instance de Paris, Nanterre, Bobigny et Créteil.
C : Conseillers et substituts généraux des cours d'appel de province, conseillers référendaires de la Cour de cassation, présidents et procureurs de la République de 41 tribunaux de grande instance, certains postes de vice-présidents, procureurs adjoints et premiers substituts de tribunaux de grande instance.
D : Conseillers de cour d'appel du second grade, présidents et procureurs de la République de 34 tribunaux de grande instance, certains vice-présidents, premiers juges, premiers substituts de tribunaux de grande instance, autres fonctions au sein des tribunaux de grande instance et tribunaux d'instance.
(Source : Chancellerie)
On observera à cette occasion que le nombre des magistrats est aujourd'hui de 6.721, chiffre très proche de ce qu'il était au milieu du XIXème siècle, ce qui est en soi-même révélateur.
Les rémunérations des magistrats sont déterminées selon l'échelle indiciaire suivante :
CARRIERE INDICIAIRE DES MAGISTRATS
|
TABLEAU DE
CORRESPONDANCE
|
||||||||
Indices ou échelles-lettres |
Temps passé |
Durée de |
Echelle- |
Traitement mensuel |
|||||
Grade-Groupe |
Indice brut |
Indice net |
Indice majoré 01/12/99 |
dans les échelons |
carrière optimale |
Lettre et
|
perçu (compte tenu retenues CSG, RDS) |
||
Hors hiérarchie |
G |
1500 |
G |
49.987,30 |
|||||
F |
1368 |
F |
45.588,42 |
||||||
E2 |
1319 |
E2 |
43.955,54 |
||||||
E1 |
1269 |
D3/E1 |
42.289,24 |
||||||
D3 |
1269 |
D2 |
40.523,03 |
||||||
D2 |
1216 |
C3/D1 |
38.761,44 |
||||||
D1 |
1163 |
C2 |
37.923,68 |
||||||
C3 |
1163 |
BB3/C1 |
37.123,94 |
||||||
C2 |
1138 |
BB2 |
36.157,46 |
||||||
C1 |
1114 |
B3BB1 |
35.224,39 |
||||||
1 er grade - |
BB3 |
1114 |
B2 |
33.424,87 |
|||||
2 ème groupe |
BB2 |
1085 |
B1/A3 |
32.058,53 |
|||||
(*)BB1 |
1057 |
21,5 ans |
A2 |
30.492,28 |
|||||
7 ème échelon (*) |
- |
- |
- |
- |
A1 |
29.325,87 |
|||
- |
820 |
27.326,41 |
|||||||
B3 |
1057 |
782 |
26.060,09 |
||||||
B2 |
1003 |
733 |
24.427,09 |
||||||
6 ème échelon |
B1 |
962 |
3 ans |
18,5 ans |
695 |
23.160,76 |
|||
A3 |
962 |
657 |
21.894,44 |
||||||
A2 |
915 |
618 |
20.594,72 |
||||||
5 ème échelon |
A1 |
880 |
3 ans |
15,5 ans |
581 |
19.361,71 |
|||
4 ème échelon |
1015 |
655 |
820 |
2 ans |
13,5 ans |
545 |
18.162,09 |
||
3 ème échelon |
966 |
635 |
782 |
18 mois |
12 ans |
495 |
16.495,81 |
||
2 ème échelon |
901 |
605 |
733 |
18 mois |
451 |
15.029,55 |
|||
1 er échelon |
852 |
583 |
695 |
18 mois |
|||||
1 er grade - |
A3 |
962 |
808 (1) |
29.926,52 |
|||||
1 er groupe |
A2 |
915 |
18 ans |
853 (2) |
28.426,97 |
||||
5 ème échelon |
A1 |
880 |
15 ans |
Nota bene : les indemnités, versées |
|||||
4 ème échelon |
1015 |
655 |
820 |
3 ans |
12 ans |
trimestriellement, ont été calculées |
|||
3 ème échelon |
966 |
635 |
782 |
3 ans |
10 ans |
mensuellement sur ce tableau. |
|||
2 ème échelon |
901 |
605 |
733 |
2 ans |
Le traitement indiqué est donc |
||||
1 er échelon |
852 |
583 |
695 |
2 ans |
un traitement moyen. |
||||
2 ème grade |
Le taux des indemnités de fonctions |
||||||||
10 ème échelon |
1015 |
655 |
820 |
18 ans |
varie actuellement dans une fourchette |
||||
9 ème échelon |
966 |
635 |
782 |
3 ans |
15 ans |
de 34 à 39 %. |
|||
8 ème échelon |
901 |
605 |
733 |
3 ans |
12 ans |
(1) Conseiller de cour d'appel en service |
|||
7 ème échelon |
852 |
583 |
695 |
2 ans |
10 ans |
extraordinaire du premier grade, |
|||
6 ème échelon |
801 |
558 |
657 |
2 ans |
8 ans |
premier groupe, - taux des indemnités |
|||
5 ème échelon |
750 |
532 |
618 |
2 ans |
6 ans |
de fonctions : 37 %. |
|||
4 ème échelon |
701 |
508 |
581 |
2 ans |
4 ans |
(2) Conseiller de cour d'appel en service |
|||
3 ème échelon |
655 |
485 |
545 |
2 ans |
2 ans |
extraordinaire du premier grade, second |
|||
2 ème échelon |
588 |
451 |
495 |
1 an |
1 an |
groupe - taux des indemnités de |
|||
1 er échelon |
528 |
409 |
451 |
1 an |
fonctions : 37 % |
||||
Auditeurs de justice |
396 |
319 |
359 |
||||||
Conseiller C.A.(1) 11111111111111111111`extraord. I-1 |
808 |
||||||||
Conseiller C.A.(2) extraord. I-2 |
853 |
(*) accessible aux seuls chefs des juridictions dont la liste est fixée par arrêt du 6 août 1996 (Amiens, Angers, Avignon, Besançon, Caen, Chalon s/Saône, Clermont-Ferrand, Dijon, Le Havre, Le Mans, Limoges, Lorient, Meaux, Melun, Montpellier, Nancy, Nîmes, Orléans, Reims, Rennes, Saint-Denis de la Réunion, Saint-Etienne, Tours, Valence, Valenciennes). Béthune, Aix-en-Provence, Grasse et Mulhouse sont élevés à la hors-hiérarchie par la loi organique n° 99-583 du 12 juillet 1999.
(Source : Chancellerie)