E. AUTONOMIE (CHANTAL DESEYNE) : LE RECOURS À L'ALLOCATION JOURNALIÈRE DU PROCHE AIDANT (AJPA)

1. L'AJPA : une allocation mise en place pour renforcer l'effectivité du congé de proche aidant

La France compte 9,3 millions d'aidants, dont le rôle est croissant en raison du vieillissement de la population et des difficultés d'accès aux soins. Pour permettre aux aidants de mieux concilier leur vie professionnelle avec leur vie personnelle, en 2017, le législateur a créé le congé de proche aidant (CPA). Il permet à tout salarié ou agent public de suspendre son activité professionnelle pour s'occuper d'un proche en situation de perte d'autonomie, pour une durée de trois mois renouvelables dans la limite d'un an sur l'ensemble de la carrière professionnelle.

Si la création du CPA représentait une avancée pour les proches aidants, l'absence d'indemnisation est rapidement apparue comme un obstacle à son recours, ce qui a motivé le législateur à créer, en 2020, l'allocation journalière du proche aidant (AJPA). Son montant s'élève à 65,80 euros par jour. Elle peut être versée, sur l'ensemble de la carrière professionnelle, dans la limite de 66 jours par proche et pour un maximum de quatre proches.

Dans les années qui ont suivi sa création, les conditions de recours à l'AJPA ont été assouplies : les critères d'éligibilité relatifs à la perte d'autonomie de la personne aidée ont été élargis, le montant de l'allocation a été rehaussé au niveau du Smic journalier net et un droit rechargeable (jusqu'à trois renouvellements possibles) a été mis en place.

2. Un taux de recours très faible : simplifier les démarches et mieux cibler la communication

Au 1er novembre 2024, près de 19 800 droits à l'AJPA ont été ouverts. Sur le plan budgétaire, en 2023, la CNSA a alloué 11 millions d'euros au financement de cette allocation. Mis en perspective du nombre d'aidants potentiellement éligibles, ces chiffres sont très faibles : selon l'évaluation préalable annexée au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, près de 270 000 salariés et 67 000 agents publics aidants pourraient prétendre à l'indemnisation du CPA. Sur cette base, le taux de recours à l'AJPA est proche de 6 %.

Ce faible taux de recours s'explique premièrement par la perte de salaire qui résulte, pour les salariés payés au-dessus du Smic, du recours au CPA et à son indemnisation. Il apparaît toutefois peu réaliste d'envisager une hausse du montant de l'AJPA, le dispositif étant déjà généreux dans un contexte budgétaire très contraint.

Deuxièmement, le recours à l'AJPA peut se révéler complexe, notamment dans le cas d'une dégradation brutale de l'état de santé de la personne aidée. L'ouverture des droits suppose en effet que la perte d'autonomie de la personne aidée ait été préalablement évaluée. Une simplification des démarches pour faciliter le recours à l'AJPA dans ces situations d'urgence apparaît souhaitable.

Troisièmement, l'attention du rapporteur a été portée sur le fait que le renouvellement des droits à l'AJPA ne s'applique que si la personne aidée est différente, une condition qui s'applique mal à la réalité du terrain. À ce titre, il serait opportun d'étudier l'opportunité d'ouvrir le rechargement des droits à l'AJPA pour une même personne aidée.

Enfin, l'AJPA est un dispositif récent, qui manque de notoriété. La stratégie de communication sur le congé de proche aidant et son indemnisation doit être mieux ciblée et associer tous les acteurs du service public départemental de l'autonomie, en cours de déploiement, ainsi que les employeurs.

En conséquence, la commission formule les propositions suivantes :

Proposition n° 18 : Simplifier le recours au CPA et à l'AJPA pour garantir leur effectivité.

Proposition n° 19 : Mieux cibler la communication sur le CPA et l'AJPA en s'appuyant sur le service public départemental de l'autonomie. Renforcer l'harmonisation des pratiques territoriales et la professionnalisation des acteurs.

Réunie le mercredi 18 juin 2025 sous la présidence de Philippe Mouiller, la commission des affaires sociales a décidé de proposer au Sénat de rejeter le projet de loi d'approbation des comptes de la sécurité sociale de l'année 2024.

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