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Rapport n° 87 (2009-2010) de M. Jean-Pierre VIAL , fait au nom de la commission des lois, déposé le 4 novembre 2009

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N° 87

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2009-2010

Enregistré à la Présidence du Sénat le 4 novembre 2009

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur la proposition de loi, présentée par MM. Yvon COLLIN, Michel CHARASSE, Nicolas ALFONSI, Gilbert BARBIER, Jean-Michel BAYLET, Mme Anne-Marie ESCOFFIER, M. François FORTASSIN, Mme Françoise LABORDE, MM. Daniel MARSIN, Jacques MÉZARD, Jean MILHAU, Jean-Pierre PLANCADE, Raymond VALL et François VENDASI, tendant à interdire ou à réglementer le cumul des fonctions et des rémunérations de dirigeant d'une entreprise du secteur public et d'une entreprise du secteur privé ,

Par M. Jean-Pierre VIAL,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Jacques Hyest , président ; M. Nicolas Alfonsi, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, MM. Patrice Gélard, Jean-René Lecerf, Jean-Claude Peyronnet, Jean-Pierre Sueur, Mme Catherine Troendle, M. François Zocchetto , vice-présidents ; MM. Laurent Béteille, Christian Cointat, Charles Gautier, Jacques Mahéas , secrétaires ; M. Alain Anziani, Mmes Éliane Assassi, Nicole Bonnefoy, Alima Boumediene-Thiery, MM. Elie Brun, François-Noël Buffet, Pierre-Yves Collombat, Jean-Patrick Courtois, Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, M. Yves Détraigne, Mme Anne-Marie Escoffier, MM. Pierre Fauchon, Louis-Constant Fleming, Gaston Flosse, Christophe-André Frassa, Bernard Frimat, René Garrec, Jean-Claude Gaudin, Mmes Jacqueline Gourault, Virginie Klès, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Mme Josiane Mathon-Poinat, MM. Jacques Mézard, Jean-Pierre Michel, François Pillet, Hugues Portelli, Roland Povinelli, Bernard Saugey, Simon Sutour, Richard Tuheiava, Alex Türk, Jean-Pierre Vial, Jean-Paul Virapoullé, Richard Yung.

Voir le(s) numéro(s) :

Sénat :

8 et 88 (2009-2010)

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS

La commission des lois, réunie le mercredi 4 novembre 2009 sous la présidence de M. Jean-Jacques Hyest, président , a procédé à l'examen du rapport de M. Jean-Pierre Vial et du texte proposé par la commission pour la proposition de loi 8 (2009-2010), présentée par M. Yvon Collin et plusieurs de ses collègues, tendant à interdire ou à réglementer le cumul des fonctions et des rémunérations de dirigeant d'une entreprise du secteur public et d'une entreprise du secteur privé.

M. Jean-Pierre Vial, rapporteur, a souligné que la proposition de loi s'inscrivait dans le contexte lié à la désignation envisagée de M. Henri Proglio aux fonctions de président-directeur général d'EDF, alors que celui-ci conserverait dans le même temps un mandat de président du conseil d'administration de la société Veolia Environnement. Il a expliqué que l'objet de ce texte était de réagir à cette situation par un dispositif d'encadrement du cumul de fonctions de direction dans des entreprises relevant du secteur public et du secteur privé, ainsi que du cumul des rémunérations en découlant.

Il a rappelé qu'à l'heure actuelle, il n'était pas rare qu'une même personne exerce plusieurs mandats sociaux relevant d'entreprises appartenant au secteur privé et au secteur public. En revanche, il a indiqué qu'il ne semblait pas exister à ce jour de cumul de fonctions de direction, tel que celui illustré par la situation de M. Henri Proglio. Il a précisé qu'il n'existait par ailleurs aucune réglementation relative au cumul des rémunérations publiques et privées.

Relevant que les dispositifs actuels, issus tant du droit des sociétés -en particulier les règles relatives au cumul de mandats sociaux et à la rémunération des dirigeants- que du droit de la fonction publique ne permettaient pas de prendre en compte de façon satisfaisante les situations de cumul, la commission des lois a néanmoins estimé que l'intervention de la commission de déontologie n'apparaissait pas pertinente et que l'interdiction pure et simple d'un cumul de rémunérations en cas de cumul de fonctions de direction n'était pas justifiée.

Après consultation des auteurs de la proposition de loi et à l'initiative du rapporteur, elle a prévu que la nomination aux fonctions de président du conseil d'administration, de directeur général, de membre du directoire ainsi que de président du conseil de surveillance dans une entreprise du secteur public, concurremment à l'exercice de fonctions similaires dans une entreprise du secteur privé, devrait donner lieu à un avis de l'Agence des participations de l'Etat, tant sur la compatibilité de ce cumul avec les intérêts patrimoniaux de l'Etat que sur la rémunération globale octroyée à l'intéressé à ce titre. Elle a souhaité que cet avis soit transmis aux commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat lorsque ces dernières seront amenées à rendre leur avis sur la nomination du dirigeant d'une entreprise du secteur public en application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution.

La commission des lois a adopté la proposition de loi ainsi rédigée .

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Le Sénat est appelé à examiner la proposition de loi n° 8 (2009-2010) tendant à interdire ou à règlementer le cumul des fonctions et des rémunérations de dirigeant d'une entreprise du secteur public et d'une entreprise du secteur privé, présentée par MM. Yvon Collin et Michel Charasse ainsi que plusieurs de nos collègues du groupe Rassemblement démocratique et social européen, dans le cadre de l'ordre du jour réservé aux groupes d'opposition et minoritaires en application de l'article 29 bis de notre Règlement.

Cette proposition intervient dans un contexte où l'Etat envisage de nommer à la tête d'EDF M. Henri Proglio, alors même que celui-ci conserverait des fonctions de mandataire social au sein de l'entreprise dont il a été, pendant plusieurs années le président-directeur général : Veolia Environnement. Pour ce faire, cette société a décidé de modifier sa gouvernance afin que M. Henri Proglio n'y exerce qu'une fonction de président non exécutif du conseil d'administration, alors qu'il est encore aujourd'hui président-directeur général de cette société.

Ce cumul de fonctions de direction entre sociétés du secteur public et sociétés du secteur privé qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne vient interdire ni même encadrer à ce jour, a suscité, dans son principe, des critiques tendant notamment à condamner ce que certains présentent comme un « mélange des genres ».

Le texte présenté par nos collègues s'inscrit dans cette démarche critique, son exposé des motifs mettant en particulier en exergue la nécessité, en cas de cumul, « de veiller à la préservation des intérêts de l'État, qui ne sauraient être compromis par la direction simultanée et unique de plusieurs entreprises publiques et privées, et éventuellement concurrentes . » S'il semble motivé par un cas particulier, ce texte n'en a donc pas moins une portée générale et vise à mieux s'assurer à l'avenir de la compatibilité de ce type de cumul.

A ce titre, la proposition de loi envisage un double encadrement :

- d'une part, un encadrement de la possibilité du cumul , par l'intervention obligatoire de la commission de déontologie de la fonction publique ;

- d'autre part, un encadrement de la rémunération au titre des différentes fonctions, lorsque le cumul est autorisé .

I. UN CUMUL ACTUELLEMENT PEU ENCADRÉ DES FONCTIONS DE DIRIGEANTS D'ENTREPRISES DES SECTEURS PUBLIC ET PRIVÉ

La notion d'entreprise relevant du secteur public n'est pas légalement définie en tant que telle. Néanmoins, la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public définit un certain nombre d'entités comme faisant partie du secteur public et, en conséquence, soumises à des règles particulières en matière de gouvernance ainsi qu'en matière de participation des salariés. Énumérées par son article 1 er , ces entités sont :

- les établissements publics industriels et commerciaux de l'Etat, autres que ceux dont le personnel est soumis à un régime de droit public ; autres établissements publics de l'Etat qui assurent tout à la fois une mission de service public à caractère administratif et à caractère industriel et commercial, lorsque la majorité de leur personnel est soumise aux règles du droit privé ;

- les sociétés mentionnées à l'annexe I de cette loi 1 ( * ) ;

- les entreprises nationales, sociétés nationales, sociétés d'économie mixte ou sociétés anonymes dans lesquelles l'Etat détient directement plus de la moitié du capital social ainsi que les sociétés à forme mutuelle nationalisées ;

- les sociétés anonymes dans lesquelles plus de la moitié du capital social est détenue, directement ou indirectement, depuis plus de six mois, à lui seul par l'un des établissements ou sociétés mentionnés au présent article, et dont le nombre de salariés employés en moyenne au cours des vingt-quatre derniers mois est au moins égal à 200 ;

- les autres sociétés anonymes dans lesquelles plus de la moitié du capital social est détenue, directement ou indirectement, depuis plus de six mois, conjointement par l'Etat, ses établissements publics ou les sociétés mentionnés dans cet article, et dont le nombre de salariés employés en moyenne au cours des vingt-quatre derniers mois est au moins égal à 200.

En l'absence de définition textuelle générale, le secteur public est considéré par la jurisprudence comme constitué :

- des établissements publics, qui constituent des personnes morales de droit public régies soit par le droit public, dans le cas d'une entité assurant l'exécution d'un service public administratif, soit par le droit privé dans le cas d'une entité exerçant un service public industriel et commercial ;

- d'entités relevant du droit privé, notamment les sociétés commerciales, lorsque l'Etat en est, en tout ou partie propriétaire. La jurisprudence a ainsi précisé, qu'une société relevait du secteur public dès lors que l'Etat y détient directement ou indirectement la majorité du capital social 2 ( * ) , voire la majorité des droits de vote.

Depuis 2004, un service à compétence nationale placé au sein du ministère de l'économie, l'Agence des participations de l'Etat, exerce la mission de l'Etat actionnaire dans des entreprises contrôlées ou détenues par l'Etat, limitativement énumérées 3 ( * ) .

L'agence des participations de l'Etat

L'Agence des participations de l'Etat constitue un service à compétence nationale placé auprès du directeur du Trésor au sein du ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi . Elle est dirigée par un directeur général nommé par arrêté du ministre chargé de l'économie, sur proposition du directeur du Trésor.

L'Agence exerce, en veillant aux intérêts patrimoniaux de l'Etat, la mission de l'Etat actionnaire dans certaines entreprises et organismes contrôlés ou détenus, majoritairement ou non, directement ou indirectement, par l'Etat . Elle exerce cette mission en liaison avec l'ensemble des ministères chargés de définir et de mettre en oeuvre les autres responsabilités de l'Etat.

Les entités rentrant dans le champ d'intervention de l'Agence sont actuellement :

Agence pour la diffusion de l'information technologique (ADIT)

Aéroport de Bordeaux-Mérignac

Aéroport Toulouse-Blagnac

Aéroports de la Côte d'azur

Aéroports de Lyon

Aéroports de Paris (ADP)

Air France - KLM

Areva

Arte France

Autoroute et tunnel du Mont-Blanc (ATMB)

Audiovisuel extérieur de la France

Compagnie générale maritime et financière (CGMF)

CIVIPOL Conseil

Caisse nationale des Autoroutes

CNP Assurances

Défense Conseil international groupe (DCI)

DCNS

Dexia

EADS

Electricité de France (EDF)

Etablissement public de financement et de restructuration (EPFR)

Etablissement public de réalisation de défaisance (EPRD)

ERAP

Fonds stratégique d'investissement

France Télécom

France Télévisions

GDF Suez

GIAT Industrie - Nexter

Grand Port maritime de Dunkerque

Grand Port maritime de Marseille

Grand Port maritime de Rouen

Grand Port maritime du Havre

Grand Port maritime La Rochelle

Grand Port maritime de Bordeaux

Grand Port maritime de Nantes / Saint-Nazaire

Imprimerie nationale

Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies (LFB)

La Française des jeux

La Monnaie de Paris

La Poste

Nouvelle société de réalisation de défaisance (NSRD)

Port autonome de Paris

Port autonome de Strasbourg

Radio France

RATP

Renault SA

Réseau ferré de France (RFF)

Safran

SEMMARIS

Société française du tunnel routier du Fréjus (SFTRF)

Société de gestion de garanties et de participations (SGGP)

Société nationale des chemins de fer français (SNCF)

Société nationale maritime Corse Méditerranée (SNCM)

Société nationale des poudres et explosifs (SNPE)

Société de prise de participation de l'état

Société financière de radiodiffusion (SOFIRAD)

SOGEADE Conseil

SOGEADE

Société de gestion et participations aéronautiques (SOGEPA)

Société de valorisation foncière et immobilière (SOVAFIM)

Thalès

Thomson SA

Au titre de ses missions, l'Agence :

- propose au ministre chargé de l'économie la position de l'Etat actionnaire en ce qui concerne la stratégie des entreprises et organismes relevant de son périmètre, dans le respect des attributions des autres administrations intéressées. A ce titre, elle analyse la situation économique et financière de ces entreprises et organismes et sollicite les compétences des administrations intéressées ;

