II. LA REMISE DE LA PERSONNE AUX SEULES FINS FONDANT LA DEMANDE
Les articles 12, 13 et 14 du présent traité prévoient les modalités de la remise de la personne réclamée. Les articles 16 et 17 traitent des droits de la Partie requérante sur la personne extradée.
A. UNE DÉCISION DE REMISE ENTRE FLEXIBILITÉ ET FORMALISME
1. La remise de la personne
Aux termes de l'article 13 , l'examen de la demande doit se conclure par une décision, soit accordant l'extradition, soit la rejetant partiellement ou en totalité 78 ( * ) . Un tel refus doit être motivé 79 ( * ) .
Aux interrogations de votre rapporteur sur l'absence d'encadrement de cette réponse dans un délai déterminé , le gouvernement a fait valoir qu'une telle obligation ne serait pas opportune en matière d'extradition. En effet, une demande d'extradition peut être formulée dans des conditions similaires à celle d'un mandat d'arrêt qui peut rester actif pendant des années avant de permettre l'arrestation effective de l'individu recherché.
Imposer un délai au magistrat conduirait, d'une part, ce dernier à multiplier les demandes et, d'autre part, la justice locale à devoir statuer successivement sur chacune d'entre elles.
En revanche, des délais s'imposent lorsque la personne se trouve détenue. La Partie requérante doit procéder , sauf cas de force majeure 80 ( * ) , au transfert dans une période trente jours 81 ( * ) , courant à compter du moment convenu pour y procéder 82 ( * ) . Cette obligation est sanctionnée non seulement par la remise en liberté de la personne mais aussi par l'impossibilité de requérir une nouvelle extradition pour les mêmes faits.
Conformément à l'article 14 , la remise de la personne peut toutefois être ajournée par la Partie requise pour les raisons suivantes :
- l'incarcération de la personne sur son territoire 83 ( * ) ;
- la poursuite par cette Partie pour une autre infraction 84 ( * ) .
- l'état de santé de la personne réclamée, si son transfert risque de mettre sa vie en danger 85 ( * ) .
2. Le consentement de la personne réclamée
L'article 12 constitue une spécificité conventionnelle car le présent traité est le premier à faire expressément référence au consentement de la personne réclamée. En effet, l'insertion d'une clause prévoyant l'accord de la personne recherchée à être remise à la Partie requérante 86 ( * ) répond à une demande de la Partie argentine .
Elle a constitué un sujet de négociation face aux réticences de la Partie française de l'étendre en dehors du champ de l'Union européenne et de la Suisse. Il a été toutefois convenu qu'elle ne portait pas préjudice aux droits de la France. En effet, elle ne présente pas de caractère dilatoire, bien au contraire. Il tend à permettre à la Partie requise de statuer sur la remise aussi rapidement que possible après réception de la demande formelle d'extradition.
L'objectif recherché par cette clause réside donc dans l'accélération de certaines étapes de la phase judiciaire, compte tenu du consentement de la personne réclamée. La phase administrative d'examen conformément au droit interne de la Partie requise est également nécessaire.
En outre, l'article 12 ne constitue pas à proprement parler une innovation juridique. Des dispositions similaires sont prévues aux articles 698-8 et suivants de notre Code de procédure pénale. Le consentement à l'extradition entraîne une accélération du traitement judiciaire de l'affaire réduisant de moitié le délai de comparution devant la chambre de l'instruction à cinq jours ouvrables au lieu de dix jours. Le consentement et la renonciation à exercer tout recours contre le décret autorisant son extradition conduit à une remise avant la fin du délai d'un mois, contre six mois en général en cas de contestation portée devant le Conseil d'Etat.
3. La remise de biens
Si l'extradition est accordée, la Partie requérante peut également demander la remise de biens, aux termes de l'article 15 . Il s'agit des documents, biens et autres objets qui peuvent servir de pièces à conviction 87 ( * ) ou qui sont issus de l'infraction 88 ( * ) .
De surcroît, l'hypothèse du décès ou de la fuite de la personne réclamée ne fait pas obstacle à la remise de tels objets 89 ( * ) . Cette dernière n'affecte pas les droits acquis par la Partie requise ou par des tiers sur lesdits objets 90 ( * ) . Elle peut être de nature temporaire ou conditionnelle, si une procédure pénale est en cours chez la Partie requise. 91 ( * )
4. Un droit d'information
L'article 19 impose à la Partie requérante d'informer la Partie requise, à sa demande, des résultats des poursuites pénales engagées contre la personne extradée, de l'exécution de la peine ou de sa réextradition vers un État tiers.
* 78 Cf. premier alinéa de l'article 13.
* 79 Cf. deuxième alinéa de l'article 13.
* 80 Cf. cinquième alinéa de l'article 13. Le cas de force majeure conduit à définir une nouvelle date de remise.
* 81 Cf. quatrième alinéa de l'article 13.
* 82 Cf. troisième alinéa de l'article 13. En cas d'accord, la Partie requérante est informée du moment où la personne se trouve en condition d'être extradée ainsi que de « la durée de la détention subie sous écrou extraditionnel ». Le lieu de la remise est alors fixé d'un commun accord.
* 83 Cf. troisième alinéa de l'article 14.
* 84 Cf. deuxième alinéa de l'article 14. La remise peut néanmoins avoir lieu à titre temporaire aux seules fins de poursuites.
* 85 Cf. premier alinéa de l'article 14.
* 86 Le consentement de la personne « doit être libre, explicite et volontaire » ce qui suppose qu'elle soit informée de ses droits et des conséquences de sa décision aux termes de l'article 12.
* 87 Cf. paragraphe a) de l'article 15.
* 88 Cf. paragraphe b) de l'article 15. Ils ont été trouvés au moment de l'arrestation de la personne réclamée ou ultérieurement.
* 89 Cf. quatrième alinéa de l'article 15.
* 90 Cf. sixième alinéa de l'article 15.
* 91 Cf. cinquième alinéa de l'article 15.