N° 217
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2004-2005
Annexe au procès-verbal de la séance du 2 mars 2005 |
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires
étrangères, de la défense et des forces armées (1)
sur le projet de loi
autorisant
l'
approbation
de la
convention
entre le Gouvernement de la
République française et le Gouvernement de la
Principauté
d'
Andorre
dans le domaine de
l'
enseignement
,
Par M. Robert Del PICCHIA,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : M. Serge Vinçon, président ; MM. Jean François-Poncet, Robert Del Picchia, Jacques Blanc, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Jean-Pierre Plancade, Philippe Nogrix, Mme Hélène Luc, M. André Boyer, vice-présidents ; MM. Simon Loueckhote, Daniel Goulet, Jean-Guy Branger, Jean-Louis Carrère, André Rouvière, secrétaires ; MM. Bernard Barraux, Jean-Michel Baylet, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Pierre Biarnès, Didier Borotra, Didier Boulaud, Robert Bret, Mme Paulette Brisepierre, M. André Dulait, Mme Josette Durrieu, MM. Jean Faure, Jean-Pierre Fourcade, Mmes Joëlle Garriaud-Maylam, Gisèle Gautier, MM. Francis Giraud, Jean-Noël Guérini, Michel Guerry, Robert Hue, Joseph Kergueris, Robert Laufoaulu, Louis Le Pensec, Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Louis Mermaz, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Charles Pasqua, Jacques Pelletier, Daniel Percheron, Jacques Peyrat, Xavier Pintat, Yves Pozzo di Borgo, Jean Puech, Yves Rispat, Josselin de Rohan, Roger Romani, Gérard Roujas, Mme Catherine Tasca, MM. André Trillard, André Vantomme, Mme Dominique Voynet.
Voir le numéro :
Sénat : 80 (2004-2005)
Traités et conventions |
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
La France et Andorre entretiennent des relations anciennes, qui évoluent en droit depuis le 14 mars 1993. A cette date, l'approbation par les andorrans d'une constitution mit fin à la situation prévalant depuis le XIIIe siècle, durant laquelle Andorre était une principauté régie par deux co-princes : le Président de la République française, et l'évêque d'Urgel, ville de Catalogne située près de Lérida.
Cette accession à la souveraineté internationale, consacrée par un siège à l'ONU, a été suivie par la conclusion, le 1 er juin 1993, d'un traité de « bon voisinage, d'amitié et de coopération » entre la France, l'Espagne et Andorre.
Le présent texte vise à conforter le rôle joué par notre pays dans l'enseignement primaire et secondaire de la Principauté.
A. UNE CONVENTION DANS LA CONTINUITÉ DE CELLE CONCLUE EN 1993
Parmi les nombreux liens qui unissent notre pays à la Principauté d'Andorre figure la participation française au système d'éducation primaire et secondaire de ce pays. En effet, le secteur éducatif de la Principauté est assuré par la coexistence de trois systèmes qui scolarisent chacun environ un tiers des élèves.
Le système andorran accueille ainsi, durant l'année scolaire 2004-2005, un total de 3.330 élèves répartis dans 14 établissements primaires et secondaires. Le système espagnol accueille, pour sa part, 3.585 élèves, dans 15 établissements publics et privés. Enfin, le système français s'adresse à 3.690 élèves dans 15 établissements publics.
Cette présence française est ancienne, puisque c'est un décret de 1917 qui a créé les premières écoles publiques subventionnées par notre pays. Puis un collège a été créé en 1972, et un lycée en 1979.
Cette coopération a été formalisée, lors de l'accession d'Andorre à la souveraineté internationale, en 1993, par une convention du 19 mars 1993, conclue pour dix ans. Prolongé par un échange de lettres du 13 mars 2004 jusqu'à l'entrée en vigueur de la présente convention, l'accord de 1993 intégrait le système éducatif assuré par la France dans le nouveau contexte institutionnel d'Andorre, et prenait en compte les besoins spécifiques exprimés en matière d'enseignement de la langue catalane et de la civilisation andorrane par les autorités de la Principauté. Cet accord instaurait une délégation à l'enseignement français en Andorre chargée notamment de définir un programme d'enseignement en adéquation avec ces besoins. Puis, un échange de lettres de 1997, fondé sur la convention de 1993, a établi la reconnaissance mutuelle des baccalauréats français et andorrans pour l'accès à l'enseignement supérieur des deux pays.
Le présent accord reprend les dispositions du texte de 1993, en précisant certaines modalités techniques en matière d'organisation de l'enseignement et de gestion du personnel éducatif français.
Ce texte comporte également deux annexes qui, pour la première, institue une Commission nationale d'affectation des personnels de l'Education nationale en Andorre, qui est chargée du recrutement du personnel d'encadrement et d'enseignement. La seconde annexe détermine les horaires d'enseignement de la langue catalane, et de la géographie, de l'histoire et des institutions andorranes dans les établissements français, de la maternelle au lycée. Ces cours font l'objet d'heures supplémentaires, et respectent donc le contenu des programmes français.
Le présent texte réaffirme la gratuité de l'enseignement offert par les établissements français, et détermine leur répartition : les écoles maternelles et primaires sont présentes dans les différentes « paroisses » (communes), et le lycée « Comte de Foix », situé à Andorre-la-Vieille, regroupe un collège, un lycée et un lycée professionnel.
