II. UN ACCORD DE COOPÉRATION ADAPTÉ À UNE RELATION BILATÉRALE ÉQUILIBRÉE
A. UNE NÉGOCIATION RALENTIE PAR DES ALÉAS POLITIQUES ET JURIDIQUES
Débutées en 2002 sur demande de l'Algérie, les discussions ont connu un début positif avec la visite d'Etat du Président Chirac en mars 2003 , qui a ouvert la voie à une réunion d'état-major organisée entre les deux armées au mois de novembre suivant à Paris. Le plan de coopération militaire élaboré à cette occasion s'est alors traduit par des premiers échanges.
Cependant, cette coopération avait déjà été active antérieurement à 1992 (date de la déclaration de l'état d'urgence), particulièrement en termes de formation. Elle consistait en l'envoi en France d'une trentaine de stagiaires par an dans les écoles de spécialisation et dans les écoles de l'enseignement militaire supérieur (école de guerre et écoles du commissariat). L'armée algérienne possédant ses propres centres de formation, les autorités militaires algériennes n'ont longtemps été intéressées que par des stages dans des spécialités rares (plongée, opérations aériennes, cynophilie) ou par des cours de haut niveau dans les grandes écoles où les places sont limitées. Elles prenaient alors en charge financièrement la scolarité des militaires algériens qui y sont admis.
Du côté français, le texte conclu en 2008 n'a été adopté en conseil des ministres que le 4 juillet 2012, délai nécessaire à l'élaboration d'une solution juridique adaptée aux remarques émises par le Conseil d'Etat.
Le ministère des affaires étrangères détaille ainsi cette solution :
« Comme de nombreux accords de ce type, l'accord franco-algérien de coopération en matière de défense contient des dispositions relatives à des obligations de coopération judiciaire en matière pénale, d'extradition et d'entraide judiciaire, ainsi que des règles de partages de juridiction.
Cependant, l'accord ne contient pas de mention spécifique relative à la question de la peine de mort, qui est prévue par le droit algérien, et à l'encontre de laquelle nos personnels et ressortissants doivent être protégés.
Malgré les efforts de la délégation française, la Partie algérienne s'était montrée réticente quant à l'introduction d'une telle précision dans laquelle elle voyait une atteinte à sa souveraineté.
Une solution de compromis, visant à satisfaire les autorités algériennes et à permettre la signature tout en conservant une référence à nos contraintes juridiques et constitutionnelles sur la peine de mort avait été ainsi rédigée : Art 16 « Les Parties exécutent, en toutes circonstances et conformément à leur ordre juridique interne respectif, les engagements pris dans le cadre du présent accord ».
Le Conseil d'Etat a, néanmoins, rendu un avis défavorable à cet accord le 2 juin 2009, en se fondant sur le fait qu'il ne contient pas de disposition permettant au gouvernement français de s'assurer que, lorsque la loi algérienne prévoit la peine de mort, celle-ci ne sera ni prononcée ni jugée dans les hypothèses où, par application de cet accord, les autorités françaises devraient remettre aux autorités algériennes un personnel (Français ayant commis une infraction sur le territoire algérien ou Algérien ayant commis une infraction sur le territoire français) pour leur permettre d'exercer leur priorité de juridiction.
Prenant en compte la complexité de la négociation avec les autorités algériennes, le Conseil d'Etat a suggéré, afin de relancer la procédure d'approbation de cet accord, de recourir à un échange de lettres interprétatives annexées à l'accord du 21 juin 2008, afin de lever toute ambiguïté sur l'inapplicabilité de la peine de mort dans le cadre de cet accord.
A la demande des Algériens, cette formule a finalement été remplacée par l'élaboration d'une note verbale unilatérale de la Partie française signée le 15 mai 2011 et acceptée par lettre du ministère des affaires étrangères algérien du 2 août 2011.
Cette solution, et par voie de conséquence l'accord en général, a reçu un avis favorable du Conseil d'Etat le 19 juin 2012.
Pour le reste, cet accord établit un cadre classique de coopération dans le domaine de la défense ».