- met en oeuvre les décisions et orientations de l'Etat actionnaire ;

- participe, en liaison avec les administrations compétentes, à l'élaboration des contrats qui lient ces entreprises et organismes à l'Etat ;

- examine, en liaison avec les ministères intéressés, les principaux programmes d'investissement et de financement des entreprises et organismes susmentionnés ainsi que les projets d'acquisition ou de cession, d'accord commercial ou de coopération et de recherche et développement. Elle propose au ministre chargé de l'économie la position de l'Etat actionnaire sur ces sujets et la met en oeuvre ;

- s'assure, le cas échéant avec le commissaire du Gouvernement, de la cohérence des positions des représentants de l'Etat participant aux organes délibérants de ces entreprises et organismes, et représente l'Etat aux assemblées d'actionnaires ;

- peut être consultée pour les nominations et révocations des membres des organes délibérants nommés par décret, autres que les représentants de l'Etat, dans les entreprises et organismes susmentionnés ;

- évalue régulièrement la gestion mise en oeuvre par les dirigeants des entreprises et organismes susmentionnés, en liaison avec les autres administrations concernées ;

- contrôle l'activité des personnes de droit public susmentionnées et la gestion financière des personnes contrôlées et propose, après avis du ministre chargé du budget, les évolutions relatives aux modalités d'exercice de ce contrôle. Elle recourt à cet effet, en tant que de besoin, aux services de l'inspection générale des finances et du contrôle d'Etat. L'entreprise ou l'organisme contrôlé est tenu de lui communiquer toutes les informations nécessaires à l'exécution de sa mission ;

- propose, après avis des ministères concernés, les évolutions statutaires des entreprises et organismes susmentionnés. Elle assure la préparation et la mise en oeuvre des décisions prises en ces matières en liaison avec les administrations concernées ;

- met en oeuvre, pour le compte du directeur du Trésor, les opérations en capital concernant les organismes susmentionnés ;

- établit le rapport relatif à l'Etat actionnaire prévu par l'article 142 de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques ;

- participe au suivi des questions relatives à la comptabilité patrimoniale de l'Etat.

Le droit en vigueur se caractérise par une absence d'encadrement spécifique et général en cas de cumul de fonctions de direction simultanément dans des entreprises relevant du secteur public et du secteur privé . Toutefois, certains mécanismes permettent d'appréhender cette problématique dans des hypothèses de cumul déterminées.

A. UNE ABSENCE D'ENCADREMENT SPÉCIFIQUE

1. L'absence de réglementation du cumul de fonctions de direction

À l'heure actuelle, il n'est pas rare qu'une même personne exerce plusieurs mandats sociaux dans des sociétés relevant tant du secteur public ou du secteur privé.

Plusieurs exemples, en particulier dans les sociétés du CAC 40, montrent en effet que la situation dans laquelle une personne exerçant une fonction de direction dans une société est titulaire d'un mandat social non exécutif dans une autre est même relativement fréquente .

Néanmoins, à ce jour, il ne semble pas exister de cumul de fonctions de direction dans deux entreprises relevant pour l'une du secteur public et pour l'autre du secteur privé.

De fait, le cumul éventuel de fonctions de direction dans le cadre d'entreprises relevant du secteur public et du secteur privé ne fait, à l'heure actuelle, l'objet d'aucune réglementation particulière . Rien n'empêche ainsi, dans son principe, un tel cumul.

Exemples de cumuls de mandats sociaux
dans des sociétés relevant du secteur public et du secteur privé


Mandats sociaux exercés en France
( hors filiales )

Thierry Desmarest

- Président du conseil d'administration de Total

- Administrateur d'Air liquide, de Sanofi-Aventis, de Renault SA et Renault SAS

- Membre du conseil de surveillance d'Areva

Anne Lauvergeon

- Présidente du directoire d'Areva

- Administrateur de GDF-Suez et Total

Didier Lombard

- Président-directeur général de France Télecom

- Administrateur de Thomson SA et Thalès

- Membre du conseil de surveillance de STMicrolectronics, et de Radiall

Gérard Mestrallet

- Président du conseil d'administration de GDF-Suez

- Administrateur de Saint-Gobain

- Membre du conseil de surveillance d'Axa

Henri Proglio

- Président-directeur général de Veolia environnement

- Administrateur d'EDF, de CNP Assurances, de Dassault aviation

- Membre du conseil de surveillance de Dalkia (président), Natixis et Lagardère

Louis Schweitzer

- Président du conseil d'administration de Renault

- Administrateur de Veolia, de BNP Paribas et de l'Oréal

- Président du conseil de surveillance du groupe Le Monde

Jean-Cyril Spinetta

- Président du conseil d'administration d'Air-France-KLM

- Président du conseil de surveillance d'AREVA

- Administrateur d'Alcatel, de Saint-Gobain et de GDF-Suez

Sources : documents de référence 2008.

L'état du droit en la matière se distingue donc par son libéralisme de celui qui s'applique à l'égard des fonctionnaires et agents publics, dont la situation est examinée par un organe consultatif administratif : la commission de déontologie de la fonction publique.

Le cumul d'activités au sein de l'administration et dans le secteur privé est en effet par principe interdit, mais trois hypothèses strictement limitées permettent par exception le cumul avec des activités privées :

- l'exercice d'activités accessoires à l'activité principale dans l'administration, sous réserve que ces activités ne portent pas atteinte au fonctionnement normal, à l'indépendance ou à la neutralité du service. Ces activités, limitativement énumérées 4 ( * ) , ne peuvent être exercées qu'après autorisation de l'autorité dont relève l'agent ;

- la création ou la reprise d'une entreprise. Après déclaration à l'autorité dont relève l'agent pour l'exercice de ses fonctions, cette dérogation est ouverte pendant une durée maximale de deux ans à compter de cette création ou reprise et peut être prolongée pour une durée maximale d'un an ;

- la continuation de fonctions de dirigeant d'une société ou d'une association. Cette dérogation s'applique aux lauréats d'un concours ou aux personnes recrutées en qualité d'agent non titulaire de droit public, qui, après déclaration à l'autorité dont ils relèvent pour l'exercice de leurs fonctions, peuvent continuer à exercer leur activité de direction, pendant une durée maximale d'un an à compter de leur recrutement, prolongeable pour une durée maximale d'un an.

C'est du reste cette considération qui a amené les auteurs de la présente proposition de loi à proposer un dispositif juridique particulier destiné à pallier ce que d'aucuns ont pu qualifier de manque, voire de « trou législatif ».

2. L'absence de réglementation du cumul de rémunérations

Il n'existe pas, à ce jour, de règles relatives au cumul des rémunérations publiques et privées dans le cadre des textes relatifs à la fonction publique ou au droit des sociétés.

Jusqu'en 2007, le cumul des rémunérations publiques a certes fait l'objet d'un plafonnement, en vertu du décret-loi du 29 octobre 1936 relatif aux cumuls de retraite, de rémunérations et de fonctions. Néanmoins, dans le cadre de la réforme opérée par la loi n° 2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique, ce plafonnement a été supprimé.

En revanche, le cumul de rémunérations publiques et privées n'a jamais été soumis à un quelconque plafonnement, tout comme le cumul d'une rémunération publique avec des éléments de rémunération versés par un Etat étranger.

B. DES DISPOSITIFS SUSCEPTIBLES DE JOUER DANS CERTAINES HYPOTHÈSES DE CUMUL

1. L'encadrement du cumul de fonctions

a) L'encadrement applicable aux agents publics et collaborateurs de cabinets

L'existence de conflits d'intérêts pouvant subvenir lorsqu'un agent public vient à exercer certaines fonctions dans une entreprise du secteur privé ou dans une entreprise relevant du secteur public mais exerçant son activité dans le domaine concurrentiel a conduit le législateur à prévoir certains mécanismes de prévention de ce type de conflits et, à défaut, de sanction.

La loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques a notamment institué un organisme administratif, placé auprès du premier ministre, chargé d'examiner si l'emploi d'un agent de l'administration dans le cadre d'une entité privée ou une entreprise publique du secteur concurrentiel est compatible avec les fonctions qu'il a exercées antérieurement au sein de l'administration.

Depuis la loi n° 2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique, la commission de déontologie de la fonction publique exerce deux niveaux de contrôle :

- le premier est un contrôle destiné à prévenir toute situation de conflit d'intérêts constitutive du délit de prise illégale d'intérêts , mentionné à l'article 432-13 du code pénal ;

- le second est un contrôle de nature déontologique destiné à éviter la constitution de certaines situations, sans pour autant que les faits concernés puissent être qualifiés pénalement .

Ainsi, la commission peut être saisie pour rendre un avis sur la compatibilité avec les fonctions précédentes de l'agent, de toute activité lucrative, salariée ou non, dans un organisme ou une entreprise privé ou dans une entreprise publique exerçant son activité conformément aux règles du droit privé dans un secteur concurrentiel ou d'une activité libérale, que souhaite exercer l'agent pendant un délai de trois ans suivant la cessation de ses fonctions.

Toutefois, la commission de déontologie de la fonction publique connaît seulement de la situation de catégories de personnes limitativement énumérées, soit en raison de leur statut public, soit en raison de leur participation à l'activité d'un organe chargé de la définition ou du contrôle des politiques publiques. Elle n'est donc pas compétente à l'égard des personnes relevant du droit privé sans lien juridique avec une personne publique exerçant une mission de contrôle.

Le droit en vigueur permet néanmoins d' envisager l'intervention de la commission dans l'hypothèse d'un cumul, à l'égard d'un fonctionnaire qui serait nommé comme dirigeant d'une entreprise publique intervenant dans le secteur concurrentiel, dans un délai de trois ans suivant sa nomination et au regard des fonctions précédemment exercées.

L'article 2 du décret n° 2007-611 du 26 avril 2007 relatif à l'exercice d'activités privées par des fonctionnaires ou agents non titulaires ayant cessé temporairement ou définitivement leurs fonctions et à la commission de déontologie impose en effet à tout agent de porter à la connaissance de son administration « tout nouveau changement d'activité pendant un délai de trois ans à compter de la cessation de fonctions ».

Cette disposition est ainsi susceptible de s'appliquer à la nomination aux fonctions de dirigeant d'une entreprise relevant du secteur public d'un agent ayant d'ores et déjà quitté définitivement ou temporairement son administration pour exercer des fonctions au titre de dirigeant d'une entreprise du secteur privé. Elle pourrait également concerner la situation inverse, où l'exercice d'une fonction dans le secteur public préexisterait à celle concernant l'exercice d'une fonction dans le secteur privé.

Dans les deux hypothèses, informée par l'agent de sa situation, l'administration pourra décider de saisir la commission de déontologie qui exercera alors son contrôle sur la compatibilité de cette nomination.

b) L'encadrement désormais prévu par l'article 13 de la Constitution

Depuis la révision constitutionnelle intervenue à l'occasion de la loi n° 2008-724 du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Vème République, le Parlement est amené à exercer un contrôle direct sur la nomination par le président de la République à certains emplois.

L'article 13 de la Constitution prévoit ainsi, en son cinquième alinéa, qu'une « loi organique détermine les emplois ou fonctions (...) pour lesquels, en raison de leur importance pour la garantie des droits et libertés ou la vie économique et sociale de la Nation, le pouvoir de nomination du Président de la République s'exerce après avis public de la commission permanente compétente de chaque assemblée. Le Président de la République ne peut procéder à une nomination lorsque l'addition des votes négatifs dans chaque commission représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions. La loi détermine les commissions permanentes compétentes selon les emplois ou fonctions concernés . »

Cette disposition permet, en conséquence, de soumettre au veto du Parlement la nomination des dirigeants de certaines entreprises publiques, indépendamment de leur statut juridique. Elle peut donc intervenir dans l'hypothèse où le Président de la République souhaiterait désigner à la tête d'une entreprise publique mentionnée par la loi organique une personne qui, le cas échéant, continuerait à exercer certaines fonctions dans le secteur privé.

Pour l'application de cette disposition, le projet de loi organique relatif à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution, adopté par l'Assemblée nationale le 29 septembre 2009 5 ( * ) , prévoit de soumettre à cette procédure spécifique de nomination les dirigeants de grandes entreprises publiques limitativement énumérées . Il s'agit notamment :

- du président-directeur général d'Aéroports de Paris, société anonyme ;

- du président du directoire de la Compagnie nationale du Rhône, société anonyme ;

- du président-directeur général d'Electricité de France, société anonyme ;

- du président-directeur général de la Française des jeux, société anonyme ;

- du président de France Télévisions, société anonyme ;

- du président de La Poste, exploitant public 6 ( * ) ;

- du président-directeur général de la RATP, établissement public à caractère industriel et commercial ;

- du président de Radio France, société anonyme ;

- du président de la Société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France, société anonyme ;

- du président de la SNCF, établissement public à caractère industriel et commercial ;

- du président de Réseau ferré de France, établissement public à caractère industriel et commercial.

