B. LA MISE EN oeUVRE DE LA DESTRUCTION DE L'ARSENAL CHIMIQUE RUSSE

L'Union soviétique avait développé un impressionnant arsenal d'armes chimiques, ainsi que des armes biologiques. S'agissant des armes chimiques, on estime qu'environ le tiers des systèmes d'armes soviétiques étaient conçus pour les mettre en oeuvre, qu'il s'agisse de missiles, de bombes d'aviation ou de munitions d'artillerie. En ce qui concerne les armes biologiques, elles connurent un développement inégalé dans le monde dans le cadre du complexe militaro-industriel « Biopreparat » maintenu et amplifié, sous couvert d'activités civiles, au lendemain même de la signature du protocole de 1972 sur l'interdiction des armes bactériologiques.

L' arsenal chimique proprement dit, hérité de l'Union soviétique, représentait, au moment de la conclusion de la convention de 1993 sur l'interdiction des armes chimiques, 40 000 tonnes d'agents chimiques , soit les deux tiers de stocks mondiaux .

Dès l'origine de la convention pour l'interdiction des armes chimiques, la question de la destruction des stocks apparaissait un point d'achoppement pour la Russie, non pour des motifs politiques ou stratégiques, mais simplement en raison du coût représenté par des opérations extrêmement lourdes et complexes.

En effet, la destruction des armes chimiques doit avoir lieu dans des installations hautement spécialisées. Elle nécessite des investissements dans des techniques de pointe, afin de réduire au minimum le risque pour la population et l'environnement à chaque étape du transport et de la destruction des munitions, ainsi que durant le déplacement et la destruction des agents chimiques.

Il existe deux techniques principales de destruction des agents chimiques : l'incinération directe et la neutralisation au moyen de diverses réactions chimiques. Chaque État partie à la convention de 1993 peut choisir la technique de destruction qu'il souhaite appliquer, à condition que la destruction soit conforme à des normes strictes de protection de l'environnement, qu'elle soit complète et irréversible et que l'aménagement de l'installation permette une vérification appropriée.

Pour la Russie, qui possède le plus vaste arsenal d'armes chimiques au monde, le coût de la destruction des stocks a été estimé à 11 milliards de dollars.

Ces armes et les produits associés sont entreposés dans sept sites sur lesquels doivent être construits autant d'unités de destruction. Cinq de ces sites sont des entrepôts d'agents neurotoxiques , tels que le sarin, le soman et l'agent VX et représentent, à eux seuls, environ 80 % de l'arsenal global de la Russie. Deux autres sites abritent des agents vésicants, tels que l'ypérite et le mélange lewisite/ypérite.

Trois des sept usines de destruction prévues (Gorny, Kambarka et Maradykovo) ont été mises en activité. La quatrième, située à Shchuch'ye en Sibérie occidentale et sur laquelle porte la coopération avec la France, devrait entrer en service en 2008, et les trois dernières (Kizner, Potchep et Leonidovka) ultérieurement.

Aux termes de la convention d'interdiction, les États parties disposent normalement de 10 ans pour détruire leurs stocks, un délai supplémentaire de 5 ans maximum pouvant être accordé. La Russie , tout comme d'ailleurs les Etats-Unis, a obtenu de repousser à 2012 l'achèvement de la destruction .

A l'automne 2006, la Russie n'avait détruit que 7 % de ses armes chimiques. La mise en route de deux usines supplémentaires en 2006 devrait permettre d'atteindre les 20 % en 2007.

Dans la mise en oeuvre de son programme de destruction, la Russie a obtenu une importante assistance internationale provenant de plus d'une quinzaine de pays. La Russie a fait valoir qu'elle ne pouvait mener à bien seule le programme de destruction dans les délais impartis, d'autant qu'elle doit faire face à bien d'autres charges liées à la restructuration de son complexe militaro-industriel.

Pour leur part, les pays occidentaux ont estimé que cette assistance était justifiée pour éviter les risques de détournement d'une partie des stocks, par exemple à des fins de trafics avec d'autres Etats ou par des organisations terroristes.

Cette assistance internationale s'insère dans le cadre du partenariat mondial contre la prolifération des armes de destruction massive , lancé par le G8 lors du sommet de Kananaskis en 2002 dans le prolongement de programmes américains mis en oeuvre à la fin de la guerre froide. Ce partenariat mondial, auquel se sont joints des pays non membres du G8 comme les pays scandinaves, la Belgique, les Pays-Bas, la Suisse, l'Australie, la Nouvelle-Zélande ou la Corée du Sud, couvre bien d'autres aspects que le désarmement chimique, notamment l'élimination des matières fissiles militaires russes en excédent, le renforcement de la sécurité des installations abritant des matières ou sources radioactives ou encore la reconversion des scientifiques issus des anciens laboratoires de mise au point d'armes biologiques ou chimiques.

C'est dans ce cadre du partenariat mondial qu'a été conclu l'accord de coopération avec la France signé le 14 février 2006.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page