Rapport n° 377 (1982-1983) de M. Jean-Marie RAUSCH , fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 8 juin 1983

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N° 377

SÉNAT

SECONDE SESSION ORDINAIRE DE 1982-1983

Annexe au procès-verbal de la séance du 8 juin 1983.

RAPPORT

FAIT

au nom de la Commission des Affaires économiques et du Plan (1), sur la proposition de résolution DE M. ETIENNE DAII.LY ET DES MEMBRES DE LA GAUCHE DÉMOCRATIQUE tendant à la création d'une commission de contrôle des services publics et des entreprises nationales chargés de veiller directement ou indirectement à l'application des dispositions législatives et réglementaires relatives au traitement, au transport, à /Importation et au stockage des déchets industriels toxiques ou de les mettre en oeuvre.

Par M. Jean-Marie RAUSCH,

Sénateur.

(1) Cette Commission est composée de : MM. Michel Chauty, président: Marcel Lucotte, Auguste Chupin, Bernard Legrand, Pierre Noé, vice-présidents ; Francisque Collomb, Marcel Lemaire, André Barroux, Raymond Dumont, secrétaires; Octave Bajeux, Bernard Barbier, Georges Berchet, Jean-Marie Bouloux, Amédée Bouquerel, Jacques Braconnier, Raymond Brun, Pierre Ceccaldi-Pavard, William Chervy, Jean Colin, Henri Collard, Roland Courteau, Marcel Daunay, Bernard Desbrière, Hector Dubois, Emile Durieux, Gérard Ehlers, Philippe François, Alfred Gérin, Roland Grimaldi, Paul Guillaumot, Rémi Herment, Bernard-Charles Hugo (Ardèche), Bernard-Michel Hugo (Yvelines), René Jager, Maurice Janetti, Pierre Jeambrun, Paul Kauss, Pierre Lacour, Robert Laucournet, Bernard Laurent, France Léchenault, Fernand Lefort, Charles-Edmond Lenglet, Paul Malassagne, Serge Mathieu, Louis Minetti, Jacques Mossion, Georges Mouly, Jacques Moutet, Henri Olivier, Bernard Parmantier, Pierre Perrin, Jean Peyrafitte, Marc Plantegenest, Richard Pouille, Maurice Prévoteau, Jean Puech, Jean-Marie Rausch, René Regnault, Michel Rigou, Roger Rinchet, Marcel Rosette, Jules Roujon, André Rouvière, Maurice Schumann, Michel Sordel, Raymond Splingard, Pierre Tajan, Fernand Tardy, René Travert, Raoul Vadepied, Jacques Valade, Frédéric Wirth, Joseph Yvon, Charles Zwickert.

Voir le numéro :

Sénat : 314 (1982-1983).

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Pollution et nuisances.

Mesdames, Messieurs,

Comment un camion transportant des déchets dangereux, escorté par des motards et une voiture officielle jusqu'à la frontière franco-italienne, a-t-il pu franchir sans encombre les contrôles douaniers au poste frontière de Vintimille, traverser une grande partie du territoire français et décharger sa cargaison, en toute tranquillité, près de Saint-Quentin dans un lieu inadéquat ? L'administration était-elle informée ou non du caractère dangereux des produits transportés au moment du passage de la frontière et ultérieurement ? Comment a-t-on pu perdre la trace du camion porteur de « déchets spéciaux » ? Cette énigme mérite des investigations approfondies.

La législation française - loi du 15 juillet 1975 sur les déchets et loi du 19 juillet 1976 sur les installations classées - que l'on croyait protectrice n'a pas permis d'empêcher une telle opération. Indépendamment des poursuites engagées contre le responsable du transport et du stockage des déchets de Seveso, ces faits posent le problème de l'efficacité des services publics chargés de contrôler l'activité des entreprises de transport, de stockage et de traitement des déchets.

Il faut rappeler que la loi de 1975 offre de larges possibilités de contrôle qui ne semblent pas être pleinement utilisées. En effet, l'article 8 de la loi n°75-633 prévoit : « Les entreprises qui produisent, importent, transportent ou éliminent des déchets appartenant aux catégories définies par décret comme pouvant, soit en l'état, soit lors de leur élimination, causer des nuisances telles que celles qui sont mentionnées à l'article 2 1 ( * ) sont tenues de fournir à l'administration toutes informations concernant l'origine, la nature, les caractéristiques, les quantités, la destination et les modalités d'élimination des déchets qu'elles produisent, remettent à un tiers ou prennent en charge. »

De plus, selon l'article 9 du même texte : « Pour certaines des catégories de déchets visées à l'article 8 et précisées par décret, l'administration fixe, sur tout ou partie du territoire national, les conditions d'exercice de l'activité d'élimination telle qu'elle est définie à l'article 2, et en particulier, celles de transporteur de déchets. »

Le décret n° 77-974 du 19 août 1977 (art. 2) prévoit que « les entreprises mentionnées à l'article 8 de la loi du 15 juillet 1975 peuvent notamment être assujetties à la tenue d'un registre, à l'envoi périodique d'une déclaration ou, en ce qui concerne le transport des déchets, à l'établissement d'une déclaration de chargement précisant en particulier les modalités d'élimination prévues pour les déchets transportés. »

En pratique, la mise en oeuvre de ces procédures est laissée à la discrétion des directions interdépartementales de l'industrie, chargées de surveiller l'application de la législation relative aux déchets et aux installations classées.