Avant même l'adoption définitive par le Parlement des projets de loi organique et ordinaire relatifs à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution, M. Henri Proglio a été entendu respectivement par la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, le 27 octobre dernier, et par votre commission de l'économie, le 28 octobre dernier, dans la perspective de sa désignation par décret du président de la République aux fonctions de président-directeur général d'EDF, annoncée pour la date du 25 novembre 2009. Faute d'une entrée en vigueur des dispositions organiques et ordinaires d'application de la Constitution, ces deux commissions n'ont pas formulé d'avis ni procédé à un vote qui aurait pu conduire, le cas échéant, à un veto à la nomination de M. Henri Proglio.

Votre rapporteur souligne que ces auditions ont permis à l'intéressé d'évoquer très directement la question de l'éventualité d'un conflit d'intérêts pouvant naître du cumul de fonctions envisagé à EDF et à Veolia Environnement, sur celle de l'accomplissement simultané de ces mandats, ainsi que sur celle de sa rémunération .

Ainsi, devant votre commission de l'économie 7 ( * ) , M. Henri Proglio, déjà membre du conseil d'administration d'EDF depuis 2004 et président de son comité stratégique, a estimé qu'en trente-sept ans de carrière à Veolia et cinq ans de présence au conseil d'administration d'EDF, il n'avait pas eu connaissance de sujets susceptibles de créer des conflits d'intérêts. Il a précisé que le seul risque pourrait résider dans des opérations relatives à la valorisation des actions de Dalkia, filiale commune préexistante des deux sociétés, et au renforcement de la position d'EDF dans le capital de Veolia, soulignant que les deux groupes respectent des obligations de transparence répondant aux normes internationales les plus élevées, ce qui rend très improbables les risques d'opérations litigieuses.

Il a par ailleurs souligné que tous ses pouvoirs exécutifs au sein de Veolia étant transférés au nouveau directeur général de cette société, il n'aurait plus qu'à présider six ou sept conseils d'administration par an, ce qui signifie que 98 % de son temps serait consacré à EDF.

S'agissant de sa rémunération au titre des deux fonctions, M. Henri Proglio a indiqué bénéficier actuellement, au sein de Veolia, du 28 ème salaire par ordre d'importance parmi les patrons du CAC 40 et que son souhait était de conserver en tant que président directeur général d'EDF un niveau de revenu comparable 8 ( * ) .

c) La limitation du cumul des fonctions de dirigeants mandataires sociaux dans les sociétés commerciales

Dans la mesure où de nombreuses entreprises du secteur public sont constituées sous la forme de sociétés anonymes -dotées soit d'un conseil d'administration, soit d'un directoire et d'un conseil de surveillance-, s'appliquent à elles les dispositions relatives au cumul des mandats sociaux , inscrites dans le code de commerce.

? La loi fixe en premier lieu des règles de limitation propres à chaque type de sociétés anonymes.

Dans les sociétés à conseil d'administration , l'article L. 225-21 du code de commerce fixe ainsi une règle de limitation du nombre de mandats sociaux pouvant être détenus par un même administrateur . Ce nombre est fixé à cinq mandats .

Néanmoins, ce principe comporte deux types de dérogations :

- d'une part, ne sont pas pris en compte les mandats d'administrateur ou de membre du conseil de surveillance exercés par cette personne dans les sociétés contrôlées exclusivement ou conjointement par la société dont elle est administrateur 9 ( * ) ;

- d'autre part, les mandats d'administrateur des sociétés dont les titres ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé et contrôlées au sens de l'article L. 233-16 par une même société ne comptent que pour un seul mandat, sous réserve que le nombre de mandats détenus à ce titre n'excède pas cinq.

L'article L. 225-54-1 du code de commerce, quant à lui, ne permet à une même personne physique d'exercer qu' un seul mandat de directeur général de sociétés anonymes .

Cette limitation drastique ne trouve néanmoins à s'appliquer qu'aux sociétés anonymes ayant leur siège sur le territoire français, ouvrant ainsi la possibilité de cumuler une ou plusieurs fonctions équivalentes au sein de sociétés situées dans des Etats étrangers. Elle permet également à une même personne d'occuper des fonctions de direction équivalentes dans des sociétés françaises autres que les sociétés anonymes.

Des dérogations à cette règle sont néanmoins prévues :

- en premier lieu, un deuxième mandat de directeur général ou un mandat de membre du directoire ou de directeur général unique peut être exercé dans une société contrôlée au sens de l'article L. 233-16 par la société dont il est directeur général ;

- en second lieu, une personne physique exerçant un mandat de directeur général dans une société peut également exercer un mandat de directeur général, de membre du directoire ou de directeur général unique dans une société, dès lors que les titres de celles-ci ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé.

Dans les sociétés anonymes à directoire et conseil de surveillance , l'article L. 225-77 du code de commerce prévoit qu'une même personne physique ne peut exercer simultanément plus de cinq mandats de membre de conseil de surveillance de sociétés anonymes ayant leur siège social sur le territoire français. Toutefois :

- d'une part, ne sont pas pris en compte les mandats de membre du conseil de surveillance ou d'administrateur exercés par cette personne dans les sociétés contrôlées au sens de l'article L. 233-16 par la société dont elle est déjà membre du conseil de surveillance ;

- d'autre part, les mandats de membre du conseil de surveillance des sociétés dont les titres ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé et contrôlées au sens de l'article L. 233-16 par une même société ne comptent que pour un seul mandat, sous réserve que le nombre de mandats détenus à ce titre n'excède pas cinq.

S'agissant des mandats de membre du directoire ou de directeur général unique , l'article L. 225-67 du code de commerce prévoit qu'une personne physique ne peut exercer plus d'un mandat de membre du directoire ou de directeur général unique de sociétés anonymes ayant leur siège social sur le territoire français.

Deux dérogations à cette règle sont susceptibles d'intervenir :

- un deuxième mandat de membre du directoire ou de directeur général unique ou un mandat de directeur général peut être exercé dans une société contrôlée au sens de l'article L. 233-16 par la société dont cette personne est membre du directoire ou directeur général unique ;

- une personne physique exerçant un mandat de membre du directoire ou de directeur général unique dans une société peut également exercer un mandat de directeur général, de membre du directoire ou de directeur général unique dans une société, dès lors que les titres de celles-ci ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé.

? La loi fixe également une limitation générale, applicable simultanément à l'ensemble des mandats sociaux, indépendamment de la forme des sociétés anonymes.

L'article L. 225-94 du code de commerce dispose ainsi :

- que la limitation du nombre de sièges d'administrateur ou de membre du conseil de surveillance qui peuvent être occupés simultanément par une même personne physique, en vertu des articles L. 225-21 et L. 225-77, est applicable au cumul de sièges d'administrateur et de membre du conseil de surveillance ;

- que, pour l'application des articles L. 225-54-1 et L. 225-67, est autorisé l'exercice simultané de la direction générale par une personne physique dans une société et dans une autre société qu'elle contrôle au sens de l'article L. 233-16.

En outre, l'article L. 225-94-1 du même code soumet les mandataires sociaux des sociétés anonymes à un plafond global .

Une même personne physique ne peut en effet exercer simultanément plus de cinq mandats de directeur général, de membre du directoire, de directeur général unique, d'administrateur ou de membre du conseil de surveillance de sociétés anonymes ayant leur siège sur le territoire français. Dans ce cadre, l'exercice de la direction générale par un administrateur est décompté pour un seul mandat.

Par ailleurs, ne sont pas pris en compte les mandats d'administrateur ou de membre de conseil de surveillance dans les sociétés qui sont contrôlées, au sens de l'article L. 233-16, par la société dans laquelle est exercé un mandat.

La sanction du non respect de ces différentes règles de cumul consiste en la démission d'office du mandat « surnuméraire ».

Ainsi, toute personne physique qui se trouve en infraction avec les dispositions susmentionnées doit se démettre de l'un de ses mandats dans les trois mois de sa nomination, ou du mandat en cause dans les trois mois de l'évènement ayant entraîné la disparition de l'une des conditions fixées à l'alinéa précédent. A l'expiration de ce délai, elle est réputée s'être démise, selon le cas, soit de son nouveau mandat, soit du mandat ne répondant plus aux conditions fixées à l'alinéa précédent, et doit restituer les rémunérations perçues, sans que soit, de ce fait, remise en cause la validité des délibérations auxquelles elle a pris part 10 ( * ) .

d) Les règles de bonne gouvernance posées par les entreprises

Depuis le milieu des années 1990, les entreprises se sont engagées d'elles-mêmes à respecter certains principes de « gouvernement d'entreprise », définis par leurs pairs.

Ainsi, le Mouvement des entreprises de France (MEDEF) et l'Association française des entreprises privées (AFEP) ont adopté, à l'usage de leurs adhérents, un « code de gouvernement d'entreprise » qui a pour objet d'édicter un certain nombre de règles juridiquement non contraignantes devant être suivies au sein des sociétés, et tout particulièrement des sociétés dont les titres sont admis à la négociation sur un marché réglementé.

Il s'agit de règles, relativement usitées dans les pays anglo-saxons, et souvent qualifiées de « soft law », dont la violation n'est pas juridiquement sanctionnée . Néanmoins, en application de la règle « comply or explain » -« appliquer ou s'expliquer »- inscrite dans notre droit depuis 2008 11 ( * ) , les sociétés doivent, si elles n'appliquent pas ces règles, expliquer dans leurs documents de référence les raisons de leur décision.

Ce code de bonne conduite comporte des dispositions qui peuvent trouver à s'appliquer en cas de cumul. Il pose ainsi, au titre de la « déontologie de l'administrateur », l'obligation pour celui-ci de faire part au conseil d'administration de toute situation de conflit d'intérêts même potentiel et de s'abstenir de participer au vote de la délibération correspondante .

2. L'encadrement des rémunérations

La rémunération des dirigeants mandataires sociaux a fait, depuis 2001, l'objet d'un encadrement de plus en plus strict, soit en vertu de la loi, soit en vertu du règlement. S'y sont ajoutés des principes de bonne gouvernance définis par les entreprises elles-mêmes.

a) Le dispositif législatif applicable aux sociétés commerciales

La rémunération des dirigeants de sociétés relève d'abord de la compétence de leurs organes sociaux .

Ainsi, dans les sociétés constituées sous forme de sociétés anonymes, il revient au conseil d'administration de déterminer la rémunération de son président et de son directeur général (articles L. 225-47 et L. 225-53 du code de commerce). Le conseil de surveillance fixe, quant à lui, la rémunération des membres du directoire (article L. 225-63 du même code) ainsi que du président du conseil de surveillance (article L. 225-81 du même code).

Dans ce cadre, les organes sociaux doivent respecter certaines contraintes légales, notamment lorsque les titres de ces sociétés sont admis à la négociation sur un marché réglementé.

L'assemblée générale des actionnaires est ainsi informée dans le rapport qui lui est présenté chaque année de la rémunération totale et des avantages de toute nature versés, durant l'exercice, à chaque mandataire social (article L. 225-102-1 du code de commerce). Les éléments de rémunération différés -« retraites-chapeaux » ou indemnités de non-concurrence- sont par ailleurs soumis à la procédure des « conventions réglementées », impliquant une autorisation préalable du conseil d'administration et le vote de l'assemblée générale des actionnaires sur un rapport spécial des commissaires aux comptes sur ces conventions (articles L. 225-42-1 et L. 225-90-1 du même code).

En tout état de cause, sont interdits les éléments de rémunération, indemnités et avantages dont le bénéfice n'est pas subordonné au respect de conditions liées aux performances du bénéficiaire , appréciées au regard de celles de la société dont il préside le conseil d'administration ou exerce la direction générale ou la direction générale déléguée (articles L. 225-42-1 et L. 225-90-1 du code de commerce).

b) Le dispositif réglementaire applicable aux entreprises publiques

De longue date, s'applique une réglementation particulière à l'égard des rémunérations des dirigeants des entreprises publiques . Cette réglementation se cumule avec celle éventuellement applicable à ces entreprises à raison de leur statut de sociétés commerciales.

La détermination de leur rémunération est ainsi régie par le décret n° 53-707 du 9 août 1953 relatif au contrôle de l'État sur les entreprises publiques nationales et certains organismes ayant un objet d'ordre économique ou social. Aux termes de ce texte, qui s'applique à l'ensemble des établissements publics industriels et commerciaux, entreprises et sociétés nationales, sociétés d'économie mixte et sociétés anonymes dans lesquelles l'État détient la majorité du capital social, un contrôle ministériel s'exerce sur les rémunérations des dirigeants de l'ensemble de ces entreprises.

Ainsi, le traitement et les autres éléments de rémunération d'activité et de retraite des présidents, des directeurs généraux, des présidents directeurs généraux, des présidents et membres de directoires et, d'une manière générale, des personnes qui, quel que soit leur titre, exercent des fonctions équivalentes dans ces entités sont fixés ou approuvés, nonobstant toute dispositions contraires, par décision conjointe du ministre chargé de l'économie et des finances et du ministre intéressé .

