2. L'émergence de la question des mineurs roumains à la fin des années 1990
Le phénomène des mineurs roumains isolés sur le territoire français est globalement mal connu. Une étude 4 ( * ) note ainsi « malgré leur forte « visibilité » statistique et médiatique, il est presque impossible de rendre compte d'une manière fiable de l'ampleur réelle du phénomène ».
Les associations décrivent ainsi une population fuyante à l'égard des institutions, qui, à la différence des mineurs afghans, kurdes ou iraquiens, n'est pas en demande de protection et est, de ce fait, particulièrement difficile à approcher.
Les motifs de la migration de ces enfants sont cependant les mêmes que ceux des adultes : échapper à la pauvreté et accéder à une vie meilleure dans un eldorado occidental largement fantasmé. Cette migration est au demeurant encouragée, soutenue voire accompagnée par la famille, au moins dans un premier temps.
Devant les difficultés rencontrées à l'arrivée en France, ces mineurs sont vite confrontés à la question de leur survie quotidienne et donc vulnérables à l'attraction de réseaux criminels et exposés à un basculement, plus ou moins rapide, dans la délinquance . Certains sont pris dès leur départ de Roumanie dans l'engrenage de ces réseaux criminels qui se livrent à un véritable trafic d'êtres humains. Ainsi, si les réseaux de trafic ne sont pas toujours à l'origine de la migration des jeunes Roumains vers la France, ces jeunes se trouvent quasi systématiquement exploités au bout d'un temps plus ou moins long.
La problématique de ces mineurs dépasse le champ de la protection de l'enfance, ces mineurs étant victimes de réseaux d'exploitation avec des phénomènes croissants de prostitution, de traite des enfants et de trafics.
Enfants en danger, éligibles à ce titre aux dispositifs de protection de l'enfance, ils peuvent être dans le même temps des mineurs délinquants, appelant une réponse judicaire adaptée.
3. La mise en place d'un groupe de travail sur la situation des mineurs étrangers isolés
Afin de mieux connaître et de faire face au phénomène des mineurs étrangers isolés sur notre territoire, le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire, M. Eric Besson, a constitué, le 11 mai 2009, un groupe de travail spécifiquement consacré à ce sujet.
Ce groupe de travail comprend des représentants des associations, de l'Association des maires de France, de l'Association des départements de France, ainsi que des services et des ministères concernés.
L'objectif est de parvenir à établir un diagnostic partagé de la situation des mineurs étrangers isolés, d'examiner les possibilités d'amélioration et de proposer une stratégie sur cette question.
Ce groupe de travail a présenté ses premières conclusions dans un rapport remis au ministre le 11 novembre 2009 5 ( * ) .
Le ministre a d'ores et déjà retenu une série de propositions susceptibles d'être mises en oeuvre à court terme, comme la mise en place d'un système d'information permettant d'améliorer le suivi des mineurs étrangers isolés avec l'ensemble des acteurs concernés, la construction d'un secteur dédié à l'accueil des mineurs étrangers isolés dans la zone d'attente de Roissy et le lancement d'une expérimentation sur la mise en place d'une permanence d'administrateurs ad hoc dans cette zone.
Le ministre a indiqué que d'autres propositions pourraient être mises en oeuvre à la suite d'études complémentaires du groupe de travail et d'arbitrages interministériels, en particulier en ce qui concerne la protection, sur le plan du séjour, du jeune majeur qui poursuit sa formation en France, ou une meilleure articulation des responsabilités entre l'Etat et les collectivités locales ainsi que le pilotage global du dispositif.
Comme l'a déclaré M. Eric Besson, à l'occasion du vingtième anniversaire de la signature de la Convention internationale des droits de l'enfant, le 20 novembre 2009 : « La protection des enfants isolés, quelles que soient leur origine et leur nationalité, est un devoir essentiel pour notre République. La qualité de ressortissant étranger doit s'effacer derrière celle de mineur isolé. 20 ans après la signature de la Convention internationale des droits de l'enfant, l'Etat continue à faire prévaloir l'intérêt supérieur de l'enfant, et la France reste fidèle à sa tradition républicaine de protection des mineurs » .
* 4 Mineurs roumains en délinquance sur le territoire français : un enjeu de politique criminelle participative transnationale in Archives de politique criminelle 2008/1 n°30.
* 5 Ces propositions sont reproduites en annexe au présent rapport