5. Reconnaître au seul époux dans le besoin un droit de créance contre la succession
En première, comme en deuxième lecture, l'Assemblée nationale a modifié l'article 207-1 du code civil pour transformer le droit à pension alimentaire du conjoint survivant dans le besoin en un véritable devoir de secours perçu dans le cas où les conditions de vie du conjoint se trouveraient gravement amoindries du fait de la mort de son époux.
Cette formulation n'est pas sans rappeler celle employée pour la prestation compensatoire en matière de divorce. Il pourrait paraître logique que les obligations des héritiers d'un époux défunt à l'égard de son conjoint survivant soient au moins aussi fortes que celles susceptibles de leur incomber à l'égard d'un époux divorcé. Le devoir de secours entre époux perdurerait ainsi après la mort de l'un d'eux à travers ses héritiers.
Le Sénat avait cependant préféré en revenir à une rédaction faisant ressortir que la pension n'est due qu'à l'époux dans le besoin . Les héritiers ne doivent pas être sollicités en cas d'amoindrissement, fut-il grave, des conditions de vie du conjoint mais seulement si ce dernier se trouve dans le besoin.
En outre, le Sénat avait proposé de prolonger le délai accordé au conjoint pour demander les aliments, en cas de fourniture de prestations volontaires par les héritiers et en cas de maintien dans l'indivision. En deuxième lecture, l'Assemblée nationale a d'ailleurs suivi le Sénat sur ce point.
Le Sénat avait également proposé, sans être suivi par l'Assemblée nationale, que cette prestation puisse s'exécuter par le versement ou la constitution d'un capital.
Sur la forme, le Sénat avait jugé préférable d'intégrer cette disposition relative au droit à pension dans le chapitre consacré aux successions plutôt que dans celui consacré aux obligations qui naissent du mariage ( art. 4, art. 767 du code civil ). C'est d'ailleurs la solution retenue par l'Assemblée nationale à l'article 2 s'agissant du droit de créance des ascendants ordinaires.
Votre commission vous proposera de reprendre la rédaction de l'article 4 adoptée en première lecture.
6. Ne pas faire du conjoint survivant un héritier réservataire
L'Assemblée nationale n'a pas fait du conjoint survivant un héritier réservataire en présence de descendants ou de parents du défunt. Cette démarche doit être approuvée. La création d'une réserve supplémentaire au profit du conjoint à côté de celle existant pour les enfants et les ascendants aurait créé une trop grande rigidité. En présence de trois enfants, elle aurait ainsi supprimé toute marge testamentaire au défunt.
La création d'une réserve au profit du conjoint survivant en présence de descendants, comme elle peut exister dans les pays voisins comme l'Allemagne, le Danemark, ou l'Italie, ne pourrait se concevoir que dans le cadre général d'une réforme des libéralités.
En l'absence de descendant et d'ascendant, l'Assemblée nationale a prévu une réserve sur un quart des biens de la succession au bénéfice du conjoint survivant, sauf dans le cas où une procédure de divorce ou de séparation de corps aurait été engagée.
La liberté testamentaire du défunt doit cependant pouvoir s'exercer pleinement dans ce cas également. Il doit notamment pouvoir laisser les biens qu'il souhaite à ses frères et soeurs .
Des dispositions relatives au droit au logement et au droit à pension devraient être suffisantes pour garantir au conjoint des conditions d'existence minimales.
Votre commission vous proposera en conséquence de supprimer, comme en première lecture, l'article 6 de la proposition instituant une réserve au profit du conjoint survivant.