En outre, aux termes du décret n° 2009-348 du 30 mars 2009 relatif aux conditions de rémunération des dirigeants des entreprises aidées par l'Etat ou bénéficiant du soutien de l'Etat du fait de la crise économique et des responsables des entreprises publiques, le ministre chargé de l'économie veille à ce que les entreprises publiques dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé respectent des règles et principes de gouvernance d'un haut niveau d'exigence éthique. Le président du conseil d'administration ou du conseil de surveillance doit saisir les organes sociaux de l'entreprise des propositions requises pour répondre à cette exigence. Ces règles et principes incluent, en particulier, le fait :

- que le directeur général ou le président du directoire qui détiendrait le statut de salarié y renonce au plus tard lors du renouvellement de son mandat ;

- que les éléments variables de la rémunération sont autorisés par le conseil d'administration ou le conseil de surveillance, cette autorisation étant rendue publique. Ces éléments ne sont pas liés au cours de bourse. Récompensant la performance de l'entreprise d'une part et son progrès dans le moyen terme d'autre part, ils sont déterminés en fonction de critères précis et préétablis ;

- que s'il est prévu une indemnité de départ, celle-ci est fixée à un montant inférieur à deux années de rémunération. Elle n'est versée qu'en cas de départ contraint, à la condition que le bénéficiaire remplisse des critères de performance suffisamment exigeants. Elle n'est pas versée si l'entreprise connaît des difficultés économiques graves.

c) Les règles de bonne gouvernance posées par les entreprises

En matière de rémunérations, le code de gouvernement d'entreprise établi par l'AFEP et le MEDEF pose certains principes pour la détermination de la rémunération des dirigeants mandataires sociaux et définit le rôle du conseil d'administration.

Il prévoit ainsi que la détermination de la rémunération des dirigeants mandataires sociaux relève de la responsabilité des conseils d'administration ou de surveillance et se fonde sur les propositions du comité des rémunérations.

Il impose que, dans la détermination de ces rémunérations, les conseils et comités prennent en compte les principes suivants :

- l'exhaustivité : la détermination d'une rémunération doit être exhaustive. Partie fixe, partie variable, options d'actions (stock options), actions de performance, jetons de présence, conditions de retraite et avantages particuliers doivent être retenus dans l'appréciation globale de la rémunération ;

- l'équilibre entre les éléments de la rémunération : chaque élément de la rémunération doit être clairement motivé et correspondre à l'intérêt général de l'entreprise ;

- le « benchmark » : cette rémunération doit être appréciée dans le contexte d'un métier et du marché de référence européen ou mondial ;

- la cohérence : la rémunération du dirigeant mandataire social doit être déterminée en cohérence avec celle des autres dirigeants et celle des salariés de l'entreprise ;

- la lisibilité des règles : les règles doivent être simples, stables et transparentes ; les critères de performance utilisés pour établir la partie variable de la rémunération, ou le cas échéant pour l'attribution d'options ou d'actions de performance, doivent correspondre aux objectifs de l'entreprise, être exigeants, explicables, et autant que possible pérennes ;

- la mesure : la détermination de la rémunération et des attributions d'options ou d'actions de performance doit réaliser un juste équilibre et tenir compte à la fois de l'intérêt général de l'entreprise, des pratiques du marché et des performances des dirigeants.

Il est vraisemblable que l'hypothèse d'un cumul de fonctions dans des entreprises sera prise en compte et que la détermination de la rémunération correspondante sera faite en recourant aux principes de « benchmark » et de mesure.

II. LES DISPOSITIONS DE LA PROPOSITION DE LOI : DES MESURES D'ENCADREMENT SPÉCIFIQUES EN CAS DE CUMUL

La proposition de loi présentée par MM. Yvon Collin et Michel Charasse, et plusieurs de nos collègues du groupe RDSE, tend à ajouter aux dispositions actuellement en vigueur deux mesures d'encadrement intéressant spécifiquement les cas de cumul des fonctions de direction dans des entreprises relevant du secteur public et du secteur privé.

A. L'ÉLARGISSEMENT DU CHAMP D'INTERVENTION DE LA COMMISSION DE DÉONTOLOGIE DE LA FONCTION PUBLIQUE

L' article 1er de la proposition de loi prévoit la mise en place d'une compétence nouvelle de la commission de déontologie .

Celle-ci devrait en effet donner un avis préalablement à tout cumul des fonctions de dirigeant d'une entreprise du secteur public et de dirigeant d'une entreprise du secteur privé.

Il s'agit, dès lors, d'un cas nouveau de contrôle déontologique : le contrôle de la compatibilité des fonctions éventuelles exercées en qualité de dirigeant d'une entreprise privée, par rapport aux fonctions exercées parallèlement en qualité de dirigeant d'une entreprise publique pour vérifier que ces fonctions nouvelles ne mettent pas en cause le fonctionnement normal, l'indépendance ou la neutralité de l'entreprise publique.

En l'espèce, le contrôle de la commission de déontologie porterait sur les seuls aspects déontologiques et non sur une situation éventuelle de prise illégale d'intérêt, puisque l'on sortirait alors du champ de l'incrimination

Le texte proposé prévoit que cette situation de cumul serait soumise à l'avis de la commission « dans les conditions prévues à l'article 87 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques . » Ce renvoi aurait pour conséquence l'application pure et simple de l'ensemble des règles de procédure actuellement en vigueur dans le cadre de l'intervention de la commission de déontologie .

B. L'ENCADREMENT DU CUMUL DES RÉMUNÉRATIONS AU TITRE DES DIFFÉRENTES FONCTIONS

L' article 2 prévoit que la rémunération versée à un dirigeant du secteur public sera nette de toute autre rémunération du secteur privé, sous réserve de celles versées au titre des filiales de l'entreprise publique.

Il s'agit, ce faisant, de faire exercer gratuitement les fonctions de dirigeant, voire de salarié, d'une entreprise relevant du secteur privé . Cette gratuité s'étendrait à la qualité « d'associé » d'une entreprise privée, ce qui semble également condamner la perception de dividendes par la personne concernée, du fait de sa participation au capital social d'une société du secteur privé.

Le texte proposé réserve néanmoins le cumul de rémunérations au titre des filiales d'entreprises relevant du secteur public . En ce cas, des conditions et limites particulières s'appliqueraient, qui seraient définies par un décret en Conseil d'Etat.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION : ASSURER UN EXAMEN APPROFONDI DE L'OPPORTUNITÉ D'UN CUMUL DE FONCTIONS ET DE RÉMUNÉRATIONS

Votre commission des lois estime qu'il n'y a pas lieu d'interdire, dans son principe, la possibilité d'un cumul de fonctions de direction dans une entreprise du secteur public et une entreprise du secteur privé, tout comme celle d'un cumul de rémunérations . En revanche, se pose effectivement la question légitime de l'intérêt d'un encadrement de cette pratique afin qu'elle n'intervienne qu'après un examen approfondi, au cas par cas, de sa pertinence .

A. UN QUESTIONNEMENT LÉGITIME

La question de la légitimité d'un cumul de fonctions de direction dans des entreprises privées et publiques apparaît certainement légitime lorsque ces fonctions portent sur des sociétés dont l'objet social ou le domaine d'activité peuvent être directement ou indirectement concurrents .

Cependant, même hors d'une telle situation , il y a lieu de s'interroger sur la pertinence d'un tel cumul, ne serait-ce qu'afin de faire en sorte que l'intéressé dispose, dans l'exercice des fonctions qui lui sont dévolues dans chaque société, du temps nécessaire au bon accomplissement de ces missions .

A cet égard, il convient de souligner, comme l'a relevé notamment Mme Colette Neuville, présidente de l'Association de défense des actionnaires minoritaires, lors de son audition par votre rapporteur, que le mandat de président du conseil d'administration -même lorsqu'il n'est pas exercé concomitamment avec les fonctions de directeur général- ou de président du conseil de surveillance implique, dans le respect des principes de gouvernement d'entreprise, une charge de travail importante. Cette problématique a également été soulevée par M. Daniel Lebègue, président de l'Institut français des administrateurs, interrogé dans la presse.

Lorsqu'une telle situation survient dans le cadre de sociétés exclusivement privées, elle est réglée par la décision des organes sociaux de chacune des sociétés qui, en fonction de l'intérêt social de chacune d'elles, doivent apprécier l'intérêt ou l'inconvénient de « partager » leur dirigeant avec une autre. Ce d'autant plus que le pouvoir d'influence du président d'un conseil d'administration, même non exécutif, est réel.

La situation est néanmoins plus singulière dans le cadre de sociétés publiques où la nomination des dirigeants intervient, certes, le plus souvent sur proposition des organes sociaux, mais résulte surtout juridiquement d'une décision émanant d'une instance politique et matérialisée par un acte administratif unilatéral.

En outre, un tel cumul conduit en pratique à faire cohabiter les intérêts d'une entreprise qui, compte tenu de la nature de son principal actionnaire -l'Etat- peut avoir une politique financière et industrielle différente, voire contradictoire, de celle d'une entreprise dont les capitaux sont détenus, pour l'essentiel, par des personnes privées . Ce cas de figure pose ainsi, en cas de prééminence de la société publique, la question de la protection des actionnaires minoritaires de la société privée, soulevée devant votre rapporteur par Mme Colette Neuville. À l'inverse, en cas de prééminence de la société privée, l'interrogation est alors celle de la préservation des intérêts patrimoniaux et industriels de l'Etat.

La coexistence de fonctions dans des entreprises du secteur public et du secteur privé doit-elle conduire à introduire un dispositif spécifique destiné à encadrer les possibilités de cumul, ou les règles actuellement applicables sont-elles suffisantes pour prévenir toute difficulté dans le futur ?

A cette interrogation légitime, qui ne saurait bien évidemment se limiter au seul cas d'espèce que les médias ont abondamment commenté dans les dernières semaines, MM. Yvon Collin et Michel Charasse, ainsi que plusieurs autres membres du groupe RDSE, ont entendu répondre par l'affirmative.

Votre commission regrette que, sollicitées sur ce sujet par votre rapporteur, les organisations représentatives des entreprises privées n'aient pas souhaité s'exprimer.

Elle estime néanmoins que, pour que toute crainte au regard de la gouvernance des entreprises et des conflits d'intérêts pouvant subvenir par l'existence même de telles situations puisse être apaisée, il est nécessaire que l'Etat fasse preuve de la plus grande vigilance et de la plus grande transparence .

Aussi juge-t-elle légitime de prévoir, au niveau législatif, le suivi d'une procédure administrative particulière préalablement à ce type de cumul.

B. CONSACRER L'INTERVENTION DE L'AGENCE DES PARTICIPATIONS DE L'ÉTAT POUR UNE MEILLEURE TRANSPARENCE

Pour autant, votre commission des lois a considéré que les dispositifs envisagés par la proposition de loi de nos collègues n'étaient pas les plus pertinents .

D'une part, ils conduiraient à transformer la nature et l'objet de la commission de déontologie de la fonction publique qui, rattachée au ministre chargé de la fonction publique, aurait alors à connaître de la situation de personnes privées sans rattachement avec un organe de l'administration. L'articulation des règles posées par la loi du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques avec ces nouvelles fonctions s'avèrerait, de ce fait, difficile.

D'autre part, il n'apparaît pas légitime, en cas de cumul de fonctions, d'interdire à l'intéressé de percevoir toute forme de rémunération dans l'entreprise privée dans laquelle il officie.

Pour ces raisons, après avoir recueilli l'assentiment de principe des auteurs de la présente proposition de loi, votre commission des lois a adopté, à l'initiative de votre rapporteur, un article unique modifiant les dispositions de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public .

Dans ce cadre, il serait prévu que la nomination à des fonctions de dirigeant mandataire social dans une entreprise du secteur public concurremment à des fonctions similaires dans une entreprise du secteur privé serait soumise à l'avis préalable de l'Agence des participations de l'Etat .

Ce service serait chargé d'émettre un avis auprès de l'autorité administrative investie du pouvoir de nomination sur la compatibilité de ce cumul avec les intérêts patrimoniaux de l'Etat . Il se prononcerait également sur le montant global des rémunérations de toutes natures de l'intéressé au titre de ce cumul .

Pour assurer la pleine information du Parlement dans le cadre du pouvoir qui lui est reconnu par l'article 13 de la Constitution, le dispositif adopté par votre commission prévoit, en outre, que lorsque la nomination est soumise aux dispositions du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution, cet avis est transmis aux commissions permanentes compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat, avant que celles-ci rendent leur avis .

*

* *

Votre commission a adopté la proposition de loi ainsi rédigée.

EXAMEN DES ARTICLES

Article premier - Intervention de la commission de déontologie de la fonction publique préalablement à un cumul de fonctions de direction dans des entreprises du secteur public et du secteur privé

1. Les compétences actuelles de la commission de déontologie de la fonction publique

En vertu de l'article 87 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques, la commission de déontologie de la fonction publique, placée auprès du Premier ministre, connaît de la situation de catégories de personnes limitativement énumérées.