Jusqu'à maintenant, l'administration n'a pas cru devoir rendre systématiques la tenue d'un registre et la procédure de déclaration de chargement.

Le Gouvernement a, semble-t-il, pris conscience de l'insuffisance des mesures réglementaires actuelles. Le 11 mai dernier, le Conseil des Ministres a adopté le principe de nouveaux textes d'application de la loi précitée de 1975, afin de mieux définir la responsabilité pratique des producteurs de déchets, d'assurer un contrôle des importations et de renforcer le contrôle des décharges. Aucun texte n'a encore été publié au moment de l'examen de la présente proposition de résolution par votre commission.

Indépendamment des violations délibérées de la législation en vigueur, il semble que, pour les déchets toxiques, les procédures en usage et les pratiques administratives ne permettent pas un contrôle adapté aux dangers encourus par nos concitoyens ainsi que par les générations futures. Les exemples de Saint-Quentin et de Roumazières (Charente) mettent en lumière des carences des services publics, au-delà de la négligence ou du mauvais vouloir de certains responsables d'entreprises de transport ou de stockage de déchets toxiques. Dès lors, la création d'une commission de contrôle de ces services paraît opportune, conformément aux dispositions de l'article 6 de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires.

La surveillance de l'application de la législation par les entreprises relève de services publics et non d'entreprises nationales ; en outre, les termes de la proposition de résolution soumise à votre commission conduiraient à contrôler les conditions dans lesquelles les entreprises nationales productrices de déchets - notamment celles intervenant dans le secteur de l'industrie chimique - respectent les dispositions des lois précitées de 1975 et 1976. Votre commission estime plus opportun que la commission de contrôle à créer fasse le point des insuffisances des textes réglementaires d'application et des conditions de fonctionnement des services chargés du contrôle, plutôt que de se substituer plus ou moins à ces services à l'égard des entreprises nationales. Votre commission vous propose donc de créer une commission de contrôle des services publics compétents en matière de déchets.

D'autre part, votre commission tient à souligner qu'une maîtrise réelle des déchets toxiques implique une coordination à l'échelle internationale et, d'abord, européenne ; cette dernière a été timidement amorcée dans le cadre communautaire par la directive du 20 mars 1978, relative aux déchets toxiques et dangereux, et une proposition de directive relative à la surveillance et au contrôle des transferts transfrontaliers de déchets dangereux, présentée par la commission de Bruxelles le 17 janvier dernier.

Tels sont les motifs pour lesquels votre commission vous demande d'adopter la proposition de résolution qui suit.

TABLEAU COMPARATIF

Proposition de résolution
de M. Etienne Dailly

Texte proposé par la commission

Proposition de résolution tendant à la création d'une commission de contrôle des services publics et des entreprises nationales chargés de veiller directement ou indirectement à l'application des dispositions législatives et réglementaires relatives au traitement, au transport, à l'importation et au stockage des déchets industriels toxiques ou de les mettre en oeuvre.

Article premier.

Il est créé, conformément à l'article 11 du Règlement du Sénat, une commission de contrôle des services publics et des entreprises nationales chargés de veiller directement ou indirectement à l'application des dispositions législatives et réglementaires relatives au traitement, au transport, à l'importation et au stockage des déchets industriels toxiques ou de les mettre en oeuvre.

Art. 2.

Cette commission est composée de vingt-et-un membres désignés conformément à l'article 11 du Règlement du Sénat.

Proposition de résolution tendant à créer une commission de contrôle des services publics responsables de l'application des dispositions concernant les déchets industriels toxiques.

Article premier.

H est créé, conformément à l'article 11 du Règlement du Sénat, une commission de contrôle des services publics chargés d'assurer la mise en oeuvre des dispositions régissant le traitement, le transport, l'importation et le stockage des déchets industriels toxiques et de veiller à l'application de celles-ci.

Art. 2.

Sans modification.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

tendant à créer une commission de contrôle des services publics

responsables de l'application des dispositions concernant déchets industriels toxiques

(Texte proposé par la commission)

Article premier.

Il est créé, conformément à l'article 11 du Règlement du Sénat, une commission de contrôle des services publics chargés d'assurer la mise en oeuvre des dispositions régissant le traitement, le transport, l'importation et le stockage des déchets industriels toxiques et de veiller à l'application de celles-ci.

Art. 2.

Cette commission est composée de vingt-et-un membres, désignés conformément à l'article 11 du Règlement du Sénat.

* 1 Art. 2 (Loi n° 75-633) : « Toute personne qui produit ou détient des déchets, dans des conditions de nature à produire des effets nocifs sur le sol, la flore et la faune, à dégrader les sites ou les paysages, à polluer l'air ou les eaux, à engendrer des bruits et des odeurs et d'une façon générale à porter atteinte à la santé de l'homme et à l'environnement, est tenue d'en assurer ou d'en faire assurer l'élimination conformément aux dispositions de la présente loi, dans des conditions propres à éviter lesdits effets.

« L'élimination des déchets comporte les opérations d'e collecte, transport, stockage, tri et traitement nécessaires à la récupération des éléments et matériaux réutilisables ou de l'énergie, ainsi qu'au dépôt ou au rejet dans le milieu naturel de sous autres produits dans des conditions propres à éviter les nuisances mentionnées à l'alinéa précédent. »

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