2. La réponse apportée par le crédit d'impôt
Pour mettre fin à ces phénomènes de désincitation à la reprise d'activité, diverses mesures ont été récemment mises en place : la réforme de l'allocation logement entrée en vigueur à partir de septembre 2000 ainsi que la réforme des règles d'exonération de la taxe d'habitation.
A l'issue de la Conférence de la famille du 15 juin 2001, il a été décidé de procéder en deux étapes au 1 er janvier 2001 puis au 1 er janvier 2002, à la réforme du barème des aides personnelles au logement, pour assurer une meilleure égalité de traitement des bénéficiaires quelle que soit l'origine de leurs revenus, qu'il s'agisse des revenus de transfert ou issus du travail, jusqu'à un niveau équivalent, en moyenne, aux trois quarts du niveau du RMI.
Concernant la taxe d'habitation , le Gouvernement a présenté dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2000, un dispositif tendant à exonérer du paiement de la taxe d'habitation un nombre plus important de contribuables modestes.
Mais l'élément le plus important devait être, dans l'esprit du Gouvernement, la mise en place d'une ristourne de contribution sociale généralisée (CSG) et de contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001. Votre rapporteur ne reprendra pas ce débat mais renvoie à l'excellent rapport de M. Charles Descours 8 ( * ) , qui avait montré que cette mesure était profondément injuste pour les ménages non imposables avec deux enfants ou dont l'un des conjoints ne travaille pas et qu'elle portait atteinte au principe d'universalité du financement de la protection sociale . Il avait souligné, en conséquence, que la constitutionnalité de la mesure était " douteuse ".
Sur ce point, M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des Finances, avait également bien montré, dans son rapport sur le projet de loi de finances pour 2001, que la mesure était particulièrement injuste envers les ménages dont l'un des conjoints ne travaille pas et qui disposent d'un revenu compris entre 1,4 et 2 SMIC.
Aussi, la commission des Finances et votre commission avaient-elles proposé un dispositif de crédit d'impôt en faveur des revenus d'activité jusqu'à 1,8 SMIC, plus neutre, plus juste et plus favorable aux familles.
Le Gouvernement aurait été bien inspiré de l'approuver puisque, le 19 décembre dernier, le Conseil constitutionnel, par sa décision n° 2000-437-DC, a invalidé le dispositif de ristourne sur la CSG et la CRDS.
Le Conseil constitutionnel a relevé que si le législateur pouvait modifier l'assiette de la CSG en faveur des contribuables les plus modestes, c'était " à la condition de ne pas provoquer de rupture caractérisée de l'égalité entre les contribuables ". Or, s'agissant de l'allégement de CSG-CRDS, la mesure contestée " ne tient compte ni des revenus des contribuables autres que ceux tirés d'une activité, ni des revenus des autres membres du foyer, ni des personnes à charge au sein de celui-ci ". Le Conseil constitutionnel a donc constaté que, ce faisant, le Législateur n'avait pas pris en compte l'ensemble des facultés contributives et créé entre les contribuables une disparité manifeste contraire à l'article 13 de la Déclaration de 1789.
Bien que prévisible, la décision du Conseil constitutionnel a semble-t-il plongé le Gouvernement dans une longue réflexion : après que divers points de vue se furent exprimés au sein de la majorité plurielle en faveur, soit d'un relèvement du SMIC assorti d'un allégement des cotisations patronales, soit d'un allégement des cotisations salariales, soit d'un crédit d'impôt, le Premier ministre devait finalement arbitrer le 10 janvier dernier en faveur de cette dernière solution, préconisée par le Sénat par trois fois au cours de cet automne : lors du vote du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, lors du vote du projet de loi de finances pour 2001 et enfin lors du vote du projet de loi de finances rectificative pour 2000.
Le Président de la République, lors de la présentation des voeux aux forces vives de la Nation le 8 janvier dernier avait préalablement indiqué que " l'instauration d'un crédit d'impôt, déjà expérimenté dans d'autres pays, pourrait notamment permettre aux actifs les plus modestes de ne pas voir leurs revenus stagner, voire diminuer, quand ils reprendront une activité. "
Suivant ces avis de sagesse réitérés, le Conseil des ministres du 31 janvier dernier, a adopté le projet de loi portant création d'une prime pour l'emploi (PPE) qui, sur le fond, s'apparente à un dispositif de crédit d'impôt , sous une appellation qui n'a pour seul avantage que d'être différente de celle retenue en décembre dernier par notre Assemblée.
La prime pour l'emploi, qui prend la forme d'un article additionnel au code général des impôts, serait attribuée à chaque membre du foyer fiscal ou non salarié. Les revenus du foyer ne devraient pas dépasser un certain montant. Le revenu procuré par l'activité professionnelle devrait être compris entre 0,3 et 1,4 SMIC. Le montant de la prime serait croissant jusqu'au niveau d'un SMIC à temps plein et décroissant pour les revenus d'activité compris entre 1 et 1,4 SMIC. Le montant de la prime, qui serait versée au plus tard le 15 septembre 2001, serait majoré dans les foyers où un seul des deux conjoints travaille. Elle serait augmentée en fonction du nombre de personnes à charge.
Il est à noter que lors de la présentation du projet de loi au Conseil des ministres, le Président de la République a souhaité que " le débat parlementaire sur ce texte permette, à revenu égal, d'éviter les inégalités entre les familles selon que leurs revenus proviennent d'un ou de deux salaires. "
* 8 Rapport n° 67 (2000-2001) sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (Tomes I et IV).