Il s'agit :

- des fonctionnaires ;

- des agents non titulaires de droit public ;

- des agents contractuels de droit public ou de droit privé de certains établissements relevant du code de la santé publique, 12 ( * ) ou des autorités administratives indépendantes ;

- des membres d'un cabinet ministériel ;

- des collaborateurs de cabinet des autorités territoriales ;

- des collaborateurs du Président de la République.

La commission connaît donc de la situation de personnes, soit en raison de leur statut public, soit en raison de leur participation à l'activité d'un organe chargé de la définition ou du contrôle des politiques publiques.

Elle exerce, sur ces catégories de personnes, deux types de contrôle .

? Le premier est un contrôle de l'absence de situation susceptible de constituer une situation de prise illégale d'intérêts, pénalement sanctionnée en application de l'article 432-13 du code pénal.


Le délit de prise illégale d'intérêts

L'article 432-23 du code pénal punit de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende le fait, par une personne ayant été chargée, en tant que fonctionnaire ou agent d'une administration publique, dans le cadre des fonctions qu'elle a effectivement exercées, soit d'assurer la surveillance ou le contrôle d'une entreprise privée, soit de conclure des contrats de toute nature avec une entreprise privée ou de formuler un avis sur de tels contrats, soit de proposer directement à l'autorité compétente des décisions relatives à des opérations réalisées par une entreprise privée ou de formuler un avis sur de telles décisions, de prendre ou de recevoir une participation par travail, conseil ou capitaux dans l'une de ces entreprises avant l'expiration d'un délai de trois ans suivant la cessation de ces fonctions.

Est punie des mêmes peines toute participation par travail, conseil ou capitaux dans une entreprise privée qui possède au moins 30 % de capital commun ou a conclu un contrat comportant une exclusivité de droit ou de fait avec l'une des entreprises susmentionnées.

A cet effet, est assimilée à une entreprise privée toute entreprise publique exerçant son activité dans un secteur concurrentiel et conformément aux règles du droit privé.

Ces dispositions sont applicables aux agents des établissements publics, des entreprises publiques, des sociétés d'économie mixte dans lesquelles l'Etat ou les collectivités publiques détiennent directement ou indirectement plus de 50 % du capital et des exploitants publics prévus par la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et à France Télécom.

A cette fin, la commission de déontologie est chargée d'apprécier la compatibilité de toute activité lucrative, salariée ou non, dans une entreprise ou un organisme privé ou toute activité libérale, avec les fonctions effectivement exercées au cours des trois années précédant le début de cette activité par tout agent cessant ses fonctions.

L'administration dont relève l'agent est liée par l'avis d'incompatibilité éventuellement rendu par la commission dans ce cadre. Elle peut néanmoins solliciter une seconde délibération de la commission dans un délai d'un mois à compter de la notification d'un avis.

La saisine de la commission de déontologie est obligatoire :

- pour les agents chargés soit d'assurer la surveillance ou le contrôle d'une entreprise privée, soit de conclure des contrats de toute nature avec une entreprise privée ou de formuler un avis sur de tels contrats, soit de proposer des décisions relatives à des opérations effectuées par une entreprise privée ou de formuler un avis sur de telles décisions. Dans ce cadre, est assimilée à une entreprise privée toute entreprise publique exerçant son activité dans un secteur concurrentiel et conformément aux règles du droit privé ;

- pour les collaborateurs du Président de la République et les membres d'un cabinet ministériel.

La commission est également saisie, à titre facultatif :

- par tout agent ou par l'administration dont il relève, préalablement à l'exercice de l'activité envisagée ;

- par le président de la commission lui-même, dans un délai de dix jours à compter de l'embauche de l'agent ou de la création de l'entreprise ou de l'organisme privé. Dans ce cas, la commission émet son avis dans un délai de trois semaines, qui peut être prolongé d'une semaine par décision de son président. Si la commission rend un avis d'incompatibilité, le contrat de travail de l'agent prend fin à la date de la notification de l'avis de la commission, sans préavis et sans indemnité de rupture.

Quant à eux, les collaborateurs de cabinet des autorités territoriales doivent informer la commission avant d'exercer toute activité lucrative.

? La commission est également compétente pour exercer un contrôle de nature déontologique destiné à éviter la constitution de certaines situations, sans pour autant que les faits concernés puissent se voir donner une qualification pénale.

Ainsi, la commission peut être saisie pour rendre un avis sur la compatibilité avec les fonctions précédentes de l'agent, de toute activité lucrative, salariée ou non, dans un organisme ou une entreprise privée ou dans une entreprise publique exerçant son activité conformément aux règles du droit privé dans un secteur concurrentiel ou d'une activité libérale que souhaite exercer l'agent pendant un délai de trois ans suivant la cessation de ses fonctions.

Il revient, dans ce cadre, à la commission d' examiner si cette activité :

- porte atteinte à la dignité des fonctions précédemment exercées ;

- ou risque de compromettre ou de mettre en cause le fonctionnement normal, l'indépendance ou la neutralité du service .

Au cas où la commission a été consultée dans ce cadre et n'a pas émis d'avis défavorable, l'agent public ne peut plus faire l'objet de poursuites disciplinaires.

Elle peut également assortir ses avis de compatibilité rendus au titre du contrôle déontologique de réserves prononcées pour trois ans suivant la cessation des fonctions.

Ces réserves varient selon la nature des fonctions exercées. L'exercice de l'activité nouvelle peut être encadrée tant au plan géographique que pour ce qui concerne le domaine d'activité, afin de ne pas altérer le fonctionnement normal ou l'indépendance du service, avec lequel l'intéressé ne devra avoir aucune relation professionnelle pendant la durée de l'interdiction ou du cumul. Il est cependant parfois décidé que l'intéressé devra s'abstenir de rechercher des informations autres que celles qui ont un caractère public auprès de son ancien service, ce qui autorise a contrario les contacts pour obtenir des renseignements accessibles à tous de manière non privilégiée.

Pour éviter également que la situation puisse donner à penser que l'agent a profité de ses fonctions administratives pour se créer une clientèle qu'il exploitera ensuite à titre privé, la commission peut exiger que l'intéressé n'ait pas de relations professionnelles avec des personnes physiques ou morales avec lesquelles il a pu être en relation dans ses fonctions, ou bien qu'il s'abstienne d'intervenir en leur faveur auprès de son administration d'origine. Les réserves peuvent également porter sur les affaires ou les dossiers dont l'agent a pu connaître dans l'exercice de ses fonctions.

La commission de déontologie reste par ailleurs compétente pour connaître de la situation d'un fonctionnaire ou d'un agent au cours d'une période de trois ans depuis son départ de l'administration.

L'article 2 du décret n° 2007-611 du 26 avril 2007 relatif à l'exercice d'activités privées par des fonctionnaires ou agents non titulaires ayant cessé temporairement ou définitivement leurs fonctions et à la commission de déontologie impose en effet à tout agent de porter à la connaissance de son administration « tout nouveau changement d'activité pendant un délai de trois ans à compter de la cessation de fonctions ».

L'administration pourra dès lors saisir la commission de la compatibilité de fonctions qui ne seraient donc pas exercées immédiatement après la sortie de la fonction publique mais après que le fonctionnaire ou l'agent aura occupé un emploi hors de l'administration.

2. L'extension du champ de compétence de la commission résultant du texte de la proposition de loi

Le présent article de la proposition de loi prévoit la mise en place d'une compétence nouvelle de la commission de déontologie.

Celle-ci devrait en effet donner un avis préalablement à tout cumul des fonctions de dirigeant d'une entreprise du secteur public et de dirigeant d'une entreprise du secteur privé.

Le texte proposé prévoit que cette situation serait soumise à l'avis de la commission « dans les conditions prévues à l'article 87 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques . »

Or, ce renvoi suscite deux interrogations .

La première concerne l'étendue ratione personae de la nouvelle procédure instituée par la proposition de loi . Par son caractère général, elle aurait donc vocation à s'appliquer aussi bien à des fonctionnaires et agents de l'administration qu'à des personnes privées en situation de cumul de fonctions de direction dans deux entreprises.

Dans ces conditions, on peut s'interroger sur la pertinence du recours à la commission de déontologie pour examiner ce cas de cumul.

D'une part, la composition actuelle de la commission de déontologie n'apparaît pas adéquate pour traiter de la situation de personnes venant du secteur privé et n'ayant eu, précédemment à leurs fonctions dans une entreprise publique, aucun lien avec l'administration.

Il convient en effet de rappeler que la commission est constituée de trois formations distinctes , selon qu'elle connaît de la situation d'un fonctionnaire ou agent relevant de la fonction publique d'Etat, de la fonction publique territoriale ou de la fonction publique hospitalière.

La composition de la commission de déontologie

La commission est présidée par un conseiller d'Etat ou son suppléant, conseiller d'Etat et comprend, en outre :

- un conseiller maître à la Cour des comptes ou son suppléant, conseiller maître à la Cour des comptes ;

- un magistrat de l'ordre judiciaire en activité ou honoraire ou son suppléant, magistrat de l'ordre judiciaire en activité ou honoraire ;

- deux personnalités qualifiées ou leur suppléant, dont l'une doit avoir exercé des fonctions au sein d'une entreprise privée ;

- selon le cas, le directeur du personnel du ministère ou de l'établissement public ou le chef du corps dont relève l'intéressé, l'autorité investie du pouvoir de nomination dans la collectivité territoriale dont relève l'intéressé, le directeur de l'établissement hospitalier ou de l'établissement social ou médico-social dont relève l'intéressé ou leur représentant respectif.

Par ailleurs, la commission comprend également :

- deux directeurs d'administration centrale ou leur suppléant, lorsqu'elle exerce ses attributions à l'égard d'un agent relevant de la fonction publique de l'Etat ou d'une autorité administrative indépendante ;

- un représentant d'une association d'élus de la catégorie de collectivité dont relève l'intéressé ou son suppléant, ainsi que le directeur ou ancien directeur des services d'une collectivité territoriale ou son suppléant, lorsqu'elle exerce ses attributions à l'égard d'un agent relevant de la fonction publique territoriale, un représentant d'une association d'élus de la catégorie de collectivité dont relève l'intéressé ou son suppléant, ainsi que le directeur ou ancien directeur des services d'une collectivité territoriale ou son suppléant ;

- une personnalité qualifiée dans le domaine de la santé publique ou son suppléant, ainsi qu'un inspecteur général des affaires sociales ou un ancien directeur d'hôpital ou son suppléant, lorsqu'elle exerce ses attributions à l'égard d'un agent relevant de la fonction publique hospitalière, une personnalité qualifiée dans le domaine de la santé publique ou son suppléant, ainsi qu'un inspecteur général des affaires sociales ou un ancien directeur d'hôpital ou son suppléant ;

- deux personnalités qualifiées dans le domaine de la recherche ou de la valorisation de la recherche ou leur suppléant, lorsqu'elle connaît de la création d'une entreprise dont l'objet est d'assurer, en exécution d'un contrat conclu avec une personne publique ou une entreprise publique, la valorisation des travaux de recherche réalisés par des agents dans l'exercice de leurs fonctions

Dès lors, confier à la commission compétence pour connaître de la situation de personnes relevant exclusivement du droit privé impliquerait, à tout le moins, la création d'une formation spéciale.

En outre, la question du rattachement administratif de la commission de déontologie doit être posée. Comme l'a rappelé M. Grégoire Parmentier, sous-directeur à la direction générale de l'administration et de la fonction publique, lors de son audition par votre rapporteur, cette commission est en effet actuellement rattachée au ministre chargé de la fonction publique. Or, l'élargissement du champ de compétence de cet organe devrait logiquement conduire à son rattachement direct au ministre chargé de l'économie ou, à tout le moins, à un rattachement conjoint à ce dernier et au ministre chargé de la fonction publique.

La seconde interrogation concerne les modalités de saisine de la commission.

En premier lieu, le texte proposé n'indique pas comment la commission sera saisie de la situation de cumul . Il faudrait, à tout le moins, déterminer la personne qui sollicitera l'examen de la commission : devra-t-il s'agir de l'intéressé lui-même, d'une autorité de l'Etat, de l'entreprise publique dans lequel l'intéressé est appelé à exercer des fonctions ou de l'entité privée dans laquelle il exerce ou exercera des fonctions similaires ?

En second lieu, la question se pose de savoir si la saisine de la commission sera, dans le cas envisagé, obligatoire ou simplement facultative . La commission de déontologie ne peut en effet être saisie à titre obligatoire que dans des cas déterminés. Dans les autres cas, sa saisine n'est que facultative, à la discrétion de l'agent concerné, de l'administration dont il relève ou du président de la commission lui-même.

Il semble pourtant découler d'une lecture littérale du dispositif de la proposition de loi que ses auteurs entendent instituer un cas de saisine obligatoire de la commission. Dans ces conditions, les modalités du renvoi à l'article 87 de la loi du 29 janvier 1993 ne sont guère à même d'assurer la mise en oeuvre de cette volonté.