Les créations ou fermetures d'établissements sont décidées par accord commun entre les deux gouvernements, après avis de la commission mixte formalisée par le présent texte ; cette commission fonctionnait déjà, mais de façon informelle. Les personnels d'encadrement et d'enseignement, qui peuvent être de nationalité andorrane, de l'Union européenne, ou de l'Espace économique européen, sont tous soumis aux règles statutaires françaises.
La France prend financièrement en charge les enseignements assurés dans le cadre des programmes français. La Principauté finance les enseignements de langue catalane et d'institutions andorranes.
Les locaux des écoles maternelles et élémentaires continuent, comme prévu par le texte de 1993, d'être mis à disposition et entretenus par le gouvernement d'Andorre. Les personnels relevant du ministère français de l'éducation bénéficient, désormais, tout comme leurs familles, de la gratuité de leur carte de séjour, et d'un programme d'accueil pour faciliter leur intégration.
Par ailleurs, la coopération éducative entre les deux pays est étendue à l'enseignement professionnel, et à l'enseignement supérieur.
L'accord est conclu pour dix ans, et peut être modifié par chacune des parties avec un préavis de deux ans.
L'enseignement supérieur andorran comprend, à l'heure actuelle, deux facultés de droit et de sciences humaines, situées à Andorre-la-Vieille.
En 2004, notre pays a consacré aux établissements français d'enseignement en Andorre une dotation horaire globale de 2.513 heures, soit 136 ETP (équivalents temps plein), pour un volume financier d'environ 15 millions d'euros.
Cet effort vise à pérenniser et étendre la formation d'une élite francophone , alors que l'on constate que la plupart des étudiants de la Principauté commencent ou poursuivent leur formation universitaire en Espagne, essentiellement à Barcelone. Outre sa forte attraction économique, cette ville attire les étudiants par la communauté de langue, le catalan étant la langue officielle d'Andorre.
On estime à environ 10 % les étudiants andorrans installés en France, essentiellement à Toulouse ou Montpellier.
B. ANDORRE, UNE PRINCIPAUTÉ PROSPÈRE MALGRÉ DE FAIBLES ATOUTS ÉCONOMIQUES
Le territoire andorran couvre une superficie de 450 km2, dont la quasi-totalité se trouve à plus de 1.000 mètres d'altitude. Les quelque 68.000 habitants sont pour 90 % regroupés en zone urbaine, dont la majeure partie dans la capitale, Andorre-la-Vieille. Andorre a adopté l'euro sans avoir signé de traité avec l'Union européenne.
La principale activité économique du pays repose sur le tourisme, notamment grâce à la faible taxation des biens , qui attire de nombreux frontaliers espagnols et français. Mais la principauté cherché à diversifier son activité, particulièrement le secteur industriel : elle devrait accueillir des PMI de pointe, spécialisées dans le domaine pharmaceutique ou optique.
En 2003, le PNB par habitant atteignait 14.750 $, pour 22.550 en France.
La population est composée d'Espagnols, pour près de 45 %, d'Andorrans (35 %), de Portugais (10 %) et de Français (10 %) 1 ( * ) .
La France s'efforce donc de conforter les moyens de sa coopération avec Andorre. Ainsi a-t-elle signé avec la Principauté, le 14 février 2001, une convention relative à la coopération administrative entre les deux Etats, achevant ainsi les négociations entreprises depuis 1997.
Cette convention avait pour principal objet de fournir aux magistrats et aux fonctionnaires français appelés à occuper un emploi en Andorre un cadre juridique stable et clair, alors que leurs dossiers étaient jusqu'à présent traités au cas par cas.
Dans ce but, la convention encourageait le détachement de fonctionnaires français en Andorre, afin de répondre au souhait de la Principauté d'Andorre d'obtenir de la France les moyens humains nécessaires à la gestion de son administration, en particulier judiciaire. La convention visait à renforcer la présence française dans ce pays où les fonctionnaires espagnols sont actuellement plus nombreux dans la magistrature que les fonctionnaires français.
En effet, l'Andorre, qui compte moins de 70.000 habitants, ne dispose pas toujours des moyens humains nécessaires à une gestion efficace de son appareil administratif et judiciaire. La France, qui bénéficie d'un lien particulièrement fort avec ce pays du fait de l'institution du coprince, a un devoir de solidarité active envers cet Etat.
Plusieurs conventions ont, ces dernières années, précisé les relations entre la France et Andorre : ainsi, en 2001, un accord a été conclu entre les deux pays pour lancer les travaux de délimitation de la frontière, qui restait coutumière. Cette décision a été prise à l'occasion d'un échange de territoires, de faible ampleur, permettant à Andorre de construire un accès routier au nouveau tunnel d'Envalira, destiné à desservir la Principauté plus commodément que par l'unique route soumise aux intempéries l'hiver. Puis des accords en matière de coopération administrative, de reconnaissance mutuelle du système de sécurité sociale, de circulation et d'établissement des ressortissants de chacun des deux Etats ont suivi. Un accord en matière de transports routiers internationaux est également à l'étude au parlement français.
L'origine de la communauté française remonte aux années soixante. Nos ressortissants travaillent essentiellement dans l'enseignement, les banques, le commerce, l'hôtellerie et la restauration ; 30 % d'entre eux sont des retraités. Le nombre des Français reste modeste au regard de la présence espagnole, facilitée par la géographie et la proximité culturelle et linguistique.
* 1 Chiffres évaluatifs.