AVANT-PROPOS
Mesdames, Messieurs,
La loi du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques (loi « Novelli ») a créé un nouveau régime de transport léger de personnes : les véhicules de tourisme avec chauffeur (VTC). Depuis cette loi et avec le développement massif de l'usage des « smartphones », l'offre de VTC s'est rapidement accrue : en trois ans, de 2010 à 2013, le nombre d'immatriculations d'entreprises VTC auprès d'Atout France a été multiplié par 4,6 pour atteindre en janvier 2014 le chiffre de 7 213 entreprises.
Afin de rééquilibrer les conditions d'exercice de l'activité des taxis et des VTC , le Gouvernement a pris, en 2013, deux décrets 1 ( * ) , l'un en juillet et l'autre en décembre, qui ont précisé les conditions d'exploitation des VTC, clarifié les modalités de justification de la réservation préalable et renforcé les conditions d'accès à la profession de conducteur de VTC dont les conditions d'honorabilité.
Mais le 4 février 2014, le Conseil d'État, qui devra, dans un second temps, examiner la requête en annulation, a suspendu en référé le décret du 27 décembre 2013 qui avait notamment fixé un délai minimum de quinze minutes entre la réservation préalable et la prise en charge du client par les VTC. En effet, saisi par plusieurs sociétés exerçant l'activité de VTC, le juge des référés du Conseil d'État a estimé qu'un doute sérieux existait sur la légalité de ce décret, les motifs avancés par l'administration, tenant au souci de mieux distinguer cette activité de celle des chauffeurs de taxi et de contribuer à fluidifier la circulation dans les grandes agglomérations, n'apparaissant pas, en l'état de l'instruction, suffisants pour justifier une telle mesure au regard du principe de liberté du commerce et de l'industrie.
Cette décision a provoqué diverses actions des chauffeurs de taxi à Paris et dans de nombreuses villes de province. Le 11 juin dernier, les taxis ont fait grève dans plusieurs capitales européennes (Londres, Rome, Berlin, Paris), pour protester en particulier contre la société américaine Uber (qui met en relation, via une application « smartphone », les véhicules avec chauffeur et les clients et leur permet de les « géolocaliser » en temps réel).
En février 2014, le Gouvernement a confié au député Thomas Thévenoud une mission de concertation afin « de clarifier les obligations et les droits de chacun, pour organiser durablement le secteur et pour garantir une concurrence équilibrée. »
Son rapport 2 ( * ) , remis le 24 avril 2014, comporte 30 propositions .
Certaines de ces propositions sont de nature réglementaire, comme l'encouragement au développement des véhicules électriques et hybrides pour les taxis, la réservation d'une voie d'accès aux taxis et aux bus sur les autoroutes qui entourent Paris (notamment l'A1 et l'A6), la forfaitisation de la course d'approche ou encore l'instauration de forfaits aéroports dans les grandes métropoles.
Mais le rapport propose également un certain nombre de modifications législatives, dont la présente proposition de loi relative aux taxis et aux voitures de transport avec chauffeur déposée le 18 juin 2014 3 ( * ) est la traduction.
La proposition de loi ne revient pas sur ce qui fonde la distinction entre taxis et VTC, à savoir le régime de la maraude, c'est-à-dire la possibilité de circuler et stationner sur la voie publique à la recherche du client et d'être hélé. Au contraire, elle renforce ce principe : les taxis conservent leur monopole en la matière et l'étendent à la maraude dite « électronique », qui leur est strictement réservée.
La proposition de loi entend ainsi moderniser le secteur des taxis en lui donnant les armes nécessaires pour s'adapter à la révolution numérique et au surgissement d'un nouvel acteur, les VTC. Elle entend également garantir une meilleure protection pour la profession de chauffeur de taxis , qui compte aujourd'hui, notamment parmi les locataires, de nombreux cas de précarisation. Elle vise aussi à mieux encadrer l'activité émergente des VTC , dont le régime juridique est aujourd'hui insuffisant, et renforcer les sanctions afin de garantir une concurrence régulée entre les différents acteurs.
Cette proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale le 10 juillet 2014, fait l'objet d'une procédure accélérée . En effet, conformément à la décision du Gouvernement du 13 février 2014, les réunions de la commission d'immatriculation d'Atout France ont été suspendues pour une période de deux mois s'agissant des exploitants de VTC. Depuis, aucune immatriculation d'exploitant de VTC n'a été prononcée.
Il est donc urgent aujourd'hui d'apporter des solutions concrètes et durables pour l'équilibre d'un secteur - le transport léger de personnes - qui est un secteur d'avenir, riche en emplois et essentiel pour l'attractivité et la croissance de notre pays.
* 1 Le décret n° 2013-690 du 30 juillet 2013 relatif au transport de personnes avec conducteur et le décret n° 2013-1251 du 27 décembre 2013 relatif à la réservation préalable des voitures de tourisme avec chauffeur.
* 2 « Un taxi pour l'avenir, des emplois pour la France », rapport de la Mission de concertation Taxis-VTC conduite par Thomas Thévenoud, Député de Saône-et-Loire (avril 2014).
* 3 Proposition de loi n°2046 relative aux taxis et aux voitures de transport avec chauffeur présentée par Bruno Le Roux, Thomas Thévenoud et les membres du groupe socialiste, républicain et citoyen et apparentés le 18 juin 2014.