S'il était jugé pertinent de faire exercer par la commission de déontologie son contrôle sur les situations de cumul susmentionnées, il conviendrait alors de clarifier les dispositions de l'article 87 relatives à sa saisine.

3. La position de votre commission des lois

Votre commission estime que la nature même d'un cumul de fonctions de direction dans deux entreprises, l'une relevant du secteur privé, l'autre relevant du secteur public, implique une attention toute particulière des pouvoirs publics et rend nécessaire le suivi d'une procédure d'examen spécifique de la pertinence d'un tel cumul au regard des intérêts patrimoniaux de l'Etat.

Pour autant, elle considère que le recours à l'actuelle commission de déontologie, proposé par la proposition de loi, n'est pas pertinent . Il ne saurait en effet être envisagé de faire intervenir cette dernière qu'au risque de la dénaturer, tant dans son objet que dans son fonctionnement, ce que votre commission ne juge pas souhaitable.

a) Renforcer l'intervention de l'Agence des participations de l'Etat

En revanche, votre commission relève qu'il pourrait être opportun de renforcer le rôle de l'Agence des participations de l'Etat dans l'examen de la situation de cumul.

L'Agence est en effet d'ores et déjà partiellement compétente en matière de nomination des mandataires sociaux des entreprises publiques, en application du décret n° 2004-963 du 9 septembre 2004 portant création du service à compétence nationale « Agence des participations de l'Etat », puisqu'elle « peut être consultée pour les nominations et révocations des membres des organes délibérants nommés par décret, autres que les représentants de l'Etat, dans les entreprises et organismes » relevant de son périmètre d'intervention.

L'un des moyens de s'assurer que les implications du cumul en termes de compatibilité déontologique ainsi que de charge de travail liée à l'exercice simultanée de fonctions de direction, d'administration ou de surveillance dans des entreprises relevant du secteur public comme du secteur privé ont été effectivement prises en considération pourrait ainsi être de formaliser et rendre obligatoire l'intervention de l'Agence préalablement au cumul de fonctions .

Il reviendrait ainsi notamment à l'Agence d'examiner la situation au regard de la préservation des intérêts patrimoniaux de l'Etat et de rendre compte de ses conclusions dans un avis à l'autorité investie du pouvoir de nomination au sein de l'entreprise considérée.

Aussi votre rapporteur a-t-il soumis à la commission un amendement de réécriture de l'article 1 er de la proposition de loi afin de consacrer, au niveau législatif, l'intervention de l'Agence des participations de l'Etat, qui n'a aujourd'hui qu'une existence réglementaire . Il conviendrait, en conséquence, que les textes réglementaires actuels soient adaptés à cet effet le Gouvernement.

Aux termes de la rédaction adoptée par la commission, l'Agence des participations de l'Etat serait chargée d'émettre un avis pour tout cas de nomination à des fonctions de dirigeant mandataire social dans une entreprise du secteur public concurremment à des fonctions similaires dans une entreprise du secteur privé.

Plus précisément, votre commission a souhaité viser expressément les fonctions suivantes de :

- président du conseil d'administration ;

- directeur général ;

- membres du directoire ;

- président du conseil de surveillance .

Les entreprises du secteur public concernées seraient celles visées par l'article 1 er de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public , à savoir :

- les établissements publics industriels et commerciaux de l'Etat, autres que ceux dont le personnel est soumis à un régime de droit public ; autres établissements publics de l'Etat qui assurent tout à la fois une mission de service public à caractère administratif et à caractère industriel et commercial, lorsque la majorité de leur personnel est soumise aux règles du droit privé ;

- les sociétés mentionnées à l'annexe I de cette loi ;

- les entreprises nationales, sociétés nationales, sociétés d'économie mixte ou sociétés anonymes dans lesquelles l'Etat détient directement plus de la moitié du capital social ainsi que les sociétés à forme mutuelle nationalisées ;

- les sociétés anonymes dans lesquelles plus de la moitié du capital social est détenue, directement ou indirectement, depuis plus de six mois, à lui seul par l'un des établissements ou sociétés mentionnés au présent article, et dont le nombre de salariés employés en moyenne au cours des vingt-quatre derniers mois est au moins égal à 200 ;

- les autres sociétés anonymes dans lesquelles plus de la moitié du capital social est détenue, directement ou indirectement, depuis plus de six mois, conjointement par l'Etat, ses établissements publics ou les sociétés mentionnés dans cet article, et dont le nombre de salariés employés en moyenne au cours des vingt-quatre derniers mois est au moins égal à 200.

Cet avis, qui interviendrait préalablement au cumul , serait destiné à éclairer l'autorité administrative investie du pouvoir de nomination.

Dans cet avis -qui ne serait qu'un avis simple et ne lierait pas, en tout état de cause, l'autorité investie du pouvoir de nomination-, l'Agence se prononcerait :

- d'une part, sur la compatibilité de ce cumul avec les intérêts patrimoniaux de l'Etat ;

- d'autre part, sur le montant global des rémunérations de toutes natures de l'intéressé au titre de ce cumul .

b) Prendre en compte l'application éventuelle de la procédure prévue par le cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution

Compte tenu de l'éclairage qui serait ainsi apporté par l'Agence des participations de l'Etat, il a semblé indispensable à votre commission de prendre en compte la situation dans laquelle, en application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution, le Parlement est appelé à se prononcer sur la nomination, par le président de la République, des dirigeants de certaines grandes entreprises publiques .

Aussi, à l'initiative de votre rapporteur, la commission a-t-elle prévu que, lorsque la nomination est soumise aux dispositions du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution, cet avis est transmis aux commissions permanentes compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat, avant que celles-ci rendent leur avis .

Aux termes du projet de loi relatif à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution, tel qu'adopté en première lecture par l'Assemblée nationale, le 29 septembre 2009, les commissions permanentes concernées seraient les commissions chargées de l'économie, des finances ou de la culture 13 ( * ) .


Commissions permanentes compétentes du Parlement pour l'application
du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution
pour les grandes entreprises du secteur public

(projet de loi adopté par l'Assemblée nationale)

Président-directeur général
d'Aéroports de Paris

Commission compétente
en matière de transports

Président du directoire de la
Compagnie nationale du Rhône

Commission compétente
en matière d'énergie

Président-directeur général
d'Électricité de France

Commission compétente
en matière d'énergie

Président-directeur général de
La Française des jeux

Commission compétente
en matière de finances publiques

Président de France Télévisions

Commission compétente
en matière d'affaires culturelles

Président du conseil d'administration de
La Poste

Commission compétente
en matière de postes et communications

Président de Radio France

Commission compétente
en matière d'affaires culturelles

Président-directeur général de la
Régie autonome des transports parisiens

Commission compétente
en matière de transports

Président du conseil d'administration de Réseau ferré de France

Commission compétente
en matière de transports

Président de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France

Commission compétente
en matière d'affaires culturelles

Président du conseil d'administration de la Société nationale des chemins de fer français

Commission compétente
en matière de transports

Par ce biais, les membres des commissions compétentes du Parlement disposeraient d'une information de même nature que celle à partir de laquelle se sera prononcé le Président de la République .

Votre commission a adopté l'article 1 er ainsi rédigé .

Article 2 - Encadrement du cumul des rémunérations résultant de fonctions simultanées dans des entreprises du secteur public et du secteur privé

1. L'absence d'encadrement spécifique du cumul de rémunérations

Il n'existe pas, à ce jour, de règles relatives au cumul des rémunérations publiques et privées dans le cadre des textes relatifs à la fonction publique ou au droit des sociétés.

Jusqu'en 2007, le cumul des rémunérations publiques a certes fait l'objet d'un plafonnement, en vertu du décret-loi du 29 octobre 1936 relatif aux cumuls de retraite, de rémunérations et de fonctions. Néanmoins, dans le cadre de la réforme opérée par la loi n° 2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique, ce plafonnement a été supprimé.

En revanche, le cumul de rémunérations publiques et privées n'a jamais été soumis à un quelconque plafonnement, tout comme le cumul d'une rémunération publique avec des éléments de rémunération versés par un Etat étranger. 14 ( * )

2. L'encadrement proposé par la proposition de loi

Le présent article pose en réalité une interdiction de cumul de rémunérations liées à des fonctions de « mandataire social » simultanées dans une entreprise du secteur public et dans une entreprise du secteur privé.

La notion adoptée est ici plus large que celle retenue par les auteurs de la proposition de loi dans son article 1 er , qui ne concerne que les « dirigeants ». Or, les mandataires sociaux -qu'ils agissent dans le cadre de sociétés du secteur public ou du secteur privé- intègrent des personnes qui n'exercent pas des fonctions de direction : il s'agit en particulier des administrateurs ainsi que des membres du conseil de surveillance.

En effet, aux termes de la rédaction proposée, les mandataires sociaux d'une société du secteur public ne pourraient, du fait de leurs fonctions, recevoir :

- ni une « rémunération d'associé ». Il faudrait comprendre cette interdiction au sens large, comme s'étendant à la fois aux associés stricto sensu des sociétés de personnes (sociétés en nom collectif et sociétés à responsabilité limitée) et aux actionnaires des sociétés de capitaux (sociétés anonymes, sociétés par actions simplifiées, sociétés en commandites par actions).

Néanmoins, se pose la question de l'interprétation de la notion de « rémunération » qui pourrait concerner notamment l'ensemble des participations aux bénéfices de la société, c'est-à-dire les dividendes résultant des actions ou parts sociales détenues. Une telle interprétation conduirait à une situation beaucoup plus stricte que celle applicable aux agents publics en application de l'article 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires 15 ( * ) ;

- ni une rémunération de « mandataire social » ;

- ni une rémunération au titre d'une activité salariée .

Le texte proposé prévoit cependant qu'un décret en Conseil d'État déterminera les conditions et les limites dans lesquelles les intéressés peuvent cumuler leurs rémunérations avec celles perçues au titre des filiales des entreprises du secteur public.

3. La position de votre commission

Votre commission estime que, dès lors que le cumul de fonctions dans une entreprise du secteur privé et une entreprise du secteur public est jugé compatible tant par l'Etat actionnaire que par les actionnaires des sociétés relevant du secteur privé, il n'y a pas lieu d'interdire toute rémunération au titre des fonctions privées.

Au reste, le champ d'application de cette interdiction, qui concerne tous les mandataires sociaux et même l'ensemble des actionnaires, semble beaucoup trop étendu.

Aussi votre commission estime-t-elle qu'il n'est pas souhaitable de prévoir une telle interdiction.

En revanche, il est indispensable, en cas de cumul de fonctions, que le cumul des rémunérations en résultant soit pris en compte par les autorités de l'Etat, comme par les organes sociaux des entreprises concernées, pour décider du montant de la rémunération à octroyer par chacune des entités concernées.

Votre commission estime que cette prise en compte relève de la bonne gestion tant des intérêts patrimoniaux de l'Etat que de ceux de la société du secteur privé et qu'il n'y a pas lieu d'instituer un dispositif spécifique en la matière.

En outre, la commission a, dans la rédaction qu'elle a adoptée à l'article 1 er de la proposition de loi, prévu que l'Agence des participations de l'Etat devrait également se prononcer sur le montant global des rémunérations de toutes natures de l'intéressé au titre de ce cumul.

En conséquence, à l'initiative de votre rapporteur, votre commission a supprimé l'article 2 .

*

* *

Votre commission a adopté la proposition de loi ainsi rédigée.

EXAMEN EN COMMISSION - MERCREDI 4 NOVEMBRE 2009

_______

La commission a ensuite procédé à l' examen du rapport de M. Jean-Pierre Vial et a établi le texte qu'elle propose pour la proposition de loi n° 8 (2009-2010), présentée par M. Yvon Collin et plusieurs de ses collègues, tendant à interdire ou à réglementer le cumul des fonctions et des rémunérations de dirigeant d'une entreprise du secteur public et d'une entreprise du secteur privé .

M. Jean-Pierre Vial , rapporteur , a souligné que la proposition de loi s'inscrivait dans le contexte lié à la désignation envisagée de M. Henri Proglio aux fonctions de président-directeur général d'EDF, alors que celui-ci conserverait dans le même temps un mandat de président du conseil d'administration de la société Veolia Environnement. Il a expliqué que l'objet de ce texte était de réagir à cette situation par un dispositif d'encadrement du cumul de fonctions de direction dans des entreprises relevant du secteur public et du secteur privé, ainsi que du cumul des rémunérations en découlant.

Il a rappelé que, à l'heure actuelle, il n'était pas rare qu'une même personne exerce plusieurs mandats sociaux relevant d'entreprises appartenant au secteur privé et au secteur public. En revanche, il a indiqué qu'il ne semblait pas exister à ce jour de cumul de fonctions de direction, comme l'illustrait la situation de M. Henri Proglio. Il a précisé qu'il n'existait par ailleurs aucune réglementation relative au cumul des rémunérations publiques et privées.

M. Jean-Pierre Vial , rapporteur , a indiqué que certains dispositifs pouvaient d'ores et déjà s'appliquer à certaines hypothèses de cumul de fonctions de direction des entreprises relevant du secteur public et du secteur privé.

Il a évoqué en premier lieu l'intervention de la commission de déontologie de la fonction publique, chargée de prévenir les situations de conflits d'intérêts constitutives du délit de prise illégale d'intérêts ainsi que de situations pouvant donner lieu à de tels conflits sans pour autant être appréhendées pénalement. Il a néanmoins précisé que cette commission ne connaissait actuellement que de la situation de personnes limitativement énumérées liées à l'administration en raison soit de leur statut public, soit de leur participation à l'activité d'un organe chargé de la définition ou du contrôle des politiques publiques.

Il a souligné que, désormais, le cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution instituait une procédure permettant de soumettre aux commissions permanentes du Parlement la nomination par le Président de la République des dirigeants d'un certain nombre d'entreprises publiques. Il a précisé que le projet de loi organique, en cours d'examen au Parlement, prévoyait notamment de soumettre à l'avis des commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat la nomination du président-directeur général d'EDF. Il a indiqué que les commissions chargées des affaires économiques de l'Assemblée nationale et du Sénat avaient entendu M. Henri Proglio avant même l'entrée en vigueur de ce texte, ce qui avait permis d'apporter certaines explications sur la façon dont ce dernier entendait exercer simultanément ses fonctions chez Veolia et EDF, ainsi que sur sa rémunération globale.

Il a rappelé que dès lors que la plupart des entreprises publiques sont constituées sous la forme de sociétés anonymes, les dispositions du code de commerce applicables à ces sociétés doivent également être suivies, ce qui implique en particulier un plafonnement du nombre de mandats sociaux pouvant être exercés simultanément par une même personne physique. La loi fixe actuellement le nombre maximum de mandats sociaux pouvant être détenus par un même administrateur à cinq et impose l'exercice exclusif d'une fonction de directeur général ou de président du directoire, sous réserve de certains aménagements à l'égard des sociétés filiales.

Il a ajouté que les entreprises avaient par ailleurs édicté des codes de conduite en la matière qui n'avaient néanmoins pas de valeur juridiquement contraignante.

Abordant la question de l'encadrement du cumul de rémunérations, M. Jean-Pierre Vial , rapporteur , a précisé que la législation sur les sociétés commerciales prévoyait des règles de procédure spéciales ainsi que des interdictions de fond, notamment s'agissant de la détermination des éléments de la rémunération variable des dirigeants mandataires sociaux.

Il a expliqué qu'une réglementation particulière s'appliquait en outre aux rémunérations des dirigeants des entreprises publiques, puisque s'exerce en la matière un contrôle ministériel et que le ministre chargé de l'économie veille désormais à ce que les entreprises publiques dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé respectent des règles et principes de gouvernance d'un haut niveau d'exigence éthique.

Il a rappelé que, pour leur part, les entreprises s'étaient imposé certaines règles en la matière dans le cadre de leur code de gouvernement d'entreprise.

S'agissant de la pertinence d'une intervention législative spécifique en cas de cumul de fonctions de direction dans des entreprises relevant du secteur public et du secteur privé, M. Jean-Pierre Vial , rapporteur , a estimé que le cas présenté par M. Henri Proglio invitait à avoir une réflexion sur la nécessité de disposer de règles prudentielles en la matière.

Il a expliqué qu'un encadrement de cette pratique n'était pas illégitime mais que le choix, fait par les auteurs de la proposition de loi, de la commission de déontologie pour procéder à l'examen de la pertinence d'un cumul n'était pas satisfaisant, dès lors que sa fonction était réservée aux situations mettant en cause des agents de l'administration. Or, la faire intervenir dans un cadre plus large, et notamment à l'égard de personnes issues du secteur privé, reviendrait à la dénaturer.

Il a en revanche avancé que l'intervention de l'agence des participations de l'Etat, service actuellement rattaché au ministre de l'économie, serait mieux adaptée pour vérifier la compatibilité d'une situation de cumul avec les intérêts patrimoniaux de l'Etat et examiner la rémunération globale applicable. Il a proposé, en outre, que l'avis de l'agence des participations de l'Etat soit porté à la connaissance des commissions permanentes compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat lorsqu'elles statuent dans le cadre de la procédure prévue par le cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution.

Revenant spécifiquement sur le cas de M. Henri Proglio, M. Jean-Pierre Vial , rapporteur , a précisé que celui-ci était déjà administrateur d'EDF depuis cinq ans et membre de son conseil stratégique et que, entendu par la commission de l'économie du Sénat, M. Proglio avait affirmé ne pas avoir connu de situation de conflits d'intérêts durant cette période, le seul conflit susceptible d'intervenir concernant, selon lui, la filiale commune d'EDF et Veolia, Dalkia, qui serait alors examiné par M. Louis Schweitzer, vice-président du conseil d'administration de Veolia.

M. Jean-Jacques Hyest , président , a rappelé que, dans le cadre d'un accord avec les groupes politiques du Sénat, le texte d'une proposition de loi d'un groupe d'opposition ou minoritaire ne pouvait donner lieu à un texte établi par la commission qu'avec l'assentiment des auteurs de cette proposition. Il a souligné que le rapporteur s'était rapproché du président du groupe RDSE, par ailleurs premier signataire de la proposition de loi, afin d'aboutir à un accord de principe sur les modifications à apporter au texte originel. M. Jean-Jacques Hyest , président , a estimé que le recours à la commission de déontologie n'était absolument pas adapté au cas d'espèce et que la solution proposée par le rapporteur semblait plus opérante.

Mme Anne-Marie Escoffier , rejointe par M. Jacques Mézard , a remercié le rapporteur de ses efforts en vue de parvenir à une rédaction consensuelle mais a estimé que le texte qu'il soumettait à la commission n'était pas de nature à répondre véritablement aux problèmes soulevés, l'agence des participations de l'Etat ne lui paraissant pas l'organe le plus pertinent pour connaître des situations de cumul.

M. Pierre-Yves Collombat a jugé que l'intervention de la commission de déontologie était justifiée mais que se posait la question plus large de savoir s'il ne convenait pas d'interdire purement et simplement le cumul de fonctions de direction dans une entreprise publique et dans une entreprise privée. Il a estimé que l'agence des participations de l'Etat n'aurait pas la marge d'appréciation suffisante pour se prononcer sur la pertinence d'un tel cumul.

M. François Zocchetto a souligné que la proposition de loi avait pour principal intérêt de mettre en lumière une situation préoccupante qui n'était pas suffisamment prise en compte par les règles actuelles du droit des sociétés en matière de cumul des mandats sociaux. Estimant trop large le plafond de cinq mandats, il a jugé impossible en pratique de cumuler des fonctions de direction dans le secteur public et dans le secteur privé en raison d'un risque évident de conflit d'intérêts. Il a indiqué que la question de la stratégie industrielle devait être posée mais qu'il convenait alors de s'engager dans la voie d'une fusion d'EDF et de Veolia. Il a fait part de sa crainte que le cumul de fonctions envisagé pour M. Henri Proglio donne lieu à d'autres hypothèses de cumul et, de ce fait, à la multiplication des situations hybrides.

M. Richard Yung s'est dit mal à l'aise face à un texte de circonstances qui ne lui semblait pas pouvoir conduire à une intervention législative adaptée, l'intervention de la commission de déontologie ne lui semblant pas particulièrement appropriée. Il a souligné que le président d'un conseil d'administration exerçait un réel pouvoir au sein d'une société, quand bien même il ne cumulait pas ces fonctions avec celles de directeur général. Il lui a semblé que la seule solution en la matière serait une interdiction pure et simple du cumul des fonctions de direction.

Après que M. Jean-Jacques Hyest , président , eut rappelé que l'objet de la proposition de loi n'était pas de poser une incompatibilité de principe, M. Charles Gautier a indiqué qu'il convenait de distinguer la question de la stratégie industrielle, qui pouvait conduire à un rapprochement effectif d'EDF et Veolia, de celle des titulaires de mandats de direction dans ces deux entités. Soulignant que les fonctionnaires ne pouvaient pas cumuler de fonctions rémunérées dans le privé, il a estimé qu'un cumul chez les dirigeants de ces entreprises ne pouvait être accepté.

M. Nicolas Alfonsi a jugé que l'interdiction pure et simple du cumul aurait pu être proposée mais n'aurait sans doute pas abouti. Jugeant que l'intervention de la commission de déontologie soulevait plusieurs difficultés tout comme celle de l'agence des participations de l'Etat, il a néanmoins estimé souhaitable de soutenir la proposition faite par le rapporteur.

M. Jean-Pierre Vial , rapporteur , a souligné que, face au questionnement légitime que faisait naître la question du cumul, le Parlement était confronté à un choix : soit ne pas intervenir, au risque de voir des situations délicates exister en pratique, soit adopter un dispositif destiné à apporter un encadrement raisonnable. L'accord auquel il était parvenu avec le président du groupe RDSE sur ce texte lui paraissant satisfaisant, il a estimé que celui-ci pouvait en conséquence être adopté.

Répondant à M. Charles Gautier sur la question du cumul d'activités des agents publics, il a rappelé que, depuis 2007, ces cumuls d'activités étaient autorisés dans des cas strictement limités.

M. Jean-Jacques Hyest , président , a indiqué que la commission pouvait choisir, soit de rejeter la proposition de loi, soit d'adopter la version du rapporteur qui lui semblait plus opportune. M. Jacques Mézard a expliqué que le dépôt de la proposition de loi par le groupe RDSE était mû par la volonté de débattre d'une situation particulière qui soulevait des questions essentielles.

Il a déclaré accepter que la proposition de loi soit modifiée dans le sens proposé par le rapporteur.

M. François Zocchetto a indiqué se rallier à la solution de compromis présentée par le rapporteur, soulignant qu'elle ne devait pas lier la réflexion sur le réaménagement des règles de cumul actuellement prévues par le code de commerce, M. Richard Yung expliquant, quant à lui, que le groupe socialiste s'abstiendrait sur les amendements du rapporteur au profit d'une discussion en séance publique.

La commission a ensuite adopté :

- l'amendement n° 1 rectifié, présenté par le rapporteur, tendant à réécrire l' article premier de la proposition de loi pour prévoir l'avis de l'agence des participations de l'Etat préalablement au cumul de fonctions de direction, tant sur la compatibilité de ce cumul avec les intérêts patrimoniaux de l'Etat que sur la rémunération qui en résulterait, cet avis étant transmis aux commissions permanentes lorsqu'elles sont compétentes dans le cadre de la procédure du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution ;

- l'amendement n° 2, présenté par le rapporteur, tendant à supprimer l' article 2 de la proposition de loi.

Article premier
Intervention de la commission de déontologie de la fonction publique préalablement
à un cumul de fonctions de direction dans des entreprises du secteur public et du secteur privé

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Vial, rapporteur

1 rect

Avis de l'agence des participations de l'Etat
sur la comptabilité du cumul et la rémunération globale de l'intéressé

Adopté

Article 2
Encadrement du cumul des rémunérations résultant de fonctions simultanées
dans des entreprises du secteur public et du secteur privé

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Vial, rapporteur

2

Suppression de l'article

Adopté

Puis la commission a adopté la proposition de loi ainsi rédigée .

ANNEXE 1 - LISTE DES PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR

_______

Signataires de la proposition de loi

M. Yvon Collin, président du groupe Rassemblement démocratique et social européen

M. Michel Charasse

Ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

M. Jacques Le Pape, directeur adjoint du cabinet du ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

M. Vincent Montrieux, conseiller juridique

M. Franck Saudo, conseiller technique

M. Jérémie Dutray, conseiller technique

M. Camille Leleu, conseiller parlementaire

Mme Astrid Milsan, agence des participations de l'Etat, direction générale du Trésor et de la politique économique

Ministère du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat

M. Grégoire Parmentier, sous-directeur, direction générale de l'administration et de la fonction publique

Association de défense des actionnaires minoritaires (ADAM)

Mme Colette Neuville, présidente

ANNEXE 2 - RÉMUNÉRATION DES PRÉSIDENTS DES ENTREPRISES COTÉES RELEVANT DU PÉRIMÈTRE DE L'AGENCE DES PARTICIPATIONS DE L'ETAT EN 2008

En euros

RÉMUNÉRATION FIXE AU TITRE DE L'EXERCICE 2008

RÉMUNÉRATION VARIABLE AU TITRE DE L'EXERCICE 2008

PARACHUTE
(INDEMNITÉS DE DÉPART) SITUATION AU
31 DÉCEMBRE 2008

COMPLÉMENT DE RETRAITE SITUATION AU
31 DÉCEMBRE 2008

CONFORMITÉ AUX RECOMMANDATIONS

AFEP/MEDEF

STOCK OPTIONS

ACTIONS GRATUITES

JETONS DE PRÉSENCE

(na : non applicable - nd : non disponible)

Montant

maximal

Bonus

Critères

d'attribution

Attribuées au cours de l'exercice 2008

Attribuées au cours de l'exercice 2008

Versés par l'entreprise au titre de l'exercice 2008

AÉROPORTS DE PARIS (ADP)

Pierre Graff ,
président-directeur général

362 000

181 000

153 509

Objectifs

quantitatifs (70 %)
et qualitatifs (30 %)

Pas de parachute

Pas de complément
de retraite

Oui

Pas de stock options attribuées en 2008

Pas d'attribution d'actions gratuites
en 2008

21 450

AIR FRANCE/KLM

Jean-Cyril Spinetta ,
président-directeur général

750 000

1 125 000

1 050 000

Objectifs
quantitatifs (70 %)
et qualitatifs (30 %)

Pas de parachute

Oui pour tous les cadres dirigeants et plafonné

Oui

Pas de stock options attribuées en 2008

Pas d'attribution d'actions gratuites
en 2008

40 000

Pierre Henri Gourgeon ,
directeur général délégué

550 000

660 000

550 000

Objectifs
quantitatifs (60 %)
et qualitatifs (40 %)

Pas de parachute

Oui pour tous les cadres dirigeants et plafonné

Oui

Pas de stock options attribuées en 2008

Pas d'attribution d'actions gratuites
en 2008

- 51 -

40 000

AREVA

Anne Lauvergeon ,
présidente du directoire

550 000

550 000

363 000

Objectifs
quantitatifs (60 %)

et qualitatifs (40 %)

Conforme TEPA (AG du
30 avril 2009)

Pas de complément de retraite

Oui

Pas de stock options attribuées en 2008

Pas d'attribution d'actions gratuites
en 2008

0

Frédéric Lemoine ,
président du conseil de surveillance

173 729

na

na

na

Pas de parachute

na

Oui

Pas de stock options

attribuées en 2008

Pas d'attribution d'actions gratuites
en 2008

0

CNP ASSURANCES

Gilles Benoist ,
directeur général

580 000

nd

319 000

Objectifs
quantitatifs et qualitatifs

Conforme TEPA

Oui, applicable à 80 personnes et plafonné

Oui le DG conserve un contrat de travail jusqu'au renouvellement du mandat

Pas de stock options attribuées en 2008

Pas d'attribution d'actions gratuites
en 2008

88 175

Edmond Alphandéry ,
président du conseil d'administration

379 992

na

na

na

Pas de parachute

Oui, cf. ci-dessus

Oui

Pas de stock options attribuées en 2008

Pas d'attribution d'actions

gratuites en 2008

74 627

DEXIA (Société de droit belge)

Pierre Mariani ,
administrateur délégué et président du comité de direction depuis octobre 2008

229 170

na

na

na

Indemnités selon performance

conformément aux recommandations

belges et au code AFEP/MEDEF

Retraite complémentaire par capitalisation

(nouveau régime de retraite,

mis en place en 2008)

na

Pas de stock options attribuées en 2008

Pas d'attribution d'actions gratuites
en 2008

0

Axel Miller
(jusqu'au 8 octobre 2008)

636 500

na

0

na

825 000

(une année
de salaire)

Rente plafonnée à 80 % de la rémunération fixe plafonnée (ancien régime de retraite)

na

200 000 options sur 10 559 805 options de souscription

accordées aux employées

de Dexia

Pas d'attribution d'actions gratuites
en 2008

- 52 -

0

Jean-Luc Dehaene

(Président du CA depuis octobre 2008)

na

na

na

na

Pas de parachute

Pas de complément de retraite

na

Pas de stock options attribuées en 2008

Pas d'attribution d'actions gratuites
en 2008

38 000

EADS (Société de droit néerlandais)

Louis Gallois ,
président exécutif

900 000

nd

1 545 500.

Objectifs quantitatifs et qualitatifs

18 mois (fixe et variable) - TEPA non applicable

Oui, pour le COMEX et plafonné

na

Pas de stock options

attribuées en 2008

40 000 «Performance Units » attribués

0

EDF

Pierre Gadonneix ,
président-directeur général

760 000

456 000

361 200

Objectifs quantitatifs (70 %) et qualitatifs (30 %)

Pas de parachute

Oui (régime spécial IEG)

Oui

Pas de stock options attribuées en 2008

Pas d'attribution d'actions gratuites
en 2008

0

FRANCE TÉLÉCOM

Didier Lombard ,
président-directeur général

900 000

900 000

752 100

Objectifs quantitatifs et qualitatifs

Conforme TEPA

Oui pour les
140 cadres dirigeants classés «hors grille»
et plafonné

Oui (Contrat de travail du PDG suspendu)

Pas de stock options attribuées en 2008

Pas d'attribution d'actions gratuites

0

GDF-SUEZ

Gérard Mestrallet ,
président-directeur général

1 400 000

1 680 000

1 830 360

Objectifs quantitatifs

(cible) et qualitatifs

Pas de parachute

Oui

(régime de retraite collectifs total de l'ex-groupe Suez)

Oui (Contrat de travail du PDG suspendu)

0 sur un total de 6 519 510 options (3 750 bénéficiaires)

9 000 actions de performance,
soit 256 140 € sur
un total de
1 799 238 actions

- 53 -

(7 983 bénéficiaires)

0

Jean-François Cirelli ,
directeur-général délégué

561 311

675 000 (cible)

735 413

Objectifs quantitatifs et qualitatifs

Pas de parachute

Oui
(régime spécial des IEG)

Oui

0 sur un total de

6 519 510 options

(3 750 bénéficiaires)

6 000 actions de performance soit
170 760 € sur un total de
1 799 238 actions

(7 983 bénéficiaires)
et 30 actions

chez Gaz de France
(mai 2008)

0

RENAULT

Carlos Ghosn ,
président de la direction générale

1 200 000

1 800 000

0

Renonciation à la part variable 2008

Pas de parachute

Oui pour le COMEX plafonné

Oui

Pas de stock options

attribuées en 2008

Pas d'attribution d'actions gratuites en 2008

28 000

Louis Schweitzer ,
président du conseil d'administration

200 000

na

na

na

Pas de parachute

Oui pour le COMEX plafonné

Oui

Pas de stock options

attribuées en 2008

Pas d'attribution d'actions gratuites en 2008

28 000

SAFRAN

Francis Mer ,
président du conseil de surveillance

400 000

na

na

na

Pas de parachute

Pas de complément de retraite

Oui

Pas de stock options accordées en 2008

Pas d'attribution d'actions gratuites accordée en 2008

45 340

Jean-Paul Herteman ,
président du directoire

700 000

700 000

665 000

Objectifs quantitatifs et qualitatifs

Conforme TEPA

Pas de complément de retraite

Oui (Contrat de travail du Président du directoire suspendu)

Pas de stock options accordées en 2008

Pas d'attribution d'actions gratuites accordée en 2008

na

THALES

Denis Ranque ,
président-directeur général

700 000

1 050 000

578 500

Objectifs quantitatifs (75 %) et qualitatifs (25 %)

Conforme TEPA

Oui dans les conditions applicables aux cadres du groupe

Oui (critères de performance pour l'exercice des stock options mis en oeuvre en 2009)

80 000 sur un total de 1 688 070 options
(1 314 bénéficiaires)

0 sur un total de 317 705 actions distribuées aux salariés
(3 624 bénéficiaires)

0

Source : Agence des participations de l'Etat - Rapport annuel 2009.

* 1 Cette annexe, non mise à jour depuis 1997, mentionne Natexis (devenue Natixis en 2006), la Compagnie française d'assurance pour le commerce extérieur (Coface), la Caisse des dépôts-développement, ainsi que la société nationale Elf-Aquitaine.

* 2 Conseil d'Etat, assemblée, 22 décembre 1982, Comité central d'entreprise de la Société française d'équipement pour la navigation aérienne.

* 3 Décret n° 2004-963 du 9 septembre 2004 portant création du service à compétence nationale « Agence des participations de l'Etat ».

* 4 Le décret n° 2007-658 du 2 mai 2007 relatif au cumul d'activités des fonctionnaires, des agents non titulaires de droit public et des ouvriers des établissements industriels de l'État énumère neuf types d'activités :

- expertises ou consultations auprès d'une entreprise ou d'un organisme privés ;

- enseignements ou formations ;

- activité agricole au sens du premier alinéa de l'article L. 311-1 du Code rural dans des exploitations agricoles non constituées sous forme sociale, ainsi qu'une activité exercée dans des exploitations constituées sous forme de société civile ou commerciale, sous réserve que l'agent public n'y exerce pas les fonctions de gérant, de directeur général, ou de membre du conseil d'administration, du directoire ou du conseil de surveillance, sauf lorsqu'il s'agit de la gestion de son patrimoine personnel et familial ;

- travaux d'extrême urgence dont l'exécution immédiate est nécessaire pour prévenir des accidents imminents ou organiser des mesures de sauvetage ;

- travaux ménagers de peu d'importance réalisés chez des particuliers ;

- aide à domicile à un ascendant, à un descendant, à son conjoint, à son partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou à son concubin, permettant à l'agent de percevoir, le cas échéant, les allocations afférentes à cette aide ;

- activité de conjoint collaborateur au sein d'une entreprise artisanale ou commerciale ;

- activité d'intérêt général exercée auprès d'une personne publique ou auprès d'une personne privée à but non lucratif ;

- mission d'intérêt public de coopération internationale ou auprès d'organismes d'intérêt général à caractère international ou d'un État étranger, pour une durée limitée.

* 5 Texte adopté n° 344 (AN, XIIIème législature). Voir le rapport n° 1922 de M. Charles de La Verpillière, député, fait au nom de la commission des lois, déposé le 16 septembre 2009 ( http://www.assemblee-nationale.fr/13/rapports/r1922.asp ). Ce texte est en instance d'examen au Sénat et devrait être inscrit à l'ordre du jour avant la fin de l'année 2009.

* 6 Le Conseil d'État, dans un arrêt d'assemblée du 13 novembre 1998 (req., n° 188824), a qualifié La Poste d'« établissement public à caractère industriel et commercial », soumis de ce fait aux dispositions législatives relatives à ce type d'établissement. Sa transformation en une société anonyme est néanmoins prévue par le projet de loi n° 599 rectifié (Sénat, 2008-2009) relatif à l'entreprise publique La Poste et aux activités postales. Voir le rapport n° 50 (Sénat, 2009-2010) de M. Pierre Hérisson, fait au nom de la commission de l'économie, déposé le 21 octobre 2009.

* 7 Voir le compte-rendu de la réunion du 28 octobre 2009 de la commission de l'économie ( http://www.senat.fr/bulletin/20091026/eco.html#toc3 ).

* 8 Un communiqué de Veolia Environnement du 30 octobre 2009 a précisé que M. Henri Proglio renonçait à toute distribution nouvelle d'options, mais conserverait le bénéfice des options déjà acquises au sein de la société.

* 9 L'article L. 233-16 du code de commerce définit le contrôle exercé sur une société. Le contrôle exclusif par une société résulte :

- soit de la détention directe ou indirecte de la majorité des droits de vote dans une autre entreprise ;

- soit de la désignation, pendant deux exercices successifs, de la majorité des membres des organes d'administration, de direction ou de surveillance d'une autre entreprise. La société consolidante est présumée avoir effectué cette désignation lorsqu'elle a disposé au cours de cette période, directement ou indirectement, d'une fraction supérieure à 40 % des droits de vote, et qu'aucun autre associé ou actionnaire ne détenait, directement ou indirectement, une fraction supérieure à la sienne ;

- soit du droit d'exercer une influence dominante sur une entreprise en vertu d'un contrat ou de clauses statutaires, lorsque le droit applicable le permet.

Le contrôle conjoint est le partage du contrôle d'une entreprise exploitée en commun par un nombre limité d'associés ou d'actionnaires, de sorte que les décisions résultent de leur accord.

* 10 Dernier alinéa des articles L. 225-21, L. 225-54-1, L. 225-67, L. 225-77 et L. 225-94-1 du code de commerce.

* 11 Loi n° 2008-649 du 3 juillet 2008 portant diverses dispositions d'adaptation du droit des sociétés au droit communautaire.

* 12 Etablissements mentionnés aux articles L. 1142-22 (Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales), L. 1222-1 (Etablissement français du sang), L. 1323-1 (Agence française de sécurité sanitaire des aliments), L. 1336-1 (Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail), L. 1413-2 (Institut de veille sanitaire), L. 1418-1 (Agence de la biomédecine) et L. 5311-1 (Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé) du code de la santé publique.

* 13 Texte adopté n° 345 (AN, XIIIème législature).

* 14 Conseil d'Etat, 16 décembre 1964, Ministre des affaires étrangères c/Ebrard.

* 15 Aux termes du III de cet article : « Les fonctionnaires et agents non titulaires de droit public peuvent librement détenir des parts sociales et percevoir les bénéfices qui s'y attachent ».

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